Abidjan - Difficile pour les victimes de dire ce qui s’est passé. Dans un environnement qui lui est favorable, la victime ne parle pas même si les preuves médicales sont réunies. Dans le cas d’une mineure, ce sont les parents qui portent la parole parce que la parole est sacrée et il faut avoir un certain âge pour la porter. La peur de dénoncer leur colle à la peau.
Les survivantes d’un viol perdent la force de dénonciation parce qu’elles ont peur des représailles. Ici, la honte est immense. Elle conduit facilement à la dépression.
Doublement victime: viol et stigmatisation
Lucie Kooua, la quarantaine, exilée au Kowëit en 2018, décline sa saga.
« Il y avait un monsieur qui jouait le gentil à qui je devrais apporter le café chaque 16H. C’est dans affaire d’envoyer le thé que ça commencé. Il a commencé par les attouchements et un 16H, je suis arrivée là-bas, il m’a dit qu’il a besoin de moi. Après ça, j’ai fui la maison. J’ai ressenti du dégoût, de la haine, la rage. Je ne veux pas en parler avec les larmes aux yeux parce si je le fais, c’est comme si j’acceptais toujours que ça soit une partie de moi », lâche-t-elle.
La famille de Lucie Kooua, ses amis, lui tirent dessus lorsqu’elle évoque cette aventure. Un jour, elle prend le risque d’ouvrir la bouche dans un studio de radio. Quel fût son regret face aux réprimandes de ceux et celles qui étaient à l’écoute. « Franchement, j’ai regretté ce jour d’avoir parlé ».
La honte, l'autre face cachée des victimes des VBG
Alors question, pourquoi les victimes demeurent bouche-bée ? Nous nous sommes tournés vers N’Zi Mireille, diagnostic d'une psychologue en service à l’ONG internationale Save the children. « Le sexe est tabou en Afrique. Les victimes n’arrivent pas à en parler pour éviter les histoires de stigmatisation. Une femme violée est sous l'anathème de toute la famille et de la communauté », soutient-elle.
N'Zi Mireille est pour des actions permettant de reconditionner les victimes afin de briser leur silence et cette attitude favorable à une rétention préjudiciable à la solution de leur problème.
La psychologue poursuit : « la victime n’a pas d’arme pour sa défense. Sa préoccupation c'est d'abord sa vie. Mais quand le violeur a terminé son acte et disparaît, elle est lambeau ».
Dans un état de droit, faut-il recourir à la loi ou tenter un règlement à l'amiable ? Beaucoup se perdent en conjecture.
« Nul n’est à l’abri du viol. Chaque cas est particulier. Chaque cas à son lot d’émotion », conclut la psychologue avec un soupir.
L’explication de la honte est partagée dans la société. Pour Antoine Yapo, fonctionnaire en activité, la honte est la raison du silence des victimes de viol. Elles préfèrent garder le silence.
M. Yapo prévient que le silence a ses limites. « Il faut trouver la force et le courage pour en parler pour se libérer soi-même d'abord et ensuite être compris par son entourage. La parole qui libère », recommande-t-il.
Herman Koffi, informaticien, n'y va pas avec le dos de la cuillère. Il déclare sans ambages : « je souhaite que les auteurs de ces crimes soient punis selon la loi, même si d’autres pensent qu’il faut une peine plus sévère. La loi est ce qu’elle est. Il faut s’en tenir à la loi et l’appliquer ».
Le recours à la loi n'est pas encore un réflexe chez les victimes
Cerise sur le gâteau, Dakouri Bertin, docteur en Droit, achève de nous convaincre. « Les victimes peuvent saisir toutes les juridictions compétentes en la matière. Les gens n’aiment pas s’intéresser aux choses de la justice parce qu’ils pensent immédiatement à la prison ».
Les lois ivoiriennes sont sans équivoque. Tout acte de violation est puni. Il ressort de l’article 354 du Code pénal que le viol est puni de l’emprisonnement de 5 à 20 ans. La peine est celle de l’emprisonnement à vie si l’auteur est aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes, ou s’il est le père, un ascendant ou une personne ayant autorité sur la victime, s’il est chargé de son éducation, de sa formation intellectuelle ou professionnelle.
Le viol est le recours à la force physique, la menace de recourir à la violence ou à la contrainte émotionnelle afin de procéder à la pénétration vaginale, anale, buccale sans le consentement de la victime.
Selon le rapport 2018 du Comité nationale de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants, de manière générale, les cas de Violences basées sur le genre (VBG) à savoir le viol, agression sexuelle, agression physique, mariage forcé, dénis de ressources d’opportunités ou de service et la maltraitance psychologique, ne font pas souvent objet de plaintes devant les autorités judiciaires. Cependant, le viol est le type de VBG qui a fait l’objet de plus de plaintes, 66,4% en 2018 contre 58,43% en 2016.
Sur un total de 2.744 cas de VBG déclarés dans les structures de prise en charge psychosociale, le viol enregistre 693 cas et on note un nombre élevé de plaintes rapportés pour enfants victimes de viol (320) notamment les filles (314). La petite enfance (0 à 4 ans) n’est pas épargnée avec un total de 17 cas. La majorité de ces cas rapportés de viols sont perpétrés par des partenaires ou ex-partenaires ou personnes de l’entourage de la victime. Les élèves sont les plus touchés par les viols avec une proportion de 46,19%. On note également qu’au niveau du viol, 101 sont des cas de viol collectif.
