x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Société Publié le jeudi 3 mai 2012 | Le Temps

Marcel Anne, (expert en hygiène et environnement), 6 ans après les déchets toxiques : «Il y a toujours des risques de contamination»

Marcel Anne, expert en hygiène et environnement revient sur la toxicité des déchets déversés à Abidjan et les risques réels que court encore la population ivoirienne.

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs et presenter votre Ong ?

Je suis Marcel Anne, Président de l’Ong Anne dont le site est marcel.anne& live.fr. Je suis
professionnel en environnement et en hygiène alimentaire. Nous avons exercé au moins
dans cet univers pendant 25 ans en France où nous avons acquis une somme d’expériences
dans la gestion de certaines affaires qui ont fait grand bruit à l’époque. Citons «l’affaire du
sang contaminé», «l’affaire de la vache folle» etc. Avant de venir en Afrique. Notamment à
Abidjan en 2006, dans la mouvance de la catastrophe de déchets toxiques. A voir les victimes des déchets toxiques et notre expérience de la chose, nous nous sommes rendu compte que les associations des victimes n’avaient pas d’entrées sérieuses. Elles étaient plus en clin à établir des listes de dédommagement dans une stratégie purement mercantile que d’opter pour une véritable opération de dédommagement sanitaire. C’est à partir de là, que nous nous sommes intéressés au dossier parce nous entendions défendre toutes les victimes et les vraies.

Face à la catastrophe, quelles sont vos propositions ?

Il faut préciser qu’au moment du déversement des déchets toxiques, nous n’étions pas à
Abidjan. Mais à la suite des avis et conseils que nous donnions, on a souhaité que nous nous rapprochions de Gohourou de la Coordination nationale des victimes des déchets toxiques.

Tout le monde pensait à l’époque que Gohourou était le leader dans la défense des victimes.
Par la suite, on s’est aperçu que son objectif n’était pas de défendre les victimes, mais il avait une vision purement commerciale. Car, il ne s’y connaissait pas, surtout dans le domaine de la pollution. A lui tout comme à bien d’autres Ong et associations, nous leur avions fait remarquer que s’ils continuaient sur cette voie, ils allaient droit dans le mur. Ainsi, les responsables de ces organisations se sont rendu compte que nous n’avions pas les mêmes objectifs. Au final, nous sommes devenus gênants pour eux. Il fallait plutôt se focaliser sur la dépollution des sites et faire l’inventaire des vraies victimes.

Le régime d’alors a classé cette affaire comme une catastrophe nationale, et a opté pour
un accord à l’amiable avec Trafigura...

L’accord à l’amiable a eu le mérite de faire baisser la tension sociale née du déversement
des déchets hautement toxiques dans le District d’Abidjan. Mais cette solution n’est pas
la solution au problème actuel. Car, la population est intoxiquée. Les déchets toxiques
ramassés n’ont toujours pas été évacués. Ils sont encore stockés là où Tredi les a empilés.
Conséquences, il y a des risques potentiels de contamination des populations. Nous recevons des adhérents dans une situation de santé gravissime. Les populations se demandent ce qui leur arrive. Il faut faire des statistiques pour évaluer effectivement la toxicité de ces déchets.

Et pourtant, il y a une entreprise choisie pour la dépollution des sites ?

Effectivement, mais il faut procéder à une vraie dépollution et il faut avoir une formation
compatible avec ce qui est arrivé. On a fait du cas par cas. Ce que nous allons d’ailleurs
demander dans une procédure que nous allons engager au Tribunal d’Abidjan, c’est la prise
en compte des risques. Ces déchets toxiques sont plus dangereux qu’il y a six ans. Il y a
encore 140 tonnes de déchets toxiques entreposés encore des big bag à Abidjan, précisément à la décharge d’Akouédo. Les lieux qu’on a dépollués n’ont pas fait par la suite, l’objet d’une évaluation, pour voir si l’opération avait réussi. L’autre problème, c’est le manque de personnel médical qualifié pour lutter contre un tel phénomène.

Quelle est votre réaction aux propos d’un confrère qui doute que le déversement des
déchets toxiques ait occasionné des morts à Abidjan ?

Il y a eu énormément de victimes. Ce sont des déchets hautement toxiques, on n’en serait pas là. Par ailleurs, il faut faire beaucoup attention avec les travaux de réhabilitation de voirie et d’ouvrages d’assainissement en cours dans le District d’Abidjan. Etant donné qu’on n’a pas pu à l’époque, eu l’occasion de mesurer l’impact de la pollution dans l’air et l’environnement.

On court de gros risques d’en pâtir sur le long terme. Par le biais d’Amsterdam, il convient
de rappeler que les analyses qui ont été faites en 2006, ont prouvé que ces déchets étaient
hautement toxiques. Donc, il faut faire attention en tenant de tels propos. Notre devoir à nous, c’est d’aider les vraies victimes dans leurs prises en charge sanitaire. Nous avons également appris que des valises d’argent circuleraient sur les bords de la Lagune Ebrié. Je ne crois pas en de telles énormités. Mais bon ! Si c’est vrai qu’on paye les vraies Ong qui se battent pour les vraies victimes. L’auteur ne peut-être que Trafigura, pour certainement calmer le jeu.

(Rire…)

Quel pourrait être votre apport pour dépolluer la baie de Cocody, voire la Lagune Ebrié ?

Notre apport pourrait être sur plusieurs plans à partir de la somme d’expériences
professionnelles acquises dans le domaine. Par ailleurs, nous allons dans ce sens, à travers
notre procédure pendante devant le Tribunal d’Abidjan, préconiser la mise en place d’une
équipe d’experts internationaux devant travailler sur un véritable plan de dépollution du
District d’Abidjan. Ce, après appel d’offres pour retenir des experts sérieux et outillés qui
ne viendront pas faire n’importe quoi. En ce qui concerne l’environnement, au niveau du
District d’Abidjan, il est à préciser que les déchets se sont mélangés à l’air et à l’eau. En tant
qu’expert, nous pouvons affirmer sans nous tromper que la difficulté au niveau d’Abidjan,
c’est l’existence des décharges. On veut faire du développement industriel sur ces décharges.

Certes, mais il ne faudrait pas oublier que les déchets toxiques sont non seulement corrosifs, mais aussi explosifs. La Lagune Ebrié est aussi bien polluée que les villages environnants comme Mbadon qui peuvent recevoir l’émanation de ces gaz toxiques. Il faut donc d’abord traiter l’équation des déchets toxiques.

Réalisée par Bamba Mafoumgbé

bamaf2000@yahoo.fr
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Société

Toutes les vidéos Société à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