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Société Publié le vendredi 10 avril 2015 | L’intelligent d’Abidjan

Contribution: à propos d’une probable menace terroriste islamique en Côte d’Ivoire

Depuis un certains temps, de façon récurrente, des journaux de la place font état d’une menace terroriste qui guetterait la Côte d’Ivoire. Même si ces informations sont accueillies avec un semblant d’indifférence dans l’opinion, il n’en demeure pas qu’elles sont traitées avec le plus grand sérieux au plus haut sommet de l’Etat. Si l’on s’en tient à la Lettre du Continent n°703 du 1er avril 2015 citée par ces journaux. Pour l’instant, le Conseil supérieur des imams en Côte d’Ivoire (Cosim), l’instance suprême de l’Islam en Côte d’Ivoire n’a pas encore réagi. Toutefois, nous nous permettons de jeter un regard sur cette question hautement sensible.

Avant tout, à titre comparatif, essayons de comprendre l’histoire et le contexte de pays ouest-africains qui sont la cible du terrorisme islamique. Premier exemple, le Mali. Ce pays, à 98% musulmans, a connu une islamisation pacifique, grâce à l’action des commerçants arabes dans le cadre des échanges avec le Maghreb. Tombouctou en est une illustration vivante de cette rencontre. Toutefois, depuis la colonisation jusqu’à ce jour, les Touareg, une composante importante des peuples du sahara malien n’ont jamais cessé de montrer leur hostilité à toute occupation (coloniale) et leur volonté indépendantiste (vis-à-vis du pouvoir de Bamako). C’est sur ce terreau fertile contestataire que va germer une énième rébellion en 2012. Cette fois portée par des mouvements djihadistes islamistes. Ce qui crée un capharnaüm conflictuel insoluble jusqu’à ce jour.

Deuxième exemple, le Nigeria où l’Islam est implanté majoritairement au Nord (haussa et peul) et au Sud-ouest (yorouba). Si l’Islamisation du pays yoruba s’est faite pacifiquement, celle du nord (à l’origine haoussa) s’est faite par les peuls en assujettissant par la force les autochtones. Ainsi, depuis l’indépendance du Nigéria, la radicalisation islamique (application de la charia) et les violences religieuses ont toujours eu pour théâtre le septentrion nigérian. Au contraire du pays yorouba, où se côtoient dans une intelligence parfaite les chrétiens et les musulmans. C’est sur ces braises conflictuelles religieuses non éteintes du nord du Nigéria, que va se rallumer en 2002 le mouvement djihadiste, aujourd’hui terroriste, Boko Haram dont le « râleur » Aboubakar Shekaou en est le porte-étendard actuel. Qu’en est-il de la Côte d’Ivoire ?

L’islam a pénétré en Côte d’Ivoire depuis le XIème siècle avec des vagues de migrations successives venant principalement de l’empire Mali. Il s’est propagé pacifiquement grâce, d’un côté, aux commerçants et de l’autre, aux érudits musulmans très sollicités, qui conseillaient les rois (même animistes.) La colonisation est venue favoriser l’installation des musulmans dans les villes du sud forestier, principalement pour des raisons économiques. Depuis lors, des « dioulabougous ou dioulakros» ont poussé partout dans le sud et les musulmans vivent en harmonie avec leurs concitoyens « autochtones. » Même si, la parenthèse des deux décennies de crise qu’a connue le pays a failli déstabiliser les fondements de ce vivre-ensemble harmonieux, fruit de la vision des pères-fondateurs de la Côte d’Ivoire. En effet, au plus fort de la crise post-électorale, où les imams et les mosquées étaient la cible de groupes armés, les musulmans ont esquivé cette invite à la guerre religieuse, en suivant les consignes du Cosim qui les appelaient à la retenue.
Pourquoi donc, l’actuelle période de réconciliation, deviendrait-elle subitement propice à des attentats terroristes attribués à des musulmans ?
Il est indéniable que depuis le 11-septembre 2001, aucun pays n’est à l’abri du terrorisme. En conséquence, il serait irresponsable de rejeter d’un simple revers de la main ces menaces. Pourquoi?

Premièrement, parce que la mondialisation aidant, avec les facilités de contacts (virtuels), les traditions vacillent. De plus, la jeunesse, pas toujours bien formée et désœuvrée, en quête d’identité, s’approprie facilement des référents extérieurs qui vont souvent contre les valeurs locales.

Deuxièmement, la volonté affichée par les autorités ivoiriennes de faire participer des militaires ivoiriens à la mission africaine de lutte contre la secte terroriste Boko Haram, peut aussi justifier cette menace. Comme une sorte de réponse du berger à la bergère.

Troisièmement, on pourrait sans-fuyant penser que des associations musulmanes, séduites par l’idéologie djihadiste aient décidé d’être actives en Côte d’Ivoire. Si oui, pour quelle fin ? Dans ce cas, leurs premiers ennemis seraient leurs coreligionnaires ivoiriens. Qui rejettent totalement dans leur écrasante majorité cette vision de l’islam.

Pour se prémunir du terrorisme, plusieurs leviers doivent interagirent.

Primo, au niveau familial à travers l’effort fondamental d’éducation des enfants par leurs parents. C’est pourquoi, face à la démission de plus en plus fréquente de certains parents, le temps n’est-il pas arrivé de pénaliser l’irresponsabilité de ces géniteurs permissifs ? Cela, aurait le mérite de leur mettre la pression en amont face à leurs éventuels laisser-aller.

Secundo, la communauté musulmane doit aussi prendre ses responsabilités. D’abord, en affinant son organisation pour éviter que prospèrent d’éventuelles associations radicales. Ensuite, en offrant un meilleur encadrement aux pensionnaires des écoles confessionnelles par un contenu pédagogique qui, enseigne les véritables dogmes de l’Islam (religion de paix, d’amour de l’autre et d’un cheminement patient de la découverte d’Allah) et surtout leur assure une meilleure intégration socio-professionnelle. Enfin, par un encadrement de proximité des associations de jeunesse comme par le passé ; au risque de les voir manipulées par des mains étrangères et des esprits malins.

Tertio, il est impératif que l’Etat assume pleinement son rôle régalien de protection des citoyens. En démantelant quelque «cellule dormante » et en les mettant hors d’état de nuire. Mais aussi, en continuant en amont, à se pencher sur la question de la formation et de l’emploi des jeunes. Car, la plus grande menace sécuritaire pour nos pays reste aujourd’hui la perte d’identité et le désœuvrement de la jeunesse. S’y consacrer pleinement, offrirait un retour sur investissement inestimable aussi bien socialement, économiquement que politiquement.

NURUDINE OYEWOLE
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