Depuis que la Russie a proposé de placer l’arsenal chimique de la Syrie sous contrôle international, les perspectives de frappes militaires contre le régime de Bachar Al-Assad s’éloignent. L’ambassadeur d’Iran (un des soutiens de Damas) se réjouit du retour à une solution négociée de la crise syrienne. S.E.M Seyed Reza Nobakhti estime que ce conflit a une forte connotation économique. Il dénonce la précipitation des Occidentaux à vouloir agir en dehors du cadre de l’Onu.
L’actualité internationale est dominée par la situation en Syrie. Quelle est la position de l’Iran sur cette crise ?
La position de l’Iran n’a pas changé. Depuis le premier jour de la crise en Syrie, nous avons dit que cette crise doit être réglée d’une manière pacifique. Depuis lors, en tant que président du Mouvement des pays non-alignés, nous avons organisé deux assises de dialogue à Téhéran pour trouver une solution pacifique. Nous avons invité les opposants au gouvernement syrien à faire des propositions pour une solution pacifique à la crise qui venait de commencer.
Quelle est aujourd’hui la position du Mouvement des pays non-alignés sur le conflit syrien ?
Il est attendu dans le cadre des hauts objectifs du Mouvement des pays non-alignés : primo, que les pays membres condamnent l’utilisation de la force et une nouvelle belligérance dans cette zone sensible du Moyen-Orient. Secundo, qu’ils exigent la nécessité du respect du droit international et de la charte des Nations unies. Tertio, qu’ils soutiennent l’idée de l’arrêt de toute action précipitée avant la publication du rapport final des inspecteurs des Nations unies et la prise de la décision du Conseil de sécurité de cette institution. Nous encourageons donc la prise en compte de façon résolue par les membres du Mouvement des pays non-alignés des initiatives visant à éviter la guerre et à privilégier la concertation pour le règlement par voie politique de la crise.
Qu’attendez-vous de la Côte d’Ivoire, un pays membre du Mouvement des non-alignés ?
Je pense que les Ivoiriens ont vécu des situations difficiles de guerre et d’insécurité. Certainement qu’ils vont comprendre la situation en Syrie et soutenir le processus diplomatique du règlement pacifique de la crise syrienne.
Vous appelez là officiellement les autorités ivoiriennes à soutenir la position de Téhéran ?
Oui. Il faut comprendre que l’Iran assure actuellement la présidence du Mouvement des pays non-alignés. Notre ministre des Affaires étrangères a transmis une lettre aux autorités des pays membres du Mouvement des non-alignés pour les encourager à soutenir le règlement pacifique de la crise en Syrie. J’ai remis récemment cette lettre à Son Excellence le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères de la Côte d’Ivoire, au cours de l’audience qu’il m’a accordée la semaine dernière.
A la surprise générale, la Russie, l’un des soutiens forts de la Syrie, propose que les armes chimiques soient mises sous contrôle international pour éviter les frappes militaires. Pensez-vous que cette proposition puisse éviter l’escalade militaire ?
Je pense que c’est une bonne proposition de la part de la Russie parce que cela empêche les pays qui cherchent un prétexte pour attaquer la Syrie de passer à l’acte. Cela devrait éviter une autre guerre. Dans le même temps, la proposition russe permet aux Occidentaux, notamment les Etats-Unis et la France de chercher également une solution de sortie de crise.
En tant que soutien du régime du président Bachar el-Assad, pouvez-vous nous dire si oui ou non Damas a utilisé des armes chimiques contre les populations civiles?
Les Nations unies ont dépêché une délégation sur place pour déterminer s’il y a eu oui ou non utilisation d’armes chimiques. Il faut respecter les normes internationales. Pourquoi, avant même que le rapport de la mission de l’Onu ne soit publié, des pays accusent le président Bachar el-Assad d’avoir utilisé ces armes ?
Les Occidentaux ne sont pas seuls à porter cette accusation. Plusieurs médias internationaux ont rapporté que votre ancien président Akbar Rafsanjani se dit être sûr que les autorités syriennes ont utilisé les armes chimiques contre leur peuple.
