On a beau vouloir l’ignorer, ça reste la réalité. La plupart des remous que l’on voit à l’Ouest ces dernières années puisent leur origine du foncier rural. Les terres arables de l’Ouest de la Côte d’Ivoire sont à la base de tous les drames et passions auxquels l’on assiste en ce moment. Les attaques récurrentes des villages et campements à la frontière ouest de la Côte d’Ivoire sont certes les derniers soubresauts de la grave crise postélectorale. Mais elles ont pour moteur, à l’ouest surtout, les problèmes de terre. Depuis la fin de la crise de l’après élection en mai 2011, la crise politique s’est transposée sur le problème foncier. Par l’inconséquence de certains politiciens originaires de la région, les petits litiges fonciers qui, il faut le rappeler ont toujours existé, sont en train de prendre des proportions inconsidérées. Pourtant, il aurait fallu tout simplement s’en tenir à la loi pour comprendre que tous les petits palabres que l’on voit surgir à l’Ouest ne sont en fait que des incompréhensions. La solution à tous les remous et attaques qui surviennent de temps en temps comme des éruptions cutanées dues à des allergies ne sont au regard de la loi que des peccadilles. Elles ont pour terreau fertile l’ignorance des populations sur laquelle jouent des cadres et élus de la région, qui ont intérêt à ce que l’Ouest reste instable et dans l’insécurité. Pour eux, c’est une question de survie politique. Diviser pour mieux régner. Tel est leur devise. Que faut-il donc faire pour sauver l’Ouest ? Appliquer tout simplement le code foncier rural de 1998. Ce code foncier qui a été voté à l’unanimité par tous les partis politiques à l’époque, est on ne peut plus clair. En son article 1 alinéa 2, il stipule ceci : « Seuls l’Etat, les collectivités publiques et les personnes physiques ivoiriennes sont admis à en être propriétaires ». Autrement dit, aucun non-national ne peut être propriétaire d’une terre en Côte d’Ivoire au regard de cette disposition. La horde « d’envahisseurs burkinabé » dont parle donc le FPI n’est que pur fantasme et manipulation politicienne. Le désordre qui a cours en ce moment dans cette partie de la Côte d’Ivoire, est à la fois entretenu par tous les pêcheurs en trouble qui récoltent de nombreux dividendes dans l’affaire. Dans tout cela, la grande victime, ce sont les populations prises en otage par les apesanteurs et autres vicissitudes politiques. Il eut donc fallu qu’on explique à ceux qui se réclament propriétaires terriens que leurs hôtes, surtout étrangers, ne peuvent être, aux yeux de la loi, propriétaires des portions de terres qu’eux-mêmes leur ont vendues. Mais hélas ! « Mon peuple périt par manque de connaissance », dit l’Eternel dans la Bible. En outre, l’article 4 du Code foncier rural rappelle que, pour être définitivement propriétaire, il faut procéder à l’immatriculation des terres qu’on a acquises. « La propriété d’une terre du Domaine Foncier Rural est établie à partir de l’immatriculation de cette terre au registre foncier ouvert à cet effet par l’Administration et en ce qui concerne les terres du domaine coutumier par le Certificat Foncier. Le détenteur du Certificat Foncier doit requérir l’immatriculation de la terre correspondante dans un délai de trois ans à compter de la date d’acquisition du Certificat Foncier », précise l’article 4 du Code. Ce n’est donc pas quelques hectares qu’on a achetés dans des conditions douteuses qui font de l’acheteur un propriétaire terrien. Le droit à la propriété dans ce domaine suit donc une procédure qui ne laisse aucune marge à celui qui n’en pas droit ou qui veut contourner la loi. Tous ces garde-fous pris par le législateur, le FPI en a connaissance. Car, il ne faut pas oublier que cette loi a été modifiée le 24 juillet 2004, à la suite des accords de Linas Marcoussis, par une Assemblée nationale dominée par le Front populaire ivoirien. D’où vient-il que l’on veut faire croire qu’il y a un péril étranger qui guette l’Ouest. Le problème n’est pas le flot de personnes qui déferlent presque chaque jour dans cette partie de la Côte d’Ivoire pour cultiver les terres. Le problème est le manque de transparence que l’on constate dans les achats des terres. Aujourd’hui, la plupart des forêts classées qui ne sont pas du domaine du foncier rural, est squattée par des clandestins avec la complicité des fils et cadres originaires de la zone. Beaucoup de personnes ressortissantes de la région ignorent encore ou feignent de l’ignorer que les forêts classées, les zones d’aménagement différé, les terres sans maitre appartiennent à l’Etat. Mais, on maintient les populations dans l’ignorance en leur brandissant le spectre de l’invasion comme un épouvantail à des fins politiciennes. Pour sauver l’Ouest, il faut instruire les populations et commencer à appliquer le Code foncier rural. Il faut surtout expliquer dans les moindres détails les dispositions de ce Code qui protègent les droits de chacun à tout haut point. Pour donner une chance aux populations de l’Ouest qui sont prises en otage par les cadres FPI de la région qui, comme des Pharisiens des temps modernes, préfèrent laisser leurs frères dans l’ignorance pour mieux les manipuler. Comme le dit les Saintes Ecritures : « Vous connaitrez la vérité et elle vous affranchira ». Il faut affranchir les peuples de l’Ouest en leur expliquant que la loi a tout prévu pour sauvegarder leurs droits. Mais seul problème, elle n’est pas appliquée. Il faut donc le faire pour ne pas faire le lit des extrémistes.
Jean-Claude Coulibaly
Jean-Claude Coulibaly