Jamais en Côte d’Ivoire, les militants d’un parti politique n’ont autant souffert le martyre que ceux du Rassemblement des Républicains. Jamais, des membres et sympathisants d’une formation politique n’ont été aussi réprimés dans ce pays.
Sur cette terre d’Eburnie, ces hommes et ces femmes ont tout connu : l’humiliation d’être bafoué dans sa dignité, la douleur d’être massacré parfois avec ignominie, les enlèvements, la torture, les exécutions sommaires, le déni de patronyme et de faciès…
Dès que le RDR a été créé et qu’on a senti que des millions d’Ivoiriens se reconnaissaient aux idéaux de ce parti, ils ont commencé à être persécutés. Dans l’administration, c’était la chasse aux sorcières, qui visait les hauts cadres supposés être proches de ce parti. Dans le pays, c’étaient les rafles à n’en point finir, où on arrachait les cartes d’identité des militants du RDR si on ne leur demandait pas de prouver leur citoyenneté ivoirienne.
Quand il y a eu le boycott actif en 95, c’était encore eux qu’on pourchassait dans les rues d’Abidjan et des grandes villes du pays, certains étaient même traqués jusqu’à leur domicile. Le 26 octobre 2000, au moment même où Laurent Gbagbo accédait à la magistrature suprême du pays, selon ses propres termes, dans « des conditions calamiteuses », plusieurs centaines de jeunes militants du RDR, ou considérés comme tel, étaient enlevés dans des communes d’Abidjan, notamment à Abobo, puis exécutés froidement. Quelques jours plus tard, on découvrira un charnier de 57 corps dénudés, portant tous des impacts de balles, dans la forêt du Banco, sur la route de Yopougon.
Le 4 décembre 2000, au cours de la répression sauvage d’une marche du RDR, des femmes sont battues et violées au vu et au su de tout le monde au stade Félix Houphouët-Boigny. En pleine journée. Leur crime? Avoir manifesté contre le rejet de la candidature de leur mentor aux législatives de cette année-là, pour « nationalité douteuse ». Ce n’est pas tout.
Lorsque la rébellion éclate dans la nuit du 18 au 19 septembre 2002, c’est encore les militants du RDR qui sont ciblés dans la partie sud du pays, singulièrement à Abidjan. En eux, on a vite fait de voir des rebelles. A la tombée de la nuit, pendant le couvre-feu, des escadrons de la mort sillonnent les quartiers de la capitale économique, une liste noire en mains, enlèvent des militants du RDR, qu’ils exécutent, en toute impunité. Instaurant du coup, chez eux, une psychose terrible. Ceux qui en avaient les moyens, ont dû s’exiler pour échapper à une mort qui leur pendait au nez.
Pour autant, le supplice des militants et sympathisants du RDR ne s’arrêtera pas là. Les 24 et 25 mars 2004, quand le pouvoir Gbagbo décide de mater dans le sang, la marche de l’opposition, c’est encore eux qui seront le plus tués, sur la centaine de morts qui seront enregistrés officiellement. Même, après la marche, ils étaient toujours pourchassés et abattus, quelques-uns ont même été tirés de leur sommeil, dans la nuit du 24 au 25 mars, pour être exécutés comme des…chiens.
En 2010, entre les deux tours du scrutin présidentiel, plusieurs jeunes du RDR ont été canardés, au siège de leur parti à Yopougon Wassakara, pendant leur sommeil par des hommes en armes. Le lendemain de l’attaque, l’émotion était à son comble, à la vue des cadavres jonchés dans une marre de sang. Qu’avaient-ils fait de mal pour être ainsi tués ? Rien du tout, si ce n’est maintenir en eux la ferveur militante pendant cette période électorale, en s’installant dans ces bureaux.
Mais, le summum de leur calvaire a été la crise postélectorale, entre décembre 2010 et avril 2011 avec notamment le siège d’Abobo, par les forces pro-Gbagbo, et également la furia des miliciens et mercenaires libériens à Yopougon. Dans ces deux communes particulièrement, le RDR a perdu beaucoup de ses braves militants. Emportés par la haine sauvage des partisans du régime frontiste. Certains ont été brûlés vifs (le fameux « article 125 »), quand d’autres ont été simplement criblés de balles, parfois quatre, cinq voire plus, membres d’une même famille. On pourrait passer toute une journée à égrener tout ce que les militants et sympathisants du RDR ont enduré durant ces 20 dernières années qu’on en finirait pas, tant la liste est longue. Toutefois, le devoir de mémoire impose qu’on ne les oublie pas, car ils ont fait le sacrifice suprême, pour le RDR et aussi pour la Côte d’Ivoire.