(AIP)
ena/cmas
Les survivantes d’un viol perdent la force de dénonciation parce qu’elles ont peur des représailles. Ici, la honte est immense. Elle conduit facilement à la dépression.
Doublement victime: viol et stigmatisation
Lucie Kooua, la quarantaine, exilée au Kowëit en 2018, décline sa saga.
« Il y avait un monsieur qui jouait le gentil à qui je devrais apporter le café chaque 16H. C’est dans affaire d’envoyer le thé que ça commencé. Il a commencé par les attouchements et un 16H, je suis arrivée là-bas, il m’a dit qu’il a besoin de moi. Après ça, j’ai fui la maison. J’ai ressenti du dégoût, de la haine, la rage. Je ne veux pas en parler avec les larmes aux yeux parce si je le fais, c’est comme si j’acceptais toujours que ça soit une partie de moi », lâche-t-elle.
La famille de Lucie Kooua, ses amis, lui tirent dessus lorsqu’elle évoque cette aventure. Un jour, elle prend le risque d’ouvrir la bouche dans un studio de radio. Quel fût son regret face aux réprimandes de ceux et celles qui étaient à l’écoute. « Franchement, j’ai regretté ce jour d’avoir parlé ».
La honte, l'autre face cachée des victimes des VBG
Alors question, pourquoi les victimes demeurent bouche-bée ? Nous nous sommes tournés vers N’Zi Mireille, diagnostic d'une psychologue en service à l’ONG internationale Save the children. « Le sexe est tabou en Afrique. Les victimes n’arrivent pas à en parler pour éviter les histoires de stigmatisation. Une femme violée est sous l'anathème de toute la famille et de la communauté », soutient-elle.
N'Zi Mireille est pour des actions permettant de reconditionner les victimes afin de briser leur silence et cette attitude favorable à une rétention préjudiciable à la solution de leur problème.
La psychologue poursuit : « la victime n’a pas d’arme pour sa défense. Sa préoccupation c'est d'abord sa vie. Mais quand le violeur a terminé son acte et disparaît, elle est lambeau ».
Dans un état de droit, faut-il recourir à la loi ou tenter un règlement à l'amiable ? Beaucoup se perdent en conjecture.
« Nul n’est à l’abri du viol. Chaque cas est particulier. Chaque cas à son lot d’émotion », conclut la psychologue avec un soupir.
L’explication de la honte est partagée dans la société. Pour Antoine Yapo, fonctionnaire en activité, la honte est la raison du silence des victimes de viol. Elles préfèrent garder le silence.
M. Yapo prévient que le silence a ses limites. « Il faut trouver la force et le courage pour en parler pour se libérer soi-même d'abord et ensuite être compris par son entourage. La parole qui libère », recommande-t-il.
Herman Koffi, informaticien, n'y va pas avec le dos de la cuillère. Il déclare sans ambages : « je souhaite que les auteurs de ces crimes soient punis selon la loi, même si d’autres pensent qu’il faut une peine plus sévère. La loi est ce qu’elle est. Il faut s’en tenir à la loi et l’appliquer ».
Le recours à la loi n'est pas encore un réflexe chez les victimes
Cerise sur le gâteau, Dakouri Bertin, docteur en Droit, achève de nous convaincre. « Les victimes peuvent saisir toutes les juridictions compétentes en la matière. Les gens n’aiment pas s’intéresser aux choses de la justice parce qu’ils pensent immédiatement à la prison ».
Les lois ivoiriennes sont sans équivoque. Tout acte de violation est puni. Il ressort de l’article 354 du Code pénal que le viol est puni de l’emprisonnement de 5 à 20 ans. La peine est celle de l’emprisonnement à vie si l’auteur est aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes, ou s’il est le père, un ascendant ou une personne ayant autorité sur la victime, s’il est chargé de son éducation, de sa formation intellectuelle ou professionnelle.
Le viol est le recours à la force physique, la menace de recourir à la violence ou à la contrainte émotionnelle afin de procéder à la pénétration vaginale, anale, buccale sans le consentement de la victime.
Selon le rapport 2018 du Comité nationale de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants, de manière générale, les cas de Violences basées sur le genre (VBG) à savoir le viol, agression sexuelle, agression physique, mariage forcé, dénis de ressources d’opportunités ou de service et la maltraitance psychologique, ne font pas souvent objet de plaintes devant les autorités judiciaires. Cependant, le viol est le type de VBG qui a fait l’objet de plus de plaintes, 66,4% en 2018 contre 58,43% en 2016.
Sur un total de 2.744 cas de VBG déclarés dans les structures de prise en charge psychosociale, le viol enregistre 693 cas et on note un nombre élevé de plaintes rapportés pour enfants victimes de viol (320) notamment les filles (314). La petite enfance (0 à 4 ans) n’est pas épargnée avec un total de 17 cas. La majorité de ces cas rapportés de viols sont perpétrés par des partenaires ou ex-partenaires ou personnes de l’entourage de la victime. Les élèves sont les plus touchés par les viols avec une proportion de 46,19%. On note également qu’au niveau du viol, 101 sont des cas de viol collectif.
(AIP)
ena/cmas