Sale temps pour les pêcheurs dans la région des grands ponts. Depuis l’interdiction de la pêche par le gouvernement en juin dernier, du fait de la mortalité massive des poissons, le secteur de la pêche artisanale s’est arrêté. Sans aucune mesure compensatoire, les pêcheurs broient du noir. A côté d’eux, les commerçantes ont dû se retourner vers d’autres sites d’approvisionnement avec toute la surenchère induite.
Adossé à un cocotier, le torse nu et la chemise au cou, Kiti Antoine avait l’air songeur, ce dimanche 1 er septembre 2013. Cela va faire trois mois qu’il ne travaille presque plus du fait de l’entrée en vigueur de la mesure d’interdiction de la pêche dans la lagune de Dabou et de Jacqueville. C’est donc à l’ombre de ces arbres qu’il passe, désormais, le plus clair de son temps. Sur les berges de la lagune qui bordent le village de Layo Agbigbo, une vingtaine de pirogues sont sous cale. L’absence de toute humidité sur ces pirogues achève de convaincre qu’il y a bien longtemps qu’elles n’ont plus servi sur la lagune. Un constat renforcé par les nénuphars qui parsèment les berges.
Dévolue aux hommes, la pêche artisanale dans la région des grands ponts est une activité qui fait vivre des milliers de familles. Malheureusement, la mortalité massive des poissons dans ces eaux, a amené le gouvernement à prendre en conseil des ministres le 13 juin dernier, une mesure d’indiction de la pêche. « C’est une mesure conservatoire de trois mois qui visent à protéger les populations contre une éventuelle intoxication », précise le service de communication du ministère des ressources animales et halieutiques. Soit ! Mais sur le terrain, la pullule est amère pour ceux qui tiraient leur principales ressources de la lagune ébrié. D’autant plus que la mesure ne prévoit aucune disposition compensatoire. «Depuis trois mois nous ne pouvons plus pêcher dans la lagune. C’est difficile actuellement. Chaque matin je regarde le soleil se lever et se coucher le soir sans rien faire », explique Kiti, visiblement désemparé par la mesure gouvernement. Pour lui, cette mesure est une mise à mort. « Je pouvais me faire entre 30 à 40 mille par semaine avec la vente du poisson que je ramenais de la pêche. C’est avec ça que je nourris ma famille. Vous imaginez ce que je perds», lance t-il amer.
A Layo, comme à N’Gatti ou à Agnebi dans le département de Dabou, où nous nous sommes rendus, ce sont des témoignages de misères et d’impuissances que nous avons recueillis. Mais à en croire Adou Simon, au début, les pêcheurs ne respectaient pas la mesure. «Nous avons eu deux des nôtre qui ont été arrêtés par les forces républicaines parce qu’ils n’avaient pas respecté la mesure. Mais ils ont été finalement libérés contre le paiement d’une amende de cent mille franc», explique ce dernier. Mais en fait, ils sont nombreux, les récalcitrants qui ont fait les frais de leur entêtement à continuer de pêcher. Car, dans plusieurs villages beaucoup ont eu leur salut grâce à des arrangements avec les frci ou les agents des eaux et forêts. C’est que les contrevenants à la mesure sont traqués de jour comme de nuit par les éléments des eaux et forêt et les Frci qui veillent depuis juin au respect de la mesure. Mais les pêcheurs ne partagent pas l’avis du gouvernement selon lequel la mortalité des poissons présente un danger. « Ce n’est pas la première fois que cela arrive. C’est un phénomène naturel. Et ça n’a jamais tué personne», rassure Mélèdje Cyrille du côté de Jacqueville. Mais la santé des populations étant en jeu, le gouvernement n’entend pas cela de cette oreille. Officiellement, l’on retient que la mort de ces poissons est due à un phénomène cyclique. Même si le ministère des ressources animales et halieutiques estime que les ruissellements des eaux de pluies ont dû ramener dans la lagune des produits phytosanitaires qui ont servi de traitement des sols pour certaines cultures. Seulement depuis trois mois que des prélèvements sont faits sur les poissons incriminés par les spécialistes, aucun résultat n’a encore été publié. Prolongeant à la fois l’incertitude sur la dangerosité ou non de cette mortalité des poissons, et le calvaire des pêcheurs dont les tirelires n’ont pas tenu plus de trois semaines.
L’autre conséquence majeure de l’interdiction de la pêche, dans la cité du Leboutou, et de Jacqueville, c’est bien le prix du poisson qui a connu un léger renchérissement. Selon les commerçantes que nous avons rencontrées dans les villes de Dabou et de Jacqueville, l’approvisionnement en poisson se fait depuis Abidjan, Sassandra et Guessabo. Avec une baisse drastique de régime. « Le commerce du poisson ne s’est pas arrêté mais puisque les pêcheurs d’ici ne peuvent plus nous livrer nous allons acheter ailleurs et venons revendre sur place. On ne fait plus de bénéfice comme avant », confie Madilde Fiagbeto, l’une des centaines de commerçantes de poissons de la région.
