Mme Victoria SABULA est la nouvelle Directrice Générale (DG) de l’Africa Enterprise Challenge Fund (AECF), une institution de développement spécialisée dans le soutien aux entreprises intervenant dans le milieu rural avec un impact direct sur les populations, basée au Kenya. De passage en Côte d’Ivoire, Mme SABULA a bien voulu nous accorder cet entretien dans lequel elle explique les accès au fonds qu’elle dirige, les espoirs et les défis à relever.
Quel est l’objectif de votre visite en Côte d’Ivoire?
J’ai été désignée récemment comme Directrice Générale de AECF. Je suis ici à Abidjan pour rencontrer l’équipe sur place. Notre bureau d’Abidjan est le bureau régional à partir duquel nous couvrons le Ghana, le Nigeria, le Liberia, la Sierra Leone, le Sénégal, le Burkina Faso, et le Mali. Donc, nous sommes ici pour voir comment les travaux avancent, mais aussi pour rencontrer nos partenaires en Côte d’Ivoire et voir comment, ensemble, nous pouvons transformer la vie des communautés rurales.
Selon ses attributions, votre organisation a pour mission d’investir dans des entreprises qui innovent. Que faut-il entendre par cette ambition ?
L’AECF existe pour investir au stade initial dans les entreprises qui sont considérées comme risqués par les banques traditionnelles. Donc, on investit dans les entreprises pour lesquelles on estime qu’elles peuvent changer la vie des populations pauvres dans les milieux ruraux ainsi que les populations marginalisées. Nous soutenons les entrepreneurs qui ont des solutions pour répondre aux défis du développement. Mais, on va spécifiquement là où les banques commerciales ne vont pas, car on croit en des entreprises qui peuvent changer la vie des populations rurales et pauvres. J’aimerais insister sur un point, c’est que de nombreuses activités commerciales, de nombreuses entreprises n’ont pas accès au capital, parce qu’elles sont considérées comme risquées, notamment dans le secteur agricole et le secteur des énergies renouvelables. Nous y intervenons afin de réduire les risques. Si nous voyons par exemple qu’un entrepreneur veut extraire ou vendre des produits provenant des fermiers ruraux, nous pouvons non seulement les aider en leur fournissant l’accès à un capital, mais aussi les soutenir avec des services de conseils pour les aider à grandir. Mais, nous avons une préoccupation centrale, c’est que leurs efforts puissent améliorer les conditions de vie des populations marginalisées.
Comment se déclinent concrètement vos activités envers vos cibles ?
Nous sommes un fonds sur une base compétitive que nous appelons Challenge Fund. Ce que nous faisons, c’est que nous allons vers le marché et nous lançons un appel à proposition de projets auquel les entreprises ont la possibilité de postuler. Nous ne présentons pas d’exigence et de requête spécifique. Ce que nous disons, c’est qu’il y a un problème. Est-ce que vous avez des solutions pour résoudre ce problème. Ainsi, les entreprises vont compétir en fonction des régions et du secteur d’activité. Au bout, l’entreprise ou l’entrepreneur qui a la solution la plus innovante par rapport au problème indiqué remporte l’appel à proposition. Nous octroyons aux entreprises entre 100 000 de dollars USD (environ 60 millions de f Cfa) et 1 000.000 de dollars USD (environ 600 millions de F Cfa) pour une période de 3 à 5 ans, et les bénéficiaires sont soutenus sur toute la durée de cette période. Nous déterminons par exemple des étapes en termes de livrables à fournir.
Existe-il un mécanisme de suivi ?
L’argent qui est investi dans les entreprises au terme des compétitions provient des bailleurs de fonds, notamment de Alliance for a Green Revolution in Africa (AGRA), le Canada (GAC), la Suède (SIDA), l’Angleterre (DFID/UK Aid) et bien d’autres… Nous retournons vers les bailleurs de fonds pour leur présenter les chiffres et l’impact, mais surtout ce qui a été réalisé dans le sens du bien-être des populations. Nous faisons un suivi très précis de ces entreprises et des fonds. Nous avons des responsables de portefeuille qui travaillent étroitement avec ces entreprises pour s’assurer d’un suivi méthodique, car nous préparons l’ensemble de ses entreprises à travailler avec de futurs établissements financiers. Il est important donc de les amener à comprendre qu’il ne s’agit pas d’un simple don, mais aussi d’une assistance technique qui leur permettra d’être prêts à éventuellement collaborer avec des banques commerciales habituelles.
