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Art et Culture Publié le mercredi 6 janvier 2016 | Notre Voie

LE «FOKUé» en pays Akyé : La danse guerrière menacée de disparition

Le «fokué» ou «fankwé», en pays akyé (ou Attié), est une danse guerrière qui soulève la problématique de la transmission de pouvoir. Aujourd’hui, cette pratique semble loin d’être une préoccupation centrale de la population locale. Le dossier de Notre Voie.

«Le «fokué» ou «fankwé» est un vecteur culturel de formation des jeunes qui expérimentent le pouvoir comme réalité supranaturelle et politico-sociale, sensée être transmise, à une catégorie de personnes faisant la preuve de leurs aptitudes de maturité à travers leur intégration aux classes d’âges. Mais aujourd’hui, cette pratique est soumise aux influences de la modernité qui entache sa pérennité». C’est l’éclairage de l’anthropologue Yao Saturnin Davy Akaffou. Pour l’enseignant-chercheur à l’Institut des sciences anthropologiques de développement (Isad) / Ufr Sciences de l’homme et de la société de l’Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody-Abidjan, le «fokué» est une danse guerrière du patrimoine culturel des akan du sud – particulièrement les Akyé – en tant que mode de transmission de pouvoir aux nouvelles générations. Il constitue de fait, selon lui, un véritable test de maturité pour les jeunes soumis à ce rituel.
«Quant à savoir comment les jeunes perçoivent cette cérémonie initiatique aujourd’hui, face aux orientations nouvelles que connaissent presque toutes les localités de la Région de la Mé liées aux contingences de la modernité, il faut dire que le «fokué» est appréhendé comme une danse de générations qui consiste en la passation de flambeau tenu par les anciens aux nouvelles générations » explique Béda Achiépi, notable.
Pour lui, le «fokué» se trouve aujourd’hui à l’épreuve de la modernité qui, selon l’autorité coutumière, est perçue comme une transformation, un changement nouveau marqué par une amélioration des conditions de vie des populations au détriment des choses anciennes considérées comme rétrogrades et inutiles. Et que par ailleurs, on note de ce fait, un recul progressif de cette pratique ancestrale du «fokué» au profit de nouveaux centres d’intérêts avec l’urbanisation des villages. «La musique moderne avec de nouveaux genres musicaux que nous découvrons à travers les mass médias, au plan national et international, intéressent la plupart d’entre nous, jeunes. En plus de cela, en marge des travaux champêtres, les virées alcooliques, le sexe et les activités d’intérêts pécuniaires sont de plus en plus prisées par la jeunesse villageoise guidée désormais par le souci de se mettre à la « page » ou à la mode », argumente Innocent Yapi, responsable de jeunesse. Qui estime que cette jeunesse, émancipée du dictat des principes traditionnels, trouve en la danse «fokué» une chose inutile car elle s’apparente au fétichisme, voire à la sorcellerie.
Conséquences, selon lui, les us et coutumes sont de moins en moins respectées avec ses tabous bravés par cette jeunesse, aidée en cela par la crise militaro-politique qu’à connu le pays en montrant les limites de cette croyance. «C’est pour toutes ces raisons que le «fokué» a pris au fil du temps, une dimension beaucoup plus festive que mystique et fait souvent l’objet de récupération politicienne de mobilisation populaire. A tel point que, l’organisation de cette cérémonie est parfois entachée de susceptibilités liées à l’idée de destitution de chefs de village au profit d’un autre. Ce qui entraine des tensions, voire des conflits qui ne favorisent plus la tenue de la cérémonie du «fokué» dans la plupart des régions akyé», expliquent Béda Achiépi, notable, et Yénon Barthélémy, chef guerrier ou «sapohin».
En somme, déplorent-ils, le «fokué» semble loin d’être une préoccupation centrale des Akyé, en particulier le jeunes guidés par des soucis de subsistance et de bien-être social. Faut-il pour autant laisser disparaitre cette tradition ? «Assurément pas ! Car un peuple sans histoire est un peuple qui va à la perdition. Le retour aux sources pour comprendre l’histoire des peuples et posséder l’héritage ancestral pour le transmettre aux générations futures est un enrichissement pour l’Afrique et l’humanité tout entière», conclut l’anthropologue Yao Saturnin n


Dossier réalisé par
Patrice Tapé
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