Invité spécial de la 14ème édition de la soirée des Ebony, Christophe Boisbouvier, journaliste et spécialiste de l’Afrique Noire sur RFI (Radio France Internationale) a accepté sans coup férir de se prêter à nos questions.
Comment êtes-vous arrivé au métier de journaliste, vous qui êtes diplômé de Sciences politiques ?
J’ai fait des études de Sciences politiques à Paris et de journalisme aussi à Paris. Puis, j’ai commencé dans les télévisions et radios locales. Après, je suis entré à RFI (Radio France Internationale) où j’y suis toujours. Oui ! J’aime ce métier. J’ai toujours eu envie de faire ce métier. J’ai la chance de faire un métier que j’aime.
Christophe Boisbouvier est le journaliste ami des chefs d’Etat, surtout des chefs d’Etat africains, comment avez-vous bâti cela ?
Non ! Je ne suis pas l’ami des chefs d’Etat. Je suis une personne que les chefs d’Etat acceptent de rencontrer pour répondre à des interviews. C’est une relation tout à fait professionnelle et logique. J’ai la chance d’avoir la confiance de mes rédacteurs en chef et de ma présidente de RFI, Mme Marie-Christine Saragosse qui me donnent l’occasion de faire une émission qu’on appelle ‘’Invité Afrique’’ au cours de laquelle j’invite des acteurs de la vie africaine. Ceux-là peuvent être des chefs d’Etat, mais pas seulement. J’ai beaucoup de plaisir à recevoir un chef d’entreprise, un banquier, un avocat, des universitaires, une créatrice, une défenseuse des droits de l’Homme, un footballeur… Ce qui m’intéresse, c’est de rencontrer les acteurs de l’actualité pas seulement de l’actualité politique, même si c’est la politique qui prend le dessus à cause des évènements. Tout ce monde me permet de mieux comprendre l’actualité.
Est-ce qu’il n’y a pas des retombées financières à la suite de ces interviews avec les hommes politiques africains ?
Vous faites allusion à ce qu’on appelle le ‘’gombo’’ ou le perdiem à Abidjan ou encore le ‘’coupage’’ à Kinshasa. Evidemment non ! Je sais qu’il y a cette pratique assez partagée dans quelques pays d’Afrique qui consiste, quand on est journaliste intervieweur, à se faire payer par la personne qu’on interroge. Je suis tout à fait hostile à cette pratique. Cela fausse évidement toute l’interview. Parce que vous (le journaliste intervieweur ainsi que la personne interviewée) n’êtes plus dans une relation d’égale à égale. On n’est plus dans une relation de respect mutuel entre la personne interviewée et vous-mêmes (journaliste intervieweur). Vous êtes dans une relation de servitude. Si vous êtes payés par la personne que vous interviewez, vous êtes obligés d’être complaisant avec elle.
On vous a assez vu actif dans le développement de la crise post- électorale ivoirienne. Et pourtant vous n’étiez pas présent en Côte d’Ivoire. Est-ce cela faire du journalisme ? Être loin des faits… ?
La question que vous poser ne me concerne pas directement. C’est cette interrogation ou cette préoccupation qui concerne RFI dans son principe. RFI est une radio française basée à Paris (à la maison de la Radio) et demain probablement dans un nouveau bâtiment à côté de Paris à Issy-les-Moulineaux. C’est une radio essentiellement africaine. C’est aussi une radio mondiale. Elle s’adresse aux auditeurs du monde entier qui parle français ou une dizaine d’autres langues. Nous émettons en arabe, en chinois, en vietnamien, en swahili et en haoussa. RFI se veut une radio qui porte un message et certaines valeurs françaises à travers le monde. Notamment la démocratie, les droits de l’Homme et la culture française en général. Vous avez raison, RFI est située en France et pas en Afrique. On n’est pas sur le terrain en permanence. Les 2/3 de nos auditeurs sont en Afrique. Nous accordons donc une place importante à l’Afrique sur les antennes de RFI. On fait des efforts particuliers sur l’actualité africaine. On a un certain nombre de bureaux en Afrique dont un à Abidjan qui est tenu par Stanislas Deyishimy. Les autres sont à Dakar (Sénégal), Kinshasa (RDC) et à Johannesburg (Afrique du Sud). On n’essaie d’être sur le terrain grâce à ces bureaux. Mais aussi par le biais de notre réseau de correspondants. Trente (30) correspondants qui sont répartis à travers le continent africain. Sans oublier les envoyés spéciaux. Par exemple, pendant la bataille de Goma dans l’Est du Congo, on avait deux envoyés spéciaux sur la zone. On a la chance d’avoir un budget RFI qui permet d’envoyer un certain nombre de reporteurs sur le terrain et d’offrir à nos auditeurs africains à la fois une vision de ce qui se passe en Afrique, et aussi une vision sur ce qui se passe dans le monde. Enfin, il y a l’interactivité. Il y a par exemple l’émission de Juan Gomes intitulée ‘’Appels sur l’actualité’’ et qui permet aux auditeurs de s’exprimer sur l’actualité et qui nous permet en même temps quand on est à Paris de comprendre l’appréciation des Africains sur tel ou tel événement. C’est vrai qu’on n’est pas toujours sur le terrain, mais il y a une certaine proximité qui demeure.
