Me Zédia Bi Baly Apollinaire est administrateur des services judiciaires et greffier en chef du tribunal de 1ère instance d'Abidjan-Plateau. Il jette un regard sur l'enrôlement qui, selon lui, est mal parti, car effectué sans avoir réalisé au préalable la reconstitution de l'état civil. L'homme aborde également le grave problème lié au casier électoral non à jour en Côte d'Ivoire.
Notre Voie : Le chef de l'Etat a pris une ordonnance pour la reconstitution des actes entièrement ou partiellement détruits et perdus en associant les greffes au mode opératoire. Peut-on aujourd'hui faire l'état des lieux ?
Zédia Apollinaire : Il nous avait été, en effet, demandé de répertorier le double des registres d'état-civil de nos circonscriptions, surtout ceux d'Abidjan. Nous nous sommes acquittés de notre tâche en les transmettant afin qu'on les compare avec ceux des différents centres d'état-civil qui dépendent de notre juridiction. Nous n’avons pas encore eu le retour pour voir quels sont les actes qui existent chez nous et qui n'existent pas ailleurs. En tout cas pour ce qui est du ressort du tribunal de premier instance d'Abidjan. Si l’on fait la comparaison entre les différents registres, il doit y avoir une situation précise entre l'existant et l'inexistant.
N.V. : Quel est le contenu du mode opératoire qui a été retenu?
Z.A. : Le mode opératoire institue un comité de reconstitution. Ce comité transmet au tribunal, par le biais du procureur de la République près de chaque tribunal, les actes. Le tribunal statue sur les actes qui ont été entièrement détruits ou qui sont perdus. Et lorsque le tribunal statue en jugement unique, la décision est transmise à l'officier d'état-civil pour les transcriptions. En somme, il y a deux organes : le comité de reconstitution et le tribunal. Chacun à son niveau doit faire son travail pour reconstituer les actes perdus ou détruits entièrement ou partiellement.
N.V. : Quel est le rôle du ministère de la Justice qui semble piloter les comités locaux de reconstitution ?
Z.A. : Non, les comités locaux de reconstitution sont pilotés par les officiers d'état-civil, particulièrement les sous-préfets. D'abord, on fait appel à tous ceux qui ont perdu des actes. Ils se rendent à la sous-préfecture ou aux comités de reconstitution et ils précisent l’acte qu’ils ont perdu avec une pièce justificative. Si on se rend compte qu'ils ne sont inscrits ni au registre des greffes ni au registre de l'état-civil, on reconstitue l’acte. C'est seulement à cette condition qu’on reconstitue l’acte d’état-civil. S’il est aux greffes, mais pas l'état-civil, l’on ne fait que le retranscrire. Si on ne le retrouve pas dans ces deux registres, on le reconstitue. Quand on reconstitue les actes, on fait le point qu’on transmet au procureur de la République. Donc, le ministère de la Justice n'intervient qu’après le travail du comité de reconstitution.
N.V. : Ces comités de reconstitution ont-ils travaillé comme il se doit?
Z.A. : En ce qui concerne le tribunal de première instance d'Abidjan, je ne sais pas si le travail a été confié à la préfecture ou à chaque comité de reconstitution. J’ignore comment fonctionne le comité de reconstitution d'Abidjan. Mais le tribunal n'a pas encore été saisi pour statuer sur ces actes perdus ou détruits partiellement ou entièrement.
N.V. : Mais, pendant ce temps, on est en train de faire l'enrôlement sur le terrain, une opération qui prend en compte l'acte d'état civil…
Z.A. : Le fait d'enclencher l'enrôlement est une décision purement politique. Sinon, en tant que technicien du greffe, je crois qu'il aurait été mieux pensé de permettre à tous les citoyens d'avoir leurs actes de naissance avant d'aller à l'enrôlement. On a mis la charrue avant les bœufs. On a fait les audiences foraines qui concernent uniquement ceux qui n'ont jamais eu d'actes de naissance. Ces personnes ont obtenu des actes de naissance. De là, on n'a pas fait la reconstitution des registres et on a lancé directement l’opération d’enrôlement. Donc, aujourd'hui, ceux qui n'ont pas d'acte de naissance se retrouvent à la touche parce que les services d'enrôlement ne demandent que les actes de naissance ou les expéditions des jugements d'audiences foraines. Ceux-là, qui pour la plupart n’ont que des cartes d’identité vertes, ne semblent pas concernés par le processus d'enrôlement. Et je pense qu'il y a lieu d'accélérer la procédure de reconstitution des registres d'état-civil pour qu’ils aient leurs actes de naissance et se fassent enrôler.
