Entretien avec Albert C. Diadhiou, directeur général de Novel Côte d’Ivoire, filiale de Novel Group SA, groupe à vocation africaine basé à Genève. A l’entame de la campagne 2012-2013, cet exportateur qui exerce depuis 2008 nous donne ses éclaircissements sur la nouvelle réforme du café-cacao en Côte d’Ivoire.
La campagne 2012-2013 vient d’être lancée et le prix minimum garanti est fixé à 725 francs CFA/kg. En contrepartie, l’Etat exige une certaine qualité. Est-ce que cela ne constitue pas un blocage pour les producteurs ivoiriens ?
Le prix minimum garanti – ou prix bord champ fixé – est la valeur marchande du cacao garantie par l’Etat tout le long de la campagne. Et aucun acheteur n’a le droit de payer le cacao ivoirien en dessous des 725 FCFA le kilogramme. Ceci est valable pour le cacao marchand. Il y a bien sûr un corollaire. C’est que le producteur doit respecter les normes de qualité requises par les autorités. L’acheteur ou, le cas échéant, l’exportateur, est tenu de refouler le cacao. En réalité, ce qui est demandé par les autorités ivoiriennes, ce sont des choses faisables. Cela répond aux bonnes pratiques culturales et de récoltes bien connues dans le domaine du cacao. L’Etat n’exige rien d’impossible ! Toutefois, il convient de relever que certains producteurs ne maîtrisent pas les techniques agricoles. L’Etat doit alors intervenir, avec le concours de certains exportateurs s’il le faut. Cela peut s’inscrire par exemple dans le cadre d’un projet qualité qui prévoit généralement le renforcement des capacités des producteurs afin qu’ils acquièrent les compétences nécessaires. Techniquement, il est possible d’avoir du cacao brousse à moins de 9% de taux d’humidité, bien fermenté, bien propre et bien trié. Dans le cas contraire, il est prévu que le cacao qui ne respecterait pas les exigences soit cédé aux usines locales de broyage. Il est probable que tout le cacao ivoirien ne respecte pas les normes à l’exportation. Des dispositions ont été prises par les pouvoirs publics pour y faire face.
Aujourd’hui il est question de vendre le cacao ivoirien à terme. Pouvez-vous nous expliquer ce que cela signifie ? Quels en sont les avantages pour les producteurs, les exportateurs et l’Etat lui-même ?
C’est le mécanisme que l’Etat a choisi pour atteindre son objectif de prix minimum garanti. Le cacao fait l’objet de beaucoup de fluctuations de prix sur le marché international. Si vous voulez garantir un prix aux producteurs, il faut avoir préalablement obtenu un prix moyen de vente pour le cacao qui va être récolté. L’Etat ivoirien a donc choisi les ventes anticipées à la moyenne comme outil pour garantir le prix aux producteurs. Ces ventes ont démarré le mardi 31 janvier 2012 et ont porté sur 70% à 80% de la récolte estimée pour cette campagne 2012/2013. Avec le prix moyen de toutes ces ventes, l’Etat a pu fixer le prix minimum garanti à 725 FCFA le kilogramme. Et l’Etat peut effectivement garantir les prix parce les contrats de vente ont été préalablement établis avec les différents opérateurs de la filière, tant locaux qu’internationaux.
Aujourd’hui, lorsqu’on parle du prix minimum garanti, c’est que ce prix est connu et vraiment garanti ! L’un des avantages de ce système est de donner un maximum de visibilité aux producteurs sur leurs revenus escomptés. Autrement, ils seraient livrés aux fluctuations des prix sur le marché mondial, ce qui peut provoquer une certaine précarité. Ils ont maintenant la possibilité de faire leur calcul pour voir ce qu’ils vont exactement gagner en termes financiers. Pour les exportateurs, c’est un schéma qui va permettre d’assainir le secteur et prévenir certains risques indirects liés à la fluctuation des prix sur le marché international, qui affecte leurs coopératives partenaires et leurs traitants.
Quant aux autres acteurs, à savoir les producteurs (le maillon le plus faible de la chaîne), les coopératives et les traitants, ils n’avaient aucun moyen de se protéger et étaient à la merci des chocs provoqués par la fluctuation des prix sur le marché international. Ce qui est récurrent et qui occasionnait beaucoup de pertes chaque année pour l’ensemble de la filière. Nous, les exportateurs, subissons également cela parce que nous préfinançons les campagnes café-cacao. Les ventes par anticipation permettent de réduire les risques financiers liés aux fluctuations des cours sur le marché boursier. Par ailleurs, les banquiers qui injectent beaucoup d’argent dans les campagnes café-cacao bénéficient, in fine, de cette réduction de risques. Quant à l’Etat ivoirien, il pourra espérer une meilleure valorisation du cacao ivoirien sur le marché international, et donc une amélioration de ses revenus. Visiblement, tout le monde y gagne !
Est-ce que le mécanisme de vente à terme ne comporte pas aussi des risques ?
C’est un schéma différent de celui de la libéralisation. Et on verra les conséquences dans la pratique. Je pense que c’est un système qui a déjà fait ses preuves par le passé. La Côte d’Ivoire peut alors bâtir sa politique de relance de la cacao-culture et de la café-culture sur la base des ventes par anticipation.
