Le juge français Patrick Ramaël a donc ramassé de faux os à Issia. Si l'on s'en tient au résultat du test d'ADN auquel a été soumis le squelette présumé de Guy-André Kieffer, déterré le vendredi 06 janvier dernier dans cette localité, il ne s'agit pas du corps du journaliste franco-canadien disparu en Côte d'Ivoire le 16 avril 2004. Ainsi, plus de neuf (9) ans après, Kieffer court toujours. Les différentes recherches et autres pistes explorées pour retrouver ses traces n'ont encore rien donné de satisfaisant. Pas plus que les enquêtes menées conjointement par le juge Ramaël et le procureur militaire ivoirien, Ange Kessi Bernard. Un dossier aux contours flous, qui laisse penser que de gros bonnets sont tapis dans l'ombre et empêchent que la vérité éclate. Qui a donc intérêt à ce que Kieffer ne réapparaisse pas ? Où se trouve le journaliste franco-canadien? Détenait-il des dossiers compromettants sur la filière café-cacao (il enquêtait sur les malversations dans cette filière quand il a disparu, ndlr), et sur les réseaux puissants de chocolatiers ? Kieffer est-il mort ou a-t-il été simplement réduit au silence ? Le débat reste entier et se trouve relancé de plus belle après les résultats du test d'ADN. Au niveau de la famille Kieffer, on entretient le secret espoir que le frère, l'époux ou le père est encore en vie, quelque part sur cette terre des hommes. " Cette nouvelle est un soulagement car elle me pousse à croire que Guy-André pourrait être en vie. Le combat se poursuit car le problème reste entier. Nous ne savons toujours pas ce qui est arrivé à mon mari. Mais je tiens à saluer les efforts constants du juge Ramaël, qui examine sans relâche toutes les pistes qui surgissent dans l'enquête et va jusqu'au bout de chaque nouvel indice", a déclaré son épouse, Osange Silou-Kieffer. "Nous sommes plus mobilisés que jamais par cette annonce et apportons tout notre soutien au juge qui, depuis 2004, fournit des efforts considérables pour faire avancer l'enquête, dans des circonstances souvent difficiles. Petit à petit, nous avançons et nous approchons de la vérité", a ajouté Bernard Kieffer, le frère du journaliste. Les recherches continuent donc. Le juge Ramaël, qui on l'imagine, n'abandonnera pas après le flop d'Issia, va orienter désormais sa loupe vers d'autres horizons. Mais où ? Après la région d'origine de feu le ministre Bohoun Bouabré, suspecté dans la disparition de Kieffer, et malheureusement décédé le mercredi 11 janvier dernier, quelle sera la prochaine étape ? Seul le magistrat français Patrick Ramaël pourra répondre. Toutefois, les soutiens ne manquent pas et qui gonflent à bloc l'enquêteur français dans sa volonté de faire éclater le vérité. "Nous sommes tous, proches, amis et collègues de Guy-André, déterminés à ce que la vérité éclate et que les auteurs de sa disparition soient identifiés puis traduits en justice. Partie civile au dossier, Reporters sans frontières appelle les autorités ivoiriennes et françaises à continuer ce travail de concert et demande au juge Ramaël de poursuivre ses efforts pour que justice soit rendue", a indiqué Reporters sans frontières (Rsf) dans une note dont nous avons reçu copie. Pour rappel, il faut souligner que Guy-André Kieffer, journaliste spécialisé dans les matières premières et les questions économiques et financières, aurait été enlevé par un commando sur le parking d'un supermarché d'Abidjan, alors qu'il avait rendez-vous avec Michel Legré, un proche de Simone Gbagbo, l'épouse de l'ex-président ivoirien, Laurent Gbagbo. Et depuis, l'affaire est allée de rebondissements en rebondissements jusqu'à ce que sur indications d'un informateur, le juge Ramaël ordonne les fouilles qui ont conduit à la découverte d'un corps le 6 janvier 2012 à Issia, supposé être celui de Kieffer. Mais les tests d'ADN ont prouvé le contraire, relançant ainsi le débat sur cette affaire qui ressemble à ces crimes dont on n'a jamais pu démêler l’écheveau.
Hamadou ZIAO
Hamadou ZIAO