Pouvez-vous donner des exemples de ce qui est fait pour les femmes de l’Afrique de l’Ouest et spécifiquement en Côte d’Ivoire?
Conscient du faible taux de l’accès des femmes aux banques, en Septembre 2018, nous avons lancé une compétition "Investir en faveur des Femmes" ou Investing In Women (IIW), financé par le fonds de développement Britannique, DFID. Ce financement d’une valeur de 5.9 millions de dollars (environ 3.5 milliards de FCFA) a pour cible 3 pays de l’Afrique de l’Ouest dont le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et la Sierra Leone.
A travers ce programme, nous espérons soutenir les entreprises créées, ou dirigées par des femmes ainsi que les entreprises dont les chaînes de valeurs ont comme bénéficiaires des femmes dans deux secteurs d’activité, la chaîne de valeur du beurre de karité et également le secteur agricole en général. Nous voulons aider les paysans à accéder au marché, avoir une meilleure gestion de leurs chaînes de valeurs et de leurs produits. Ces différentes activités ont démontré qu’elles permettent de travailler avec la femme, d’impliquer les femmes dans la chaine de valeur et de soutenir les femmes en termes d’emploi et aussi d’améliorer leurs pratiques agricoles.
A l’issue de la compétition Investing In Women, 257 entreprises ont soumissionné: Burkina Faso (84), Côte D’Ivoire (41), Ethiopie (45), et Sierra Leone (49) et 38 candidats non éligibles. A ce jour, 11 compagnies ont été retenues dont 2 en Côte d’Ivoire. Parmi ces deux entreprises, une se focalise dans l’agriculture de précision avec des femmes productrices de cultures maraîchères et la seconde est une entreprise qui travaille principalement avec les organisations de femmes et qui se spécialise dans l’achat et la transformation du beurre de karité.
Avez-vous des programmes pour les jeunes en Afrique de l’Ouest, où beaucoup de pays sortent à peine de conflits comme la Côte d’Ivoire, le Mali, la Sierra Leone ?
C’est surtout pour eux que nous avons une composante énergie renouvelable. Nous travaillons sur les systèmes solaires domestiques, car nous pensons que c’est un moyen important pour permettre à ces populations d’accéder à l’énergie pour mener des activités. Nous avons, par exemple, des pompes solaires, qui sont alimentées par l’énergie solaire et qui permettraient à des entrepreneurs dans des zones où il y a des sources d’eau disponibles de pouvoir utiliser ces différents mécanismes pour accroître leur production agricole. Quand on jette un œil aux pays qui sortent de crise, on voit qu’il y a un manque de volonté d’aller dans les zones rurales, les zones reculées qui manquent d’infrastructures. Donc, ce que nous faisons, c’est que nous soutenons ces entrepreneurs pour qu’ils puissent y aller et qu’on puisse apporter l’ensemble des produits alimentés par l’énergie solaire dans ces régions.
Quid des jeunes, cette autre population vulnérable ?
Le travail que nous faisons intègre trois problématiques transversales : les femmes, la jeunesse et les personnes vulnérables. Donc, tous nos efforts vont dans le sens de l’autonomisation de la femme, l’accès aux emplois pour les jeunes, et nous savons que certains pays sortent de conflits, donc nous essayons de travailler avec eux pour un retour vers la productivité notamment dans le secteur agricole.
Si votre activité intéresse un entrepreneur ou une coopérative, comment fait-on pour bénéficier des fonds? Quel est le procédé pour accéder au fonds?
