Présidentielle en Côte d'Ivoire : la campagne démarre pour les cinq candidats

La campagne pour l'élection présidentielle en Côte d'Ivoire a débuté ce vendredi 10 octobre dans un climat politique tendu.

À Abidjan la veille, Ibrahime Coulibaly-Kuibiert, le président de la Commission électorale indépendante, a donné le ton pour le démarrage de la campagne pour l'élection présidentielle du 25 octobre en Côte d'Ivoire.

« Les candidats pourront organiser des réunions électorales, des manifestations publiques, sous réserve d'une déclaration écrite préalable à l'autorité administrative compétente », a-t-il déclaré.

Depuis ce vendredi, des affiches de campagne et autres effigies de propagande, des habits avec motifs, couleurs, logos ou effigies des candidats ou partis politiques, des circulaires et autres dépliants sont visibles dans les rues de la capitale et d'autres villes pris d'assaut par les candidats.

Ces derniers peuvent également faire usage de spécimens de bulletins de vote pour expliquer aux électeurs comment voter lors des meetings.

Le président de la CEI, dans son adresse, a mis en garde contre des comportements inciviques durant cette campagne électorale.

« Sont interdits l'utilisation des véhicules administratifs, la publication de sondages, les propos injurieux, diffamatoires ou révélant un manquement grave à la Constitution et l'incitation au mépris, à la haine, au racisme, au tribalisme et à tout fait constitutif d'infraction à la loi pénale ».

Simone Ehivet Gbagbo, l'ancienne première dame du pays, lance sa campagne à Bouaflé dans le centre, tandis que la deuxième femme parmi les prétendants à la présidence, Henriette Lagou s'apprête à tenir un meeting à Daoukro, fief du PDCI le 13 octobre.

Ahoua Don Melo tient un meeting à Bouaké au centre, alors que Jean-Louis Billon reste dans la capitale Abidjan avec un meeting à Marcory.

Le président sortant, Alassane Ouattara (83 ans), candidat à sa propre succession pour un quatrième mandat, lance sa campagne demain samedi 11 octobre à Daloa, au sud-ouest, ville considérée comme le fief de l'ancien président Laurent Gbagbo dont la candidature a été rejetée par le Conseil constitutionnel.

Ce même samedi, le front commun réunissant Laurent Gbagbo et Tidjiane Thiam, appelle à une mobilisation dans le centre de la commune de Cocody. Les deux poids lourds de l'opposition parlent d'une marche pour « la paix et les libertés ». Ils exigent également « un dialogue pour des élections inclusives, transparentes et démocratiques ».

Plusieurs militants du PDCI et du PPA-CI ont été arrêtés, inculpés et placés sous mandat de dépôt pour « troubles à l'ordre public » lors de manifestations précédentes.

Mais selon de nombreux observateurs, cette marche risque de ne pas tenir, puisque les autorités pourraient invoquer la campagne électorale pour l'interdire.

La campagne électorale prend fin le 23 octobre prochain, et le vote pour la présidentielle se tient le dimanche 25 octobre.

Le profil des candidats

Cinq candidats ont été autorisés à se présenter à l'élection d'octobre 2025.

Le Conseil constitutionnel ivoirien a confirmé les candidatures de cinq prétendants lundi 8 septembre, selon sa présidente Chantal Nanaba Camara.

Les principaux candidats à ce scrution sont :

Le président sortant Alassane Ouattara, du RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix)
Simone Ehivet Gbagbo, ancienne première dame, Mouvement des générations capables (MGC)
Jean-Louis Billon, ancien membre du PDCI qui se présente désormais avec le Congrès démocratique (CODE)
Ahoua Don Mello, ancienne ministre, indépendante
Henriette Lagou Adjoua, ancienne ministre, coalition GP-Paix

Alassane Ouattara, 83 ans

Parti : Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP)

Économiste de formation, Ouattara est président de la Côte d'Ivoire depuis le 6 mai 2011 et brigue un quatrième mandat controversé. Né en 1942 à Dimbokro, il a rejoint le Fonds monétaire international (FMI) en 1968 et a gravi les échelons jusqu'au poste de directeur général adjoint.

