Suite à notre enquête parue hier sur la situation alarmante des aéroports et aérodromes des villes de l’intérieur, le Directeur de l’administration et des finances à la Sodexam (Société d’exploitation et de développement aéroportuaire, aéronautique et météorologique) fait ici des précisions. « La société attend malheureusement des décaissements de subventions des années 2007, 2008, 2009 et 2010 pour réaliser certains investissements sur l’ensemble de ces aéroports », déplore Simon Nogbou Say.
Quelle est la situation actuelle des aérodromes de l’intérieur ou du moins dans quel état se trouvent-ils à ce jour ?
D’entrée, je voudrais indiquer le mandat que l’Etat nous a confié, ainsi que le patrimoine qu’il a mis à notre disposition pour exploitation. Les activités de la Sodexam sont contenues dans son appellation. En clair, nous sommes chargés d’exploiter et de développer les aéroports et la météorologie. A cet effet, l’Etat nous a confié une vingtaine d’aéroports et plus de 200 points d’observations et de mesures météorologiques sur l’ensemble du territoire national. Mais, de manière opérationnelle, nous sommes présents sur 14 sites. C’est-à-dire Adiaké, Bondoukou, Bouaké, Daloa, Dimbokro, Gagnoa, Korhogo, Man, Odienné, San Pedro, Sassandra, Tabou et Yamoussoukro, y compris la Direction Générale d’Abidjan. Les infrastructures et les équipements de toutes ces plate-formes sont assez vétustes. La situation s’est aggravée à l’occasion de la crise de septembre 2002 où nous avons perdu presque toutes les infrastructures et les équipements de Bouaké, de Korhogo, de Man et d’Odienné. A part les pistes, il n’y a rien, sauf les superstructures des bâtiments à Bouaké. A Odienné par exemple, même les fils électriques dans les bâtiments ont été emportés. Partout, il n’y a plus ni toiture, ni toilettes, rien.
A combien peut-on évaluer les pertes ?
Le patrimoine dans ces zones était évalué dans le rapport des commissaires aux comptes de l’exercice 2005, à 15.377.144.833 FCFA. Il faut mettre ce montant en rapport avec les besoins de reconstruction, en vue d’une exploitation normale. La 1ère phase du programme d’urgence a été estimée à 3.717.600.000 FCFA pour les zones ex-Cno et la phase de renforcement à 5.936.000.000 FCFA (soit plus de 9,6 milliards de FCFA).
Comment ces aérodromes sont-ils financés ? Est-ce que vous recevez des subventions de l’Etat ?
Les aéroports contribuent au développement socio-économique des pays dans les secteurs tels que le tourisme, la sécurité civile, la défense nationale, la surveillance et l’aménagement du territoire, etc. Le transport aérien est un instrument d’intégration et de rapprochement des peuples ainsi que d’échanges commerciaux. La Sodexam qui a été créée pour l’exploitation et le développement des aéroports et de la météorologie exerce des activités commerciales et des activités de service public. Au niveau commercial, comme tout gestionnaire des services de navigation aérienne et d’infrastructures aéroportuaires, elle facture ses prestations aux usagers sous forme de redevance aéronautique (compagnies aériennes, passagers, transitaires, etc.) ou sous forme de redevance extra-aéronautique (publicité, location d’espace, de bureau, etc.).
Donc quel est le problème à ce niveau ?
Le problème à ce niveau est de réactiver le binôme exploitant d’aéroport-compagnie aérienne. A ce titre, il faut relever que le niveau du trafic est largement insuffisant, rendant ainsi l’exploitation structurellement déficitaire. Au niveau des activités de service public, conformément à la loi sur les sociétés d’Etat, elle reçoit un financement de l’Etat, sous forme de subvention pour le fonctionnement et les investissements. Les problèmes rencontrés au niveau de la subvention dans sa forme actuelle sont de deux ordres : d’une part, le faible taux de financement des activités qui est le rapport entre les besoins exprimés et la subvention allouée, et d’autre part, les retards de décaissement par le Trésor public.