Avec la rentrée scolaire qui s’annonce à grands pas, ceux qui vivent de la pêche prient de tout cœur pour la lever de cette mesure qui les appauvrit et menace leur survie. Le gouvernement saura t-il entendre leurs angoisses ? Nous l’espérons !
Alexandre Lebel Ilboudo
Adossé à un cocotier, le torse nu et la chemise au cou, Kiti Antoine avait l’air songeur, ce dimanche 1 er septembre 2013. Cela va faire trois mois qu’il ne travaille presque plus du fait de l’entrée en vigueur de la mesure d’interdiction de la pêche dans la lagune de Dabou et de Jacqueville. C’est donc à l’ombre de ces arbres qu’il passe, désormais, le plus clair de son temps. Sur les berges de la lagune qui bordent le village de Layo Agbigbo, une vingtaine de pirogues sont sous cale. L’absence de toute humidité sur ces pirogues achève de convaincre qu’il y a bien longtemps qu’elles n’ont plus servi sur la lagune. Un constat renforcé par les nénuphars qui parsèment les berges.
Dévolue aux hommes, la pêche artisanale dans la région des grands ponts est une activité qui fait vivre des milliers de familles. Malheureusement, la mortalité massive des poissons dans ces eaux, a amené le gouvernement à prendre en conseil des ministres le 13 juin dernier, une mesure d’indiction de la pêche. « C’est une mesure conservatoire de trois mois qui visent à protéger les populations contre une éventuelle intoxication », précise le service de communication du ministère des ressources animales et halieutiques. Soit ! Mais sur le terrain, la pullule est amère pour ceux qui tiraient leur principales ressources de la lagune ébrié. D’autant plus que la mesure ne prévoit aucune disposition compensatoire. «Depuis trois mois nous ne pouvons plus pêcher dans la lagune. C’est difficile actuellement. Chaque matin je regarde le soleil se lever et se coucher le soir sans rien faire », explique Kiti, visiblement désemparé par la mesure gouvernement. Pour lui, cette mesure est une mise à mort. « Je pouvais me faire entre 30 à 40 mille par semaine avec la vente du poisson que je ramenais de la pêche. C’est avec ça que je nourris ma famille. Vous imaginez ce que je perds», lance t-il amer.
A Layo, comme à N’Gatti ou à Agnebi dans le département de Dabou, où nous nous sommes rendus, ce sont des témoignages de misères et d’impuissances que nous avons recueillis. Mais à en croire Adou Simon, au début, les pêcheurs ne respectaient pas la mesure. «Nous avons eu deux des nôtre qui ont été arrêtés par les forces républicaines parce qu’ils n’avaient pas respecté la mesure. Mais ils ont été finalement libérés contre le paiement d’une amende de cent mille franc», explique ce dernier. Mais en fait, ils sont nombreux, les récalcitrants qui ont fait les frais de leur entêtement à continuer de pêcher. Car, dans plusieurs villages beaucoup ont eu leur salut grâce à des arrangements avec les frci ou les agents des eaux et forêts. C’est que les contrevenants à la mesure sont traqués de jour comme de nuit par les éléments des eaux et forêt et les Frci qui veillent depuis juin au respect de la mesure. Mais les pêcheurs ne partagent pas l’avis du gouvernement selon lequel la mortalité des poissons présente un danger. « Ce n’est pas la première fois que cela arrive. C’est un phénomène naturel. Et ça n’a jamais tué personne», rassure Mélèdje Cyrille du côté de Jacqueville. Mais la santé des populations étant en jeu, le gouvernement n’entend pas cela de cette oreille. Officiellement, l’on retient que la mort de ces poissons est due à un phénomène cyclique. Même si le ministère des ressources animales et halieutiques estime que les ruissellements des eaux de pluies ont dû ramener dans la lagune des produits phytosanitaires qui ont servi de traitement des sols pour certaines cultures. Seulement depuis trois mois que des prélèvements sont faits sur les poissons incriminés par les spécialistes, aucun résultat n’a encore été publié. Prolongeant à la fois l’incertitude sur la dangerosité ou non de cette mortalité des poissons, et le calvaire des pêcheurs dont les tirelires n’ont pas tenu plus de trois semaines.
L’autre conséquence majeure de l’interdiction de la pêche, dans la cité du Leboutou, et de Jacqueville, c’est bien le prix du poisson qui a connu un léger renchérissement. Selon les commerçantes que nous avons rencontrées dans les villes de Dabou et de Jacqueville, l’approvisionnement en poisson se fait depuis Abidjan, Sassandra et Guessabo. Avec une baisse drastique de régime. « Le commerce du poisson ne s’est pas arrêté mais puisque les pêcheurs d’ici ne peuvent plus nous livrer nous allons acheter ailleurs et venons revendre sur place. On ne fait plus de bénéfice comme avant », confie Madilde Fiagbeto, l’une des centaines de commerçantes de poissons de la région.
Avec la rentrée scolaire qui s’annonce à grands pas, ceux qui vivent de la pêche prient de tout cœur pour la lever de cette mesure qui les appauvrit et menace leur survie. Le gouvernement saura t-il entendre leurs angoisses ? Nous l’espérons !
Alexandre Lebel Ilboudo