De 1990 à 1993, il a occupé le poste de Premier ministre sous la présidence de Félix Houphouët-Boigny.

Il a été élu président en 2010 avec 54 % des voix, mais l'élection a donné lieu à une crise violente, le président sortant Laurent Gbagbo refusant de céder le pouvoir. Ouattara a finalement consolidé son pouvoir après l'arrestation de Gbagbo.

Simone Ehivet Gbagbo, 76 ans

Parti : Mouvement des générations capables (MGC)

Née en 1946 à Grand Bassam, Simone Gbagbo a été première dame de 2000 à 2010 et a joué un rôle clé dans la fondation du Front populaire ivoirien (FPI), un important parti d'opposition.

Fille d'un gendarme et issue d'une fratrie de 15 enfants, elle a une solide formation et un passé militant.

Elle a été condamnée à 20 ans de prison pour atteinte à la sûreté de l'État, mais a été libérée après sept ans à la suite d'une amnistie présidentielle accordée par Ouattara. Simone et Laurent Gbagbo ont divorcé en 2023, et elle a fondé le parti MGC en 2025.

Jean-Louis Billon, 60 ans

Parti : Congrès démocratique (CODE)

Ancien député et ministre du PDCI, Jean-Louis Billon est l'héritier du SIFCA, un important groupe agro-industriel ivoirien actif dans les secteurs de l'huile de palme, du caoutchouc et du sucre. Il représente une génération d'hommes d'affaires avisés qui allient commerce et politique.

Diplômé en droit des affaires et en gestion, Jean-Louis Billon figure parmi les personnes les plus riches de Côte d'Ivoire, ce qui lui confère une grande visibilité. Sur le plan politique, il a été élu maire de Dabakala en 2001 et a occupé le poste de ministre du Commerce de 2012 à 2017.

Il a brigué l'investiture présidentielle du PDCI en 2020, mais s'est retiré pour soutenir Henri Konan Bédié, le leader historique du parti.

Henriette Lagou, 66 ans

Parti : Coalition GP-Paix

Henriette Lagou se présente pour la deuxième fois à l'élection présidentielle. Née en 1959, elle était auparavant membre du PDCI et a occupé le poste de ministre de la Famille, des Femmes et des Enfants.

Elle a ensuite rejoint le Congrès national de résistance pour la démocratie (CNRD), proche de l'ancien président Laurent Gbagbo.

Elle a fondé le mouvement "Deux millions de filles pour Gbagbo". En 2015, elle s'est présentée à l'élection présidentielle et a obtenu moins de 1 % des voix. Aujourd'hui, dix ans plus tard, elle revient en tant que candidate axée sur la paix et les questions relatives aux femmes.

Ahoua Don Mello, 67 ans

Indépendant.

Ingénieur formé en Côte d'Ivoire et en France, Don Mello est diplômé de l'École nationale des travaux publics et de l'École nationale des ponts et chaussées à Paris.

Il a occupé le poste de ministre de l'Équipement et est actuellement représentant de l'Afrique occidentale et centrale auprès des BRICS et vice-président de l'organisation BRICS International.

Il prône un ordre mondial multipolaire qui soutient le développement en Afrique et dans les pays du Sud. Il était un proche allié de l'ancien président Laurent Gbagbo.

Tensions vives

Alors que la campagne démarre, les tensions sont vives. Le RHDP reste confiant, mais l'incertitude plane sur l'opposition. Jean-Louis Billon, qui s'est distancié du PDCI, ne bénéficie pas du soutien de Tidjane Thiam, qui refuse de le soutenir.

Les chances de Simone Gbagbo de s'aligner sur le parti de son ex-mari Laurent Gbagbo semblent minces. Tidjane Thiam et Laurent Gbagbo ont tous deux déclaré qu'ils poursuivraient leur combat politique, mais qu'ils ne soutiendraient pas d'autres candidats.