Ces problèmes financiers de niveau insuffisant des ressources par rapport à des charges d’exploitation importantes et à des besoins d’inves¬tissements lourds impactent sur les conditions de travail et de bien-être du personnel et les questions techniques, d’où des installations vétustes et/ou obsolètes et insuffisantes et des difficultés de programmation des investissements. Pourtant, la vision de la Sodexam est de mettre en place en Côte d’Ivoire, un système d’aéroports performants comme dans les pays développés, et permettre d’avoir au moins 2 ou 3 aéroports internationaux certifiés à Abidjan, à Bouaké et à Yamoussoukro. Malheureusement, à ce jour par exemple, la société attend des décaissements de subventions des années 2007, 2008, 2009 et 2010 pour réaliser certains investissements sur l’ensemble des aéroports. La nouvelle Direction Générale du Trésor a promis aider la société dans la mesure du possible, à résorber progressivement ces arriérés.
Aujourd’hui, c’est pratiquement l’Onu¬ci qui exploite ces plate-formes de l’intérieur avec des avions ou des hélicoptères. Comment se fait la col¬labo¬ration avec cet organisme ?
Nos services collaborent bien avec l’Onuci. Dans le cadre de leur mission, nous avons même signé un accord pour permettre à certains de nos collaborateurs techniques d’être détachés auprès de cette institution. Le seul problème que nous avons avec l’Onuci se rapporte à l’interprétation d’un dispositif au niveau de l’accord entre la Côte d’Ivoire et l’Onu, en matière d’utilisation des aéroports et notamment sur les questions de rémunération pour service rendu. Les discussions se poursuivent sur ce sujet. En ce qui concerne l’utilisation des plates-formes, il y a une nuance à faire sur le terme «exploitation» de votre question. L’Onuci demeure utilisatrice de l’ensemble de nos plates-formes aéroportuaires pour effectuer ses vols. Pour les aéroports des zones ex-Cno (Bouaké, Korhogo, Man et Odienné) où la Sodexam n’a pas repris la totalité de l’exploitation, l’Onuci assure par elle-même la gestion de ses vols, ce qui n’est pas le cas des aéroports de Daloa, de San Pedro, de Sassandra, de Tabou et de Yamoussoukro où la Sodexam exerce cette activité. Il faut indiquer par ailleurs que, pour les aéroports des zones ex-Cno, un programme d’urgence de réhabilitation a été élaboré par la Sodexam depuis plusieurs années. Ce programme attend le financement. Le personnel à affecter sur ces plates-formes a déjà été identifié, recruté. Pour l’instant, ces agents sont en activité sur les plates-formes opérationnelles, prêts à être redéployés après une réhabilitation des aéroports concernés. Les responsables de ces aéroports et un personnel composé d’une secrétaire, d’un chauffeur et d’un ou des agents de sécurité ont été pré-positionnés pour conduire le redéploiement.
Un constat saute aux yeux, c’est que la plupart de ces aérodromes ne sont pas bitumés. Pourquoi ?
Je rappelle que nous gérons une dizaine d’aérodromes de manière régulière dont 6 ont une piste bitumée (Yamoussoukro, Bouaké, Korhogo, Man, Daloa, et San Pedro) et 3 autres ont une piste non-bitumée (Odienné, Sassandra et Tabou). Les études sommaires du projet de bitumage de la piste d’O¬dienné sont disponibles, mais il faut que le financement suive. Evidemment, il y a d’autres pistes non-bitumées qui ne sont pas exploitées de manière régulière (Bondoukou, Bouna, etc.). C’est au gouvernement d’en décider. Pour l’instant, nous concentrons le peu de moyens au fonctionnement des aéroports régulièrement exploités.
A Korhogo par exemple, les balises de marquage de jour comme de nuit sont pratiquement inexistantes. N’y a-t-il pas un risque ?