Pourquoi avez-vous accepté d’être présent à la 14ème édition de la soirée des Ebony ?
Je suis venu à l’invitation de l’UNJCI (Union des journalistes de Côte d’Ivoire). Je suis venu pour saluer les confrères et les consœurs journalistes ivoiriens qui ont travaillé dans des conditions difficiles ces douze dernières années et qui sont en train de bâtir une presse forte. Je suis donc venu par solidarité et confraternité.
Comment votre arrivée en Côte d’Ivoire a-t-elle été possible ?
Quand j’ai été invité par l’UNJCI, j’en ai fait part à ma direction, c’est-à-dire à Mme Saragosse, directrice de RFI, qui m’a demandé qu’est-ce qui était l’UNJCI ? Est-ce que c’est une organisation représentative de la presse ivoirienne ? Je me suis informé bien entendu. J’ai vu que c’était une association pluraliste dans laquelle se retrouvait des journalistes de différents courants de pensées et que c’était une association qui défendait la liberté d’expression et la liberté d’informer. C’est cela qui m’a convaincu de venir et qui m’a aussi permis de convaincre ma directrice de RFI, Marie-Christine Saragosse. Elle s’est d’ailleurs associée à ma démarche. Puisqu’elle m’a remis deux cadeaux pour les deux Ebony au nom de RFI.
Comment avez-vous trouvé la soirée ?
Très réussie ! La forme de la soirée était bonne parce qu’il y avait une alternance de discours et de musique. Sur le fond, ce que j’ai apprécié, c’est ce qu’a dit le président du jury, le professeur Antoine Kacou, qui visiblement est une personne très rigoureuse dans sa démarche. Il a expliqué pourquoi sur les trois prix, il y en avait un qu’il ne pouvait pas remettre faute de candidat de qualités suffisantes. J’ai trouvé que c’était un gage de sérieux et de rigueur. Et que cela prouvait qu’on ne donne pas le prix Ebony à n’importe qui et qu’il fallait le mériter. Ce qu’il a dit sur le prix manqué, mettait en valeur les autres prix qui ont été décernés aux deux collègues.
Quelles propositions pouvez-vous apporter pour l’amélioration de l’organisation de la soirée des Ebony ?
Une seule remarque. Le prix Ebony récompense des journalistes qui écrivent ou qui parlent. Je pense que le prix Ebony pourrait aussi récompenser des journalistes qui filment ou qui prennent des photos. Parce que ce sont aussi des journalistes. Parce qu’une photo et une belle vidéo sont aussi des instruments journalistiques. Parce qu’en temps de guerre, les collègues photoreporters et cameramen prennent plus de risques que les autres. J’ai beaucoup d’admiration pour eux.
Quel rôle peut jouer la libéralisation de l’espace audio-visuel dans le processus de démocratisation de la Côte d’Ivoire ?
Une place importante ! Dans tout pays, un gouvernement qui fait l’effort de libéraliser sa Radio et sa Télé, c’est un gouvernement qui répond au défi de la démocratie. Il montre qu’il n’a pas peur de la parole libre. Chacun sait que la radio et la télé touchent un public beaucoup plus important que la presse écrite. En Afrique, il y a des pays qui libéralisent la presse écrite mais qui ne libéralisent pas la Radio et la Télé à cause de leur impact plus fort sur le public. La libéralisation de l’espace audiovisuel est une étape très importante de la vie d’un pays. Je crois que c’est un vrai chantier pour le gouvernement ivoirien pour les deux (2) ans qui viennent.
Quel commentaire pouvez-vous faire de la liberté de la presse en Côte d’Ivoire ?