N.V. : De quel recours disposent ces personnes restées à la touche ?
Z.A. : Le recours, c'est par rapport à une inscription sur les registres d'identification ou de recensement électoral. C'est quand on est omis ou qu'on a été mal inscrit qu'on fait un recours. Or ils n'y sont même pas, puisqu'ils n'ont pas d'actes de naissance. Alors ils vont faire le recours contre quoi ? Ont-ils été mal inscrits ? Ils ne sont pas inscrits. Peut-être que les juristes les plus avisés, les juristes de la CEI, pourront nous donner la solution qu'ils ont pour eux. Il faudrait interroger la CEI pour voir ce qui est prévu pour ces personnes qui ont des pièces autres que les actes de naissance et les expéditions de jugements supplétifs.
N.V. : Que faut-il faire pour corriger cette situation ?
Z.A. : En son temps, les accords politiques conclus entre les leaders ivoiriens ont demandé que tous ceux qui sont inscrits sur les listings de 2000 soient déclarés ivoiriens. S'ils le sont, ils n'ont qu'à le prouver en produisant une pièce qui justifie que c'est leur nom qui est inscrit. Il faut donc les identifier et leur établir une carte d'électeur et une nouvelle carte d'identité. Parce qu'après l'opération, ceux qui ne se seront pas fait établir une carte d'identité, quel sera leur sort ? Est-ce qu'à partir du fichier de 2000, on ne peut pas techniquement leur établir les deux pièces ? C'est-à-dire renouveler leur inscription à partir de leur carte d'identité verte ou de la carte d'identité jaune qui porte au moins le numéro de l’acte de naissance. De manière très naïve, je pense qu'on peut exploiter cette piste.
N.V. : Qu'est-ce qu'une expédition d’audience foraine ?
Z.A. : Une expédition, c'est la reproduction littérale d'une décision de justice, d’une minute, signée et cachetée par l'officier public ministériel, le greffier en chef ou le notaire. C'est ce que les juges et les greffiers ont délivré lors des audiences foraines. Et le mode opératoire de l’identification dit qu'avec ces pièces, on peut se faire identifier.
N.V. : Un individu qui détient une expédition qui n’est pas signée peut-il normalement se faire enrôler ?
Z.A. : Non, dès lors que la reproduction d'une décision n'est pas signée, elle devient une copie simple. Or, le mode opératoire de l’identification et la note circulaire du Premier ministre sont clairs là-dessus. On exige l'expédition. Si elle n'est pas signée, elle n'a pas de valeur ; elle ne peut pas être une pièce qu'on peut produire pour revendiquer des droits.
N.V. : Le cas du casier judiciaire au niveau de la justice qui n'est pas à jour pose également un problème crucial…
Z.A. : Les casiers judiciaires posent en fait deux problèmes. Dans les zones CNO, les tribunaux ont été détruits, c'est-à-dire qu’en même temps les greffes qui sont dépositaires des fiches de casiers judiciaires des personnes condamnées dans leur ressort. Dès lors que ces tribunaux et la paperasse ont été détruits, il est évident que les fiches de casiers judiciaires qui retracent l'antécédent judiciaire des personnes nées dans ces zones sont détruites. Et, aujourd'hui, il sera difficile de reconstituer l’antécédent judiciaire de ces personnes-là. A moins qu'on fasse appel à témoins. Nous risquons d’avoir, après les élections, des bagnards qui seront nos représentants soit à l'Assemblée nationale, dans les mairies et les conseils généraux, parce qu'on n’aura pas su véritablement quel est leur antécédent judiciaire. La deuxième situation qui prévaut dans les juridictions, c'est que par manque de moyens matériels, on établit rarement les fiches de casier judiciaire dans les tribunaux non ouverts. Donc, dans les tribunaux, c'est rare de trouver des fiches classées auxquelles on peut faire référence lorsque quelqu'un demande son antécédent judiciaire. Il aurait fallu revoir tout pour voir exactement quels sont ceux qui peuvent être élus ou électeurs parce qu'il y a quand même des dispositions du code pénal qui privent certains individus, certains délinquants de leurs droits civiques. Mais, pourvu que le ministère décide, on pourra, en tant que techniciens, se mettre à sa disposition pour voir la conduite à tenir.
