Abidjan – A l’instar de la communauté mondiale, la Côte d’Ivoire est déterminée à opposer une « Tolérance zéro » face au drame des mutilations génitales féminines (MGF), communément appelées excision.
Commémorée tous les 06 février, la Journée internationale de lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF), décrétée par l’Assemblée générale des Nations Unies, est une occasion, une fois de plus, de rappeler que cette pratique que rien ne justifie a encore droit de cité dans le monde, notamment en Afrique et dans des pays asiatiques.
Les mutilations génitales féminines désignent l'ablation totale ou partielle des organes génitaux féminins externes. Généralement réalisée par une exciseuse traditionnelle avec un couteau ou une lame de rasoir avec ou sans anesthésie, les procédures varient selon les régions et les groupes ethniques. Elles peuvent aller d'une simple scarification à l'ablation partielle ou totale du clitoris et des lèvres (excision) voire à la suture des lèvres pour fermer la vulve (infibulation).
En Côte d’Ivoire, le taux de prévalence est de l’ordre de 36 à 38%, selon le ministère de la Femme, de la Protection de l’enfant et de la Solidarité. Dans les zones Ouest, Nord-Ouest et Nord, il touche plus de 70% des 15-49 ans mais ce taux décline dans les régions Centre, Sud et Est, quoiqu’existant, en raison des migrations transfrontalières.
Aucun bénéfice connu pour la santé
De l’avis des spécialistes, les MGF ne présentent aucun bénéfice connu pour la santé. Parmi les complications les plus courantes figurent les hémorragies lors de l'opération, les infections urinaires, des règles douloureuses, des douleurs chroniques, une diminution du plaisir sexuel et des complications liées à l'accouchement et la mise en péril du nouveau-né, les problèmes menstruels et urinaires dont les fistules, l'infertilité, les risques de contamination au VIH/Sida et la mort.
L’environnement juridique
L’interdiction de l’excision a été votée en 1998 en Côte d’Ivoire. La loi n°98/757 promulguée le 23 décembre 1998 prévoit que toute atteinte à l’intégrité des organes génitaux d’une femme, par voie de mutilation totale ou partielle, excision, désensibilisation ou tout autre pratique, si elle s’avère sanitairement néfaste, est passible d’une peine d’emprisonnement de un à cinq ans et d’une forte amende (de 360 000 à 2 millions de FCFA, soit environ de 550 à 3 060 euros).
La peine est portée de cinq ans à 20 ans d’emprisonnement si la victime meurt des suites de son opération.
Par ailleurs, si la procédure est effectuée par un médecin, il risque jusqu’à cinq ans d’interdiction de pratique professionnelle
Les conventions et traités internationaux
Plusieurs textes internationaux condamnant la pratique des MGF ont été ratifiés par la Côte d’Ivoire notamment la Convention sur les droits de l’enfant (CDE), la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes (CEDEF), la Charte africaine sur les droits et le bien-être de l’enfant, la Charte africaine sur les droits humains et ceux des populations et le Protocole additionnel sur les droits des femmes (protocole de Maputo).
De nombreuses ONG nationales ainsi que des organisations internationales issues surtout du Système des Nations Unies (ONUCI, UNFPA, UNICEF…) sont également actives dans la lutte contre ce fléau.
Les Mutilations génitales féminines sont ainsi classées parmi les violences à l’égard des Femmes et des Enfants, constituant des violations des droits humains.
Une pratique pas du tout islamique
Considérée à tort comme une prescription religieuse notamment islamique, l’excision n’est pas du tout reconnue par la religion musulmane car aucun texte ne la justifie.
En effet, dans la région du Nord ivoirien où l’Islam est prédominant, plus de 70% des femmes ont subi cette initiation que l’on décrit comme sociale, culturelle et parfois religieuse.
« Refusez l’excision même si on veut vous maudire », lançait l’Imam Cissé Djiguiba aux couples, lors d’une réunion de travail du Comité interafricain qui œuvre pour l’abandon des pratiques traditionnelles dont il préside la section ivoirienne, en novembre 2011. Le président de la Fondation Djigui / La bonne espérance) réfutait ainsi officiellement, ces allégations faisant de la pratique de l’excision, une prescription de l’Islam.
