x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Société Publié le jeudi 12 mars 2009 | Fraternité Matin

Lutte contre l’insalubrité : 3 mois pour rendre Abidjan propre • Gbagbo lance l’opération cet après-midi

Le Président de la République va présider cet après-midi, sur le Nangui Abrogoua, la cérémonie de lancement officielle de l’opération “Abidjan ville propre” financée par la Banque mondiale.



Le projet d’urgence des Infrastructures urbaines du gouvernement financé par la Banque mondiale, dans son volet « Déchets solides » sera officiellement lancé cet après-midi au cours d’une cérémonie que le Président de la République présidera sur le boulevard Nangui Abrogoua. Quels sont, selon vous, M. le ministre de la Ville et de la Salubrité urbaine, les principaux enjeux d’une telle opération ?



Je voudrais remercier la Banque mondiale pour ce don fait à notre pays et me féliciter de la mise en œuvre effective du volet déchets solides dont notre département ministériel est bénéficiaire. Une opération ville propre va être organisée à Abidjan. Les populations de notre capitale économique doivent savoir que chaque année, il y a environ un résidu de 1.000.000 de tonnes d’ordures dans la ville et qui constituent des dépôts sauvages à divers endroits. Pour que la ville soit réellement rendue propre, nous avons estimé que ces dépôts sauvages doivent disparaître. Cela facilitera le travail quotidien des entreprises chargées de la collecte des ordures et permettra que la production journalière des ordures par lesdites entreprises soit enlevée et transférée à la décharge. Les Abidjanais doivent comprendre qu’il s’agit pour nous d’enlever les dépôts sauvages pour pouvoir apprécier l’état de propreté du district d’Abidjan.



La cérémonie de ce jour sera lancée en présence du Président de la République et du Premier ministre qu’il a instruit de prendre à cœur cette question de salubrité pour que nous trouvions des solutions originales pour soulager les Ivoiriens. Et pour donner sa caution à cette opération, il sera là et nous espérons qu’il pourra livrer un message fort aux Ivoiriens pour que nous retrouvions la culture de la propreté comme autrefois.



Quelles sont les compétences de l’Anasur par rapport aux maires pour mettre fin à ce conflit larvé qui plombe la gestion des ordures ?



L’Anasur est chargée maintenant de vérifier si le travail est fait et selon la réglementation. Il faut rappeler qu’il n’ y avait pas de réglementation. La direction générale de la Salubrité urbaine et la direction des Affaires et de la Coopération travaillent en ce moment sur un ensemble de textes, d’arrêtés et de projets de décrets, qui vont permettre à l’Anasur d’agir sur le terrain, mais pour le compte des maires. L’occupation du domaine public repose sur un vieux texte des années 1928 et 1929 et aucun texte ne précise comment est géré le domaine public.



Les grandes vallées d’Abidjan sont occupées par des quartiers précaires, mais tout ceci est un domaine qui appartient à l’Etat. Il est apparu nécessaire au gouvernement de créer un cadre institutionnel nouveau pour faire respecter l’utilisation de ces espaces. Progressivement et grâce à une bonne politique de communication, nous allons sensibiliser les Ivoiriens à la connaissance des règles sur lesquelles l’Anasur va s’appuyer pour tout ce qui concerne la propreté de la ville. A titre d’exemple, les opérateurs déversaient des ordures sur la décharge, mais en réalité le contrôle fait était passif. Aujourd’hui, n’importe qui peut téléphoner à l’agence et il est identifié à partir de l’endroit où il téléphone. Lorsqu’il donne l’information sur le dépôt qui vient d’être créé, les services techniques de l’Anasur peuvent immédiatement se rendre sur ce lieu, parce que leurs ordinateurs leur donnent une carte qui sort directement et qui indique toutes ces informations. Ce qui n’existait pas par le passé. Nous sommes au 21e siècle, ce sont nos premiers pas et notre ambition est de mettre en place un cadre institutionnel fort, une réglementation juridique et légale forte pour que dès que l’Etat se donne les moyens de permettre un travail constant des opérateurs, nous n’ayons plus de surprises désagréables. Et nous annoncerons très bientôt des mesures pour conforter ce que nous venons de dire.



Quelles sont ces mesures ?



