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Art et Culture Publié le mercredi 23 mai 2012 | Le Mandat

Interview / Tiburce Koffi (journaliste et écrivain) : “On ne dira jamais feu Zadi Zaourou / Mes enfants seront scandalisés s’ils apprennent que…”

Tiburce Koffi. Récemment promu Directeur de l’Insaac, ce professeur de Lettres, journaliste écrivain et critique littéraire, n’est plus à présenter au public ivoirien. Fils spirituel de Zadi Zaourou, il nourrit de grands projets après le décès du maître. «Le grand livre de la musique », œuvre à paraître, occupe presque toute sa vie. Il y a mis « toute sa fortune », au point où il ne veut pas le bazarder. C’est un grand défenseur de la littérature ivoirienne qui s’est ouvert à Le Mandat.
Critique littéraire, journaliste écrivain, artiste musicien, en somme homme de culture, on s’étonne de voir tant de qualifications pour un seul homme. Quel est votre secret ?
Il n’y a pas tant de qualifications. Vous vous trompez. Ce que je suis, ce que j’ai fait ou que je fais ne relève pas de l’extraordinaire. Ecoutez : en réalité, on trouve toujours le temps de faire ce qu’on a vraiment envie de faire. Je professe dans les lettres. Quoi de plus normal que quelqu’un qui enseigne les lettres sache et puisse aussi écrire des articles de journal et des livres, et se tailler une stature d’homme de culture ! Si j’avais été dans le même temps un footballeur émérite ou un excellent économiste, ou un cycliste hors paire, là oui, cela aurait relevé du prodige ! Heureusement que ce n’est pas le cas.
Votre père spirituel, Zadi, n’est plus. Mais, sur le plateau du Jt de 20heures , lors de la préparation de l’hommage à lui adressé par l’Insaac, vous avez affirmé que vous ne pourriez jamais parler de lui au passé. Comment l’éternisez-vous ?
En prolongeant son discours artistique et intellectuel dans mes créations. Et puis, il est coutume de dire que les créateurs de sa dimension sont immortels. Victor et Césaire sont immortels ; Jinmy Hendrix et Mozart, de même. On ne dit pas feu Mozart ! Ce serait ridicule. On ne dira pas non plus ‘‘feu Zadi Zaourou’’, ce serait tout aussi ridicule. Il n’est feu qu’à l’Etat civil, mais pas dans la conscience intellectuelle et affective du peuple qui l’a vu naître.
En tant que critique littéraire, quel regard portez-vous sur la littérature en Côte d’Ivoire ?
C’est une littérature en plein essor. Sur le plan de la production, vous constaterez qu’il n’y a pratiquement pas de rupture entre les différentes générations (il y en a trois) qui se sont succédé. Le relais de la génération d’Amon d’Aby, Bernard Dadié, Gadeau, a été parfaitement assuré par celle de Zadi, Kourouma, Ahmadou Koné, Anoma Kanié, Jean-Marie Adiaffi, entre autres. La mienne, qui comprend Maurice Bandaman, Fatou Kéita, Diégou Bailly, Venance Konan, Josette Abondio, Véronique Tadjo, Ernest de St-Sauveur, Régina Yaou, Were Were Liking, Assamala Amoi… joue aussi, et à mon avis, bien son rôle. Une curiosité : cette génération d’écrivains à laquelle j’appartiens a enregistré de nombreux noms de plumes féminines, et pas des moindres. Tadjo par exemple, est Grand prix littéraire d’Afrique noire ; Wêrê Wêrê a obtenu le « Prix Nomma » qui est une référence dans le monde littéraire. Les distinctions obtenues par Fatou Kéita sont tout aussi connues. Même dans le livre de bas de gamme littéraire, la jeune Anzata Ouattara ne s’en laisse pas conter par Biton Koulibaly qui est, quand même, en Côte d’Ivoire, le père de ce type de livres à l’eau de rose. C’est un type de production qui rebute certes les littéraires de race, mais qui a droit à l’existence : il faut élargir au mieux l’audience du livre pour créer des habitudes de lecture chez nous. La quatrième génération d’écrivains ivoiriens se dessine déjà. Elle sera certainement conduite par des plumes comme Henri Nkoumo, Josué Guébo, qui sont des littéraires accomplis et qui nous ont déjà servi des textes dignes d’intérêt aussi bien gnostique qu’esthétique. Je pense sincèrement que cette génération là va rapporter beaucoup de lauriers à la Côte d’Ivoire, grâce à des plumes chargées de promesses comme François Konan-d’Assise, Khéa Zéanh, Clémentine Caumaueth….
Au salon du livre en France, vous disiez que « la présence de la Côte d’Ivoire marquait son grand retour sur la scène internationale en matière d’œuvre littéraire ». Est-ce à dire que la littérature ivoirienne n’avait pas une assise à l’international?
Si. Elle en avait. Dadié, Kourouma, Zadi, Adiaffi ont porté la littérature ivoirienne à des sommets que nous aurons du mal à égaler. Sur le plan international, le rayonnement de ces écrivains ne souffre d’aucun doute. Jean-Marie Adiaffi, surtout lui, était une sorte de star africaine de la littérature ; et son audience internationale était réelle. Ce que j’ai dit au récent Salon du Livre de Paris, je l’ai dit pour souligner l’importance de l’acte posé par le chef de l’Etat, qui n’a pas hésité un seul instant à offrir cet espace d’expression aux écrivains ivoiriens ; une chose inédite en Côte d’Ivoire. Même sous le régime des enseignants, nous n’avons pas vu cela ! La Côte d’Ivoire n’existait pas officiellement à ce Salon, comparée à d’autres pays d’Afrique qui y avaient stand et presse nationale pour la promotion de leurs écrivains.
La lecture n’est pas la tasse de thé des Ivoiriens. Avez-vous des solutions, quand on sait qu’aujourd’hui la bibliothèque nationale est toujours en travaux?
Il faut d’abord préciser que le thé n’est pas non plus la boisson préférée des Ivoiriens ! Cela dit, non, je n’ai pas de solution à la question de la promotion de la lecture. C’est le rôle du ministre de la Culture, des éditeurs et des libraires de penser à cela, mais pas le mien.
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