Chronique/Le blog de Yehni Djidji : Ces brigades des mœurs improvisees

S’il y a une chose sur laquelle bon nombre de personnes s’accordent, c’est la dégradation des mœurs. Et l’un des visages de cette déliquescence, est la mode qui est aux tenues vestimentaires montrant plus de peau qu’elles n’en cachent. Dans les rues d’Abidjan, vos yeux ne sont jamais à l’abri de croiser, un pan de dessous féminin, ou pis, la naissance d’un postérieur, à la faveur d’un mouvement mal contrôlé. Que l’on pointe du doigt les parents qui ont démissionné, les mauvaises fréquentations des enfants, la télévision qui présente des programmes douteux…ou pas, le mal existe bel et bien. Face aux dérives vestimentaires, certains refusent de se limiter à détourner les yeux, ou à formuler une critique en pensée ou en paroles…Ils passent à l’acte. On assiste à une nouvelle forme de « milice » des mœurs dans des quartiers. Des jeunes gens, mènent des campagnes d’humiliation des filles qui se font ambassadrices de tenues indécentes et qui ont le malheur de croiser leur chemin. Bien sûr, la qualification du degré d’indécence de tel ou tel vêtement est laissée à la seule discrétion de ces « brigades des mœurs » auto-proclamées qui prennent un malin plaisir, en plus, à filmer leurs exploits et à les publier sur Internet. A Adjamé, une jeune femme voyait sa robe, jugée trop courte par ce tribunal de rue, soulevée par une horde de moralisateurs, déchaînés, alors que quelques femmes, au milieu de la cohue générale, tentaient de la couvrir d’un pagne. Bousculée, malmenée, frappée, tripotée par des hommes, pour une tenue dite impudique. Mais en toute franchise, combien parmi eux n’avaient pas des caleçons dits américains exposés. Combien parmi eux n’hésitent pas à uriner à chaque coin de rue, quand l’envie se fait sentir ? Encore une fois, ils ont oublié de retirer la poutre de leurs yeux, avant d’enlever la paille dans ceux de la jeune fille. Et c’est dommage. A ma connaissance, aucun homme n’a fait les frais de cette opération de sensibilisation violente et musclée, jusqu’à présent. Sans vouloir verser dans un débat d’égalité des sexes, si leur théorie stipulant que « en humiliant plusieurs filles comme ça, nos sœurs vont bien s’habiller maintenant », est efficace, pourquoi ne pas étendre la campagne à la gente masculine ? Sinon, on finira par croire qu’on ne reproche pas aux femmes le fait de ne pas respecter leur corps, mais plutôt celui d’éveiller des pulsions honteuses, que les hommes essaient de refouler, alors qu’elles n’ont pas suffisamment de force physique pour se défendre. Si chacun doit se mettre à faire la chasse à la nudité et à l’indécence, en se basant sur les critères connus de lui seul, nous ne sommes pas sortis de l’auberge. Les organes usités doivent rapidement sévir et mettre fin à ce genre d’agissement avant qu’on entende « en violant plusieurs filles comme ça, nos sœurs vont bien s’habiller maintenant ».
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