Né en 1966 à Sinfra – Côte d’Ivoire, Jems Robert Koko Bi est un transfuge de l’Université de Cocody d’Abidjan et de l’Institut national supérieur des Arts et de l’Action culturelle (INSAAC) d’Abidjan. Après une bourse d’étude du DAAD (Service allemand des échanges académiques), le sculpteur ivoirien est admis à l’Académie des Arts de Düsseldorf, Allemagne chez le Professeur Klaus Rinke. D’où il ressort avec une maîtrise académique. Détenteur de plusieurs distinctions, Jems Robert Koko Bi réside en Allemagne dans la ville de Hessen. Il se livre aux Ivoiriens.
Votre style est atypique et votre art éclectique. Pouvez-vous décrire votre art ?
Je suis un artiste sensible à l’histoire et à l’évolution du monde. J’existe dans le courant sans toutefois me laisser entraîner sans résistance. De ce fait, il est vrai que le principal support de mes créations est le bois mais, selon la sensibilité qui se dévéloppe autour d’une histoire, d’un fait ou d’une tragédie, je choisis un support et une technique que je juge adaptée. Pour ces portraits par exemple, je n’ai pas voulu utiliser du crayon ou de l’encre de Chine comme souvent je le fais dans mes dessins. C’est dire que chez moi, le concept impose le support et la technique. Par ailleurs, puisque je suppose que j’appartiens au monde, je ne limite pas ma palette. Je traite tous les sujets qui touchent ce monde et qui m’affectent ou me stimulent. Et malgré le caractère éclectique comme vous le dites, vous retrouverez toujours du Koko Bi.
Vous pratiquez aujourd'hui votre art en Allemagne, le pays qui vous a acceuilli. Que faites-vous exactement au pays de Angel Merkel ?
Je participe à la vie culturelle et artistique de ma ville (Essen, capitale des régions de la Ruhr) et aussi d’autres villes comme Darmstadt dans l’Etat sud-ouest de Hessen en Allemagne où je milite artistiquement pour l’harmonie et la sauvegarde de la valeur de la forêt. A vrai dire, l’Allemagne est mon point de résidence et le lieu de dépot de mes outils de travail, mais je travaille plus à travers le monde. Là où l’histoire m’appelle, j’y vais pour développer et instaurer le concept qui naît autour de cette histoire. Je suis un artiste de l’espace et de l’histoire.
Votre art est assez hermétique et éclestique. Comment avez-vous pu susciter un intérêt sur votre art, la sculpture?
Je me permets d’aller un peu au-delà de l’humilité afin de répondre à votre question pour dire qu’il n’y a pas heureusement que les Européens qui aiment mon art. Car, je suis et reste africain mais mon art semble avoir un caractère universel. Alors si l’on reste sur le plan universel, un travail qui traite d’un problème ou d’une réalité universelle, atteint toutes les sensibilités. Pour parler de l’Europe, ma vie ici m’a permis et aidé à découvrir et à reconnaître le "MOI". Et le moi, c’est d’abord mon histoire liée à mon origine, à ma culture et plus loin à mon appartenance raciale (tout simplement) et qui est très importante. Car, même si la vertu milite pour l’égalité raciale, cela n’a rien à voir avec la différence entre le noir et le blanc surtout dans l’art. Et cette différence doit exister pour échanger avec l’autre. Les Européens veulent voir ce qu’ils n’ont pas. Et pour arriver à cela, il a fallu que je reste moi-même, cet artiste d’ailleurs avec d’autres réalités et d’autres façons de faire. Ce n’est pas de l’originalité mais il s’agit plutôt de la personnalité et de l’identité, sans tricher ni créer le surréel parce qu’on penserait que de toute façon, l’autre ne sait pas. Il a fallu être authentique, discipliné et ne pas créer surtout sur mesure. Je crois que, c’est ce qu’aiment les Européens dans mon travail. Et je ne crois pas qu’il soit aussi hermétique qu’on le pense. En lieu et place, j’aurais préféré le mot ambigü, car il est arrivé qu’un curateur d’un musée ici en Allemagne, le Musée de Heilbronn dans le Sud, aie décrit des parallèles entre deux de mes sculptures et celles du romain Constantin Brancusi (l'un des sculpteurs les plus influents du début du XXe siècle) et du britannique Henry Moore (connu grâce à ses grandes sculptures abstraites en bronze et en marbre taillé). Les Européens trouvent une ambigüité attractive dans ce que je crée car j’y traduis mes réalités africaines ou personnelles. Mais, ils y voient des angles similaires de leurs pairs qui sont de très loin mes références. Ils ont peut-être compris en moi que le produit artistique n’a pas de nationalité même s’il traite d’un problème de Balkan. Sinon pour parler de l’hermétique, il y a peut-être un peu moins de détails dans mon travail auxquels certains s’attendraient souvent pour faire une lecture facile. Malheureusement, je suis moins partisan des détails.
