Déversement des déchets toxiques en Côte d’Ivoire. Le sujet est d’importance non seulement médicale, environnementale mais aussi sociale. C’est que l’opération de dédommagement d’un montant de cent milliards FCFA de Trafigura, en ce qui nous concerne ici, a laissé un grand sentiment d’injustice. En effet, l’ex chef de l’Etat, Laurent Gbagbo a estimé avoir fait un usage judicieux des cent milliards FCFA. Fonds versé par Trafigura, affréteur du tristement célèbre Probo Koala. En dédommageant à hauteur de deux cent mille FCFA chacun, les 95.247 malades ambulatoires, de deux millions FCFA chacun, les 75 malades dont l’état avait été jugé critique et qui avaient fait l’objet d’une hospitalisation et de cent millions FCFA chaque ayant-droit des 16 personnes décédées officiellement. Soit une enveloppe prévisionnelle de 22,7 milliards à distribuer aux victimes sanitaires ou à leurs ayant droits.
Rappelons que sur les cent milliards, l’ancien président a cru bon d’accorder 50,18 milliards à l’Etat de Côte d’Ivoire pour avoir subi des préjudices sanitaires, économiques et écologiques. Une manne dans laquelle le gouvernement s’est taillé la part du lion en retranchant 30 milliards au titre des dépenses qu’il aurait eu à effectuer dans le cadre de la gestion d’urgence de la crise sanitaire. Les 20 autres milliards devraient servir, avait décidé l’ex- chef de l’Etat, d’appui à la construction d’infrastructures et à la réhabilitation des hôpitaux et centres de santé. A l’analyse, l’enveloppe mise à la disposition des victimes est bien dérisoire.
Qui plus est, n’a pas véritablement profité aux bénéficiaires. Il apparaît clairement que l’arrangement conclu avec Trafigura au nom des victimes aura servi au gouvernement à aller au bout de ses projets au détriment des vrais bénéficiaires qui meurent aujourd’hui dans le silence et l’indifférence quand ils ne traînent pas des souffrances physiques pour le restant de leur vie. Les quelques 30.000 victimes restantes percevront –elles un jour leur indemnisation? L’Etat étant une continuité, les regards sont tournés vers les nouvelles autorités pour réparer l’injustice. Il en va de même des 22 milliards conclus par l’entremise du cabinet Light Day an Co et qui a donné lieu à un véritable spectacle de prévarication. Un audit s’impose peut-être pour faire la lumière sur ces sommes
La clé de répartition des 100 milliards
Au titre des collectivités
Le gouvernement 30 milliards Remboursement de ses dépenses
District d’Abidjan 2,5 milliards Assainissement du District
Abobo 1,5 milliard Transformation de l’hôpital en CHU
Attécoubé 500 millions Pour des projets socio communautaires
Cocody 4,2 milliards Projets communautaires, construction d’hôpital
Koumassi 1 milliard Transformation de l’hôpital en CHU
Bingerville 1 milliard Pour des projets socio communautaires
Port-Bouet 1 milliard Renforcement des capacités de l’hôpital
Yopougon 1,2 milliard Renforcement des capacités de l’hôpital
Treichville 200 millions Renforcement des capacités du CHU
Djibi village 660 millions Adduction d’eau et projets communautaires
Akouédo Attié 600 millions Projets socio communautaires et centre de santé
Akouédo Ebrié 520 millions Projets socio communautaires.