Pour permettre aux avions d’atterrir, il est prévu des marques au sol qui sont de deux types : un marquage au sol, comme pour délimiter les routes, qu’on appelle le balisage diurne, pour permettre au pilote de voir la limite de la piste. De même, par mauvais temps ou la nuit, on installe des lampes sur le pourtour de la piste : c’est le balisage lumineux de piste. Ces balisages existaient du temps où il y avait une exploitation régulière de cette piste. Air Ivoire y effectuait des vols de nuit. Depuis la crise, la Sodexam n’a pas encore repris la gestion de ces aérodromes. Nous y avons affecté du personnel en nombre réduit pour préparer le redéploiement depuis plus de 2 ans. Nous attendons des ressources pour la remise en état des infrastructures aux fins d’exploitation.
Il y a aussi qu’à San Pedro, la municipalité a autorisé la construction d’habitations sur une partie de l’espace aéroportuaire… Cela ne remet-il pas au goût du jour la question de la sécurisation de ces infrastructures ?
Vous avez parfaitement raison. Le problème de San Pedro est vécu sur l’ensemble de nos plates-formes. Il y a une telle pression foncière qu’il faut prendre des mesures pour sécuriser le patrimoine, notamment par la clôture des plates-formes. Des besoins ont été exprimés dans ce sens dans le cadre du Programme d’investissement public (Pip). Mais, ils n’ont pas encore été satisfaits. Mais ce qu’il faut avoir à l’esprit, c’est que de manière générale, les aéroports sont loin des centres-villes pour diverses nuisances (sonores ou autres) et qu’il peut survenir des catastrophes et que la trop grande proximité de population est à éviter.
Quel est le tableau sur les stations météorologiques ?
Elles sont dans le même état que les aéroports. Malgré les efforts consentis, il demeure que ces moyens sont insuffisants. Pourtant, comme au niveau des aéroports, l’Organisation météorologique mondiale (Omm) procède à la certification des stations météorologiques. Dans un passé pas trop lointain, les stations d’Odienné et de Sassandra s’étaient vu décerner cette distinction. Il faut réhabiliter les stations, déplacer celles qui sont maintenant au centre-ville, comme à Adiaké, à Daloa, à Dimbokro, à Gagnoa et à Bondoukou. Densifier le réseau de stations mé¬téo-rologiques, créer des stations de météorologie marine et les rééquiper pour permettre de fournir au réseau mondial, des informations météorologiques de meilleures qualités. Les stations météorologiques en activité sont Adiaké, Bondoukou, Daloa, Dimbokro, Gagnoa, San Pedro, Sassandra, Tabou et Yamoussoukro. Là, également, on se heurte toujours à la question des ressources financières.
Il y a quelques années, vous annonciez la mise en œuvre d’un projet relatif au développement de la météorologie dans les collectivités décentralisées. Quel est le bilan aujourd’hui ?
A la météorologie comme dans les aéroports, la Sodexam a élaboré un plan de développement. Dans la mise en œuvre de ce plan, il a été prévu à ce niveau d’impliquer les collectivités décentralisées : conseils généraux et mairies. A cet effet, il me plaît de rappeler que, lors des journées mondiales de la météorologie le 23 mars 2005 et le 23 mars 2009, des préfets, des présidents de conseils généraux, des maires et la Direction de la décentralisation (Dd) ont été invités. Ce premier projet du genre a pour objet d’implanter dans ces mairies, des équipements permettant de mesurer les quantités d’eau, les températures etc pour affiner les prévisions saisonnières. Un engagement avait été pris par la Dd pour amener les collectivités décentralisées à acquérir des équipements météo, la Sodexam apportant son expertise à ces collectivités pour l’installation et l’exploitation de ces équipements. Le partenariat proposé par la Sodexam n’a pas pu se mettre en place, certainement du fait de la crise. Mais il sera bientôt réactivé auprès de la Dd.
L’absence d’aéroport peut être source d’isolement géographique, politique et économique pour nos régions. Au moment où la Côte d’Ivoire amorce la relance économique, quels seront, dans l’urgence, les aérodromes à réhabiliter ?