Une de vos oeuvres trône en pleine ville de Essen en Allemagne. Pouvez-vous nous parler de cette oeuvre et de cette collaboration avec la ville de Essen ?
En 2010, la ville de Essen où j’habite était devenue le capitale culturelle de l’Europe. C’est à cette occasion que j’avais été invité par l’église à travailler sur le thème de la "Souffrance de la liberté". Ce thème allait dans le sens d’un projet que je préparais après celui de l’esclavage à savoir rendre hommage à quatre (4) héros de la lutte pour la Liberté en l’occurence Nelson Mandela, Martin Luther King Junior, Mahatma Gandhi et Mère Théresa. J’ai ainsi commencé par Mandela à qui j’ai dédié une tête de quatre (4) mètres de haut et de deux (2) mètres de large conçue avec vingt et sept mille morceaux de bois empilés que j’ai intitulée "MANDELA 27000 pieces of Life’s history." L’installation de cette sulpture était prévue juste pour la durée des évènements de la capitale de la culture mais sa durée avait été prolongée vu la résonnance qu’elle avait créée. Elle était provisoirement posée sur la place officielle du marché de Noël. Aujourd’hui, la ville a décidé de l’enlever jusqu’à l’assainissement d’une place appropriée. Pour autre information, le deuxième personnage de ma liste citée plus haut vient d’être réalisé. Depuis avril 2012, une autre tête avec la même technique trône dans l’enceinte de la California States University à Bakersfield en Californie. Les deux (2) autres personnages sont en vue.
Quels matériaux et supports utilisez-vous dans la pratique de votre art ?
Le support principal de mon travail reste le bois. Ce matériau me rattache mieux à mon histoire et à mon origine. Il satisfait le rendu de mes idées et de mes aspirations. Il est mon compagnon, mon conseiller, mon interlocuteur et mon tuteur. De sa chaleur, sa présence et sa force, il offre un grand et noble habitat à mes idées. Je lui dois mon existence. Et pour reposer mes muscles, ou quand ici l’hiver devient insupportable, je dessine et pour cela, j’utilise du papier. Le troisième support de mon travail est mon corps lui-même. Je l’utilise lui pour mes performances.
Pourquoi ne revenez-vous pas mettre votre savoir au service de votre pays ?
Je suis un artiste. Par conséquent, même loin de mon pays, je reste à son service, et tous les artistes ivoiriens le sont, je crois. Lorsque je parcours le monde pour réaliser mon art, c’est avec le nom de la Côte d’Ivoire que je me déplace. Mais, si vous préférez du concret, à savoir travailler en Côte d’Ivoire, je suis d’autant prêt chaque jour que je me le préconise chaque fois. Et si vous vous référez à la formation de la jeune génération d’étudiants en art, je suis aussi prêt et j’en serai fier. Car, ici, en Allemagne, j’ai formé des jeunes gens (Académie privée des Arts de Essen), alors pourquoi pas des jeunes de chez moi (Ndlr: Ivoiriens) qui se trouvent plus dans le besoin que ceux d’ici. Je suis quand même doté d’un CAPEAS (Certificat d’Aptitude pour l’Enseignement des Arts dans le Supérieur) de l’INSAAC et d’une Maîtrise academique de l’Academie des arts de Düsseldorf. Alors, j’en aurais les moyens mais que le pays le veuille effectivement et je serais prêt à venir. Je suis d’avis que lorsqu’on a accumulé des expériences fortes, il faut les partager et je voudrais bien le faire. Vous remarquez que ça ressemble même déjà à une candidature, même si je ne ressens aucun ennui à rester en Europe et à continuer mon art. Je trouve simplement que ce serait plus beau dans mon pays.
Vous arborez une barbe assez originale. Y a-t-il une explication particulière?
Oui ! Depuis maintenant neuf (9) années, j’ai laissé pousser cette barbe. Cela n’a rien avoir avec l’art, croyez-moi. La simple raison est que j’ai quitté vraiment très tôt ma mère. Depuis le pays déjà, et pour moi, le cordon ombilical a été rompu trop tôt. Et le fait d’être encore plus loin d’elle, d’être de l’autre côté de l’Océan atlantique n’a pas amoindri les choses. Rien ne m’unissait plus à elle. Alors, j’ai décidé de laisser pousser cette barbe pour remplacer ce cordon. Et depuis, elle me procure la force de résister au chagrin. Je l’aime profondément et elle me manque terriblement. Je profite de vos lignes pour lui adresser mes vives salutalions, lui dire merci et enfin que je vais.