Au titre des structures d’intérêt national
MACA 100 millions Renforcement des capacités de l’infirmerie
LANADA 1,3 milliard Pour équipement et achat de détecteur analyseur d’air
Zoo 300 millions Pour la réhabilitation
Abobo 2,06 milliards Construction d’un centre de veille sanitaire
Au titre des dommages économiques
Secteur informel : 471. 980.363 FCFA
Secteur formel : 2,8 milliards FCFA Pour 37 entreprises
Au titre des victimes humaines
Aux associations des victimes des déchets : 100 millions FCFA
Aux 101. 313 Victimes ambulatoires : 20,2 milliards de FCFA
Aux 75 victimes hospitalisés : 150 millions FCFA
Aux personnel soignant : 929,4 millions FCFA
Aux ayant droits des décédés : 1,6 milliard
Etat récapitulatif
Etat et ses démembrements : 68.658.000.000 FCFA
Les victimes économiques : 3. 300.00.000 FCFA
Le personnel soignant : 929.400.000 FCFA
Les associations des victimes : 100.000.000 FCFA
Les victimes sanitaires : 22.0120600.000 FCFA
Bakayoko Vamory Ba, ayant-droit de Bakayoko Moussa
“Nous n’avons pas reçu les 100 millions qui nous reviennent de droit”
Bakayoko Vamory Ba est l’ayant-droit légal de Moussa, son frère cadet, décédé à la suite de l’inhalation des déchets toxiques. Depuis 2008, ce dernier affirme n’avait pas encore été indemnisé.
Le Patriote : Vous êtes le frère de Bakayoko Moussa, décédé à la suite du déversement des déchets toxiques. Comment s’est faite la reconnaissance de la cause de son décès ?
Bakayoko Moussa : Comme la plupart des malades, mon frère avait été suivi dans un hôpital où il s’est fait enregistré. Il a eu des boutons sur tout le corps, il toussait beaucoup et il avait les yeux toujours rouges. Ce sont des symptômes qu’il a développés après l’inhalation des déchets toxiques. On a passé tout le temps entre l’hôpital et la maison. Jusqu’à ce qu’il décède. Après son décès, le gouvernent a publié le nom des personnes décédées dans les journaux et le nom de mon petit frère y était.
LP : Quels sont les documents qui vous ont été demandés ensuite ?
BV : Ils ont d’abord demandé un certificat de décès. Après, nous sommes passés à l’audition à la justice. Mais avant l’audition, nous avons eu une concertation en famille. Et la famille a décidé que je suis l’ayant-droit. Il me revenait de suivre le dossier. A la justice, le juge qui a étudié notre dossier s’appelle Ouattara Romain. Nous étions nombreux mais le jour où j’ai été reçu, le juge m’a confié que nous avions le dossier le plus complet. Il m’a aussitôt délivré l’acte d’hérédité. J’avais pris un avocat et c’est ce dernier qui a pris la procédure en main, mais jusqu’à ce jour, ça n’a pas abouti.
LP : Vous n’avez donc pas reçu un centime des cent millions qui vous revient à titre d’indemnisation ?
BV : Je n’ai reçu aucun centime.
LP : Pourquoi ?
BV : Mon avocat qui suivait le dossier venait chaque jour me dire que telle personne demandait tel montant. A tous les niveaux de l’évolution du dossier, les gens demandaient leur part. Mon avocat refusait cette corruption et nous avons décidé de ne pas céder au chantage. Cette indemnisation est de l’argent qui nous revient de droit et nous n’entendons pas concéder des pourcentages à des gens qui oublient que nous avons perdu quelqu’un. Depuis 2007, je me traite moi-même au Xylo-Mepha parce que j’ai les narines toujours bouchées. C’est parce que mon avocat et moi avons refusé la corruption que nous n’avons pas encore reçu notre argent. C’était du marchandage.
LP : Vous avez connaissance des cas similaires au vôtre parmi les bénéficiaires?
BV : J’avoue que chacun suit son dossier. Au tribunal, nous étions nombreux mais on ne se connaît pas vraiment. Donc je ne peux pas parler du cas des autres. Mais en ce qui me concerne, je n’ai pas reçu les cent millions auxquels nous avons droit.
LP : Vous abandonnez ou que comptez-vous faire maintenant?