Au moment donc où le RDR s’apprête à souffler sur ses 19 bougies, il est important que nous nous souvenions de ces combattants de la liberté, qui ont, pour certains, payé de leur vie, et pour d’autres, tout perdu, pour que ce parti soit là où il est actuellement. Au sommet de la Côte d’Ivoire.
Pour ceux qui ne sont plus parmi nous, ayons une pensée pieuse pour eux, en ce jour anniversaire de la création du RDR. Implorons, partout où nous nous trouvons, le Tout-Puissant, pour qu’il les accueille en son paradis. Qu’ils sachent là où ils se trouvent aujourd’hui, qu’ils ne sont pas tombés, pour rien, sur les champs de bataille. Leur combat n’a pas été vain, parce que le RDR a conquis le pouvoir d’Etat. Et bien plus, la Côte d’Ivoire est redevenue un Etat de droit où personne n’est persécuté pour ses origines et où on peut circuler du Nord au Sud, et de l’Est en Ouest, sans être inquiété par des barrages des forces de l’ordre. Plus que l’accession d’Alassane Ouattara à la tête du pays, c’était une lutte pour une société égalitaire où tous les Ivoiriens ont les mêmes droits, quelles que soient leurs ethnies et leurs croyances religieuses. Pour cela, ils peuvent être fiers du devoir accompli.
A ceux qui ont la chance d’être encore en vie, après cette tragédie, qu’ils ne baissent pas les bras, même s’ils n’ont encore rien obtenu, en termes de retombées financières ou matérielles. La « récompense » viendra peut-être après. Ou même pas. Mais, ce qu’ils doivent retenir, c’est qu’au-delà de tout ce qu’on pourrait leur offrir, le plus beau cadeau de leur lutte, c’est cette Côte d’Ivoire de paix et de sécurité d’aujourd’hui, qui se construit et tend allègrement les bras vers l’émergence. Et surtout qu’ils devront léguer à leurs enfants et aux générations futures.
C’est pourquoi, ils doivent rester, en dépit de tout, mobilisés et gonflés à bloc, pour ne pas que le pays retombe dans les travers du passé. Le plus important est de ne pas surtout perdre les acquis de la lutte…
Y. Sangaré
Sur cette terre d’Eburnie, ces hommes et ces femmes ont tout connu : l’humiliation d’être bafoué dans sa dignité, la douleur d’être massacré parfois avec ignominie, les enlèvements, la torture, les exécutions sommaires, le déni de patronyme et de faciès…
Dès que le RDR a été créé et qu’on a senti que des millions d’Ivoiriens se reconnaissaient aux idéaux de ce parti, ils ont commencé à être persécutés. Dans l’administration, c’était la chasse aux sorcières, qui visait les hauts cadres supposés être proches de ce parti. Dans le pays, c’étaient les rafles à n’en point finir, où on arrachait les cartes d’identité des militants du RDR si on ne leur demandait pas de prouver leur citoyenneté ivoirienne.
Quand il y a eu le boycott actif en 95, c’était encore eux qu’on pourchassait dans les rues d’Abidjan et des grandes villes du pays, certains étaient même traqués jusqu’à leur domicile. Le 26 octobre 2000, au moment même où Laurent Gbagbo accédait à la magistrature suprême du pays, selon ses propres termes, dans « des conditions calamiteuses », plusieurs centaines de jeunes militants du RDR, ou considérés comme tel, étaient enlevés dans des communes d’Abidjan, notamment à Abobo, puis exécutés froidement. Quelques jours plus tard, on découvrira un charnier de 57 corps dénudés, portant tous des impacts de balles, dans la forêt du Banco, sur la route de Yopougon.
Le 4 décembre 2000, au cours de la répression sauvage d’une marche du RDR, des femmes sont battues et violées au vu et au su de tout le monde au stade Félix Houphouët-Boigny. En pleine journée. Leur crime? Avoir manifesté contre le rejet de la candidature de leur mentor aux législatives de cette année-là, pour « nationalité douteuse ». Ce n’est pas tout.