Je dirai qu’il y a eu depuis la fin de la crise postélectorale de grandes avancées. Les journalistes ne courent plus le risque d’être arrêtés ou plus grave d’être tués. J’ai une pensée particulière pour mon collègue de RFI, Jean-Hélène qui a été assassiné en octobre 2003. J’ai aussi une autre pensée pour mon autre collègue Franco-canadien, Guy André- Kieffer qui a disparu en avril 2004. Il y a une vraie dynamique. On sent que la presse se développe que ce soit la presse écrite malgré toutes les difficultés économiques qu’elles rencontrent. La presse Radio et la presse Télé sont un vrai espoir. Il y a encore des crispations. J’ai vu que quelques journaux ont été suspendus en août dernier. Est-ce que l’article qui était mis en cause justifiait la suspension ? Je ne crois pas. Il y a quelques fois des excès dans les écrits dans certains journaux. Quelques fois aussi, il peut y avoir des excès dans la répression de ces écrits. Il y a un apprentissage de la liberté d’expression qui prend du temps mais qui pourrait être surmontée notamment grâce à l’UNJCI. Je demande à cette union et à son président Moussa Traoré qu’ils se battent pour que les journalistes ivoiriens soient plus rigoureux dans leur travail et qu’ils soient plus respectés par les autorités des organes de régulation de la presse.
Pensez-vous que les sanctions à répétition provenant des organes de régulation peuvent freiner les ardeurs des journalistes dans leur volonté…
Je pense que c’est une question de respect mutuel. Comme le disait la vice-présidente de l’Assemblée nationale le vendredi 7 dernier, lors de la soirée des Ebony : « Un journaliste est maître de sa plume et n’accepte pas la tutelle ». C’est tout à fait juste. S’il est maître de sa plume, c’est qu’il la maîtrise et qu’il ne tombe pas dans l’excès. C’est-à-dire aussi que les autorités de contrôle respectent sa plume. Je crois que l’objectif comme le disait la ministre de Communication, c’est que la future presse en Côte d’Ivoire soit forte et indépendante. C’est à la fois nécessaire pour sa crédibilité à la presse et pour la démocratie ivoirienne.
Votre message à l’endroit des journalistes ivoiriens ?
Je suis solidaire de tout ce que font mes collègues ivoiriens dans leur combat quotidien pour la liberté d’expression, et pour gagner chaque jour davantage un peu plus de liberté d’expression. Un seul conseil : quand un journaliste subit des pressions que ce soient politiques ou économiques ou encore des pressions qui menacent sa liberté physique et de travailler, ce qui compte c’est la solidarité entre les journalistes. Parce que si l’un a des problèmes aujourd’hui, demain ça peut être un autre.
Réalisé par Patrick Krou
Comment êtes-vous arrivé au métier de journaliste, vous qui êtes diplômé de Sciences politiques ?
J’ai fait des études de Sciences politiques à Paris et de journalisme aussi à Paris. Puis, j’ai commencé dans les télévisions et radios locales. Après, je suis entré à RFI (Radio France Internationale) où j’y suis toujours. Oui ! J’aime ce métier. J’ai toujours eu envie de faire ce métier. J’ai la chance de faire un métier que j’aime.
Christophe Boisbouvier est le journaliste ami des chefs d’Etat, surtout des chefs d’Etat africains, comment avez-vous bâti cela ?
Non ! Je ne suis pas l’ami des chefs d’Etat. Je suis une personne que les chefs d’Etat acceptent de rencontrer pour répondre à des interviews. C’est une relation tout à fait professionnelle et logique. J’ai la chance d’avoir la confiance de mes rédacteurs en chef et de ma présidente de RFI, Mme Marie-Christine Saragosse qui me donnent l’occasion de faire une émission qu’on appelle ‘’Invité Afrique’’ au cours de laquelle j’invite des acteurs de la vie africaine. Ceux-là peuvent être des chefs d’Etat, mais pas seulement. J’ai beaucoup de plaisir à recevoir un chef d’entreprise, un banquier, un avocat, des universitaires, une créatrice, une défenseuse des droits de l’Homme, un footballeur… Ce qui m’intéresse, c’est de rencontrer les acteurs de l’actualité pas seulement de l’actualité politique, même si c’est la politique qui prend le dessus à cause des évènements. Tout ce monde me permet de mieux comprendre l’actualité.
Est-ce qu’il n’y a pas des retombées financières à la suite de ces interviews avec les hommes politiques africains ?
Vous faites allusion à ce qu’on appelle le ‘’gombo’’ ou le perdiem à Abidjan ou encore le ‘’coupage’’ à Kinshasa. Evidemment non ! Je sais qu’il y a cette pratique assez partagée dans quelques pays d’Afrique qui consiste, quand on est journaliste intervieweur, à se faire payer par la personne qu’on interroge. Je suis tout à fait hostile à cette pratique. Cela fausse évidement toute l’interview. Parce que vous (le journaliste intervieweur ainsi que la personne interviewée) n’êtes plus dans une relation d’égale à égale. On n’est plus dans une relation de respect mutuel entre la personne interviewée et vous-mêmes (journaliste intervieweur). Vous êtes dans une relation de servitude. Si vous êtes payés par la personne que vous interviewez, vous êtes obligés d’être complaisant avec elle.