Sous peu, nous allons interdire les coffres posés ici et là dans les quartiers de la Ville, parce que l’Anasur a pu observer que certains coffres restaient jusqu’à trois mois avant d’être enlevés, alors que leur enlèvement doit être quotidien.



A qui la faute? Des maires ou à votre ministère?



C’est le fait des entreprises mais c’est davantage d’un manque de contrôle. Les services techniques des mairies ne contrôlent pas systématiquement. Peut-être que ce n’était pas dans leurs compétences de contrôler. Mais aujourd’hui, l’instrument que nous avons, nous permet de faire des contrôles partout et nous distribuons des bons et des mauvais points. Il y a des constats de carence qui sont faits. Une entreprise a reçu une lettre avec des constats d’huissier qui montrent qu’elle n’a pas fait son travail depuis belle lurette. Au moment des règlements, nous allons sortir ces documents pour dire, monsieur, nous avons remarqué que l’année dernière à cette même période vous aviez enlevé 500 tonnes d’ordures et que cette année, vous n’avez enlevé que 40 tonnes, donc il y a un problème. Ce qui n’existait pas par le passé. Une des nouvelles mesures concerne ces constats de carence et le contrôle régulier de l’enlèvement des dépôts journaliers de tous les dépôts d’ordures qui devront désormais être dans des bacs et dans des sacs. Nous obligerons les entreprises, même si elles n’ont pas de tasseurs parce qu’ils coûtent excessivement cher, à passer dans les rues comme cela se faisait à l’époque pour ramasser les ordures qui auront été déposées dans des sachets.



Par contre, tous ceux qui seront pris en train de déposer des ordures qui ne seront pas dans des récipients ou dans des sachets seront systématiquement verbalisés et seront même conduits dans un poste de police quel que soit leur statut. Le contrôle sera très accru à ce niveau et nous allons sévir. Parce que cela fait un an que nous faisons de la sensibilisation, que nous disons aux Ivoiriens que notre ville n’est pas une poubelle, mais cela ne semble pas porter des fruits. Peut-être que ces concitoyens ne lisent pas les journaux, ne regardent pas la télévision ou n’écoutent pas la radio. Nous allons passer à une phase un peu plus répressive. C’est une nouvelle mesure. Et nous voulons que la population comprenne que la propreté leur évite des maladies, leur permet d’avoir un cadre agréable et d’être même envié des autres.



Et vous pensez obtenir des résultats probants ?



Samedi dernier, j’ai fait de la marche et j’ai vu des cadres qui dirigent ce pays dans le secteur privé ou public qui, après leur marche, n’ont pu se s’empêcher de jeter tout le long du parcours, les sachets vides d’eau après s’être désaltérés. Certains se sont sentis gênés, quand ils se sont aperçus après leur vilain geste que c’était moi qui passait aussi par là pendant ma marche. Ce sont de nouvelles habitudes que nous voulons que les gens prennent. Il ne coûte rien de garder sur soi un sachet d’eau vide et de le jeter après dans une poubelle. Si la population n’assume pas son quota d’effort, l’administration aura beau faire, ça ne changera rien.



Que comptez-vous faire ?



La dernière mesure que je dois vous annoncer, c’est que nous essayons de nous mettre d’accord avec le ministre de l’Economie et des Finances pour dire que tout le monde doit payer pour la salubrité. L’administration doit payer pour la salubrité. La preuve , c’est que quand vous allez le soir dans les tours administratives, vous pouvez voir les ordures amoncelées et déposées dans leurs jets d’eau qui ne fonctionnent plus. Cela est atroce et c’est une tradition dans toutes les administrations. Des industries doivent payer. A côté des déchets industriels, elles produisent des déchets qui proviennent de leurs bureaux et de leurs usines. Les commerçants doivent payer.



Les ménages ont déjà commencé à payer et font enlever leurs ordures par des personnes qui passent. C’est un principe d’équité, parce que personne n’a l’eau, le téléphone et l’électricité gratuitement. Ce sont des services publics concédés et l’Etat a l’obligation de fournir ces services à ses citoyens. L’Etat a aussi l’obligation de fournir la salubrité à ses populations et l’article 19 de la constitution dit bien que chacun a droit à un environnement sain, ce qui veut dire que l’Etat doit prendre toutes les dispositions pour que cet environnement sain existe. Et comme tous les services publics, ils ne sont pas gratuits.