BV : Nous avons d’abord compté sur les journalistes pour nous défendre mais jusque-là, les journaux dénoncent mais rien ne change. C’est un cri de cœur que je lance aujourd’hui aux nouvelles autorités. Ça fait six ans que les déchets toxiques ont semé la mort à Abidjan. Il y a cinq ans que l’on nous a promis les indemnisations. Comment comprendre que jusque-là nous n’ayons pas reçu l’argent ? Si le gouvernement n’a pas pu empêcher le déversement des déchets à Abidjan, le minimum, c’est de nous remettre sans difficultés ce qui nous revient. Je supplie le président Ouattara de se pencher sur ce dossier en faisant payer aux vrais bénéficiaires leur argent. Il rendrait service à de nombreuses familles qui vivent dans la souffrance et la douleur. Nous regardons les nouvelles autorités et nous attendons de voir si elles nous rendront justice.
Propos recueillis par A. Lebel
Rappelons que sur les cent milliards, l’ancien président a cru bon d’accorder 50,18 milliards à l’Etat de Côte d’Ivoire pour avoir subi des préjudices sanitaires, économiques et écologiques. Une manne dans laquelle le gouvernement s’est taillé la part du lion en retranchant 30 milliards au titre des dépenses qu’il aurait eu à effectuer dans le cadre de la gestion d’urgence de la crise sanitaire. Les 20 autres milliards devraient servir, avait décidé l’ex- chef de l’Etat, d’appui à la construction d’infrastructures et à la réhabilitation des hôpitaux et centres de santé. A l’analyse, l’enveloppe mise à la disposition des victimes est bien dérisoire.
Qui plus est, n’a pas véritablement profité aux bénéficiaires. Il apparaît clairement que l’arrangement conclu avec Trafigura au nom des victimes aura servi au gouvernement à aller au bout de ses projets au détriment des vrais bénéficiaires qui meurent aujourd’hui dans le silence et l’indifférence quand ils ne traînent pas des souffrances physiques pour le restant de leur vie. Les quelques 30.000 victimes restantes percevront –elles un jour leur indemnisation? L’Etat étant une continuité, les regards sont tournés vers les nouvelles autorités pour réparer l’injustice. Il en va de même des 22 milliards conclus par l’entremise du cabinet Light Day an Co et qui a donné lieu à un véritable spectacle de prévarication. Un audit s’impose peut-être pour faire la lumière sur ces sommes
La clé de répartition des 100 milliards
Au titre des collectivités
Le gouvernement 30 milliards Remboursement de ses dépenses
District d’Abidjan 2,5 milliards Assainissement du District
Abobo 1,5 milliard Transformation de l’hôpital en CHU
Attécoubé 500 millions Pour des projets socio communautaires
Cocody 4,2 milliards Projets communautaires, construction d’hôpital
Koumassi 1 milliard Transformation de l’hôpital en CHU
Bingerville 1 milliard Pour des projets socio communautaires
Port-Bouet 1 milliard Renforcement des capacités de l’hôpital
Yopougon 1,2 milliard Renforcement des capacités de l’hôpital
Treichville 200 millions Renforcement des capacités du CHU
Djibi village 660 millions Adduction d’eau et projets communautaires
Akouédo Attié 600 millions Projets socio communautaires et centre de santé
Akouédo Ebrié 520 millions Projets socio communautaires.
Au titre des structures d’intérêt national
MACA 100 millions Renforcement des capacités de l’infirmerie
LANADA 1,3 milliard Pour équipement et achat de détecteur analyseur d’air
Zoo 300 millions Pour la réhabilitation
Abobo 2,06 milliards Construction d’un centre de veille sanitaire
Au titre des dommages économiques
Secteur informel : 471. 980.363 FCFA
Secteur formel : 2,8 milliards FCFA Pour 37 entreprises
Au titre des victimes humaines
Aux associations des victimes des déchets : 100 millions FCFA
Aux 101. 313 Victimes ambulatoires : 20,2 milliards de FCFA
Aux 75 victimes hospitalisés : 150 millions FCFA
Aux personnel soignant : 929,4 millions FCFA
Aux ayant droits des décédés : 1,6 milliard
Etat récapitulatif
Etat et ses démembrements : 68.658.000.000 FCFA
Les victimes économiques : 3. 300.00.000 FCFA
Le personnel soignant : 929.400.000 FCFA
Les associations des victimes : 100.000.000 FCFA
Les victimes sanitaires : 22.0120600.000 FCFA
Bakayoko Vamory Ba, ayant-droit de Bakayoko Moussa
“Nous n’avons pas reçu les 100 millions qui nous reviennent de droit”
Bakayoko Vamory Ba est l’ayant-droit légal de Moussa, son frère cadet, décédé à la suite de l’inhalation des déchets toxiques. Depuis 2008, ce dernier affirme n’avait pas encore été indemnisé.