Lorsque la rébellion éclate dans la nuit du 18 au 19 septembre 2002, c’est encore les militants du RDR qui sont ciblés dans la partie sud du pays, singulièrement à Abidjan. En eux, on a vite fait de voir des rebelles. A la tombée de la nuit, pendant le couvre-feu, des escadrons de la mort sillonnent les quartiers de la capitale économique, une liste noire en mains, enlèvent des militants du RDR, qu’ils exécutent, en toute impunité. Instaurant du coup, chez eux, une psychose terrible. Ceux qui en avaient les moyens, ont dû s’exiler pour échapper à une mort qui leur pendait au nez.
Pour autant, le supplice des militants et sympathisants du RDR ne s’arrêtera pas là. Les 24 et 25 mars 2004, quand le pouvoir Gbagbo décide de mater dans le sang, la marche de l’opposition, c’est encore eux qui seront le plus tués, sur la centaine de morts qui seront enregistrés officiellement. Même, après la marche, ils étaient toujours pourchassés et abattus, quelques-uns ont même été tirés de leur sommeil, dans la nuit du 24 au 25 mars, pour être exécutés comme des…chiens.
En 2010, entre les deux tours du scrutin présidentiel, plusieurs jeunes du RDR ont été canardés, au siège de leur parti à Yopougon Wassakara, pendant leur sommeil par des hommes en armes. Le lendemain de l’attaque, l’émotion était à son comble, à la vue des cadavres jonchés dans une marre de sang. Qu’avaient-ils fait de mal pour être ainsi tués ? Rien du tout, si ce n’est maintenir en eux la ferveur militante pendant cette période électorale, en s’installant dans ces bureaux.
Mais, le summum de leur calvaire a été la crise postélectorale, entre décembre 2010 et avril 2011 avec notamment le siège d’Abobo, par les forces pro-Gbagbo, et également la furia des miliciens et mercenaires libériens à Yopougon. Dans ces deux communes particulièrement, le RDR a perdu beaucoup de ses braves militants. Emportés par la haine sauvage des partisans du régime frontiste. Certains ont été brûlés vifs (le fameux « article 125 »), quand d’autres ont été simplement criblés de balles, parfois quatre, cinq voire plus, membres d’une même famille. On pourrait passer toute une journée à égrener tout ce que les militants et sympathisants du RDR ont enduré durant ces 20 dernières années qu’on en finirait pas, tant la liste est longue. Toutefois, le devoir de mémoire impose qu’on ne les oublie pas, car ils ont fait le sacrifice suprême, pour le RDR et aussi pour la Côte d’Ivoire.
Au moment donc où le RDR s’apprête à souffler sur ses 19 bougies, il est important que nous nous souvenions de ces combattants de la liberté, qui ont, pour certains, payé de leur vie, et pour d’autres, tout perdu, pour que ce parti soit là où il est actuellement. Au sommet de la Côte d’Ivoire.
Pour ceux qui ne sont plus parmi nous, ayons une pensée pieuse pour eux, en ce jour anniversaire de la création du RDR. Implorons, partout où nous nous trouvons, le Tout-Puissant, pour qu’il les accueille en son paradis. Qu’ils sachent là où ils se trouvent aujourd’hui, qu’ils ne sont pas tombés, pour rien, sur les champs de bataille. Leur combat n’a pas été vain, parce que le RDR a conquis le pouvoir d’Etat. Et bien plus, la Côte d’Ivoire est redevenue un Etat de droit où personne n’est persécuté pour ses origines et où on peut circuler du Nord au Sud, et de l’Est en Ouest, sans être inquiété par des barrages des forces de l’ordre. Plus que l’accession d’Alassane Ouattara à la tête du pays, c’était une lutte pour une société égalitaire où tous les Ivoiriens ont les mêmes droits, quelles que soient leurs ethnies et leurs croyances religieuses. Pour cela, ils peuvent être fiers du devoir accompli.
A ceux qui ont la chance d’être encore en vie, après cette tragédie, qu’ils ne baissent pas les bras, même s’ils n’ont encore rien obtenu, en termes de retombées financières ou matérielles. La « récompense » viendra peut-être après. Ou même pas. Mais, ce qu’ils doivent retenir, c’est qu’au-delà de tout ce qu’on pourrait leur offrir, le plus beau cadeau de leur lutte, c’est cette Côte d’Ivoire de paix et de sécurité d’aujourd’hui, qui se construit et tend allègrement les bras vers l’émergence. Et surtout qu’ils devront léguer à leurs enfants et aux générations futures.
C’est pourquoi, ils doivent rester, en dépit de tout, mobilisés et gonflés à bloc, pour ne pas que le pays retombe dans les travers du passé. Le plus important est de ne pas surtout perdre les acquis de la lutte…
Y. Sangaré