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Société Publié le samedi 13 octobre 2012 | Le Mandat

Hommage : Taïfour, un journaliste émérite célébré par ses Amis

“Vivre Kaba’’. C’est le slogan-prétexte que les amis de l’inimitable journaliste et intellectuel, Kaba Taïfour, ont choisi pour noyer leur tristesse après sa disparition, le 30 août dernier. Mais surtout, pour tenter de cerner l’homme sous ses multiples dimensions. Cet hommage posthume aux allures de colloque s’est tenu le jeudi 4 octobre dernier, à l’Université Charles Louis de Montesquieu, à Cocody-Mermoz. Une initiative du confrère Clovis Sewa, en collaboration avec la famille et cette université fondée par le Pr Urbain Amoa. L’unanimité spontanée qui s’est faite autour de ce projet a permis une variété extraordinaire de témoignages. Hommes de culture, parents, amis, journalistes et admirateurs se sont joints aux Amis de Kaba (Mamadou Berté, Tony Adiatou, Baba Coul, Agnès Kraidy, Marie Mactar Niang, Gbané Bakary, Amoa Urbain, Tiburce Koffi, Diakité Aboubakary et Clovis Sewa) pour revisiter celui qui a marqué la Radio Côte d’Ivoire par sa maitrise de la langue française, la densité de ses réflexions et son sens profond du métier de journaliste. C’est à juste titre que l’Université a dévoilé une salle multimédia baptisée Kaba Taïfour. «Un génie tourmenté et inconnu, journaliste éclectique, champion de la rhétorique, homme de Lettres inclassable… ». Toute une énigme, un concentré cérébral dont les clés se perdent dans les méandres d’un destin hors pair. Pour aller justement à sa conquête, quatre thèmes ont été soumis à de fins connaisseurs de quelques parcelles de la chose Kaba dans le cadre d’un panel suivi de témoignages. Tour à tour, sur interpellation de Agnès Kraidy, modérateur du jour, Mamadou Berté, ancien Directeur de Radio Côte d’Ivoire, a évoqué le collaborateur, l’ami et le frère. Eugène Dié Kacou a retrouvé et raconté l’ami de promotion et le collègue. Tiburce Koffi, écrivain et Dg de l’INSAAC a tenté de décrire le personnage que cache ‘‘l’énigme d’une solitude publique’’. Le quatrième orateur, l’Iman Cissé Djiguiba, Recteur de la mosquée du Plateau et Directeur de Radio Al Bayanne, son frère en Islam et confident, a fait découvrir l’homme de spiritualité auquel il s’est frotté des années durant.

