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Région Publié le samedi 1 février 2014 | AIP

Statut des rois et chefs traditionnels: Nanan N’Guessan Bingbin, salue son avènement mais émet quelques réserves

Dimbokro - Nanan N’Guessan Bingbin est chef du village de Kangrassou-Aluibo dans la sous-préfecture de Dimbokro. Il est Secrétaire général adjoint (Sga) du Conseil des Rois et Chefs traditionnels de Côte d’Ivoire et par ailleurs membre fondateur et président de l’Union des Chefs de villages de Côte d’Ivoire. Dans cette interview, il salue la validation par le gouvernement du projet de statut des rois et chefs traditionnels, en attendant son adoption définitive par l’Assemblée nationale et s’interroge sur le contenu de ce statut.

Aip : Quels commentaires faites-vous, Nanan, de la décision du chef de l’Etat octroyant un statut aux rois et chefs traditionnels de Côte d’Ivoire ?

Nanan N’Guessan Bingbin (NNB) : Il faut dire que nous avons couru depuis longtemps après ce statut. L’organisation des Rois et Chefs traditionnels de Côte d’Ivoire qui a eu son histoire depuis 1999-2000 avait pour objectif majeur la reconnaissance de cette institution traditionnelle garante de nos us et coutumes, afin de pérenniser la cohésion sociale et garantir les relations intercommunautaires et intracommunautaires.

De ce fait, nous avons fait toute la Côte d’Ivoire pour essayer de sensibiliser nos collègues qui sont rois, chefs de cantons, chefs de provinces, et chefs de villages et de tribus. Et donc depuis treize ans, nous n’avons qu’œuvré pour la reconnaissance de la chefferie traditionnelle légitime et légale de sorte que quand il y a des décisions majeures à prendre au niveau du pays, nous soyons associés… C’est en cela qu’à toutes les grandes réunions nationales et internationales (séminaires, colloques, sommets, etc.) auxquelles nous avons été conviés, nous n’avons eu de cesse de dire que nous voulons un statut.

L’arrêté colonial N° 3206 du 10 octobre 1934 nous octroyant une espèce de statut nous traite d’indigènes alors que nous sommes indépendants depuis 1960… C’est pourquoi nous remercions du fond du cœur les autorités actuelles qui nous octroient un statut même si avant elles, l’intention n’a pas manqué aux autres qui se sont succédé à la tête de l’Etat.

Le président Bédié y a pensé mais le coup d’Etat de 1999 ne lui a pas permis, de façon claire, de réaliser cela. Le général Guéi arrivé au pouvoir nourrissait de bonnes intentions relativement à notre statut si bien que pratiquement tous les week-ends on était à Yamoussoukro pour des discussions. Quant au président Gbagbo, il a pris son premier bain de foule le 28 novembre 2000 à l’hôtel communal de Cocody où nous lui avons soumis la question de la chefferie traditionnelle et notre statut juridique. Il a répondu qu’il est compatissait, qu’il est avec nous et est très sensible à cette question. C’est ainsi qu’à la création du Conseil des Rois et Chefs traditionnels, le 25 janvier 2005, à l’hôtel Ivoire, le président Gbagbo nous a dit qu’il est prêt à régler ce problème dès que la situation socio-économique du pays le mettra à l’aise. Il a alors décidé de mettre en place une commission constituée de juristes, d’administrateurs et dirigée par un de nos frères, son directeur de cabinet, M. N’Zi Paul David. Malheureusement, avec la situation qui prévalait, cela n’a pas abouti. Mais après la crise postélectorale, beaucoup de candidats ont trouvé en nous, chefs traditionnels, des stabilisateurs de la société pour travailler dans nos zones de compétence à garantir les fondamentaux au niveau des relations humaines. Aussi, le président Alassane Ouattara, lors de sa campagne en 2010, a-t-il promis qu’une fois au pouvoir, il va nous octroyer ce statut. Aujourd’hui, c’est chose faite. Il a eu la même intention que tous ses prédécesseurs mais lui est passé aux actes. Pour ce faire, nous lui traduisons toute notre gratitude.

Aip : Au chapitre de la rémunération, beaucoup de vos pairs pensaient à un salaire déterminé, que dit exactement la décision sur cette question pécuniaire ?