Ce n’est pas ce que le président Rafsanjani a dit. Il n’a pas déclaré que le gouvernement du président Bachar avait utilisé des armes chimiques. Il y a eu un problème d’interprétation de ses propos. Il a été mal compris. J’ai le texte de sa déclaration. Il a dit que dans un pays où il y a une utilisation de l’arme chimique, il est difficile de retourner à une situation normale. C’est tout ce qu’il a dit. Il n’a pas dit clairement que le gouvernement a utilisé des armes chimiques.
Depuis plusieurs jours, la menace de frappes militaires contre Damas s’éloigne avec la proposition de la Russie. Au cas où il y a effectivement des attaques contre Damas, qu’est-ce que Téhéran compte faire?
Notre Président a annoncé qu’en cas de frappes militaires contre Damas, nous allons soutenir les populations syriennes sur le plan humanitaire. Nous pensons que l’armée syrienne est assez forte pour se défendre. Elle n’a pas besoin d’une intervention iranienne.
L’Iran fournit-il des armes à la Syrie, ou est-ce qu’il y a des militaires iraniens sur le terrain, aux côtés des forces pro- régime?
Nous n’avons rien à faire sur le terrain militaire en Syrie.
Pensez-vous que la sécurité et la stabilité de la région soient vraiment menacées en cas de frappes militaires occidentales?
J’ai déjà dit qu’il y a au moins 50.000 terroristes qui ont infiltré la Syrie à partir de 23 pays. Ils se sont infiltrés dans les rangs des rebelles pour combattre le gouvernement légitime de Bachar el-Assad. Ce sont des gens qui se battent pour de l’argent. Il y a quelques mois, ils étaient en Libye et maintenant ils se retrouvent en Syrie.
Que pensez-vous du soutien de certains pays de la région comme l’Arabie Saoudite aux frappes contre le régime syrien?
Il y a une collaboration entre l’Arabie Saoudite et les rebelles parce que les deux parties sont de la même foi.
Donc pour vous, la guerre en Syrie est purement religieuse ?
Leur objectif est de transformer cette guerre en une guerre religieuse. Mais toutes les évidences montrent que c’est plutôt une guerre commerciale.
Quel est le fondement du soutien iranien au régime du président Bachar el-Assad?
Notre position est claire. Nous soutenons la démocratie et la norme internationale partout dans le monde. Nous voyons qu’il y a des pays qui pensent qu’ils sont forts et qui veulent attaquer un autre, sans motif valable. Nous nous interrogeons sur le rôle des Nations unies. La République islamique d’Iran, en tant que victime des armes chimiques, condamne fortement l’utilisation de ce type d’armes et estime que toute action précipitée de la part des pays qui soutiennent l’opposition syrienne et cela avant la publication du rapport final des inspecteurs de l’Organisation des Nations unies et de la prise de décision du Conseil de sécurité de cette organisation est illégale.
A qui profite cette guerre commerciale ?
Elle profite aux compagnies qui fabriquent des armes, aux Occidentaux. Dans la guerre en Libye, ils ont détruit pratiquement toutes les infrastructures. Maintenant ils sont en train de signer des accords de dizaines de milliards pour reconstruire ou fabriquer des choses qu’eux-mêmes ont détruites en Libye. Ils poursuivent les mêmes objectifs en Syrie. Mais les autorités syriennes ont bien résisté. Le fait que la Syrie accepte que les armes chimiques soient mises sous contrôle du droit international montre qu’il y a un respect des normes internationales et une position logique. Dans une déclaration sur la Syrie, le pape François a annoncé que la guerre dans ce pays n’est pas une guerre humanitaire, mais une guerre commerciale.
Approuvez-vous la proposition de sortie de crise de la Russie de mettre les armes chimiques syriennes sous scellés ?
Notre position a toujours été logique et claire. Nous condamnons l’utilisation des armes chimiques, quelles que soient les parties en présence. L’Iran, la Russie ainsi que la Chine et d’autres pays qui soutiennent cette logique-là militent pour le respect des normes internationales.
Pour la politique intérieure iranienne, pensez-vous qu’avec l’élection du président Hassan Rohani en 2013, la crise sur le dossier du nucléaire iranien va connaître un dénouement ? Il semble plus ouvert au dialogue avec les Occidentaux.
Vous savez bien que l’Agence internationale de l’énergie atomique (Aiea, Ndlr) a annoncé plus d’une vingtaine de fois qu’il n’y a pas de déviation dans le dossier du nucléaire iranien. Toutes les caméras de surveillance de l’Aiea sont installées dans tous les centres, dans toutes les usines nucléaires iraniennes.