Réalisée via Internet par Patrick Krou
Votre style est atypique et votre art éclectique. Pouvez-vous décrire votre art ?
Je suis un artiste sensible à l’histoire et à l’évolution du monde. J’existe dans le courant sans toutefois me laisser entraîner sans résistance. De ce fait, il est vrai que le principal support de mes créations est le bois mais, selon la sensibilité qui se dévéloppe autour d’une histoire, d’un fait ou d’une tragédie, je choisis un support et une technique que je juge adaptée. Pour ces portraits par exemple, je n’ai pas voulu utiliser du crayon ou de l’encre de Chine comme souvent je le fais dans mes dessins. C’est dire que chez moi, le concept impose le support et la technique. Par ailleurs, puisque je suppose que j’appartiens au monde, je ne limite pas ma palette. Je traite tous les sujets qui touchent ce monde et qui m’affectent ou me stimulent. Et malgré le caractère éclectique comme vous le dites, vous retrouverez toujours du Koko Bi.
Vous pratiquez aujourd'hui votre art en Allemagne, le pays qui vous a acceuilli. Que faites-vous exactement au pays de Angel Merkel ?
Je participe à la vie culturelle et artistique de ma ville (Essen, capitale des régions de la Ruhr) et aussi d’autres villes comme Darmstadt dans l’Etat sud-ouest de Hessen en Allemagne où je milite artistiquement pour l’harmonie et la sauvegarde de la valeur de la forêt. A vrai dire, l’Allemagne est mon point de résidence et le lieu de dépot de mes outils de travail, mais je travaille plus à travers le monde. Là où l’histoire m’appelle, j’y vais pour développer et instaurer le concept qui naît autour de cette histoire. Je suis un artiste de l’espace et de l’histoire.
Votre art est assez hermétique et éclestique. Comment avez-vous pu susciter un intérêt sur votre art, la sculpture?
Je me permets d’aller un peu au-delà de l’humilité afin de répondre à votre question pour dire qu’il n’y a pas heureusement que les Européens qui aiment mon art. Car, je suis et reste africain mais mon art semble avoir un caractère universel. Alors si l’on reste sur le plan universel, un travail qui traite d’un problème ou d’une réalité universelle, atteint toutes les sensibilités. Pour parler de l’Europe, ma vie ici m’a permis et aidé à découvrir et à reconnaître le "MOI". Et le moi, c’est d’abord mon histoire liée à mon origine, à ma culture et plus loin à mon appartenance raciale (tout simplement) et qui est très importante. Car, même si la vertu milite pour l’égalité raciale, cela n’a rien à voir avec la différence entre le noir et le blanc surtout dans l’art. Et cette différence doit exister pour échanger avec l’autre. Les Européens veulent voir ce qu’ils n’ont pas. Et pour arriver à cela, il a fallu que je reste moi-même, cet artiste d’ailleurs avec d’autres réalités et d’autres façons de faire. Ce n’est pas de l’originalité mais il s’agit plutôt de la personnalité et de l’identité, sans tricher ni créer le surréel parce qu’on penserait que de toute façon, l’autre ne sait pas. Il a fallu être authentique, discipliné et ne pas créer surtout sur mesure. Je crois que, c’est ce qu’aiment les Européens dans mon travail. Et je ne crois pas qu’il soit aussi hermétique qu’on le pense. En lieu et place, j’aurais préféré le mot ambigü, car il est arrivé qu’un curateur d’un musée ici en Allemagne, le Musée de Heilbronn dans le Sud, aie décrit des parallèles entre deux de mes sculptures et celles du romain Constantin Brancusi (l'un des sculpteurs les plus influents du début du XXe siècle) et du britannique Henry Moore (connu grâce à ses grandes sculptures abstraites en bronze et en marbre taillé). Les Européens trouvent une ambigüité attractive dans ce que je crée car j’y traduis mes réalités africaines ou personnelles. Mais, ils y voient des angles similaires de leurs pairs qui sont de très loin mes références. Ils ont peut-être compris en moi que le produit artistique n’a pas de nationalité même s’il traite d’un problème de Balkan. Sinon pour parler de l’hermétique, il y a peut-être un peu moins de détails dans mon travail auxquels certains s’attendraient souvent pour faire une lecture facile. Malheureusement, je suis moins partisan des détails.