Dans l’exécution de ce projet d’urgence des infrastructures urbaines, quel va être véritablement le rôle de l’Etat ?



La Banque mondiale a fait un don qui est ciblé sur l’environnement et en particulier les déchets solides. L’ancien coordonnateur de la Macon qui n’existe plus en tant que tel, doit veiller aux procédures de la banque, qui ne sont pas celles de notre administration publique et financière. En revanche, les initiatives, les mécanismes de fonctionnement, le suivi de l’opération relèvent de l’Anasur qui est le maître d’ouvrage délégué. Il est vrai qu’il existe des entreprises qui ne sont pas celles qui étaient là. Ces nouvelles entreprises ont été sélectionnées à l’issue d’un appel d’offres international, donc ouvert. Ces entreprises ont été sélectionnées selon des critères arrêtés par la banque. Aujourd’hui, nous sommes quasiment d’accord. La banque a des consultants qui seront sur le terrain ; l’Anasur a des coordonnateurs sur le terrain. Il y a un comité de suivi et un comité technique. Toutes ces personnes vont ensemble veiller au bon déroulement de l’opération. Cette opération va coûter 3 milliards 200 millions de francs CFA, rien que pour la gestion des ordures. Ce projet va durer 3 mois et nous allons enlever 500.000 tonnes. Il s’agit d’ordures résiduelles qui sont là pour certaines depuis des années et pour d’autres qui sont de création nouvelle. Le fonctionnement du projet est très lourd mais l’essentiel est que nous puissions avoir la confiance de la banque pour les prochains projets que nous voulons développer. Nous pensons que les Ivoiriens doivent prendre conscience du fait que ce n’est pas une opération miracle. C’est une opération qui va permettre de débarrasser certains endroits de la ville d’Abidjan de dépôts sauvages qui ont été déjà identifiés. Elle va permettre également à la ville de respirer quelque peu.



Après ces 3 mois, quel avenir pour l’opération Ville propre. Le gouvernement va-t-il, sur fonds propres, prendre désormais le relais ?



Face à ces contraintes, nous avons des solutions. Puisque nous avons espoir que d’ici à 3 mois, nous aurons été éligibles à l’initiative PPTE, nous aurons les moyens de continuer ce travail. Nous ambitionnons de doter le fonds d’appui au programme de salubrité et de rénovation urbaine de moyens suffisants pour garantir la continuité du service public d’une part et d’autre part essayer d’élargir l’assiette fiscale. C’est-à-dire que chacun doit comprendre que tout le monde devra payer la salubrité. Et moi, le ministre de la Ville, je me propose d’envoyer à tout contrevenant, à toutes les administrations, à toutes les entreprises, à tous les commerces et à tous les ménages un état, de façon que chacun sache que celui qui salit doit payer pour qu’on nettoie.



Avez-vous trouvé une solution durable à la question de la décharge, car il ne faudra pas enlever les ordures pour les garder sous les bras ?



Au niveau du chapitre des déchets solides, la Banque mondiale a décidé de nous aider pour un montant de 3 milliards 500 millions, de rénover et contribuer également à la création du centre de transfert de Williamsville. Ce centre ne sera pas une décharge à ciel ouvert. Désormais, les choses seront organisées de sorte que les déchets soient triés selon leur nature avant d’être transférés dans le centre. La décharge d’Akouédo est saturée et nous avons en projet un appel d’offres international pour la construction d’une décharge aux normes internationales.