Il y a comme un dialogue de sourds entre les deux parties. Vous dites que vous n’enrichissez pas l’uranium, mais les Occidentaux soutiennent le contraire.
Il faut simplement comprendre que nous avons déjà annoncé que nous n’avons pas besoin d’armes nucléaires. Parce qu’il a été démontré qu’aucune arme nucléaire ne peut maintenir en place ou protéger un régime. Vous savez que l’Union soviétique a été déstabilisée alors qu’elle avait des armements atomiques. D’autre part, nous sommes des musulmans. Selon les principes islamiques, la fabrication des armes de destruction massive est interdite. Vous savez bien qu’à l’époque de la guerre Iran-Irak, ils ont utilisé beaucoup d’armes chimiques. Mais nous les Iraniens n’en avons pas utilisé.
Quel est donc le vrai problème lié au dossier du nucléaire iranien ?
Le problème entre nous et les Occidentaux est d’ordre économique et politique. Il faut savoir que le coût de production de l’énergie électrique à partir d’une centrale nucléaire est seize fois moins cher que celle issue d’une centrale thermique. La France produit 90% de son énergie électrique à partir de centrales nucléaires.
Quand vous allez en France, même dans la journée, ils laissent allumer les ampoules dans les avenues. Parce que la production de l’énergie nucléaire coûte moins cher. Mais ici, par exemple, on doit payer cher les factures d’électricité. Les Européens aussi sont prêts à nous procurer de l’uranium enrichi. Mais il se trouve que le coût est trop élevé. Nous avons des mines, la technologie et les savants pour enrichir l’uranium en Iran. Nous n’avons donc pas besoin de l’acheter en Europe.
Comment se porte la coopération entre votre pays et la Côte d’Ivoire ?
Depuis 35 ans que nous avons établi les relations entre l’Iran et la Côte d’Ivoire, elles sont très bonnes. L’année passée, notre ministre des Sports a visité la Côte d’Ivoire. Pendant l’année en cours, certaines entreprises iraniennes sont venues pour investir en Côte d’Ivoire. Il y a une société iranienne qui va investir à hauteur de 70 millions d’Euros dans le domaine de l’alimentation. Il est prévu qu’une délégation des autorités du ministère des Affaires étrangères se rende en Iran. Bientôt, nous allons organiser la grande commission mixte de coopération irano-ivoirienne. Lors de cette commission, nous allons fixer le programme de notre coopération.
On se rappelle qu’une visite du Président Ouattara en Iran avait été annoncée. Ce voyage est-il toujours à l’ordre du jour ?
Nous avions invité le Président Ouattara pour participer au sommet du Mouvement des pays non-alignés qui s’est déroulé à Téhéran. Cette invitation est tombée au moment où il y avait le problème des attaques en Côte d’Ivoire. C’est ce qui a empêché le Président Ouattara de se rendre en Iran.
Quel regard portez-vous sur la gouvernance du Président Alassane Ouattara ?
C’est plutôt à la population ivoirienne d’apprécier cela. Mais nous apprécions les efforts du gouvernement pour améliorer les conditions de vie des populations et l’Iran pour sa part soutient les actions de Son Excellence le Président Ouattara.
Lors d’une interview, il y a plus d’un an, vous annonciez l’installation d’une polyclinique dans la commune d’Abobo. Où en êtes-vous avec le projet?
Nous attendons le ministère de la Santé de Côte d’Ivoire qui doit mettre un bâtiment à notre disposition. Notre part sera de doter ladite polyclinique en médecins et en matériel adéquat et de pointe pour son fonctionnement. Nous demandons un cadre accessible, de préférence en bordure de route pour mettre sur pied cette clinique. Nous attendons le ministère de la Santé et de la lutte contre le sida.
Avez-vous un interlocuteur au ministère, surtout que le blocage semble incompréhensible pour le commun des Ivoiriens?
Nous suivons le dossier. La semaine prochaine, nous serons reçus en audience par le ministre de la Santé pour nous informer sur la suite du projet. Je me ferai accompagner par un médecin iranien pour manifester notre disponibilité à commencer le projet.
Le souci se situe-t-il donc au niveau de l’acquisition du terrain ?
