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Société Publié le vendredi 18 novembre 2011 | L’expression

Coût exorbitant des cautions et loyers, manque de politique de logement…

Locataires et propriétaires se font la guerre

Le manque d’une politique de logement a accentué, ces dernières années, les crises entre les propriétaires, les locataires et les agents immobiliers. L’anarchie est devenue maîtresse dans le secteur et la guerre fait rage dans les ménages.
C’est la troisième fois que G. Agathe se sépare avec son propriétaire de maison en ’’queue de poisson’’. La quarantaine environ, divorcée et mère de trois enfants, elle vient de quitter l’appartement de trois pièces qu’elle occupait depuis avril 2007 à Cocody-Angré. Ce 1er octobre, il est 5h 30 à la cité «Manguier». Agathe et sa servante, en compagnie de ses deux neveux transportent leurs affaires loin des regards curieux des voisins. Dans la discrétion la plus totale, le déménagement s’est fait en trois nuits à l’insu du propriétaire. «Nous sommes obligés de partir de la sorte. Si les voisins nous voient transporter nos bagages sur la tête, ce sera une honte pour ma tante. N’ayant par les moyens de faire le déménagement à l’aide d’un véhicule, nous venons à 5h30 faire sortir nos affaires. Mais dès qu’il fera jour, nous arrêterons l’opération pour attendre le lendemain, sans que le propriétaire ne le sache », révèle D.S., neveu d’Agathe. Pour un coût de 110.000 Fcfa le mois, elle a dû débourser trois mois de caution pour avoir accès au logis. Selon D.S, sa tante a vécu en odeur de sainteté avec son propriétaire pendant trois ans, parce qu’elle s’acquittait régulièrement de son loyer. Mais depuis un an, elle est devenue une mauvaise payeuse. «En réalité, c’est sa fille qui paye la maison. Sur les 110.000 Fcfa de loyer, sa fille contribue à hauteur de 90.000 Fcfa et elle n’ajoute que 20.000 Fcfa. La maison était régulièrement payée jusqu’en 2010 où ma tante ne versait que 50.000 Fcfa au propriétaire. Alors que chaque fin de mois, c’est moi qui allais chercher les 90.000 Fcfa. Si elle est obligée de quitter la maison en catimini, c’est parce qu’elle doit sept mois de loyer», déplore D.S. âgé de 33 ans, sans emploi. Aujourd’hui, la famille est disloquée. Par la force des choses, les membres de cette famille sont devenus des Sans domicile fixe (Sdf). Agathe a déposé ses valises chez sa fille en Zone 4 et a trouvé refuge chez une sœur à Yopougon. Ses deux garçons sont retournés chez leur père. Quant à D.S, laissé-pour-compte, ne sachant où aller, continue de squatter l’ancienne demeure de sa tante. Joint au téléphone, G. Agathe a reconnu qu’elle est partie dans la discrétion parce qu’elle en avait marre des agissements de son propriétaire.

Les nouveaux locataires refusent de payer les arriérés…
«Mais comprenez qu’il était difficile pour moi d’assumer toutes les charges de la maison. Il fallait nourrir cinq bouches, payer les factures d’eau et d’électricité, alors que mon petit commerce ne marche plus. Les 90.000 Fcfa que ma fille me donnait ne suffisaient plus. J’ai tout fait pour que mon propriétaire revoie le prix du loyer à la baisse. Il a préféré me mettre à la porte», se justifie-t-elle. Une affirmation jugée erronée par le propriétaire. Il abonde dans le même sens que le neveu d’Agathe pour exposer les problèmes qui existaient entre lui et son ancienne locataire. «Elle me doit sept mois de loyer. Alors qu’elle avait promis de mettre la maison en état avant de s’en aller. Malheureusement, elle a laissé la maison dans un état piteux. Aucune ampoule ne fonctionnait après son départ. Les carreaux de la douche ont été endommagés de sorte que l’eau coule jusqu’au salon. La peinture est écaillée. Les plafonds sont fissurés. C’est égoïste de sa part», juge K. Erick, propriétaire rencontré lors de l’aménagement de la maison. Pour Alangba Georges, gérant de plusieurs logements à Yopougon, «le propriétaire-bailleur est en droit de déduire du dépôt de garantie, les sommes éventuellement dues au titre des loyers et des charges. Afin de faire des travaux de réparations-locatives non exécutés ou liés à des dégradations occasionnées pendant l’utilisation de la maison, à ses annexes ou à ses équipements», souligne-t-il. Pourtant, plusieurs personnes estiment que les logeurs sont à la base des conflits. Tidiane D. explique que sa sœur a eu des altercations, récemment, avec son propriétaire-bailleur lorsqu’elle devait partir de la maison. «Avant qu’elle ne parte de la maison, le propriétaire est venu faire l’état des lieux. Il a demandé à sa locataire de refaire la peinture, de remplacer les prises électriques, les ampoules et de changer des joints de robinets. Elle s’est exécutée. Mais l’audit du propriétaire a relevé que tous les travaux que ma sœur a engagés ont été mal faits. Et qu’il devait tout reprendre. Sur les deux mois de caution qui s’élevaient à 450.000 Fcfa, à raison de 225.000 Fcfa le loyer, le propriétaire a dit qu’il pouvait restituer seulement 60.000 Fcfa. C’est vraiment de l’escroquerie», se plaint Tidiane.

