A quelque chose, malheur est bon, dit-on. La récente interpellation de M. Innocent Anaky Kobena, député de Kouassi-Datékro et président du Mouvement des Forces d’Avenir (MFA), a permis de découvrir que des troupes du Général Philippe Mangou sont toujours prêtes à défendre le régime Laurent Gbagbo par tous les moyens. Parfois en foulant aux pieds ses propres règles : la neutralité politique et en froissant sa mission première : la défense de la République. Les troupes de Philippe Mangou en effet, dans ce qu’il convient d’appeler désormais l’«affaire Anaky Kobena», ont avoué avoir ordonné l’interpellation et l’audition d’un opposant politique, un civil, au chef de l’Etat. Anaky était dans son rôle, pas les troupes de Mangou. Mais cette affaire est révélatrice de ce qu’est en réalité la nature du régime Gbagbo. Un pouvoir civil assis sur un socle militaire. Ou peut-être, si l’on veut, un pouvoir militaire portant le masque d’un civil.
C’est en 2000, à l’occasion de la présidentielle organisée de « façon calamiteuse » que la connexion s’est faite, dans le duel à mort qui opposait le militaire Guéi Robert, Général de son état et le civil Laurent Gbagbo, président du Front Populaire Ivoirien. Devant les foules qui se sont déversées dans la rue pour des raisons diverses, une frange de l’armée s’est désolidarisée du Général. Elle a donc aidé un de ses membres à abandonner le combat pour se réfugier (on le saura plus tard) à Toukouzou-Hozalem, dans le village du prophète Papa Nouveau. C’est cette frange de militaires, on le sait maintenant, à la lumière des récents évènements, qui porte depuis, sur les bras, le pouvoir de Laurent Gbagbo.
C’est en comptant sur cette frange de militaires que l’ancien opposant, grand militant pour la démocratie, du temps où il était dans l’opposition, a répondu sur les ondes de RFI, que « la police » fera son travail quand un journaliste de cette radio mondiale lui apprenait que les militants du RDR, son ancien allié du Front républicain, projetaient de manifester pour réclamer la reprise de l’élection présidentielle. La police a tellement bien fait son travail qu’un charnier a été découvert dans les environs de la prison civile d’Abidjan, au lendemain de l’investiture du vainqueur par proclamation du scrutin présidentiel.
C’est encore cette frange de militaires qui a sorti les matraques et les fusils contre ces mêmes militants du RDR en décembre de cette même année pour protester contre l’exclusion de leur leader Alassane Ouattara, des législatives qui devaient se tenir.
C’est cette même frange de militaires qui a gonflé les rangs des patriotes qui ont envahi les rues d’Abidjan pour empêcher la venue du nouveau Premier ministre, Elimane Seydou Diarra, issu des accords de Linas-Marcoussis censés mettre fin à une crise militaro-civile qui a éclaté en septembre 2002. Bien que fissurée à l’épreuve des réalités (Défection du Général Doué, alors chef d’Etat-major de l’armée), cette frange, en novembre 2004 va se mettre en civil, se fondre dans les mouvements dits patriotiques pour saccager, piller et détruire les entreprises et les domiciles des ressortissants français, devant l’arrêt brutal de l’opération « Dignité ». Un baroud d’honneur initié par cette frange qui n’a jamais voulu accepter que Laurent Gbagbo n’ait pas réussi à mater sa rébellion. Les portes des domiciles et les grilles des entreprises défoncées au cours de ces manifestations, ne pouvaient l’être qu’à l’aide de matériel militaire.
Retour à la normale
Quand en Mais 2004, rappelons-le, un pasteur avait annoncé que la marche envisagé par le RHDP se solderait par le départ du chef de l’ Etat, ses partisans armés ne s’étaient pas faits prier pour ouvrir le feu sur des manifestants civils aux mains nues. Résultat de la course : 500 morts selon l’opposition, 150, selon une enquête internationale.
Jusque-là, la frange de l’armée favorable à Gbagbo peut être pas la plus importante, mais faisant preuve d’un activisme débordant, avait avancé, camouflée. Elle se cachait derrière les instructions du chef de l’Etat, chef suprême des armées ; derrière les mouvements des « patriotes » pour opprimer les opposants et intimider les ressortissants étrangers. Mais, dans l’affaire Anaky Kobena, pour des raisons que l’on ignore, elle (cette frange de l’armée) a décidé d’avancer à visage découvert. Elle s’est postée sur un terrain nu. Voulait-elle que l’on sache que (toute) l’armée est rangée derrière Laurent Gbagbo, oubliant que nous sommes dans un régime démocratique multipartite ? Voulait-elle faire des gros yeux, sortir les dents et les griffes pour effrayer l’opposition ?
Voulait-elle démontrer que c’est elle qui, en réalité, mène le bal ? Ou tout, simplement, se sent-elle agacée, menacée dans son existence par la tenue de l’élection présidentielle qui se profile à l’horizon et que son poulain ne peut remporter ? Et si cette frange voulait se rendre maîtresse du jeu politique tout simplement ? La Côte d’Ivoire aurait alors fait de grands pas dans la régression. La preuve sera faite que Laurent Gbagbo n’aura été qu’un pantin entre les mains de la frange de l’armée qui l’a porté au pouvoir.