Une de vos oeuvres trône en pleine ville de Essen en Allemagne. Pouvez-vous nous parler de cette oeuvre et de cette collaboration avec la ville de Essen ?
En 2010, la ville de Essen où j’habite était devenue le capitale culturelle de l’Europe. C’est à cette occasion que j’avais été invité par l’église à travailler sur le thème de la "Souffrance de la liberté". Ce thème allait dans le sens d’un projet que je préparais après celui de l’esclavage à savoir rendre hommage à quatre (4) héros de la lutte pour la Liberté en l’occurence Nelson Mandela, Martin Luther King Junior, Mahatma Gandhi et Mère Théresa. J’ai ainsi commencé par Mandela à qui j’ai dédié une tête de quatre (4) mètres de haut et de deux (2) mètres de large conçue avec vingt et sept mille morceaux de bois empilés que j’ai intitulée "MANDELA 27000 pieces of Life’s history." L’installation de cette sulpture était prévue juste pour la durée des évènements de la capitale de la culture mais sa durée avait été prolongée vu la résonnance qu’elle avait créée. Elle était provisoirement posée sur la place officielle du marché de Noël. Aujourd’hui, la ville a décidé de l’enlever jusqu’à l’assainissement d’une place appropriée. Pour autre information, le deuxième personnage de ma liste citée plus haut vient d’être réalisé. Depuis avril 2012, une autre tête avec la même technique trône dans l’enceinte de la California States University à Bakersfield en Californie. Les deux (2) autres personnages sont en vue.
Quels matériaux et supports utilisez-vous dans la pratique de votre art ?
Le support principal de mon travail reste le bois. Ce matériau me rattache mieux à mon histoire et à mon origine. Il satisfait le rendu de mes idées et de mes aspirations. Il est mon compagnon, mon conseiller, mon interlocuteur et mon tuteur. De sa chaleur, sa présence et sa force, il offre un grand et noble habitat à mes idées. Je lui dois mon existence. Et pour reposer mes muscles, ou quand ici l’hiver devient insupportable, je dessine et pour cela, j’utilise du papier. Le troisième support de mon travail est mon corps lui-même. Je l’utilise lui pour mes performances.
Pourquoi ne revenez-vous pas mettre votre savoir au service de votre pays ?
Je suis un artiste. Par conséquent, même loin de mon pays, je reste à son service, et tous les artistes ivoiriens le sont, je crois. Lorsque je parcours le monde pour réaliser mon art, c’est avec le nom de la Côte d’Ivoire que je me déplace. Mais, si vous préférez du concret, à savoir travailler en Côte d’Ivoire, je suis d’autant prêt chaque jour que je me le préconise chaque fois. Et si vous vous référez à la formation de la jeune génération d’étudiants en art, je suis aussi prêt et j’en serai fier. Car, ici, en Allemagne, j’ai formé des jeunes gens (Académie privée des Arts de Essen), alors pourquoi pas des jeunes de chez moi (Ndlr: Ivoiriens) qui se trouvent plus dans le besoin que ceux d’ici. Je suis quand même doté d’un CAPEAS (Certificat d’Aptitude pour l’Enseignement des Arts dans le Supérieur) de l’INSAAC et d’une Maîtrise academique de l’Academie des arts de Düsseldorf. Alors, j’en aurais les moyens mais que le pays le veuille effectivement et je serais prêt à venir. Je suis d’avis que lorsqu’on a accumulé des expériences fortes, il faut les partager et je voudrais bien le faire. Vous remarquez que ça ressemble même déjà à une candidature, même si je ne ressens aucun ennui à rester en Europe et à continuer mon art. Je trouve simplement que ce serait plus beau dans mon pays.
Vous arborez une barbe assez originale. Y a-t-il une explication particulière?
Oui ! Depuis maintenant neuf (9) années, j’ai laissé pousser cette barbe. Cela n’a rien avoir avec l’art, croyez-moi. La simple raison est que j’ai quitté vraiment très tôt ma mère. Depuis le pays déjà, et pour moi, le cordon ombilical a été rompu trop tôt. Et le fait d’être encore plus loin d’elle, d’être de l’autre côté de l’Océan atlantique n’a pas amoindri les choses. Rien ne m’unissait plus à elle. Alors, j’ai décidé de laisser pousser cette barbe pour remplacer ce cordon. Et depuis, elle me procure la force de résister au chagrin. Je l’aime profondément et elle me manque terriblement. Je profite de vos lignes pour lui adresser mes vives salutalions, lui dire merci et enfin que je vais.
Réalisée via Internet par Patrick Krou