Propos recueillis par Jean-Jacques Amond
La campagne 2012-2013 vient d’être lancée et le prix minimum garanti est fixé à 725 francs CFA/kg. En contrepartie, l’Etat exige une certaine qualité. Est-ce que cela ne constitue pas un blocage pour les producteurs ivoiriens ?
Le prix minimum garanti – ou prix bord champ fixé – est la valeur marchande du cacao garantie par l’Etat tout le long de la campagne. Et aucun acheteur n’a le droit de payer le cacao ivoirien en dessous des 725 FCFA le kilogramme. Ceci est valable pour le cacao marchand. Il y a bien sûr un corollaire. C’est que le producteur doit respecter les normes de qualité requises par les autorités. L’acheteur ou, le cas échéant, l’exportateur, est tenu de refouler le cacao. En réalité, ce qui est demandé par les autorités ivoiriennes, ce sont des choses faisables. Cela répond aux bonnes pratiques culturales et de récoltes bien connues dans le domaine du cacao. L’Etat n’exige rien d’impossible ! Toutefois, il convient de relever que certains producteurs ne maîtrisent pas les techniques agricoles. L’Etat doit alors intervenir, avec le concours de certains exportateurs s’il le faut. Cela peut s’inscrire par exemple dans le cadre d’un projet qualité qui prévoit généralement le renforcement des capacités des producteurs afin qu’ils acquièrent les compétences nécessaires. Techniquement, il est possible d’avoir du cacao brousse à moins de 9% de taux d’humidité, bien fermenté, bien propre et bien trié. Dans le cas contraire, il est prévu que le cacao qui ne respecterait pas les exigences soit cédé aux usines locales de broyage. Il est probable que tout le cacao ivoirien ne respecte pas les normes à l’exportation. Des dispositions ont été prises par les pouvoirs publics pour y faire face.
Aujourd’hui il est question de vendre le cacao ivoirien à terme. Pouvez-vous nous expliquer ce que cela signifie ? Quels en sont les avantages pour les producteurs, les exportateurs et l’Etat lui-même ?
C’est le mécanisme que l’Etat a choisi pour atteindre son objectif de prix minimum garanti. Le cacao fait l’objet de beaucoup de fluctuations de prix sur le marché international. Si vous voulez garantir un prix aux producteurs, il faut avoir préalablement obtenu un prix moyen de vente pour le cacao qui va être récolté. L’Etat ivoirien a donc choisi les ventes anticipées à la moyenne comme outil pour garantir le prix aux producteurs. Ces ventes ont démarré le mardi 31 janvier 2012 et ont porté sur 70% à 80% de la récolte estimée pour cette campagne 2012/2013. Avec le prix moyen de toutes ces ventes, l’Etat a pu fixer le prix minimum garanti à 725 FCFA le kilogramme. Et l’Etat peut effectivement garantir les prix parce les contrats de vente ont été préalablement établis avec les différents opérateurs de la filière, tant locaux qu’internationaux.
Aujourd’hui, lorsqu’on parle du prix minimum garanti, c’est que ce prix est connu et vraiment garanti ! L’un des avantages de ce système est de donner un maximum de visibilité aux producteurs sur leurs revenus escomptés. Autrement, ils seraient livrés aux fluctuations des prix sur le marché mondial, ce qui peut provoquer une certaine précarité. Ils ont maintenant la possibilité de faire leur calcul pour voir ce qu’ils vont exactement gagner en termes financiers. Pour les exportateurs, c’est un schéma qui va permettre d’assainir le secteur et prévenir certains risques indirects liés à la fluctuation des prix sur le marché international, qui affecte leurs coopératives partenaires et leurs traitants.
Quant aux autres acteurs, à savoir les producteurs (le maillon le plus faible de la chaîne), les coopératives et les traitants, ils n’avaient aucun moyen de se protéger et étaient à la merci des chocs provoqués par la fluctuation des prix sur le marché international. Ce qui est récurrent et qui occasionnait beaucoup de pertes chaque année pour l’ensemble de la filière. Nous, les exportateurs, subissons également cela parce que nous préfinançons les campagnes café-cacao. Les ventes par anticipation permettent de réduire les risques financiers liés aux fluctuations des cours sur le marché boursier. Par ailleurs, les banquiers qui injectent beaucoup d’argent dans les campagnes café-cacao bénéficient, in fine, de cette réduction de risques. Quant à l’Etat ivoirien, il pourra espérer une meilleure valorisation du cacao ivoirien sur le marché international, et donc une amélioration de ses revenus. Visiblement, tout le monde y gagne !
Est-ce que le mécanisme de vente à terme ne comporte pas aussi des risques ?
C’est un schéma différent de celui de la libéralisation. Et on verra les conséquences dans la pratique. Je pense que c’est un système qui a déjà fait ses preuves par le passé. La Côte d’Ivoire peut alors bâtir sa politique de relance de la cacao-culture et de la café-culture sur la base des ventes par anticipation.
Propos recueillis par Jean-Jacques Amond