En ce moment, nous n’avons pas de compétition active. Notre dernière compétition, "Investir en faveur des Femmes", a eu lieu en Septembre 2018 et nous arrivons à la fin du processus. Mais, lorsque nous organisons des compétitions, nous faisons une large communication sur le terrain, nous organisons des sessions d’information et faisons de la publicité dans les médias pour encourager les entreprises à postuler. Mais, nous travaillons sur une base compétitive, il faut donc que les entrepreneurs qui recherchent des financements restent informés, connectés pour essayer de voir l’ensemble des programmes qui sont ouverts à ce moment précis. Ils peuvent également obtenir ces informations via nos réseaux sociaux, Twitter, Facebook ou notre site web.
En suivant vos activités, on se rend compte que 268 entreprises ont obtenu des soutiens dans 26 pays sur des milliers de dossiers déposés. Pourquoi seulement 268? Y aurait-il des blocages?
Il est vraiment délicat de trouver des bons business plans en Afrique. Si vous regardez par exemple les autres bailleurs, la BAD, Proparco, la Banque Mondiale, …, ils ont des financements, ils recherchent des candidats, mais n’en trouvent pas de suffisamment bien formés pour soumissionner aux appels d’offre. Parce que pour fonctionner efficacement, il faut qu’un certain nombre de conditions soient réunies au niveau micro, macro-économique, et aussi au niveau du capital et de l’accès au marché. Donc, nous avons des fonds, mais lorsqu’on lance la compétition les entreprises qui parviennent au stade du financement sont en nombre limité. Il faut savoir qu’en Afrique, nous ne sommes pas formés pour être des entrepreneurs. On nous apprend à être des chercheurs d’emploi. Il faut qu’on cultive cette culture de prise de risque, qu’on apprenne à nos jeunes à prendre des risques. Si vous allez par exemple, aux Etats-Unis, un jeune homme de 14 ans veut être un entrepreneur, un homme d’affaire. Il va vers ses proches pour leur emprunter de l’argent pour démarrer une affaire. Mais, en Afrique, nos jeunes vont vers leurs proches pour leur demander de l’argent tout court. Donc, peut-être qu’il faut revoir notre système éducatif et notre culture même, histoire de cultiver ce gout du risque et cet esprit d’entreprise chez les jeunes.
Pour revenir au programme, Investir en faveur des Femmes, en Côte d’Ivoire, 41 entreprises ont postulé et seulement 2 sont parvenues au terme de la compétition, alors qu’on a reçu 257 propositions. Il faut qu’on travaille tous ensemble, qu’en plus du secteur privé, on implique le Gouvernement pour créer des structures, des universités, des instituts pour former des futurs entrepreneurs et aussi des personnes qui auront les compétences requises à l’avenir. Aujourd’hui, on parle du numérique, mais le numérique ce n’est pas être sur Whatsapp sur votre portable. C’est chercher à créer des moyens de paiement digitaux qui permettront de régler vos factures, par exemple, comme cela est fait actuellement. Il faut absolument revoir, repenser la manière dont nous formons nos jeunes afin qu’ils soient prêts pour les défis du futur.
En tant que nouveau DG de AECF, quels sont vos objectifs et vos priorités ?
Premièrement, nous sommes centrés sur l’idée de développer davantage d’entreprises en Afrique et voir plus d’entreprises réussir, des entreprises qui pourront fournir des emplois. Ensuite, nous sommes là également pour construire des institutions fortes pour le présent et l’avenir, parce que nous croyons aux institutions qui sont dirigées en Afrique par les Africains. On est également présent pour soutenir et appuyer nos équipes afin d’arriver à des résultats et continuer d’améliorer le bien-être des populations rurales.
De cette vision actuelle, qu’est ce que la Côte d’Ivoire peut attendre de vous dans les prochains mois?
Nous sommes ici en Côte d’Ivoire pour développer davantage de partenariats, notamment dans le secteur agricole et des énergies renouvelables. On va investir davantage dans ces ressources. C’est la raison de notre présence, travailler afin d’investir dans ces secteurs, et mieux soutenir ces secteurs.