J’ai indiqué tantôt qu’il était primordial de réactiver le binôme exploitant d’aéroport-compagnie aérienne. Nous sommes heureux de l’annonce de la reprise des vols d’Air Ivoire, pour le début de l’année prochaine. En accord avec cette compagnie et sous réserve de la mise à disposition des ressources financières, nous allons réhabiliter les aéroports qui auront été choisis par cette compagnie. Il nous faut un délai de 3 à 4 mois pour cela. Ce n’est que l’existence et l’exploitation des lignes domestiques qui vont permettre aux aéroports de désenclaver les régions et jouer le rôle de point d’entrée et de développement de nos régions. Nos dossiers sont prêts en attendant le financement de l’Etat, à savoir le programme d’urgence de 3.717.600.000 FCFA, dont 1.207.900.000 FCFA pour Bouaké, 884.800.000 FCFA pour Korhogo, 860. 300.000 FCFA pour Man et 764.600.000 FCFA pour Odienné.
Depuis 2007 en France, dans le processus de décentralisation, l’Etat a transféré des aéroports dans le giron des collectivités territoriales. Une autonomisation qui a permis de désenclaver de nombreuses régions, de développer le tourisme et de satisfaire les besoins de mobilité des populations. Cela est-il possible en Côte d’Ivoire aujourd’hui ?
Cela peut parfaitement se faire dans notre pays également. Mais, il y a des pré-requis : il faut qu’il y ait du trafic pour rendre viable cette politique. Voyez-vous, au niveau de l’aéroport d’Abidjan, la mairie de Port-Bouët sur le territoire de laquelle l’aéroport est implanté a été associée aux discussions pour le renouvellement de la concession. De plus, dans l’actionnariat du concessionnaire AERIA figure la Chambre de Commerce et d’Industrie de Côte d’Ivoire. Pour l’instant, au niveau des aéroports de l’intérieur et au stade actuel de développement de notre pays, fédérer tout ceci au sein d’une entité unique comme la Sodexam nous semble la meilleure voie, par souci d’économie d’échelle. Les collectivités territoriales pourront intervenir dans un premier temps dans des projets conduisant à faire des aéroports de leur localité de véritables pôles de développement économique.
Quelle est la situation actuelle des aérodromes de l’intérieur ou du moins dans quel état se trouvent-ils à ce jour ?
D’entrée, je voudrais indiquer le mandat que l’Etat nous a confié, ainsi que le patrimoine qu’il a mis à notre disposition pour exploitation. Les activités de la Sodexam sont contenues dans son appellation. En clair, nous sommes chargés d’exploiter et de développer les aéroports et la météorologie. A cet effet, l’Etat nous a confié une vingtaine d’aéroports et plus de 200 points d’observations et de mesures météorologiques sur l’ensemble du territoire national. Mais, de manière opérationnelle, nous sommes présents sur 14 sites. C’est-à-dire Adiaké, Bondoukou, Bouaké, Daloa, Dimbokro, Gagnoa, Korhogo, Man, Odienné, San Pedro, Sassandra, Tabou et Yamoussoukro, y compris la Direction Générale d’Abidjan. Les infrastructures et les équipements de toutes ces plate-formes sont assez vétustes. La situation s’est aggravée à l’occasion de la crise de septembre 2002 où nous avons perdu presque toutes les infrastructures et les équipements de Bouaké, de Korhogo, de Man et d’Odienné. A part les pistes, il n’y a rien, sauf les superstructures des bâtiments à Bouaké. A Odienné par exemple, même les fils électriques dans les bâtiments ont été emportés. Partout, il n’y a plus ni toiture, ni toilettes, rien.
A combien peut-on évaluer les pertes ?
Le patrimoine dans ces zones était évalué dans le rapport des commissaires aux comptes de l’exercice 2005, à 15.377.144.833 FCFA. Il faut mettre ce montant en rapport avec les besoins de reconstruction, en vue d’une exploitation normale. La 1ère phase du programme d’urgence a été estimée à 3.717.600.000 FCFA pour les zones ex-Cno et la phase de renforcement à 5.936.000.000 FCFA (soit plus de 9,6 milliards de FCFA).