Nos interlocuteurs nous ont montré quelques terrains, mais la localisation n’est pas à notre goût. Nous demandons que le terrain soit vraiment accessible facilement aux populations, pas loin d’une route.
Réalisée par Bakayoko Youssouf
L’actualité internationale est dominée par la situation en Syrie. Quelle est la position de l’Iran sur cette crise ?
La position de l’Iran n’a pas changé. Depuis le premier jour de la crise en Syrie, nous avons dit que cette crise doit être réglée d’une manière pacifique. Depuis lors, en tant que président du Mouvement des pays non-alignés, nous avons organisé deux assises de dialogue à Téhéran pour trouver une solution pacifique. Nous avons invité les opposants au gouvernement syrien à faire des propositions pour une solution pacifique à la crise qui venait de commencer.
Quelle est aujourd’hui la position du Mouvement des pays non-alignés sur le conflit syrien ?
Il est attendu dans le cadre des hauts objectifs du Mouvement des pays non-alignés : primo, que les pays membres condamnent l’utilisation de la force et une nouvelle belligérance dans cette zone sensible du Moyen-Orient. Secundo, qu’ils exigent la nécessité du respect du droit international et de la charte des Nations unies. Tertio, qu’ils soutiennent l’idée de l’arrêt de toute action précipitée avant la publication du rapport final des inspecteurs des Nations unies et la prise de la décision du Conseil de sécurité de cette institution. Nous encourageons donc la prise en compte de façon résolue par les membres du Mouvement des pays non-alignés des initiatives visant à éviter la guerre et à privilégier la concertation pour le règlement par voie politique de la crise.
Qu’attendez-vous de la Côte d’Ivoire, un pays membre du Mouvement des non-alignés ?
Je pense que les Ivoiriens ont vécu des situations difficiles de guerre et d’insécurité. Certainement qu’ils vont comprendre la situation en Syrie et soutenir le processus diplomatique du règlement pacifique de la crise syrienne.
Vous appelez là officiellement les autorités ivoiriennes à soutenir la position de Téhéran ?
Oui. Il faut comprendre que l’Iran assure actuellement la présidence du Mouvement des pays non-alignés. Notre ministre des Affaires étrangères a transmis une lettre aux autorités des pays membres du Mouvement des non-alignés pour les encourager à soutenir le règlement pacifique de la crise en Syrie. J’ai remis récemment cette lettre à Son Excellence le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères de la Côte d’Ivoire, au cours de l’audience qu’il m’a accordée la semaine dernière.
A la surprise générale, la Russie, l’un des soutiens forts de la Syrie, propose que les armes chimiques soient mises sous contrôle international pour éviter les frappes militaires. Pensez-vous que cette proposition puisse éviter l’escalade militaire ?
Je pense que c’est une bonne proposition de la part de la Russie parce que cela empêche les pays qui cherchent un prétexte pour attaquer la Syrie de passer à l’acte. Cela devrait éviter une autre guerre. Dans le même temps, la proposition russe permet aux Occidentaux, notamment les Etats-Unis et la France de chercher également une solution de sortie de crise.
En tant que soutien du régime du président Bachar el-Assad, pouvez-vous nous dire si oui ou non Damas a utilisé des armes chimiques contre les populations civiles?
Les Nations unies ont dépêché une délégation sur place pour déterminer s’il y a eu oui ou non utilisation d’armes chimiques. Il faut respecter les normes internationales. Pourquoi, avant même que le rapport de la mission de l’Onu ne soit publié, des pays accusent le président Bachar el-Assad d’avoir utilisé ces armes ?
Les Occidentaux ne sont pas seuls à porter cette accusation. Plusieurs médias internationaux ont rapporté que votre ancien président Akbar Rafsanjani se dit être sûr que les autorités syriennes ont utilisé les armes chimiques contre leur peuple.
Ce n’est pas ce que le président Rafsanjani a dit. Il n’a pas déclaré que le gouvernement du président Bachar avait utilisé des armes chimiques. Il y a eu un problème d’interprétation de ses propos. Il a été mal compris. J’ai le texte de sa déclaration. Il a dit que dans un pays où il y a une utilisation de l’arme chimique, il est difficile de retourner à une situation normale. C’est tout ce qu’il a dit. Il n’a pas dit clairement que le gouvernement a utilisé des armes chimiques.