Pour terminer, je pense qu’il faudrait encourager la jeunesse à sortir des sentiers battus, parce qu’il y a de nombreux investisseurs qui recherchent des projets dans lesquels investir. Mais cette jeunesse se met-elle sur le marché ? Donc, il faut qu’on encourage vraiment cette jeunesse à sortir et à se découvrir.
Entretien réalisé par F.D.BONY
Quel est l’objectif de votre visite en Côte d’Ivoire?
J’ai été désignée récemment comme Directrice Générale de AECF. Je suis ici à Abidjan pour rencontrer l’équipe sur place. Notre bureau d’Abidjan est le bureau régional à partir duquel nous couvrons le Ghana, le Nigeria, le Liberia, la Sierra Leone, le Sénégal, le Burkina Faso, et le Mali. Donc, nous sommes ici pour voir comment les travaux avancent, mais aussi pour rencontrer nos partenaires en Côte d’Ivoire et voir comment, ensemble, nous pouvons transformer la vie des communautés rurales.
Selon ses attributions, votre organisation a pour mission d’investir dans des entreprises qui innovent. Que faut-il entendre par cette ambition ?
L’AECF existe pour investir au stade initial dans les entreprises qui sont considérées comme risqués par les banques traditionnelles. Donc, on investit dans les entreprises pour lesquelles on estime qu’elles peuvent changer la vie des populations pauvres dans les milieux ruraux ainsi que les populations marginalisées. Nous soutenons les entrepreneurs qui ont des solutions pour répondre aux défis du développement. Mais, on va spécifiquement là où les banques commerciales ne vont pas, car on croit en des entreprises qui peuvent changer la vie des populations rurales et pauvres. J’aimerais insister sur un point, c’est que de nombreuses activités commerciales, de nombreuses entreprises n’ont pas accès au capital, parce qu’elles sont considérées comme risquées, notamment dans le secteur agricole et le secteur des énergies renouvelables. Nous y intervenons afin de réduire les risques. Si nous voyons par exemple qu’un entrepreneur veut extraire ou vendre des produits provenant des fermiers ruraux, nous pouvons non seulement les aider en leur fournissant l’accès à un capital, mais aussi les soutenir avec des services de conseils pour les aider à grandir. Mais, nous avons une préoccupation centrale, c’est que leurs efforts puissent améliorer les conditions de vie des populations marginalisées.
Comment se déclinent concrètement vos activités envers vos cibles ?
Nous sommes un fonds sur une base compétitive que nous appelons Challenge Fund. Ce que nous faisons, c’est que nous allons vers le marché et nous lançons un appel à proposition de projets auquel les entreprises ont la possibilité de postuler. Nous ne présentons pas d’exigence et de requête spécifique. Ce que nous disons, c’est qu’il y a un problème. Est-ce que vous avez des solutions pour résoudre ce problème. Ainsi, les entreprises vont compétir en fonction des régions et du secteur d’activité. Au bout, l’entreprise ou l’entrepreneur qui a la solution la plus innovante par rapport au problème indiqué remporte l’appel à proposition. Nous octroyons aux entreprises entre 100 000 de dollars USD (environ 60 millions de f Cfa) et 1 000.000 de dollars USD (environ 600 millions de F Cfa) pour une période de 3 à 5 ans, et les bénéficiaires sont soutenus sur toute la durée de cette période. Nous déterminons par exemple des étapes en termes de livrables à fournir.
Existe-il un mécanisme de suivi ?
L’argent qui est investi dans les entreprises au terme des compétitions provient des bailleurs de fonds, notamment de Alliance for a Green Revolution in Africa (AGRA), le Canada (GAC), la Suède (SIDA), l’Angleterre (DFID/UK Aid) et bien d’autres… Nous retournons vers les bailleurs de fonds pour leur présenter les chiffres et l’impact, mais surtout ce qui a été réalisé dans le sens du bien-être des populations. Nous faisons un suivi très précis de ces entreprises et des fonds. Nous avons des responsables de portefeuille qui travaillent étroitement avec ces entreprises pour s’assurer d’un suivi méthodique, car nous préparons l’ensemble de ses entreprises à travailler avec de futurs établissements financiers. Il est important donc de les amener à comprendre qu’il ne s’agit pas d’un simple don, mais aussi d’une assistance technique qui leur permettra d’être prêts à éventuellement collaborer avec des banques commerciales habituelles.