Comment ces aérodromes sont-ils financés ? Est-ce que vous recevez des subventions de l’Etat ?
Les aéroports contribuent au développement socio-économique des pays dans les secteurs tels que le tourisme, la sécurité civile, la défense nationale, la surveillance et l’aménagement du territoire, etc. Le transport aérien est un instrument d’intégration et de rapprochement des peuples ainsi que d’échanges commerciaux. La Sodexam qui a été créée pour l’exploitation et le développement des aéroports et de la météorologie exerce des activités commerciales et des activités de service public. Au niveau commercial, comme tout gestionnaire des services de navigation aérienne et d’infrastructures aéroportuaires, elle facture ses prestations aux usagers sous forme de redevance aéronautique (compagnies aériennes, passagers, transitaires, etc.) ou sous forme de redevance extra-aéronautique (publicité, location d’espace, de bureau, etc.).
Donc quel est le problème à ce niveau ?
Le problème à ce niveau est de réactiver le binôme exploitant d’aéroport-compagnie aérienne. A ce titre, il faut relever que le niveau du trafic est largement insuffisant, rendant ainsi l’exploitation structurellement déficitaire. Au niveau des activités de service public, conformément à la loi sur les sociétés d’Etat, elle reçoit un financement de l’Etat, sous forme de subvention pour le fonctionnement et les investissements. Les problèmes rencontrés au niveau de la subvention dans sa forme actuelle sont de deux ordres : d’une part, le faible taux de financement des activités qui est le rapport entre les besoins exprimés et la subvention allouée, et d’autre part, les retards de décaissement par le Trésor public.
Ces problèmes financiers de niveau insuffisant des ressources par rapport à des charges d’exploitation importantes et à des besoins d’inves¬tissements lourds impactent sur les conditions de travail et de bien-être du personnel et les questions techniques, d’où des installations vétustes et/ou obsolètes et insuffisantes et des difficultés de programmation des investissements. Pourtant, la vision de la Sodexam est de mettre en place en Côte d’Ivoire, un système d’aéroports performants comme dans les pays développés, et permettre d’avoir au moins 2 ou 3 aéroports internationaux certifiés à Abidjan, à Bouaké et à Yamoussoukro. Malheureusement, à ce jour par exemple, la société attend des décaissements de subventions des années 2007, 2008, 2009 et 2010 pour réaliser certains investissements sur l’ensemble des aéroports. La nouvelle Direction Générale du Trésor a promis aider la société dans la mesure du possible, à résorber progressivement ces arriérés.
Aujourd’hui, c’est pratiquement l’Onu¬ci qui exploite ces plate-formes de l’intérieur avec des avions ou des hélicoptères. Comment se fait la col¬labo¬ration avec cet organisme ?
Nos services collaborent bien avec l’Onuci. Dans le cadre de leur mission, nous avons même signé un accord pour permettre à certains de nos collaborateurs techniques d’être détachés auprès de cette institution. Le seul problème que nous avons avec l’Onuci se rapporte à l’interprétation d’un dispositif au niveau de l’accord entre la Côte d’Ivoire et l’Onu, en matière d’utilisation des aéroports et notamment sur les questions de rémunération pour service rendu. Les discussions se poursuivent sur ce sujet. En ce qui concerne l’utilisation des plates-formes, il y a une nuance à faire sur le terme «exploitation» de votre question. L’Onuci demeure utilisatrice de l’ensemble de nos plates-formes aéroportuaires pour effectuer ses vols. Pour les aéroports des zones ex-Cno (Bouaké, Korhogo, Man et Odienné) où la Sodexam n’a pas repris la totalité de l’exploitation, l’Onuci assure par elle-même la gestion de ses vols, ce qui n’est pas le cas des aéroports de Daloa, de San Pedro, de Sassandra, de Tabou et de Yamoussoukro où la Sodexam exerce cette activité. Il faut indiquer par ailleurs que, pour les aéroports des zones ex-Cno, un programme d’urgence de réhabilitation a été élaboré par la Sodexam depuis plusieurs années. Ce programme attend le financement. Le personnel à affecter sur ces plates-formes a déjà été identifié, recruté. Pour l’instant, ces agents sont en activité sur les plates-formes opérationnelles, prêts à être redéployés après une réhabilitation des aéroports concernés. Les responsables de ces aéroports et un personnel composé d’une secrétaire, d’un chauffeur et d’un ou des agents de sécurité ont été pré-positionnés pour conduire le redéploiement.