Le Patriote : Vous êtes le frère de Bakayoko Moussa, décédé à la suite du déversement des déchets toxiques. Comment s’est faite la reconnaissance de la cause de son décès ?
Bakayoko Moussa : Comme la plupart des malades, mon frère avait été suivi dans un hôpital où il s’est fait enregistré. Il a eu des boutons sur tout le corps, il toussait beaucoup et il avait les yeux toujours rouges. Ce sont des symptômes qu’il a développés après l’inhalation des déchets toxiques. On a passé tout le temps entre l’hôpital et la maison. Jusqu’à ce qu’il décède. Après son décès, le gouvernent a publié le nom des personnes décédées dans les journaux et le nom de mon petit frère y était.
LP : Quels sont les documents qui vous ont été demandés ensuite ?
BV : Ils ont d’abord demandé un certificat de décès. Après, nous sommes passés à l’audition à la justice. Mais avant l’audition, nous avons eu une concertation en famille. Et la famille a décidé que je suis l’ayant-droit. Il me revenait de suivre le dossier. A la justice, le juge qui a étudié notre dossier s’appelle Ouattara Romain. Nous étions nombreux mais le jour où j’ai été reçu, le juge m’a confié que nous avions le dossier le plus complet. Il m’a aussitôt délivré l’acte d’hérédité. J’avais pris un avocat et c’est ce dernier qui a pris la procédure en main, mais jusqu’à ce jour, ça n’a pas abouti.
LP : Vous n’avez donc pas reçu un centime des cent millions qui vous revient à titre d’indemnisation ?
BV : Je n’ai reçu aucun centime.
LP : Pourquoi ?
BV : Mon avocat qui suivait le dossier venait chaque jour me dire que telle personne demandait tel montant. A tous les niveaux de l’évolution du dossier, les gens demandaient leur part. Mon avocat refusait cette corruption et nous avons décidé de ne pas céder au chantage. Cette indemnisation est de l’argent qui nous revient de droit et nous n’entendons pas concéder des pourcentages à des gens qui oublient que nous avons perdu quelqu’un. Depuis 2007, je me traite moi-même au Xylo-Mepha parce que j’ai les narines toujours bouchées. C’est parce que mon avocat et moi avons refusé la corruption que nous n’avons pas encore reçu notre argent. C’était du marchandage.
LP : Vous avez connaissance des cas similaires au vôtre parmi les bénéficiaires?
BV : J’avoue que chacun suit son dossier. Au tribunal, nous étions nombreux mais on ne se connaît pas vraiment. Donc je ne peux pas parler du cas des autres. Mais en ce qui me concerne, je n’ai pas reçu les cent millions auxquels nous avons droit.
LP : Vous abandonnez ou que comptez-vous faire maintenant?
BV : Nous avons d’abord compté sur les journalistes pour nous défendre mais jusque-là, les journaux dénoncent mais rien ne change. C’est un cri de cœur que je lance aujourd’hui aux nouvelles autorités. Ça fait six ans que les déchets toxiques ont semé la mort à Abidjan. Il y a cinq ans que l’on nous a promis les indemnisations. Comment comprendre que jusque-là nous n’ayons pas reçu l’argent ? Si le gouvernement n’a pas pu empêcher le déversement des déchets à Abidjan, le minimum, c’est de nous remettre sans difficultés ce qui nous revient. Je supplie le président Ouattara de se pencher sur ce dossier en faisant payer aux vrais bénéficiaires leur argent. Il rendrait service à de nombreuses familles qui vivent dans la souffrance et la douleur. Nous regardons les nouvelles autorités et nous attendons de voir si elles nous rendront justice.
Propos recueillis par A. Lebel