« (…) Nous savons tous qu’aucune fille du prophète Mohamed n’a été excisée, même parmi ses compagnons. Or, ce sont des modèles. Dans le Coran, il est fait mention de la circoncision masculine. Mais, nulle part, on ne parle de l’excision de la femme », répondait-il, dans une interview publiée le 29 novembre de la même année dans Nord-Sud Quotidien.
« Assez, c’est assez ! », poursuit-il dans une vidéo diffusée sur Youtube (https://www.youtube.com/watch?v=6F4-j63HBp0). « Pour nous, c’est ‘’Tolérance Zéro ’’ », ajoute-t-il, invitant les décideurs, les intellectuels, les responsables d’associations, les leaders communautaires et traditionnels à « ouvrir les yeux sur l’avenir ».
Expliquant que l’origine des MGF remonte, d’après les anthropologues et les historiens, à 3 000 ans avant Jésus-Christ, l’imam ivoirien observe ainsi que cette pratique ne saurait être imputée à une quelconque religion.
« La tradition a la carapace très dure, (…) très néfaste. (…) C’est une question de vie, de droits humains, de l’honneur de la femme… Le pire, c’est de ne pas avoir le courage de dénoncer », disait alors Cissé Djiguiba, jetant un pavé de la mare de la tradition.
Reconversion, réparation
Diverses raisons sont invoquées pour justifier la pratique de l’excision, par ses adeptes. La plus répandue reste le fait que cette pratique favoriserait, entre autres, la fidélité des personnes qui l’ont subie. Cette idée ardemment défendue par la gente masculine au sein des peuples qui la pratiquent, est de plus en plus réprouvée par les victimes, à savoir les femmes.
Grâce au travail conjugué des autorités publiques, des organisations nationales et internationales opérant en Côte d’Ivoire, plusieurs exciseuses ont accepté de « déposer le couteau », pour se reconvertir dans d’autres activités. Une décision salutaire pour le salut de millions d’innocentes victimes sauvées par le marteau du législateur et certainement par la chirurgie réparatrice qui existe en Côte d’Ivoire.
(Coulibaly Maryam A. S.)
Commémorée tous les 06 février, la Journée internationale de lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF), décrétée par l’Assemblée générale des Nations Unies, est une occasion, une fois de plus, de rappeler que cette pratique que rien ne justifie a encore droit de cité dans le monde, notamment en Afrique et dans des pays asiatiques.
Les mutilations génitales féminines désignent l'ablation totale ou partielle des organes génitaux féminins externes. Généralement réalisée par une exciseuse traditionnelle avec un couteau ou une lame de rasoir avec ou sans anesthésie, les procédures varient selon les régions et les groupes ethniques. Elles peuvent aller d'une simple scarification à l'ablation partielle ou totale du clitoris et des lèvres (excision) voire à la suture des lèvres pour fermer la vulve (infibulation).
En Côte d’Ivoire, le taux de prévalence est de l’ordre de 36 à 38%, selon le ministère de la Femme, de la Protection de l’enfant et de la Solidarité. Dans les zones Ouest, Nord-Ouest et Nord, il touche plus de 70% des 15-49 ans mais ce taux décline dans les régions Centre, Sud et Est, quoiqu’existant, en raison des migrations transfrontalières.
Aucun bénéfice connu pour la santé
De l’avis des spécialistes, les MGF ne présentent aucun bénéfice connu pour la santé. Parmi les complications les plus courantes figurent les hémorragies lors de l'opération, les infections urinaires, des règles douloureuses, des douleurs chroniques, une diminution du plaisir sexuel et des complications liées à l'accouchement et la mise en péril du nouveau-né, les problèmes menstruels et urinaires dont les fistules, l'infertilité, les risques de contamination au VIH/Sida et la mort.
L’environnement juridique
L’interdiction de l’excision a été votée en 1998 en Côte d’Ivoire. La loi n°98/757 promulguée le 23 décembre 1998 prévoit que toute atteinte à l’intégrité des organes génitaux d’une femme, par voie de mutilation totale ou partielle, excision, désensibilisation ou tout autre pratique, si elle s’avère sanitairement néfaste, est passible d’une peine d’emprisonnement de un à cinq ans et d’une forte amende (de 360 000 à 2 millions de FCFA, soit environ de 550 à 3 060 euros).
