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Afrique Publié le lundi 17 décembre 2012 | L’Inter

Afrique du sud / 18 ans de pouvoir de l`ANC : Les Noirs toujours dans l`attente du miracle

Hier dimanche 16 décembre 2012 , l'ANC a tenu son congrès dont l'un des enjeux est l'élection d'un nouveau président. Jacob Zuma l'actuel chef du parti est sûr de rester à la tête de la formation et de l'Etat pour les quatre prochaines années. Mais après 18 ans de pouvoir de l'ANC, le pays semble toujours vivre sur les acquis de la période de l'apartheid au plan économique. Au plan social, la situation des Noirs n'a guère évolué, bien au contraire.

En prévenant ses concitoyens que «La route vers la prospérité sera longue et rude... », mais que l'ANC reste le seul espoir pour les pauvres et les exclus, Jacob Zuma, sait bien qu'il ne peut cacher avec la main le soleil de la pauvreté dans son pays, notamment chez les noirs. Le bilan de 18 ans de gouvernance du Congrès national africain, l'ANC est peu reluisant. Plus d'un quart de la population a faim, le système éducatif est catastrophique, les noirs sont les mal lotis aux côtés des Blancs, des Indiens, et autres Métis qui constituent cette Nation arc-en-ciel qu'est l'Afrique du Sud. Mais comme il sait bien le faire, «JZ» diminutif de Jacob Zuma, sait abreuver son peuple de paroles et de promesses. Dans un discours fleuve à l'ouverture du 53e congrès du parti hier dimanche à Bloemfontein, tout en se gardant de promesses démagogiques, il a néanmoins promis des lendemains meilleurs à son peuple. Il s'est félicité des avancés démocratiques, ce qui est une réalité palpable dans ce pays, mais le massacre en août dernier de 34 mineurs de la mine de Marikana en grève, est venu rappeler les pires répressions de la période de l'apartheid. Au plan socio-économique, le président sud-africain est très critiqué pour sa gestion, notamment son incapacité à résoudre les problèmes du pays. Pendant ce temps, les cas de corruption se multiplient et Zuma lui-même n'est pas épargné. Avant son arrivée au pouvoir en 2009, il avait échappé de justesse à la prison dans l'affaire d'achat d'armes au Groupe français Thales dans laquelle il a été soupçonné d'avoir demandé des pots-de-vins. Récemment, il a été critiqué pour avoir fait rénover sa résidence du KwaZulu-Natal aux frais de l'Etat. Mais malgré son échec à changer le quotidien de son peuple, surtout des Noirs, ce septuagénaire conserve toute sa popularité. Son secret est peut-être le naturel que son statut de président de la République n'a pas chassé. «JZ» est resté le bon Zulu qui harangue la foule à chacun de ses meetings avec ses chansons et ses pas de danse. Très ancré dans la tradition, il est resté un bon chef africain polygame avec quatre femmes et une pléthore d'enfants (21 pour le moment). C'est ce côté «authentique» qui manquait à Thabo Mbeki son prédécesseur, dont le look est jugé trop policé par ses compatriotes. A l'issue de son congrès, l'ANC va élire un nouveau président. L'opposition à Zuma qui prend de plus en plus d'ampleur au sein même de l'ANC, a «poussé dans le dos» le vice-président et N02 du parti Kgalema Motlanthe à postuler. Mais ce syndicaliste de 63 ans qui a assuré la transition à la tête du pays de septembre 2008 à mai 2009 lorsque Mbeki a été évincé, n' a pas le coffre de Zuma. Si la réélection de Jacob Zuma à la tête du parti et dans un an, de l'Etat, est presque assurée, il doit cependant faire face à de nombreux défis. Le premier est la sauvegarde de l'unité au sein de l'ANC après Nelson Mandela, 94 ans, l'un des fondateurs du parti encore en vie, mais actuellement souffrant. Jacob Zuma qui a passé 10 années, de (1963 à 1973) au bagne de Robben Island avec le premier président noir de l'Afrique du Sud, utilise à fond la notoriété de Mandela dont il se réclame le digne héritier. Hier dimanche, c'est par une chanson à la gloire de «Madiba» qu'il a entonné lui-même, que Jacob Zuma a ouvert les travaux. L'après Mandela va certainement voir l'irruption de jeunes leaders qui n'ont pas vécu l'enfer carcéral et les années de plomb de la ségrégation raciale. Le passage du flambeau entre la vieille garde de l'ANC et les jeunes loups ne se fera pas sans heurt. Parmi ces jeunes leaders, on peut compter Julius Malema. Malgré les sanctions qui le frappent au sein de L'ANC, sa popularité reste incontestable. Lors de la dernière grève des travailleurs des mines de platine, il a pris ouvertement fait et cause pour les mineurs face aux tergiversations de Zuma. Le N01 sud-africain était obligé de ménager la chèvre et le choux dans ce conflit opposant les Blancs qui tiennent encore fermement les manettes de l'économie nationale et les travailleurs noirs, sous payés. Justement, l'autre défi qui attend le président est l'économie. L'ex-président Thabo Mbeki jugé trop libéral, donc trop proche des riches que sont les industriels blancs, a été écarté en faveur de Zuma qui portait tous les espoirs des millions de Noirs partisans d'un virage à gauche de l'économie. Mais au terme de son premier mandat, l'actuel président n'a pas réussi ce changement radical. Les terres agricoles, l'industrie, restent toujours aux mains de la minorité blanche. Certes l'on assiste à une timide émergence des Noirs dans cette classe dirigeante de l'économie, mais leur influence reste encore très faible pour changer la vie dans les townships, ces immenses bidonvilles où s'entassent les populations noires. Zuma a promis d'entamer pendant son second mandat les réformes économiques, mais en a t-il les capacités? Ce Zulu natif de Nkandla, est plutôt un bon tribun, un chef plus ancré dans les traditions qu'un vrai bâtisseur capable d'opérer le «miracle» que les Noirs attendent depuis la fin de l'apartheid.

Charles d'Almeida
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