On vous a assez vu actif dans le développement de la crise post- électorale ivoirienne. Et pourtant vous n’étiez pas présent en Côte d’Ivoire. Est-ce cela faire du journalisme ? Être loin des faits… ?
La question que vous poser ne me concerne pas directement. C’est cette interrogation ou cette préoccupation qui concerne RFI dans son principe. RFI est une radio française basée à Paris (à la maison de la Radio) et demain probablement dans un nouveau bâtiment à côté de Paris à Issy-les-Moulineaux. C’est une radio essentiellement africaine. C’est aussi une radio mondiale. Elle s’adresse aux auditeurs du monde entier qui parle français ou une dizaine d’autres langues. Nous émettons en arabe, en chinois, en vietnamien, en swahili et en haoussa. RFI se veut une radio qui porte un message et certaines valeurs françaises à travers le monde. Notamment la démocratie, les droits de l’Homme et la culture française en général. Vous avez raison, RFI est située en France et pas en Afrique. On n’est pas sur le terrain en permanence. Les 2/3 de nos auditeurs sont en Afrique. Nous accordons donc une place importante à l’Afrique sur les antennes de RFI. On fait des efforts particuliers sur l’actualité africaine. On a un certain nombre de bureaux en Afrique dont un à Abidjan qui est tenu par Stanislas Deyishimy. Les autres sont à Dakar (Sénégal), Kinshasa (RDC) et à Johannesburg (Afrique du Sud). On n’essaie d’être sur le terrain grâce à ces bureaux. Mais aussi par le biais de notre réseau de correspondants. Trente (30) correspondants qui sont répartis à travers le continent africain. Sans oublier les envoyés spéciaux. Par exemple, pendant la bataille de Goma dans l’Est du Congo, on avait deux envoyés spéciaux sur la zone. On a la chance d’avoir un budget RFI qui permet d’envoyer un certain nombre de reporteurs sur le terrain et d’offrir à nos auditeurs africains à la fois une vision de ce qui se passe en Afrique, et aussi une vision sur ce qui se passe dans le monde. Enfin, il y a l’interactivité. Il y a par exemple l’émission de Juan Gomes intitulée ‘’Appels sur l’actualité’’ et qui permet aux auditeurs de s’exprimer sur l’actualité et qui nous permet en même temps quand on est à Paris de comprendre l’appréciation des Africains sur tel ou tel événement. C’est vrai qu’on n’est pas toujours sur le terrain, mais il y a une certaine proximité qui demeure.
Pourquoi avez-vous accepté d’être présent à la 14ème édition de la soirée des Ebony ?
Je suis venu à l’invitation de l’UNJCI (Union des journalistes de Côte d’Ivoire). Je suis venu pour saluer les confrères et les consœurs journalistes ivoiriens qui ont travaillé dans des conditions difficiles ces douze dernières années et qui sont en train de bâtir une presse forte. Je suis donc venu par solidarité et confraternité.
Comment votre arrivée en Côte d’Ivoire a-t-elle été possible ?
Quand j’ai été invité par l’UNJCI, j’en ai fait part à ma direction, c’est-à-dire à Mme Saragosse, directrice de RFI, qui m’a demandé qu’est-ce qui était l’UNJCI ? Est-ce que c’est une organisation représentative de la presse ivoirienne ? Je me suis informé bien entendu. J’ai vu que c’était une association pluraliste dans laquelle se retrouvait des journalistes de différents courants de pensées et que c’était une association qui défendait la liberté d’expression et la liberté d’informer. C’est cela qui m’a convaincu de venir et qui m’a aussi permis de convaincre ma directrice de RFI, Marie-Christine Saragosse. Elle s’est d’ailleurs associée à ma démarche. Puisqu’elle m’a remis deux cadeaux pour les deux Ebony au nom de RFI.
Comment avez-vous trouvé la soirée ?