Un constat saute aux yeux, c’est que la plupart de ces aérodromes ne sont pas bitumés. Pourquoi ?
Je rappelle que nous gérons une dizaine d’aérodromes de manière régulière dont 6 ont une piste bitumée (Yamoussoukro, Bouaké, Korhogo, Man, Daloa, et San Pedro) et 3 autres ont une piste non-bitumée (Odienné, Sassandra et Tabou). Les études sommaires du projet de bitumage de la piste d’O¬dienné sont disponibles, mais il faut que le financement suive. Evidemment, il y a d’autres pistes non-bitumées qui ne sont pas exploitées de manière régulière (Bondoukou, Bouna, etc.). C’est au gouvernement d’en décider. Pour l’instant, nous concentrons le peu de moyens au fonctionnement des aéroports régulièrement exploités.
A Korhogo par exemple, les balises de marquage de jour comme de nuit sont pratiquement inexistantes. N’y a-t-il pas un risque ?
Pour permettre aux avions d’atterrir, il est prévu des marques au sol qui sont de deux types : un marquage au sol, comme pour délimiter les routes, qu’on appelle le balisage diurne, pour permettre au pilote de voir la limite de la piste. De même, par mauvais temps ou la nuit, on installe des lampes sur le pourtour de la piste : c’est le balisage lumineux de piste. Ces balisages existaient du temps où il y avait une exploitation régulière de cette piste. Air Ivoire y effectuait des vols de nuit. Depuis la crise, la Sodexam n’a pas encore repris la gestion de ces aérodromes. Nous y avons affecté du personnel en nombre réduit pour préparer le redéploiement depuis plus de 2 ans. Nous attendons des ressources pour la remise en état des infrastructures aux fins d’exploitation.
Il y a aussi qu’à San Pedro, la municipalité a autorisé la construction d’habitations sur une partie de l’espace aéroportuaire… Cela ne remet-il pas au goût du jour la question de la sécurisation de ces infrastructures ?
Vous avez parfaitement raison. Le problème de San Pedro est vécu sur l’ensemble de nos plates-formes. Il y a une telle pression foncière qu’il faut prendre des mesures pour sécuriser le patrimoine, notamment par la clôture des plates-formes. Des besoins ont été exprimés dans ce sens dans le cadre du Programme d’investissement public (Pip). Mais, ils n’ont pas encore été satisfaits. Mais ce qu’il faut avoir à l’esprit, c’est que de manière générale, les aéroports sont loin des centres-villes pour diverses nuisances (sonores ou autres) et qu’il peut survenir des catastrophes et que la trop grande proximité de population est à éviter.
Quel est le tableau sur les stations météorologiques ?
Elles sont dans le même état que les aéroports. Malgré les efforts consentis, il demeure que ces moyens sont insuffisants. Pourtant, comme au niveau des aéroports, l’Organisation météorologique mondiale (Omm) procède à la certification des stations météorologiques. Dans un passé pas trop lointain, les stations d’Odienné et de Sassandra s’étaient vu décerner cette distinction. Il faut réhabiliter les stations, déplacer celles qui sont maintenant au centre-ville, comme à Adiaké, à Daloa, à Dimbokro, à Gagnoa et à Bondoukou. Densifier le réseau de stations mé¬téo-rologiques, créer des stations de météorologie marine et les rééquiper pour permettre de fournir au réseau mondial, des informations météorologiques de meilleures qualités. Les stations météorologiques en activité sont Adiaké, Bondoukou, Daloa, Dimbokro, Gagnoa, San Pedro, Sassandra, Tabou et Yamoussoukro. Là, également, on se heurte toujours à la question des ressources financières.