N.V. : Les casiers judiciaires sont de diverses natures. De quel casier parlez-vous ici ?
Z.A. : Du casier électoral ; en matière d'élection c'est le casier électoral. En fait, les fiches de casier judiciaire, il y en a trois. Il y a le casier des personnes condamnées dans un ressort, le casier qui prive certains citoyens d'aller dans l'armée qu’on appelle le casier militaire ; et puis il y a le casier qui prive certains citoyens d'être électeurs, éligibles ou élus.
N.V. : En clair, notre casier électoral n'est pas à jour…
Z.A. : Ça, c'est sûr. En fait, il est dit que le casier électoral doit être logé dans l’enceinte de l'organisme chargé des élections. Je ne suis pas sûr qu'aujourd'hui, à la CEI, il y ait un casier électoral.
N.V. : Alors, c'est que le danger est grand. Qu'est-ce qu'il faut donc faire ?
Z.A. : Bien entendu, le danger est grand. Nous risquons d'avoir des bagnards comme élus. Chaque fois que des gens déposeront des dossiers, il faudra faire un appel à témoins pour chercher à savoir s’ils ont été condamnés une fois dans leur vie.
N.V. : Les casiers judiciaires posent problème dans les zones CNO ?
Z.A. : Ils ne sont pas à jour, pas seulement dans les zones CNO. Par exemple, quelqu'un né dans une zone CNO peut être candidat à Abidjan. Les casiers judiciaires s'établissent dans les lieux de naissance. S'il est à Abidjan, il dira qu'il est blanc comme neige, or il a une condamnation en zone CNO que personne ne sait. Si des instructions fermes sont données aux greffes avec les moyens à l'appui, ils vont se mettre à établir les casiers. Ça, il n'y a aucun problème.
N.V. : Souvent, il y a des décisions de justice qui ne sont pas rédigées par les juges…
Z.A. : Oui, c'est vrai. Mais c'est le politique qui peut mettre la pression sur les juges pour rédiger leurs décisions, sur les greffes pour établir les fiches. Ça, ce n'est même pas un problème. S’il faut même mobiliser les ressources humaines pour le faire les samedis et dimanches, on pourra le faire sortir rapidement.
Interview réalisée par Félix Téha Dessrait coll. : Bruno Kouadio
Notre Voie : Le chef de l'Etat a pris une ordonnance pour la reconstitution des actes entièrement ou partiellement détruits et perdus en associant les greffes au mode opératoire. Peut-on aujourd'hui faire l'état des lieux ?
Zédia Apollinaire : Il nous avait été, en effet, demandé de répertorier le double des registres d'état-civil de nos circonscriptions, surtout ceux d'Abidjan. Nous nous sommes acquittés de notre tâche en les transmettant afin qu'on les compare avec ceux des différents centres d'état-civil qui dépendent de notre juridiction. Nous n’avons pas encore eu le retour pour voir quels sont les actes qui existent chez nous et qui n'existent pas ailleurs. En tout cas pour ce qui est du ressort du tribunal de premier instance d'Abidjan. Si l’on fait la comparaison entre les différents registres, il doit y avoir une situation précise entre l'existant et l'inexistant.
N.V. : Quel est le contenu du mode opératoire qui a été retenu?
Z.A. : Le mode opératoire institue un comité de reconstitution. Ce comité transmet au tribunal, par le biais du procureur de la République près de chaque tribunal, les actes. Le tribunal statue sur les actes qui ont été entièrement détruits ou qui sont perdus. Et lorsque le tribunal statue en jugement unique, la décision est transmise à l'officier d'état-civil pour les transcriptions. En somme, il y a deux organes : le comité de reconstitution et le tribunal. Chacun à son niveau doit faire son travail pour reconstituer les actes perdus ou détruits entièrement ou partiellement.
N.V. : Quel est le rôle du ministère de la Justice qui semble piloter les comités locaux de reconstitution ?