Pouvez-vous donner des exemples de ce qui est fait pour les femmes de l’Afrique de l’Ouest et spécifiquement en Côte d’Ivoire?
Conscient du faible taux de l’accès des femmes aux banques, en Septembre 2018, nous avons lancé une compétition "Investir en faveur des Femmes" ou Investing In Women (IIW), financé par le fonds de développement Britannique, DFID. Ce financement d’une valeur de 5.9 millions de dollars (environ 3.5 milliards de FCFA) a pour cible 3 pays de l’Afrique de l’Ouest dont le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et la Sierra Leone.
A travers ce programme, nous espérons soutenir les entreprises créées, ou dirigées par des femmes ainsi que les entreprises dont les chaînes de valeurs ont comme bénéficiaires des femmes dans deux secteurs d’activité, la chaîne de valeur du beurre de karité et également le secteur agricole en général. Nous voulons aider les paysans à accéder au marché, avoir une meilleure gestion de leurs chaînes de valeurs et de leurs produits. Ces différentes activités ont démontré qu’elles permettent de travailler avec la femme, d’impliquer les femmes dans la chaine de valeur et de soutenir les femmes en termes d’emploi et aussi d’améliorer leurs pratiques agricoles.
A l’issue de la compétition Investing In Women, 257 entreprises ont soumissionné: Burkina Faso (84), Côte D’Ivoire (41), Ethiopie (45), et Sierra Leone (49) et 38 candidats non éligibles. A ce jour, 11 compagnies ont été retenues dont 2 en Côte d’Ivoire. Parmi ces deux entreprises, une se focalise dans l’agriculture de précision avec des femmes productrices de cultures maraîchères et la seconde est une entreprise qui travaille principalement avec les organisations de femmes et qui se spécialise dans l’achat et la transformation du beurre de karité.
Avez-vous des programmes pour les jeunes en Afrique de l’Ouest, où beaucoup de pays sortent à peine de conflits comme la Côte d’Ivoire, le Mali, la Sierra Leone ?
C’est surtout pour eux que nous avons une composante énergie renouvelable. Nous travaillons sur les systèmes solaires domestiques, car nous pensons que c’est un moyen important pour permettre à ces populations d’accéder à l’énergie pour mener des activités. Nous avons, par exemple, des pompes solaires, qui sont alimentées par l’énergie solaire et qui permettraient à des entrepreneurs dans des zones où il y a des sources d’eau disponibles de pouvoir utiliser ces différents mécanismes pour accroître leur production agricole. Quand on jette un œil aux pays qui sortent de crise, on voit qu’il y a un manque de volonté d’aller dans les zones rurales, les zones reculées qui manquent d’infrastructures. Donc, ce que nous faisons, c’est que nous soutenons ces entrepreneurs pour qu’ils puissent y aller et qu’on puisse apporter l’ensemble des produits alimentés par l’énergie solaire dans ces régions.
Quid des jeunes, cette autre population vulnérable ?
Le travail que nous faisons intègre trois problématiques transversales : les femmes, la jeunesse et les personnes vulnérables. Donc, tous nos efforts vont dans le sens de l’autonomisation de la femme, l’accès aux emplois pour les jeunes, et nous savons que certains pays sortent de conflits, donc nous essayons de travailler avec eux pour un retour vers la productivité notamment dans le secteur agricole.
Si votre activité intéresse un entrepreneur ou une coopérative, comment fait-on pour bénéficier des fonds? Quel est le procédé pour accéder au fonds?
En ce moment, nous n’avons pas de compétition active. Notre dernière compétition, "Investir en faveur des Femmes", a eu lieu en Septembre 2018 et nous arrivons à la fin du processus. Mais, lorsque nous organisons des compétitions, nous faisons une large communication sur le terrain, nous organisons des sessions d’information et faisons de la publicité dans les médias pour encourager les entreprises à postuler. Mais, nous travaillons sur une base compétitive, il faut donc que les entrepreneurs qui recherchent des financements restent informés, connectés pour essayer de voir l’ensemble des programmes qui sont ouverts à ce moment précis. Ils peuvent également obtenir ces informations via nos réseaux sociaux, Twitter, Facebook ou notre site web.