Très réussie ! La forme de la soirée était bonne parce qu’il y avait une alternance de discours et de musique. Sur le fond, ce que j’ai apprécié, c’est ce qu’a dit le président du jury, le professeur Antoine Kacou, qui visiblement est une personne très rigoureuse dans sa démarche. Il a expliqué pourquoi sur les trois prix, il y en avait un qu’il ne pouvait pas remettre faute de candidat de qualités suffisantes. J’ai trouvé que c’était un gage de sérieux et de rigueur. Et que cela prouvait qu’on ne donne pas le prix Ebony à n’importe qui et qu’il fallait le mériter. Ce qu’il a dit sur le prix manqué, mettait en valeur les autres prix qui ont été décernés aux deux collègues.
Quelles propositions pouvez-vous apporter pour l’amélioration de l’organisation de la soirée des Ebony ?
Une seule remarque. Le prix Ebony récompense des journalistes qui écrivent ou qui parlent. Je pense que le prix Ebony pourrait aussi récompenser des journalistes qui filment ou qui prennent des photos. Parce que ce sont aussi des journalistes. Parce qu’une photo et une belle vidéo sont aussi des instruments journalistiques. Parce qu’en temps de guerre, les collègues photoreporters et cameramen prennent plus de risques que les autres. J’ai beaucoup d’admiration pour eux.
Quel rôle peut jouer la libéralisation de l’espace audio-visuel dans le processus de démocratisation de la Côte d’Ivoire ?
Une place importante ! Dans tout pays, un gouvernement qui fait l’effort de libéraliser sa Radio et sa Télé, c’est un gouvernement qui répond au défi de la démocratie. Il montre qu’il n’a pas peur de la parole libre. Chacun sait que la radio et la télé touchent un public beaucoup plus important que la presse écrite. En Afrique, il y a des pays qui libéralisent la presse écrite mais qui ne libéralisent pas la Radio et la Télé à cause de leur impact plus fort sur le public. La libéralisation de l’espace audiovisuel est une étape très importante de la vie d’un pays. Je crois que c’est un vrai chantier pour le gouvernement ivoirien pour les deux (2) ans qui viennent.
Quel commentaire pouvez-vous faire de la liberté de la presse en Côte d’Ivoire ?
Je dirai qu’il y a eu depuis la fin de la crise postélectorale de grandes avancées. Les journalistes ne courent plus le risque d’être arrêtés ou plus grave d’être tués. J’ai une pensée particulière pour mon collègue de RFI, Jean-Hélène qui a été assassiné en octobre 2003. J’ai aussi une autre pensée pour mon autre collègue Franco-canadien, Guy André- Kieffer qui a disparu en avril 2004. Il y a une vraie dynamique. On sent que la presse se développe que ce soit la presse écrite malgré toutes les difficultés économiques qu’elles rencontrent. La presse Radio et la presse Télé sont un vrai espoir. Il y a encore des crispations. J’ai vu que quelques journaux ont été suspendus en août dernier. Est-ce que l’article qui était mis en cause justifiait la suspension ? Je ne crois pas. Il y a quelques fois des excès dans les écrits dans certains journaux. Quelques fois aussi, il peut y avoir des excès dans la répression de ces écrits. Il y a un apprentissage de la liberté d’expression qui prend du temps mais qui pourrait être surmontée notamment grâce à l’UNJCI. Je demande à cette union et à son président Moussa Traoré qu’ils se battent pour que les journalistes ivoiriens soient plus rigoureux dans leur travail et qu’ils soient plus respectés par les autorités des organes de régulation de la presse.
Pensez-vous que les sanctions à répétition provenant des organes de régulation peuvent freiner les ardeurs des journalistes dans leur volonté…
Je pense que c’est une question de respect mutuel. Comme le disait la vice-présidente de l’Assemblée nationale le vendredi 7 dernier, lors de la soirée des Ebony : « Un journaliste est maître de sa plume et n’accepte pas la tutelle ». C’est tout à fait juste. S’il est maître de sa plume, c’est qu’il la maîtrise et qu’il ne tombe pas dans l’excès. C’est-à-dire aussi que les autorités de contrôle respectent sa plume. Je crois que l’objectif comme le disait la ministre de Communication, c’est que la future presse en Côte d’Ivoire soit forte et indépendante. C’est à la fois nécessaire pour sa crédibilité à la presse et pour la démocratie ivoirienne.
Votre message à l’endroit des journalistes ivoiriens ?
Je suis solidaire de tout ce que font mes collègues ivoiriens dans leur combat quotidien pour la liberté d’expression, et pour gagner chaque jour davantage un peu plus de liberté d’expression. Un seul conseil : quand un journaliste subit des pressions que ce soient politiques ou économiques ou encore des pressions qui menacent sa liberté physique et de travailler, ce qui compte c’est la solidarité entre les journalistes. Parce que si l’un a des problèmes aujourd’hui, demain ça peut être un autre.
Réalisé par Patrick Krou