Z.A. : Non, les comités locaux de reconstitution sont pilotés par les officiers d'état-civil, particulièrement les sous-préfets. D'abord, on fait appel à tous ceux qui ont perdu des actes. Ils se rendent à la sous-préfecture ou aux comités de reconstitution et ils précisent l’acte qu’ils ont perdu avec une pièce justificative. Si on se rend compte qu'ils ne sont inscrits ni au registre des greffes ni au registre de l'état-civil, on reconstitue l’acte. C'est seulement à cette condition qu’on reconstitue l’acte d’état-civil. S’il est aux greffes, mais pas l'état-civil, l’on ne fait que le retranscrire. Si on ne le retrouve pas dans ces deux registres, on le reconstitue. Quand on reconstitue les actes, on fait le point qu’on transmet au procureur de la République. Donc, le ministère de la Justice n'intervient qu’après le travail du comité de reconstitution.
N.V. : Ces comités de reconstitution ont-ils travaillé comme il se doit?
Z.A. : En ce qui concerne le tribunal de première instance d'Abidjan, je ne sais pas si le travail a été confié à la préfecture ou à chaque comité de reconstitution. J’ignore comment fonctionne le comité de reconstitution d'Abidjan. Mais le tribunal n'a pas encore été saisi pour statuer sur ces actes perdus ou détruits partiellement ou entièrement.
N.V. : Mais, pendant ce temps, on est en train de faire l'enrôlement sur le terrain, une opération qui prend en compte l'acte d'état civil…
Z.A. : Le fait d'enclencher l'enrôlement est une décision purement politique. Sinon, en tant que technicien du greffe, je crois qu'il aurait été mieux pensé de permettre à tous les citoyens d'avoir leurs actes de naissance avant d'aller à l'enrôlement. On a mis la charrue avant les bœufs. On a fait les audiences foraines qui concernent uniquement ceux qui n'ont jamais eu d'actes de naissance. Ces personnes ont obtenu des actes de naissance. De là, on n'a pas fait la reconstitution des registres et on a lancé directement l’opération d’enrôlement. Donc, aujourd'hui, ceux qui n'ont pas d'acte de naissance se retrouvent à la touche parce que les services d'enrôlement ne demandent que les actes de naissance ou les expéditions des jugements d'audiences foraines. Ceux-là, qui pour la plupart n’ont que des cartes d’identité vertes, ne semblent pas concernés par le processus d'enrôlement. Et je pense qu'il y a lieu d'accélérer la procédure de reconstitution des registres d'état-civil pour qu’ils aient leurs actes de naissance et se fassent enrôler.
N.V. : De quel recours disposent ces personnes restées à la touche ?
Z.A. : Le recours, c'est par rapport à une inscription sur les registres d'identification ou de recensement électoral. C'est quand on est omis ou qu'on a été mal inscrit qu'on fait un recours. Or ils n'y sont même pas, puisqu'ils n'ont pas d'actes de naissance. Alors ils vont faire le recours contre quoi ? Ont-ils été mal inscrits ? Ils ne sont pas inscrits. Peut-être que les juristes les plus avisés, les juristes de la CEI, pourront nous donner la solution qu'ils ont pour eux. Il faudrait interroger la CEI pour voir ce qui est prévu pour ces personnes qui ont des pièces autres que les actes de naissance et les expéditions de jugements supplétifs.
N.V. : Que faut-il faire pour corriger cette situation ?
Z.A. : En son temps, les accords politiques conclus entre les leaders ivoiriens ont demandé que tous ceux qui sont inscrits sur les listings de 2000 soient déclarés ivoiriens. S'ils le sont, ils n'ont qu'à le prouver en produisant une pièce qui justifie que c'est leur nom qui est inscrit. Il faut donc les identifier et leur établir une carte d'électeur et une nouvelle carte d'identité. Parce qu'après l'opération, ceux qui ne se seront pas fait établir une carte d'identité, quel sera leur sort ? Est-ce qu'à partir du fichier de 2000, on ne peut pas techniquement leur établir les deux pièces ? C'est-à-dire renouveler leur inscription à partir de leur carte d'identité verte ou de la carte d'identité jaune qui porte au moins le numéro de l’acte de naissance. De manière très naïve, je pense qu'on peut exploiter cette piste.
N.V. : Qu'est-ce qu'une expédition d’audience foraine ?
Z.A. : Une expédition, c'est la reproduction littérale d'une décision de justice, d’une minute, signée et cachetée par l'officier public ministériel, le greffier en chef ou le notaire. C'est ce que les juges et les greffiers ont délivré lors des audiences foraines. Et le mode opératoire de l’identification dit qu'avec ces pièces, on peut se faire identifier.
