Depuis quelques semaines, la vie s’est arrêtée à Djigbadji. Le déguerpissement devenu destruction a laissé 1804 personnes sans abris. Hier, les deux députés de Méagui, chef-lieu de département, ont uni leurs voix, à Abidjan, pour exprimer la gravité de la situation. Il s’agit des députés Nétro Tagbo Réné et Salé Poli, accompagnés du chef de terre de la localité, Bogui Francis. C’était au cours d’une conférence de presse, dans les locaux de la maison du Pdci-Rda, à Cocody. Selon les témoignages des conférenciers, la situation est intenable. « Ecoles, centre de santé, églises, habitations, tout a été saccagé. Les magasins de stockage saccagés. Les récoltes ont disparu. Seule la mosquée du village a été épargnée, on ne sait pour quelle raison » on-ils rapporté. Pis, les populations dorment sous les cacaoyers, à la merci des grandes pluies de cette région à forte pluviométrie. Ils sont coupés de tous soins médicaux, les élèves laissés- pour-compte. Dans les villages environnants, les enseignants, poursuivent les députés, ont tous déposé la craie pour fuir, suite à des violences perpétrées sur certains de leurs collègues à Djigbadji. Djigbagui, aussi appelé Pascalkro ou encore Bandikro, c’est 80 Km de piste non praticable du chef-lieu de département. « Il s’agit d’une catastrophe sanitaire » soutiennent les députés de Méagui. Qui sont les auteurs de ce drame? D’où viennent-ils ? L’honorable Netro Réné et son collègue informent que ce sont les forces publiques. « C’est une brigade mixte qui est partie, composée de gendarmes, agents des Eaux et forêts, militaires, etc.» Pourquoi ont-ils agi ainsi ? Les députés eux-mêmes s’interrogent. « J’appelle le Gouvernement à y remédier, également La Croix Rouge qui contribue à apaiser l’intensité des crises humanitaires. Il y a matière à travail. L’humanitaire est touché. Cette population a besoin d’aide. Le droit humain est dérangé. Qu’on nous aide à le restituer » a plaidé le député Salé Poli. Au dire du chef de terre, les habitants de Djigbadji ne sont pas des envahisseurs. L’histoire du village est liée à la construction des barrages hydroélectriques dans le centre du pays. Cela remonte à la décennie 1960-1970. « C’est sur instruction du président Félix Houphouët-Boigny que les populations ont migré dans cette zone ». « L’Etat a demandé à faire de l’agroforesterie, c’est-à dire que les paysans peuvent cultiver leurs terres mais en même temps, on leur donne des essences à planter dans leurs plantations. Si la Sodefor consent qu’on peut être là et l’aider à faire l’agroforesterie, alors pourquoi aller détruire ? (…) Même si ce sont des aires protégées, ce n’est pas ce qu’on voit ailleurs où les forêts sont nouvellement occupées » s’indigne le député Salé Poli. Il poursuit pour dire que « la population s’étant sédentarisée de façon durable, on doit faire des enclaves, c’est-à-dire dégager des terres pour permettre aux paysans de faire leurs cultures. C’est à partir de là qu’on maîtrise les populations ». Ensemble, les députés et le chef de terre ont exprimé leur reconnaissance au président Henri Konan Bédié qui a dépêché le député de Daoukro-N’gattakro, Olivier Akoto, à Djigbadji, pour aller exprimer son soutien et sa solidarité aux déguerpis. Méagui, a-t-on noté, est un melting-pot, la Cedeao en miniature qui embrasse toutes les ethnies.
JB KOUADIO
JB KOUADIO