…les bailleurs bloquent le dépôt de garantie

Selon lui, les propriétaires-bailleurs trouvent des subterfuges pour ne pas restituer la caution. ’’Ils nous demandent souvent d’attendre la caution du prochain preneur’’, ajoute Meguy Kouadio, résidant à Cocody. En réalité, «lorsque vous quittez le logement, le dépôt de garantie doit vous être restitué dans les 2 mois qui suivent la remise des clés», soutient un expert immobilier. Selon lui, les conflits naissent entre propriétaires et locataires suite à l’ignorance de certaines règles immobilières. « Le propriétaire ou le locataire ne doivent pas négliger l`état des lieux. L`état des lieux, appelé aussi "constat d`état des lieux" est un document essentiel qui décrit le logement loué, pièce par pièce, ainsi que les équipements qu`il comporte. Il doit obligatoirement être joint au contrat de location», révèle l’expert. A l’en croire, cela permet de comparer l`état du logement au début et à la fin de la location et de déterminer, en cas de réparations nécessaires, celles qui incombent au propriétaire ou au locataire. A côté de cette crédulité, les populations ivoiriennes sont «meurtries» par le coût exorbitant des loyers. « En Côte d’Ivoire, il n’y a pas de politique de logement. Chaque propriétaire de maison augmente le coût du loyer selon son bon vouloir, sans que l’Etat ne dise quelque chose. Alors que le pouvoir d’achat des ménages est très faible. Dans de telles conditions, on ne peut même pas être propriétaire de maison après 30 ans de service», dénonce Ouattara Anzoumane, instituteur à Abobo. Il révèle que les agences immobilières sont aussi à la base des coûts exorbitants des loyers’’. « Elles réclament toujours de l’argent avant la signature du bail. Et quand elles parviennent à avoir ‘’un client’’ qui désire la maison, elles exigent un mois de loyer. Ce sont des abus auxquels l’Etat doit mettre fin », propose Solange Atta, femme d’affaires.

Dacoury Vincent, Stagiaire

Encadré : Que fait l’Etat ?
Pour dénicher un toit à la mesure de ses moyens, il faut s’armer d’une bonne dose de persévérance et être vigilant. En plus des maisons qui coûtent les yeux de la tête, il y a des escrocs qui profitent de la situation pour soutirer de l’argent aux désespérés à la recherche de location. Heureusement, le gouvernement Soro a en son sein un ministère chargé de la promotion du logement. Plusieurs projets immobiliers sont annoncés, et certains sont en cours de réalisation par la ministre Kaba Nialé. Conformément à ses promesses de campagne, le président Ouattara entend réaliser 10.000 logements sociaux par an sur cinq ans. Mais avant, la première responsable de l’habitat devra mettre de l’ordre dans le secteur de l’immobilier. Elle a la lourde charge de mettre fin aux abus des propriétaires de maison, qui généralement font des coûts élevés. Nos tentatives pour joindre le ministre de la Promotion du logement ont été vaines.

D.V
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