La peine est portée de cinq ans à 20 ans d’emprisonnement si la victime meurt des suites de son opération.
Par ailleurs, si la procédure est effectuée par un médecin, il risque jusqu’à cinq ans d’interdiction de pratique professionnelle
Les conventions et traités internationaux
Plusieurs textes internationaux condamnant la pratique des MGF ont été ratifiés par la Côte d’Ivoire notamment la Convention sur les droits de l’enfant (CDE), la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes (CEDEF), la Charte africaine sur les droits et le bien-être de l’enfant, la Charte africaine sur les droits humains et ceux des populations et le Protocole additionnel sur les droits des femmes (protocole de Maputo).
De nombreuses ONG nationales ainsi que des organisations internationales issues surtout du Système des Nations Unies (ONUCI, UNFPA, UNICEF…) sont également actives dans la lutte contre ce fléau.
Les Mutilations génitales féminines sont ainsi classées parmi les violences à l’égard des Femmes et des Enfants, constituant des violations des droits humains.
Une pratique pas du tout islamique
Considérée à tort comme une prescription religieuse notamment islamique, l’excision n’est pas du tout reconnue par la religion musulmane car aucun texte ne la justifie.
En effet, dans la région du Nord ivoirien où l’Islam est prédominant, plus de 70% des femmes ont subi cette initiation que l’on décrit comme sociale, culturelle et parfois religieuse.
« Refusez l’excision même si on veut vous maudire », lançait l’Imam Cissé Djiguiba aux couples, lors d’une réunion de travail du Comité interafricain qui œuvre pour l’abandon des pratiques traditionnelles dont il préside la section ivoirienne, en novembre 2011. Le président de la Fondation Djigui / La bonne espérance) réfutait ainsi officiellement, ces allégations faisant de la pratique de l’excision, une prescription de l’Islam.
« (…) Nous savons tous qu’aucune fille du prophète Mohamed n’a été excisée, même parmi ses compagnons. Or, ce sont des modèles. Dans le Coran, il est fait mention de la circoncision masculine. Mais, nulle part, on ne parle de l’excision de la femme », répondait-il, dans une interview publiée le 29 novembre de la même année dans Nord-Sud Quotidien.
« Assez, c’est assez ! », poursuit-il dans une vidéo diffusée sur Youtube (https://www.youtube.com/watch?v=6F4-j63HBp0). « Pour nous, c’est ‘’Tolérance Zéro ’’ », ajoute-t-il, invitant les décideurs, les intellectuels, les responsables d’associations, les leaders communautaires et traditionnels à « ouvrir les yeux sur l’avenir ».
Expliquant que l’origine des MGF remonte, d’après les anthropologues et les historiens, à 3 000 ans avant Jésus-Christ, l’imam ivoirien observe ainsi que cette pratique ne saurait être imputée à une quelconque religion.
« La tradition a la carapace très dure, (…) très néfaste. (…) C’est une question de vie, de droits humains, de l’honneur de la femme… Le pire, c’est de ne pas avoir le courage de dénoncer », disait alors Cissé Djiguiba, jetant un pavé de la mare de la tradition.
Reconversion, réparation
Diverses raisons sont invoquées pour justifier la pratique de l’excision, par ses adeptes. La plus répandue reste le fait que cette pratique favoriserait, entre autres, la fidélité des personnes qui l’ont subie. Cette idée ardemment défendue par la gente masculine au sein des peuples qui la pratiquent, est de plus en plus réprouvée par les victimes, à savoir les femmes.
Grâce au travail conjugué des autorités publiques, des organisations nationales et internationales opérant en Côte d’Ivoire, plusieurs exciseuses ont accepté de « déposer le couteau », pour se reconvertir dans d’autres activités. Une décision salutaire pour le salut de millions d’innocentes victimes sauvées par le marteau du législateur et certainement par la chirurgie réparatrice qui existe en Côte d’Ivoire.
(Coulibaly Maryam A. S.)