Un livre qui sera lu avec beaucoup d’intérêt. "Regard miroir" de l’ancien Bâtonnier de l’ordre des Avocats de Côte d’Ivoire, Maître Lucien Mathieu N’Gouin Claih. Paru chez les éditions NEI/CEDA, ce roman traduit la volonté de l’auteur à prendre une part active à la réflexion sur le débat démocratique en Côte d’Ivoire. A la lecture, le miroir que Maître N’Gouin Claih promène renvoie, au lecteur le reflet de la crise ivoirienne ! C’est l’histoire d’un village africain du nom de "Véjubli". Une appellation obtenue par des combinaisons savantes, fruit de l’imagination créatrice de l’auteur. (Vé) pour vérité, (Ju) pour justice et (Bli) pour Village ou localité. C’est-à-dire la localité de la vérité. La trame, c’est l’histoire de cette communauté villageoise minée par ses dissensions mais qui, chaque fois, parvient à surmonter sa fracture sociale. A un moment donné de la vie de ce village, l’irruption des vices et avatars tels que "Wi", le maître de la fraude, de la corruption et du trafic, "Tê", la méchanceté, "Cupididi", le prince de l’avarice, "Corupana", l’adepte des dessous de table…provoque l’exil de "Paxini (la paix), occasionnant la perversion morale et des rixes au sein du village. Mais, pour retrouver son harmonie d’antan, "Véjubli" doit d’abord ramener "Véritian", la Vérité. Par le truchement de belles constructions, le roman de Lucien N’Gouin Claih laisse découvrir des toponymies significatifs ou des personnages allégoriques comme " Paxini" (la paix), "Yafa" (pardon), "Justinan" (la justice), incarnant des valeurs. Par contre, des anti- valeurs, des avatars du vice sont symbolisés par "Cupididi", "Corupta", "Wi", "Tê". En somme, "Regard miroir" est sans doute un plaisant travestissement de l’histoire récente de la Côte d’Ivoire, matérialisée par la vie de "Véjubli". Une bourgade de deux cents âmes caractérisée par sa beauté, l’harmonie et la paix qui y règnent. Mais qui subira, par la suite, « une fracture sociale qu’on avait cru définitive. La rue principale qui est une voie de communication, aujourd’hui, était une parfaite ligne de séparation. Les deux quartiers étaient deux camps ennemis.» A lire entre ces lignes, le lecteur de se remémorer l’histoire récente de la Côte d’Ivoire. Tel que la rue consacre la division de "Véjubli" « en deux camps ennemis », la Côte d’Ivoire avait connu, elle aussi, une partition à l’aune de la crise civilo- militaire qui a éclaté un 19 septembre 2009. Cela suite à des incompréhensions politiques. Maître N’Gouin Claih est Président du Comité scientifique de l’Université judiciaire de Côte d’Ivoire, membre fondateur de la Ligue Ivoirienne des Droits de l’Homme dont il a été président en 2003. Il a déjà publié "Un Bâtonnier pour dire". "Regard miroir", sa nouvelle publication a été préfacée par l’éminent historien Niamkey Koffi et comporte 220 pages.
Jean- Antoine Doudou
Jean- Antoine Doudou