En suivant vos activités, on se rend compte que 268 entreprises ont obtenu des soutiens dans 26 pays sur des milliers de dossiers déposés. Pourquoi seulement 268? Y aurait-il des blocages?
Il est vraiment délicat de trouver des bons business plans en Afrique. Si vous regardez par exemple les autres bailleurs, la BAD, Proparco, la Banque Mondiale, …, ils ont des financements, ils recherchent des candidats, mais n’en trouvent pas de suffisamment bien formés pour soumissionner aux appels d’offre. Parce que pour fonctionner efficacement, il faut qu’un certain nombre de conditions soient réunies au niveau micro, macro-économique, et aussi au niveau du capital et de l’accès au marché. Donc, nous avons des fonds, mais lorsqu’on lance la compétition les entreprises qui parviennent au stade du financement sont en nombre limité. Il faut savoir qu’en Afrique, nous ne sommes pas formés pour être des entrepreneurs. On nous apprend à être des chercheurs d’emploi. Il faut qu’on cultive cette culture de prise de risque, qu’on apprenne à nos jeunes à prendre des risques. Si vous allez par exemple, aux Etats-Unis, un jeune homme de 14 ans veut être un entrepreneur, un homme d’affaire. Il va vers ses proches pour leur emprunter de l’argent pour démarrer une affaire. Mais, en Afrique, nos jeunes vont vers leurs proches pour leur demander de l’argent tout court. Donc, peut-être qu’il faut revoir notre système éducatif et notre culture même, histoire de cultiver ce gout du risque et cet esprit d’entreprise chez les jeunes.
Pour revenir au programme, Investir en faveur des Femmes, en Côte d’Ivoire, 41 entreprises ont postulé et seulement 2 sont parvenues au terme de la compétition, alors qu’on a reçu 257 propositions. Il faut qu’on travaille tous ensemble, qu’en plus du secteur privé, on implique le Gouvernement pour créer des structures, des universités, des instituts pour former des futurs entrepreneurs et aussi des personnes qui auront les compétences requises à l’avenir. Aujourd’hui, on parle du numérique, mais le numérique ce n’est pas être sur Whatsapp sur votre portable. C’est chercher à créer des moyens de paiement digitaux qui permettront de régler vos factures, par exemple, comme cela est fait actuellement. Il faut absolument revoir, repenser la manière dont nous formons nos jeunes afin qu’ils soient prêts pour les défis du futur.
En tant que nouveau DG de AECF, quels sont vos objectifs et vos priorités ?
Premièrement, nous sommes centrés sur l’idée de développer davantage d’entreprises en Afrique et voir plus d’entreprises réussir, des entreprises qui pourront fournir des emplois. Ensuite, nous sommes là également pour construire des institutions fortes pour le présent et l’avenir, parce que nous croyons aux institutions qui sont dirigées en Afrique par les Africains. On est également présent pour soutenir et appuyer nos équipes afin d’arriver à des résultats et continuer d’améliorer le bien-être des populations rurales.
De cette vision actuelle, qu’est ce que la Côte d’Ivoire peut attendre de vous dans les prochains mois?
Nous sommes ici en Côte d’Ivoire pour développer davantage de partenariats, notamment dans le secteur agricole et des énergies renouvelables. On va investir davantage dans ces ressources. C’est la raison de notre présence, travailler afin d’investir dans ces secteurs, et mieux soutenir ces secteurs.
Pour terminer, je pense qu’il faudrait encourager la jeunesse à sortir des sentiers battus, parce qu’il y a de nombreux investisseurs qui recherchent des projets dans lesquels investir. Mais cette jeunesse se met-elle sur le marché ? Donc, il faut qu’on encourage vraiment cette jeunesse à sortir et à se découvrir.
Entretien réalisé par F.D.BONY