Depuis plusieurs jours, la menace de frappes militaires contre Damas s’éloigne avec la proposition de la Russie. Au cas où il y a effectivement des attaques contre Damas, qu’est-ce que Téhéran compte faire?
Notre Président a annoncé qu’en cas de frappes militaires contre Damas, nous allons soutenir les populations syriennes sur le plan humanitaire. Nous pensons que l’armée syrienne est assez forte pour se défendre. Elle n’a pas besoin d’une intervention iranienne.
L’Iran fournit-il des armes à la Syrie, ou est-ce qu’il y a des militaires iraniens sur le terrain, aux côtés des forces pro- régime?
Nous n’avons rien à faire sur le terrain militaire en Syrie.
Pensez-vous que la sécurité et la stabilité de la région soient vraiment menacées en cas de frappes militaires occidentales?
J’ai déjà dit qu’il y a au moins 50.000 terroristes qui ont infiltré la Syrie à partir de 23 pays. Ils se sont infiltrés dans les rangs des rebelles pour combattre le gouvernement légitime de Bachar el-Assad. Ce sont des gens qui se battent pour de l’argent. Il y a quelques mois, ils étaient en Libye et maintenant ils se retrouvent en Syrie.
Que pensez-vous du soutien de certains pays de la région comme l’Arabie Saoudite aux frappes contre le régime syrien?
Il y a une collaboration entre l’Arabie Saoudite et les rebelles parce que les deux parties sont de la même foi.
Donc pour vous, la guerre en Syrie est purement religieuse ?
Leur objectif est de transformer cette guerre en une guerre religieuse. Mais toutes les évidences montrent que c’est plutôt une guerre commerciale.
Quel est le fondement du soutien iranien au régime du président Bachar el-Assad?
Notre position est claire. Nous soutenons la démocratie et la norme internationale partout dans le monde. Nous voyons qu’il y a des pays qui pensent qu’ils sont forts et qui veulent attaquer un autre, sans motif valable. Nous nous interrogeons sur le rôle des Nations unies. La République islamique d’Iran, en tant que victime des armes chimiques, condamne fortement l’utilisation de ce type d’armes et estime que toute action précipitée de la part des pays qui soutiennent l’opposition syrienne et cela avant la publication du rapport final des inspecteurs de l’Organisation des Nations unies et de la prise de décision du Conseil de sécurité de cette organisation est illégale.
A qui profite cette guerre commerciale ?
Elle profite aux compagnies qui fabriquent des armes, aux Occidentaux. Dans la guerre en Libye, ils ont détruit pratiquement toutes les infrastructures. Maintenant ils sont en train de signer des accords de dizaines de milliards pour reconstruire ou fabriquer des choses qu’eux-mêmes ont détruites en Libye. Ils poursuivent les mêmes objectifs en Syrie. Mais les autorités syriennes ont bien résisté. Le fait que la Syrie accepte que les armes chimiques soient mises sous contrôle du droit international montre qu’il y a un respect des normes internationales et une position logique. Dans une déclaration sur la Syrie, le pape François a annoncé que la guerre dans ce pays n’est pas une guerre humanitaire, mais une guerre commerciale.
Approuvez-vous la proposition de sortie de crise de la Russie de mettre les armes chimiques syriennes sous scellés ?
Notre position a toujours été logique et claire. Nous condamnons l’utilisation des armes chimiques, quelles que soient les parties en présence. L’Iran, la Russie ainsi que la Chine et d’autres pays qui soutiennent cette logique-là militent pour le respect des normes internationales.
Pour la politique intérieure iranienne, pensez-vous qu’avec l’élection du président Hassan Rohani en 2013, la crise sur le dossier du nucléaire iranien va connaître un dénouement ? Il semble plus ouvert au dialogue avec les Occidentaux.
Vous savez bien que l’Agence internationale de l’énergie atomique (Aiea, Ndlr) a annoncé plus d’une vingtaine de fois qu’il n’y a pas de déviation dans le dossier du nucléaire iranien. Toutes les caméras de surveillance de l’Aiea sont installées dans tous les centres, dans toutes les usines nucléaires iraniennes.
Il y a comme un dialogue de sourds entre les deux parties. Vous dites que vous n’enrichissez pas l’uranium, mais les Occidentaux soutiennent le contraire.
