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Société Publié le vendredi 8 mars 2024 | L’intelligent d’Abidjan

Sur les derniers vestiges de la première école de Côte d’Ivoire

L’histoire apprend que la première école en Côte d’Ivoire a été créée en 1882 à Élima, dans la région du Sud-Comoé. 142 ans après, qu’est devenue cette école ou qu’en reste-t-il comme vestiges ? Nous avons fait une incursion dans le village d’Élima, berceau de l’École de Côte d’Ivoire pour voir ce qui en reste.


Situé à quelque 50 km de la ville d’Aboisso et séparé de son chef-lieu de département, Adiaké par la lagune Aby, le village d’Élima perd sous le regard de tous (ministère de la Culture, ministère du Tourisme, ministère de l’Éducation nationale), les derniers vestiges de ce qui a été la première école en Côte d’Ivoire. Et pourtant, c’est de ce petit village perdu au bord de la lagune Aby qu’est partie l’éducation en 1882 par la volonté de l’officier de marine, aventurier, commerçant, planteur, armateur et conseiller municipal rochelais, Arthur Verdier. Selon ce qui nous a été conté sur place à Élima, Arthur Verdier est arrivé vers 1872 dans ce village, quelques années avant que la Côte d’Ivoire ne soit érigée en colonie française, le 10 mars 1893. Il arrive dans cette partie de ce qui va devenir une colonie française, et crée environ cent hectares de plantation de café assortis d’un vaste espace de séchage et d’une usine de décorticage pour l’exportation du produit vers son pays, la France.


C’est un gros navire marchand qui attendait en pleine mer les petites embarcations qui partaient de la lagune Aby avec des tonnes de cargaisons de café décortiqué. Mais, les bras valides qui constituaient cette main d’œuvre, cette richesse, ne savaient ni lire, ni écrire encore moins parler français. C’est pour combler ce déficit d’éducation que Verdier va faire venir à Elima un enseignant du nom de Treich Laplène pour tenir l’école qu’il a construite pour ses besoins. Le colon Verdier y a construit sa résidence qui surplombe tout le village avec une vue plongeante sur le plan d’eau lagunaire. Non loin des vestiges de l’école, se trouvent encore les ruines de la résidence d’Arthur Verdier et elles peuvent servir de lieu de tourisme, si l’État s’y met.


Sur les derniers vestiges de la première école de Côte d’Ivoire

Des vestiges (quatre murs) de ce qui était dénommé ‘’École française de Côte d’Ivoire’’, il ne reste que le dernier pan d’une piteuse façade. Pis, ce mur noirci par l’usure du temps est envahi par de hautes herbes et surplombé par un gros arbre qui a pris racines dans la salle de classe. Étonnant de savoir que c’est ce lieu à l’abandon qui a donné à la Côte d’Ivoire, ses premiers enfants éduqués.


« L’État nous a complètement oubliés », déclare Assohoun Ahico, conservateur de ces vestiges


C’est avec les yeux larmoyants que le guide, Assohoun Ahico, conservateur de ces vestiges et fils d’Élima, fait savoir que les villageois ont gros sur le cœur contre les autorités pour les avoir abandonnés à leur propre sort. Le conservateur ajoute que ceux-ci fulminent leur colère parce qu’en 1970, un préfet a donné l’ordre de détruire les murs de l’usine de café et autres. En revanche, les villageois se réjouissent de ce qu’ils n’ont eu, leur première école primaire publique qu’en 2016, après celle construite par Arthur Verdier en 1882. Cette école primaire publique est située entre Élima et le village d’Étuéboué, la sous-préfecture dont il dépend. Assohoun Ahico, conservateur de ces vestiges d’Élima raconte : « Depuis 1882, c’est maintenant qu’on vient d’avoir une école primaire. Arthur Verdier est le fondateur de la première école de Côte d’Ivoire en 1882, c’était, ici, à Elima. C’est lui qui a créé la première plantation de café en Côte d’Ivoire précisément à Élima. Tous les Treich-Laplène étaient ici. Verdier a fait venir Laplène de France pour enseigner dans son école.


Et quand celui-ci est arrivé ici, à Elima et quand il a vu que la terre était fertile, il a cessé d’enseigner et s’est lancé dans l’agriculture, aussi. Arthur Verdier avait créé la Société des plantations d’Élima (Spe) ici, à Elima pour exporter sa production en France.(…) On attend que l’État pense à nous, ici, à Élima. Puisque c’est à Élima qu’a été construite la première école française de 1882. Je prends un exemple, du Ghana. La première école anglaise est devenue la plus grande université du Ghana. Mais, en Côte d’Ivoire pour dire à Élima, nous manquons de beaucoup de choses, telles que les infrastructures (routes bitumées). Nous n’avons rien. Même, l’eau peut se couper ici, au village pendant une semaine. Même chose pour l’électricité. Que l’État pense à nous. La première plantation de cacao, la première plantation de palmier à huile, c’est ici. Aujourd’hui, nous n’avons rien. L’État nous a complètement oubliés. L’école coloniale est tombée en ruines. Nous venons d’avoir une école de 6 classes mais on n’a que seulement trois maîtres. Il faut que la Côte d’Ivoire pense un peu à Élima qui est le berceau de l’École ivoirienne. Mais, il ne faudrait pas que la Côte d’Ivoire nous oublie. Même le premier terrain de football, c’est ici, à Élima créé par Arthur Verdier en 1883, ce terrain existe encore », témoigne le fils d’Élima.

Accès difficile à Elima


C’est la croix et la bannière pour accéder au village d’Élima tout comme à sa sous-préfecture Étuéboué. La distance Aboisso- Étuéboué (50km) est un parcours du combattant en passant par les villages d’Éboué, Adjouan, Aby, Aby-Até, Élima. Que de routes escarpées ! Qui traversent plantations de palmiers à huile, d’hévéa (richesses de la région). « Notre village, Élima est enclavé. Alors qu’Élima-Abidjan est distant de 178 km.


Élima-Aboisso fait 50 km. Élima-Adiaké fait 12 km par la lagune. Élima-Assinie Mafia fait 8 km par la lagune. Élima-Étuéboué qui est le chef-lieu de sous-préfecture, 2 km. Nous demandons le bitumage pour permettre aux Ivoiriens de venir voir ici, la première école », plaide Assohoun Ahico. Il tient à créer un musée sur place pour sauvegarder les documents et les dizaines de photos qu’il a sur l’histoire de la première école de Côte d’Ivoire y compris les plantations de café et autres.


Mamadou Ouattara, envoyé spécial à Élima

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