x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Politique Publié le vendredi 11 novembre 2011 | AFP

Réconciliation ivoirienne : la tradition veut jouer sa partition

© AFP Par Prisca
Commission Dialogue-vérité et réconciliation : le Président Charles Konan Banny rencontre ses collaborateurs
Mardi 6 septembre 2011. Abidjan. Siège de la Commission Dialogue-vérité et réconciliation, Cocody Riviera. Photo: Sa Majesté Désiré Amon Tanoé, roi des N’Zima Kotoko, 1er Vice-président
BASSAM - Couronnes, sceptres et sacrifices rituels pour sauver la Côte d`Ivoire?
Les chefs traditionnels sont mis à contribution pour réconcilier le pays au sortir d`une grave crise politique mais, souvent instrumentalisés, ils ne font pas l`unanimité.

Coiffé d`une énorme couronne dorée et vêtu d`un pagne multicolore, il fend la foule, porté par de solides gaillards, et fait quelques mouvements au rythme du tam-tam sacré: voici Awoula Amon Tanoé, roi des N`Zima Kotoko, une petite ethnie de la côte ivoirienne.

Début novembre, "Sa majesté" présidait le festival annuel de l`Abissa, qui a drainé des milliers de visiteurs à Bassam, ex-capitale coloniale située près d`Abidjan et connue pour ses plages. Thème de la fête des N`Zima pour 2011:

"la réconciliation".

Ce septuagénaire, diplomate de carrière, a été nommé premier vice-président de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (CDVR) installée par le président Alassane Ouattara fin septembre.

Il y représente les chefs traditionnels, qui pèsent lourd dans une société aux 20 millions d`Ivoiriens et aux dizaines d`ethnies, surtout en milieu rural où ils sont souvent le principal repère, vu la faiblesse de l`Etat.

Pour ce "roi", "il faut puiser dans nos traditions toutes les énergies qui permettront de mettre un terme à la crise" de décembre 2010-avril 2011. Née du refus de l`ex-président Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite au scrutin de novembre 2010, elle a fait quelque 3.000 morts et abouti à une guerre, épilogue d`une décennie de tourmente et de déchirements communautaires.

La catharsis doit commencer par "une période de deuil, à travers laquelle il faudra faire tous les sacrifices rituels", explique-t-il à l`AFP dans sa discrète villa contrastant avec son flamboyant palais.

"Trop de sang a souillé la terre de Côte d`Ivoire. La population, d`où qu`elle soit, ne peut pas se sentir apaisée et vivre ensemble tant que ces rituels n`ont pas été accomplis", assure-t-il.

Il faudra donc immoler moutons et autres poulets, et prononcer les formules héritées des ancêtres.

La CDVR tarde à se mettre en marche. Mais dès son investiture, son président, l`ex-Premier ministre Charles Konan Banny, a donné le ton: comme on nettoie "une plaie de ses impuretés avant de la soigner", les diverses communautés ivoiriennes devront d`abord effectuer leurs rites de "purification".

Le roi des N`Zima y croit, comme il croit à la nécessité de "s`appuyer sur la chefferie" pour réconcilier: il veut "mettre en branle" les 12 rois, les 11.800 chefs de villages et 145 chefs de cantons et de tribus du pays.

"si le chef est un pantin..."

Mobiliser les chefs traditionnels après l`échec de la classe politique?

Pour le Pr Amoa Urbain, spécialiste des cultures ivoiriennes, ils peuvent faire "peu et beaucoup dans cette période de réconciliation".

"Beaucoup si le chef a une forte notoriété dans sa région, s`il a les moyens de sa politique. A contrario, si le chef est un pantin, il est ballotté", affirme-t-il.

"Pantins" des élus locaux, "ballottés" au gré de leurs intérêts financiers, rabatteurs de voix en période électorale: le constat est courant.

Pour Gisèle Aka, commerçante de Bassam venue assister à l`Abissa, les chefs traditionnels ne peuvent jouer les arbitres: "ils appartiennent à des partis" politiques et ont durant la crise "divisé les villages".

"Les leaders traditionnels doivent se défaire de la politique", approuve Jean Gervais Tchiffie Zié, assis sur son trône couvert d`une peau de bête, dans sa riche demeure d`Abidjan.

Un repentir pour ce petit chef bété - l`ethnie de Laurent Gbagbo - qui avait été bombardé par le défunt "Guide" libyen Mouammar Kadhafi secrétaire général de son "Forum des rois et sultans d`Afrique".

Il avait tenu meeting en mars à Abidjan pour défendre son mentor libyen face à la rébellion qui l`a depuis vaincu.

S`il est tout de noir vêtu, Tchiffie Zié, qui entonne à son tour le refrain de la réconciliation à la mode Ouattara, ce n`est d`ailleurs pas en mémoire des victimes ivoiriennes: il porte le deuil de Kadhafi, "le roi des rois d`Afrique".

Par Christophe KOFFI
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Politique

Toutes les vidéos Politique à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