Les samedis de Biton : Par Isaïe Biton Koulibaly / Abidjan contre Dakar

Maître Abdoulaye Wade, Président de la République du Sénégal, disait, il y a quelques mois : « Je n’ai pas pris la place de la Côte d’Ivoire, c’est la Côte d’Ivoire qui a abandonné sa place. » Pendant de nombreuses années, Abidjan était l’attraction de toute la sous-région. L’économie du pays s’étendait jusqu’en Afrique centrale. Presque tous les Africains voulaient passer leurs vacances à Abidjan. Depuis la restauration de la démocratie, les habitants de ce pays ont pris un grand plaisir à la politique politicienne sans comprendre que, c’est l’union qui fait la force. Houphouët-Boigny, on ne cessera jamais de parler de lui, avait eu une inspiration divine en trouvant la devise du pays. Union-Discipline-Travail. Les enfants ont raillés le père. Tout enfant qui se moque de son père trouve l’enfer dans sa vie. C’est une loi divine. Au moment où les Ivoiriens se battaient comme deux voleurs, le troisième larron, comme dans la fable, est venu prendre le magot, la place. Dakar est devenue la nouvelle attraction touristique de la sous- région. Depuis l’avènement de l’alternance au Sénégal, la ville de Dakar a connu un développement spectaculaire. Autrefois, j’aimais railler mes amis sénégalais, quand je me trouvais à Dakar, en disant que leur ville a été construite grâce à l’argent de la Côte d’Ivoire au moment de la colonisation. Cette vérité est historique. La Côte d’Ivoire coloniale alimentait à plus de cinquante pour cent, ou plus, le budget de l’Afrique occidentale française. Féfé a-t-il eu tort de réclamer la balkanisation ? Aujourd’hui, Dakar est devant Abidjan avec son propre budget. On a donné à cette métamorphose spectaculaire de la ville, l’apport de dons arabes à cause de la réunion de l’OIC. Aujourd’hui, par rapport à Abidjan, Dakar c’est la mobilité urbaine avec de nombreux échangeurs dans la ville, la rénovation, l’élargissement et l’embellissement de la route de la corniche. Il faut la voir pour comprendre. Comment ne pas s’extasier devant le tunnel de Soumbédioune ? Que dire de l’autoroute à péage sauf que le quartier des deux plateaux d’Abidjan a besoin d’une telle voie jusqu’au plateau. Nos artistes devraient voir le parc culturel qui doit comprendre presque toutes les institutions culturelles. Pour le moment, le chantier gigantesque a déjà livré le grand théâtre national, le palais de la musique et la bibliothèque nationale sont en voie d’achèvement. Ne parlons pas du monument de la Renaissance qu’on ne peut atterrir à Dakar sans courir voir. Je croyais que la construction du nouvel aéroport Blaise Diagne était une blague sénégalaise, car l’aéroport actuel de Dakar est grand et moderne. Je me suis trompé. Le chantier est même en voie d’achèvement. Les constructions des maisons, avec des architectures variées, se font par dizaines de mille chaque année, depuis l’arrivée de cette génération du concret. Mais, la Côte d’Ivoire du changement va relever le défi sénégalais. Le Président Wade disait : « Si j’avais cette population de la Côte d’Ivoire, des hommes et des femmes venus de partout de l’Afrique ! » Dans la course poursuite que nous venons d’entamer, notre premier atout sera la diversité des habitants de ce pays comme les Etats-Unis d’Amérique. En plus, on a un Président « américain ». Avec lui, c’est le concret. Le bavardage à la « francophone » a vécu. Déjà nous sommes impressionnés. Béchir Ben Yahmed de Jeune Afrique écrivait que les Ivoiriens ne vont pas tarder à constater les changements que va apporter le Président Ouattara et ils se diront pourquoi n’avions nous pas voté pour lui depuis longtemps ? Le pays est déjà en chantier. Le sprint final avec Dakar, pour le moment, est en notre défaveur mais Félix Houphouët-Boigny avait dit : « Nous partons perdants mais nous arrivons gagnants. » Après l’indépendance, nous avions mis Dakar à quelques mètres de nous. Pendant notre récréation, Dakar a repris la place qu’elle détenait sous la colonisation. Dès que la BAD reviendra, il est certain que nous serons à une longueur d’avance sur Dakar. Malgré l’amitié légendaire ente les deux peuples, la rivalité n’a jamais cessé entre les deux capitales. Georges Marchais disait que l’union est un combat. Toute la Côte d’Ivoire doit participer à ce sprint final. Air Sénégal vient d’avoir un quatrième avion baptisé le « Marsassoum. » Air Ivoire ! Le nombre impressionnant de grandes et belles maisons à Dakar s’explique aussi, à mon avis, par l’apport considérable des immigrés et des grands marabouts. Notre diaspora doit cesser de parler et ferait mieux d’agir. Le style francophone, où on parle beaucoup pour faire moins, comme presque partout dans notre espace, n’impressionne plus personne dans ce pays. Notre Président à un Ph.D. C’est un américain. C’est bizarre d’ailleurs qu’on ne l’appelle pas le docteur Alassane Dramane Ouattara. Un autre atout pour Abidjan dans ce sprint final, c’est l’électricité. Comment Dakar a pu ainsi se développer avec le délestage, quand on sait que presque toutes les routes sont goudronnées ? Nous jugerons les transformations à venir en regardant Dakar. Notre défi, c’est de l’atteindre et de la battre absolument. Ainsi va l’Afrique. A la semaine prochaine.