Nous voulons des décharges ou des unités de transformation construites conformément aux normes actuelles exigées en Europe. La Côte d’Ivoire n’est pas une poubelle. Les gens ont réussi à rentrer avec les déchets toxiques dans la décharge, parce qu’elle n’est pas équipée comme elle devrait l’être. Les décharges en Europe ont une traçabilité. A l’entrée de toutes les décharges en Europe, se trouve de nuit comme de jour, un laboratoire qui permet d’avoir un échantillonnage des produits déversés. On sait alors où a été déposé le produit dans la décharge, sans oublier qui l’a emmené et d’où il provient. Ce ne sont pas des choses qui se font en un an et en toute vitesse. Voilà pourquoi, je déconseille aux Ivoiriens de vouloir nous mettre le couteau sous la gorge. Ce n’est pas parce que des ordures empestent notre environnement qu’il nous faudra nous engager à la va-vite dans des solutions qui nous créerons de nouveaux et sérieux problèmes dans l’avenir. Nous avons fait appel à un cabinet international pour nous proposer un avant-projet sommaire qui va permettre à plusieurs cabinets d’études de soumissionner et faire l’étude selon les normes internationales, notamment européennes, qui sont généralement utilisées. Après nous allons pouvoir dire à ces entrepreneurs et à ces hommes d’affaires que nous voulons une décharge construite de telle ou telle manière. Je voudrais dire pour terminer sur ce chapitre que nous avons eu une séance de travail avec la Sodemi qui connaît mieux le sous-sol ivoirien et abidjanais et dont l’avis peut permettre de mettre fin à tous ces débats sur la proximité ou les menaces sur la nappe phréatique. Nous avons aujourd’hui une coupe de tout Abidjan. Les points les plus bas se trouvent à Port-Bouët où on est à pratiquement 2 ou 3 mètres de la nappe et des points beaucoup plus hauts qui sont sur des calcaires ou des roches. Nous avons maintenant des informations utiles sur le sous- sol du district d’Abidjan pour savoir où il faut installer tel ou tel type d’unité de façon à préserver le sous-sol lui-même.



Quel est le prototype de décharge que vous voulez ?



Je suis allé en France et j’ai vu de gros blocs blancs, identifiés et dans un casier bien précis. On m’a dit que ce sont les déchets toxiques de Côte d’Ivoire. On n’aurait jamais pensé qu’on se trouvait sur une décharge, simplement parce que les choses ont été faites dans les normes. Dans une décharge, les parois des alvéoles doivent être recouvertes du polyane. Il doit exister un réseau de collecte des lexiviat, c’est-à-dire des eaux qui suintent des ordures. Il faut des cheminées d’échappatoire des gaz, tel le méthane. Quand tout est terminé, il faut que le tout soit bien recouvert de terre. Ensuite, il faut recréer de la végétation en cet endroit. Enfin que tous les germes de maladie soient détruits. Si cela se fait en Europe, pourquoi nous ne le ferions pas ici ? L’Etat a le devoir de garantir l’avenir des générations futures. Akouédo a plus de 40 ans d’existence et si nous devons construire un centre d’incinération, nous devons le faire aux normes internationales. Tant au niveau du traitement des fumées, des gaz d’échappatoire, des cendres qu’au niveau de l’enfouissement lui-même ou de la mise à feu et du brûlage des matériaux collectés.C’est en somme une grande tâche qui nécessite beaucoup de rigueur et où il n’ y a aucune place pour la compromission.



Qu’est-ce qui bloque la sortie de terre du centre d’enfouissement technique d’Akeïkoi que l’association des maires du district d’Abidjan a été récemment visité?



Ce centre d’enfouissement technique a été fait sans autorisation et selon les normes que les opérateurs eux-mêmes ont déterminées. Ce n’est pas parce qu’il y a un trou où on peut jeter des ordures que c’est un centre d’enfouissement technique. Il n’ y a pas que le centre d’enfouissement technique d’Akeïkoi. Nous avons connnaissance de l’existence d’un autre quelque part. Chacun s’est mis à creuser des trous n’importe comment parce que les gens pensent que nous allons partir d’Akouédo à n’importe quelle condition. Même au niveau de Williamsville, nous avons exigé que le centre de transfert corresponde aux normes internationales. C’est-à-dire que vous pouvez arrivez sur un centre de transfert, vous ne sentez aucune odeur. Pourtant, ce sont des ordures qui y sont. Il n’ y a pas de bactéries qui puissent se développer au-delà, parce que les déchets sont traités à la chaux régulièrement, les microbes sont tués. Mais qui le fait. L’opérateur actuel sur le site de la décharge d’Akouédo ne le fait pas. On doit faire des épandages pour éviter les moustiques et les insectes nuisibles, on doit faire des épandages pour éviter que la légion de rats n’envahisse les zones d’habitations proches.



Interview réalisée par
Franck A. Zagbayou
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Société

Toutes les vidéos Société à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