N.V. : Un individu qui détient une expédition qui n’est pas signée peut-il normalement se faire enrôler ?
Z.A. : Non, dès lors que la reproduction d'une décision n'est pas signée, elle devient une copie simple. Or, le mode opératoire de l’identification et la note circulaire du Premier ministre sont clairs là-dessus. On exige l'expédition. Si elle n'est pas signée, elle n'a pas de valeur ; elle ne peut pas être une pièce qu'on peut produire pour revendiquer des droits.
N.V. : Le cas du casier judiciaire au niveau de la justice qui n'est pas à jour pose également un problème crucial…
Z.A. : Les casiers judiciaires posent en fait deux problèmes. Dans les zones CNO, les tribunaux ont été détruits, c'est-à-dire qu’en même temps les greffes qui sont dépositaires des fiches de casiers judiciaires des personnes condamnées dans leur ressort. Dès lors que ces tribunaux et la paperasse ont été détruits, il est évident que les fiches de casiers judiciaires qui retracent l'antécédent judiciaire des personnes nées dans ces zones sont détruites. Et, aujourd'hui, il sera difficile de reconstituer l’antécédent judiciaire de ces personnes-là. A moins qu'on fasse appel à témoins. Nous risquons d’avoir, après les élections, des bagnards qui seront nos représentants soit à l'Assemblée nationale, dans les mairies et les conseils généraux, parce qu'on n’aura pas su véritablement quel est leur antécédent judiciaire. La deuxième situation qui prévaut dans les juridictions, c'est que par manque de moyens matériels, on établit rarement les fiches de casier judiciaire dans les tribunaux non ouverts. Donc, dans les tribunaux, c'est rare de trouver des fiches classées auxquelles on peut faire référence lorsque quelqu'un demande son antécédent judiciaire. Il aurait fallu revoir tout pour voir exactement quels sont ceux qui peuvent être élus ou électeurs parce qu'il y a quand même des dispositions du code pénal qui privent certains individus, certains délinquants de leurs droits civiques. Mais, pourvu que le ministère décide, on pourra, en tant que techniciens, se mettre à sa disposition pour voir la conduite à tenir.
N.V. : Les casiers judiciaires sont de diverses natures. De quel casier parlez-vous ici ?
Z.A. : Du casier électoral ; en matière d'élection c'est le casier électoral. En fait, les fiches de casier judiciaire, il y en a trois. Il y a le casier des personnes condamnées dans un ressort, le casier qui prive certains citoyens d'aller dans l'armée qu’on appelle le casier militaire ; et puis il y a le casier qui prive certains citoyens d'être électeurs, éligibles ou élus.
N.V. : En clair, notre casier électoral n'est pas à jour…
Z.A. : Ça, c'est sûr. En fait, il est dit que le casier électoral doit être logé dans l’enceinte de l'organisme chargé des élections. Je ne suis pas sûr qu'aujourd'hui, à la CEI, il y ait un casier électoral.
N.V. : Alors, c'est que le danger est grand. Qu'est-ce qu'il faut donc faire ?
Z.A. : Bien entendu, le danger est grand. Nous risquons d'avoir des bagnards comme élus. Chaque fois que des gens déposeront des dossiers, il faudra faire un appel à témoins pour chercher à savoir s’ils ont été condamnés une fois dans leur vie.
N.V. : Les casiers judiciaires posent problème dans les zones CNO ?
Z.A. : Ils ne sont pas à jour, pas seulement dans les zones CNO. Par exemple, quelqu'un né dans une zone CNO peut être candidat à Abidjan. Les casiers judiciaires s'établissent dans les lieux de naissance. S'il est à Abidjan, il dira qu'il est blanc comme neige, or il a une condamnation en zone CNO que personne ne sait. Si des instructions fermes sont données aux greffes avec les moyens à l'appui, ils vont se mettre à établir les casiers. Ça, il n'y a aucun problème.
N.V. : Souvent, il y a des décisions de justice qui ne sont pas rédigées par les juges…
Z.A. : Oui, c'est vrai. Mais c'est le politique qui peut mettre la pression sur les juges pour rédiger leurs décisions, sur les greffes pour établir les fiches. Ça, ce n'est même pas un problème. S’il faut même mobiliser les ressources humaines pour le faire les samedis et dimanches, on pourra le faire sortir rapidement.
Interview réalisée par Félix Téha Dessrait coll. : Bruno Kouadio