Il faut simplement comprendre que nous avons déjà annoncé que nous n’avons pas besoin d’armes nucléaires. Parce qu’il a été démontré qu’aucune arme nucléaire ne peut maintenir en place ou protéger un régime. Vous savez que l’Union soviétique a été déstabilisée alors qu’elle avait des armements atomiques. D’autre part, nous sommes des musulmans. Selon les principes islamiques, la fabrication des armes de destruction massive est interdite. Vous savez bien qu’à l’époque de la guerre Iran-Irak, ils ont utilisé beaucoup d’armes chimiques. Mais nous les Iraniens n’en avons pas utilisé.
Quel est donc le vrai problème lié au dossier du nucléaire iranien ?
Le problème entre nous et les Occidentaux est d’ordre économique et politique. Il faut savoir que le coût de production de l’énergie électrique à partir d’une centrale nucléaire est seize fois moins cher que celle issue d’une centrale thermique. La France produit 90% de son énergie électrique à partir de centrales nucléaires.
Quand vous allez en France, même dans la journée, ils laissent allumer les ampoules dans les avenues. Parce que la production de l’énergie nucléaire coûte moins cher. Mais ici, par exemple, on doit payer cher les factures d’électricité. Les Européens aussi sont prêts à nous procurer de l’uranium enrichi. Mais il se trouve que le coût est trop élevé. Nous avons des mines, la technologie et les savants pour enrichir l’uranium en Iran. Nous n’avons donc pas besoin de l’acheter en Europe.
Comment se porte la coopération entre votre pays et la Côte d’Ivoire ?
Depuis 35 ans que nous avons établi les relations entre l’Iran et la Côte d’Ivoire, elles sont très bonnes. L’année passée, notre ministre des Sports a visité la Côte d’Ivoire. Pendant l’année en cours, certaines entreprises iraniennes sont venues pour investir en Côte d’Ivoire. Il y a une société iranienne qui va investir à hauteur de 70 millions d’Euros dans le domaine de l’alimentation. Il est prévu qu’une délégation des autorités du ministère des Affaires étrangères se rende en Iran. Bientôt, nous allons organiser la grande commission mixte de coopération irano-ivoirienne. Lors de cette commission, nous allons fixer le programme de notre coopération.
On se rappelle qu’une visite du Président Ouattara en Iran avait été annoncée. Ce voyage est-il toujours à l’ordre du jour ?
Nous avions invité le Président Ouattara pour participer au sommet du Mouvement des pays non-alignés qui s’est déroulé à Téhéran. Cette invitation est tombée au moment où il y avait le problème des attaques en Côte d’Ivoire. C’est ce qui a empêché le Président Ouattara de se rendre en Iran.
Quel regard portez-vous sur la gouvernance du Président Alassane Ouattara ?
C’est plutôt à la population ivoirienne d’apprécier cela. Mais nous apprécions les efforts du gouvernement pour améliorer les conditions de vie des populations et l’Iran pour sa part soutient les actions de Son Excellence le Président Ouattara.
Lors d’une interview, il y a plus d’un an, vous annonciez l’installation d’une polyclinique dans la commune d’Abobo. Où en êtes-vous avec le projet?
Nous attendons le ministère de la Santé de Côte d’Ivoire qui doit mettre un bâtiment à notre disposition. Notre part sera de doter ladite polyclinique en médecins et en matériel adéquat et de pointe pour son fonctionnement. Nous demandons un cadre accessible, de préférence en bordure de route pour mettre sur pied cette clinique. Nous attendons le ministère de la Santé et de la lutte contre le sida.
Avez-vous un interlocuteur au ministère, surtout que le blocage semble incompréhensible pour le commun des Ivoiriens?
Nous suivons le dossier. La semaine prochaine, nous serons reçus en audience par le ministre de la Santé pour nous informer sur la suite du projet. Je me ferai accompagner par un médecin iranien pour manifester notre disponibilité à commencer le projet.
Le souci se situe-t-il donc au niveau de l’acquisition du terrain ?
Nos interlocuteurs nous ont montré quelques terrains, mais la localisation n’est pas à notre goût. Nous demandons que le terrain soit vraiment accessible facilement aux populations, pas loin d’une route.
Réalisée par Bakayoko Youssouf