NNB : Le chef traditionnel a beaucoup de responsabilités alors qu’il ne dispose pas de moyens. Avec ce statut, nous ne pouvons pas dire que nous n’avons pas pensé à un salaire, ce serait masquer les choses. Mais aujourd’hui, ce sur quoi nous insistons, c’est que les chefs ont trop de charges à travers les nombreuses réceptions et sollicitations auxquelles ils doivent faire face. C’est la raison fondamentale de souhait d’un salaire. Si cela peut venir de façon matérielle ponctuelle et périodique pour nous soulager, nous pourrions être plus actifs dans nos activités. Donc, nous disons que si cela est possible, nous ne cracherions pas de dessus. Il faut donc que l’Etat puisse nous aider dans la gestion des institutions dont il vient de nous doter.

Aip : Que dites-vous sur l’idée de subvention à vous allouer dans le cadre de votre statut et non des salaires à vous payer individuellement ?

NNB : Il va y avoir des problèmes dans la répartition ou l’utilisation de cette subvention. Le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité qui nous a reçus n’a pas manqué de nous demander quelle serait la formule qui siérait le mieux. Est-ce un salaire, une dotation budgétaire pour qu’on puisse fonctionner ? Sur place, nous avons donné notre avis qui est que chaque chef perçoive quelque chose, quitte à lui de fonctionner comme il veut au mieux de ses intérêts et au mieux des intérêts de ses administrés. Nous disons qu’il faut prendre en compte les chefs de tribus et les chefs de provinces qui ne l’ont pas été au départ alors que les rois et les chefs de villages l’étaient.

Que chacun soit rétribué en fonction de ses responsabilités, de la nécessité et de la pertinence des activités qu’il mène sur le terrain. Je dis en tout cas qu’il faut quelque chose de substantiel pour chaque chef, pour ne pas dire pour chaque village. Par-dessus tout, il y a eu un problème de contribution budgétaire qu’il faut chercher à comprendre… On nous parle de Chambre de Rois et Chefs traditionnels. Qui sera dans cette Chambre ? Faut-il des représentations ? Si des représentants sont choisis par exemple par département, est-ce à eux qu’ira la rémunération ? … C’est toute une problématique qui mérite d’être éclaircie. On maitrise la forme notamment l’Assemblée générale annuelle et la Chambre mais on en maitrise moins le fond. Enfin, moi je pense que statut pour statut, on n’a pas bougé.

Aip : Nanan, à vous entendre, vous posez là à la fois le problème d’entrée dans la Chambre notamment le mode de désignation, et le problème de rémunération. Comment souhaitez-vous que tout cela se déroule concrètement ?

NNB : Tout ce qui n’émane pas de nos pratiques traditionnelles est une concession. Nous pensons que ce doit être ainsi. A ce niveau, pour une question d’équité, le concepteur lui-même doit pouvoir savoir contenter les uns et les autres. En ce qui me concerne, si cette chambre est créée, il faudrait qu’elle soit composée de rois, de chefs de villages, de chefs de tribus, de cantons et de provinces. Quitte à eux de trouver les attributions à donner à chaque membre. Mais la question fondamentale repose toujours sur la façon de désigner notamment en ce qui concerne les chefs de villages qui sont très nombreux. Les critères de choix sont donc très importants tout comme le mode de rémunération. Il faut y réfléchir sérieusement pour éviter des frustrations.

Aip : Souhaitez-vous, Nanan, devant tant d’interrogations que vous soulevez, que le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, à l’instar de son collègue de la Fonction publique et de la Réforme administrative vienne donner des éclairages publiquement notamment à la télévision et à la radio?

NNB: Le problème de chefferie ne doit pas être ébruité et doit être traité différemment... Je souhaite que le ministre de tutelle puisse clarifier le problème de la Chambre, nous dire ce qu’il entend par Assemblée générale annuelle. Est-ce une présentation de bilan par la Chambre chaque année ? Est-ce la présentation par les chefs de ce qui ne va pas dans leurs circonscriptions respectives, afin que la Chambre y apporte des réponses dans ses actions ? Voilà autant de questionnements qu’on ne maitrise pas. Le ministre doit donc donner des éclaircissements pour une bonne compréhension de la situation aussi bien par les chefs que par les administrés. A lui de trouver la formule pour communiquer.

Aip : Votre dernier mot.

NNB : (…) Il y a une loi, un arrêté et un décret d’application qui vont être pris. C’est tout cela que nous attendons. Peut-être qu’ils apporteront des réponses à nos préoccupations. Attendons de voir.

zgrp/Ask
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