Trait commun aux quatre panelistes

Ils ont une histoire particulière avec Kaba. La preuve, lorsque Kaba et l’Imam se rencontraient, ils s’appelaient mutuellement ‘‘Ombre’’. Avec Eugène Kacou, Kaba donnait dans une dérision de collégien en lançant, ‘‘mon papa’’, allusion à une affaire de travaux pratiques à l’école de journalisme. Et l’autre de rétorquer : «Kaba, t’es fou ». Tiburce est appelé Turbulence par Kaba. Sobriquet tout mérité, puisque le concerné le prend à la rigolade en répondant «Ombre ou Kaba». Dans son témoignage, Mamadou Berté a été sincère avec l’ami, disant tout, déplorant surtout son penchant pour l’alcool. L’on a compris alors que leurs relations étaient fondées sur une profonde amitié, marquée par le respect des choix philosophiques. Le témoin de mariage de Kaba, quoique très déçu de son divorce, ne le juge pas. Il soutient simplement que l’homme est un incompris insuffisamment soutenu. En tant que supérieur hiérarchique, il dit de lui qu’il était fait pour la radio. Doté d’une mémoire phénoménale, il avait un don exceptionnel pour la radio et en abusait presque, tellement cela lui réussissait, affirme Mamadou Berté. Que de regrets, en effet, lorsque son ex-directeur évoque «un destin contrarié et un génie tourmenté». Pour Eugène Kacou, c’est l’intelligence et le sens du métier qui font Kaba Taïfour. C’est en 1968 qu’ils effectuent, ensemble avec Ahmed Touré, leur formation. Et déjà, Kaba marque la différence en décrochant plus de 15 de moyenne à l’examen de sortie du Studio Ecole de la RTI. Quand il revient du CESTI de Dakar, il s’impose comme un journaliste polyvalent, allant jusqu’à faire d’excellents reportages sportifs, lors de la Coupe d’Afrique des nations en 1974, en Egypte. L’ami d’Eugène Kacou était un homme libre, passionné de voyages et de littérature, qui voulait un jour se rendre à Dakar pour aller frimer avec 404. Expédition qui a été freinée net au Mali par un accident. Un amour de 404, puisque Kaba appelait ce véhicule ‘‘Akissi’’ dans lequel il montait et duquel il sortait par le toit ouvrant. L’ami des belles Lettres a fait une rencontre essentielle en 1983, par l’intermédiaire de Bernard Zadi Zaourou. Turbulence, nom qu’il donne à Tiburce Koffi. Que de partages entre intellos! Nuits d’alcool, de tabac, les paradis artificiels qui aident à visiter des territoires imaginaires interdits au sens de l’homme ordinaire et passable. Tiburce Koffi ne sait par quel bout aborder son compagnon. Il décide de présenter ‘‘l’énigme d’une solitude publique’’. Son sosie est un platonicien par son vécu et son style littéraire. Kaba disait un jour à Turbulence : « l’habitude de fréquenter un grand homme ne nous permet pas de mesurer le privilège que nous avons de le côtoyer». Kaba admirait Zadi Zaourou, Amédée Pierre, Désiré Tanoe, Memel Foté. Tiburce lui même dit de ‘‘Ombre’’ qu’il appartient à la race de ces mêmes hommes, celle des penseurs précieux et profonds.

«C’était un savant»

L’imam Cissé Djiguiba, qui avoue sa jalousie à l’égard de Tiburce Koffi, ne comprend pas une chose. «Ombre était toujours avec moi. Pourtant il était presque toujours aussi avec Tiburce Koffi. Je me demande comment il faisait? Il était toujours disponible pour la religion et pour moi. Il n’hésitait pas à prendre son propre véhicule et payer le carburant, pour que nous allions réaliser des émissions à l’intérieur du pays. J’ai beaucoup appris de lui. Au point où il s’intriguait de mon silence. Je lui réponds que j’apprends beaucoup à ses côtés, c’est pourquoi je ne parle pas. Il m’a enseigné la tenue du micro et la présentation radiophonique. C’est un homme de foi qui avait une prodigieuse connaissance de la religion». Avec une amertume mal contenue, l’Imam Cissé Djiguiba conclut que le savant est parti avec sa science. D’autres vérités sur Kaba viendront d’Ali Diaby, son oncle maternel, Ahmed Touré, son directeur des Programmes d’alors, d’Emmanuel Koffi, son collègue, de Fofana Dole, Conseiller au Ministère de l’Economie et des Finances, son frère de case et témoin de son 2ème mariage, de Seydou Coulibaly, DP du quotidien Le Jour Plus, où il animait une chronique, d’Edwige Domoraud, une admiratrice… L’animation de cette rencontre culturelle a été offerte par l’INSAAC, qui se souvient que Kaka était un amoureux des planches et de la musique. Fort logiquement, les experts de cette institution ont célébré l’homme avec un orchestre de chambre et une mini pièce de théâtre. C’est Claude Tamo qui a conclu cette improvisation collective, en imitant son frère Kaba dans une interview d’Eric Cossa et Patrick Bouyé. Kaba survivra vraiment à Kaba.

Euphrate DJAKO
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