Il y a quelques années, vous annonciez la mise en œuvre d’un projet relatif au développement de la météorologie dans les collectivités décentralisées. Quel est le bilan aujourd’hui ?
A la météorologie comme dans les aéroports, la Sodexam a élaboré un plan de développement. Dans la mise en œuvre de ce plan, il a été prévu à ce niveau d’impliquer les collectivités décentralisées : conseils généraux et mairies. A cet effet, il me plaît de rappeler que, lors des journées mondiales de la météorologie le 23 mars 2005 et le 23 mars 2009, des préfets, des présidents de conseils généraux, des maires et la Direction de la décentralisation (Dd) ont été invités. Ce premier projet du genre a pour objet d’implanter dans ces mairies, des équipements permettant de mesurer les quantités d’eau, les températures etc pour affiner les prévisions saisonnières. Un engagement avait été pris par la Dd pour amener les collectivités décentralisées à acquérir des équipements météo, la Sodexam apportant son expertise à ces collectivités pour l’installation et l’exploitation de ces équipements. Le partenariat proposé par la Sodexam n’a pas pu se mettre en place, certainement du fait de la crise. Mais il sera bientôt réactivé auprès de la Dd.
L’absence d’aéroport peut être source d’isolement géographique, politique et économique pour nos régions. Au moment où la Côte d’Ivoire amorce la relance économique, quels seront, dans l’urgence, les aérodromes à réhabiliter ?
J’ai indiqué tantôt qu’il était primordial de réactiver le binôme exploitant d’aéroport-compagnie aérienne. Nous sommes heureux de l’annonce de la reprise des vols d’Air Ivoire, pour le début de l’année prochaine. En accord avec cette compagnie et sous réserve de la mise à disposition des ressources financières, nous allons réhabiliter les aéroports qui auront été choisis par cette compagnie. Il nous faut un délai de 3 à 4 mois pour cela. Ce n’est que l’existence et l’exploitation des lignes domestiques qui vont permettre aux aéroports de désenclaver les régions et jouer le rôle de point d’entrée et de développement de nos régions. Nos dossiers sont prêts en attendant le financement de l’Etat, à savoir le programme d’urgence de 3.717.600.000 FCFA, dont 1.207.900.000 FCFA pour Bouaké, 884.800.000 FCFA pour Korhogo, 860. 300.000 FCFA pour Man et 764.600.000 FCFA pour Odienné.
Depuis 2007 en France, dans le processus de décentralisation, l’Etat a transféré des aéroports dans le giron des collectivités territoriales. Une autonomisation qui a permis de désenclaver de nombreuses régions, de développer le tourisme et de satisfaire les besoins de mobilité des populations. Cela est-il possible en Côte d’Ivoire aujourd’hui ?
Cela peut parfaitement se faire dans notre pays également. Mais, il y a des pré-requis : il faut qu’il y ait du trafic pour rendre viable cette politique. Voyez-vous, au niveau de l’aéroport d’Abidjan, la mairie de Port-Bouët sur le territoire de laquelle l’aéroport est implanté a été associée aux discussions pour le renouvellement de la concession. De plus, dans l’actionnariat du concessionnaire AERIA figure la Chambre de Commerce et d’Industrie de Côte d’Ivoire. Pour l’instant, au niveau des aéroports de l’intérieur et au stade actuel de développement de notre pays, fédérer tout ceci au sein d’une entité unique comme la Sodexam nous semble la meilleure voie, par souci d’économie d’échelle. Les collectivités territoriales pourront intervenir dans un premier temps dans des projets conduisant à faire des aéroports de leur localité de véritables pôles de développement économique.