Ici s’explique alors, la grande impatience des Ivoiriens de voir se tenir ces élections libératrices. Un jeu qui remettrait les choses en place : le pouvoir politique détenu par le peuple et confié à un civil pour sa gestion équitable dans l’intérêt bien compris du pays et l’armée aux militaires pour la défense de l’intégrité territoriale. Redevenue muette et totalement républicaine, cette armée protégeant la tranquillité des populations et garantissant leur confiance en leur patrie. C’est Laurent Gbagbo lui-même qui disait, dans le temps où il était dans l’opposition, que l’armée est « formatée » pour tuer, elle est conçue pour utiliser les armes contre des ennemis venus d’ailleurs. C’est pourquoi, on ne doit pas la mettre en face du peuple. L’armée ne peut pas avoir changé de nature et de méthode du jour au lendemain. Rompez les rangs, soldats et retournez dans les casernes ! Le peuple vous le rendra.
Raphaël Lakpé.
Journaliste-sociologue,
Consultant
C’est en 2000, à l’occasion de la présidentielle organisée de « façon calamiteuse » que la connexion s’est faite, dans le duel à mort qui opposait le militaire Guéi Robert, Général de son état et le civil Laurent Gbagbo, président du Front Populaire Ivoirien. Devant les foules qui se sont déversées dans la rue pour des raisons diverses, une frange de l’armée s’est désolidarisée du Général. Elle a donc aidé un de ses membres à abandonner le combat pour se réfugier (on le saura plus tard) à Toukouzou-Hozalem, dans le village du prophète Papa Nouveau. C’est cette frange de militaires, on le sait maintenant, à la lumière des récents évènements, qui porte depuis, sur les bras, le pouvoir de Laurent Gbagbo.
C’est en comptant sur cette frange de militaires que l’ancien opposant, grand militant pour la démocratie, du temps où il était dans l’opposition, a répondu sur les ondes de RFI, que « la police » fera son travail quand un journaliste de cette radio mondiale lui apprenait que les militants du RDR, son ancien allié du Front républicain, projetaient de manifester pour réclamer la reprise de l’élection présidentielle. La police a tellement bien fait son travail qu’un charnier a été découvert dans les environs de la prison civile d’Abidjan, au lendemain de l’investiture du vainqueur par proclamation du scrutin présidentiel.
C’est encore cette frange de militaires qui a sorti les matraques et les fusils contre ces mêmes militants du RDR en décembre de cette même année pour protester contre l’exclusion de leur leader Alassane Ouattara, des législatives qui devaient se tenir.
C’est cette même frange de militaires qui a gonflé les rangs des patriotes qui ont envahi les rues d’Abidjan pour empêcher la venue du nouveau Premier ministre, Elimane Seydou Diarra, issu des accords de Linas-Marcoussis censés mettre fin à une crise militaro-civile qui a éclaté en septembre 2002. Bien que fissurée à l’épreuve des réalités (Défection du Général Doué, alors chef d’Etat-major de l’armée), cette frange, en novembre 2004 va se mettre en civil, se fondre dans les mouvements dits patriotiques pour saccager, piller et détruire les entreprises et les domiciles des ressortissants français, devant l’arrêt brutal de l’opération « Dignité ». Un baroud d’honneur initié par cette frange qui n’a jamais voulu accepter que Laurent Gbagbo n’ait pas réussi à mater sa rébellion. Les portes des domiciles et les grilles des entreprises défoncées au cours de ces manifestations, ne pouvaient l’être qu’à l’aide de matériel militaire.
Retour à la normale
Quand en Mais 2004, rappelons-le, un pasteur avait annoncé que la marche envisagé par le RHDP se solderait par le départ du chef de l’ Etat, ses partisans armés ne s’étaient pas faits prier pour ouvrir le feu sur des manifestants civils aux mains nues. Résultat de la course : 500 morts selon l’opposition, 150, selon une enquête internationale.
Jusque-là, la frange de l’armée favorable à Gbagbo peut être pas la plus importante, mais faisant preuve d’un activisme débordant, avait avancé, camouflée. Elle se cachait derrière les instructions du chef de l’Etat, chef suprême des armées ; derrière les mouvements des « patriotes » pour opprimer les opposants et intimider les ressortissants étrangers. Mais, dans l’affaire Anaky Kobena, pour des raisons que l’on ignore, elle (cette frange de l’armée) a décidé d’avancer à visage découvert. Elle s’est postée sur un terrain nu. Voulait-elle que l’on sache que (toute) l’armée est rangée derrière Laurent Gbagbo, oubliant que nous sommes dans un régime démocratique multipartite ? Voulait-elle faire des gros yeux, sortir les dents et les griffes pour effrayer l’opposition ?
Voulait-elle démontrer que c’est elle qui, en réalité, mène le bal ? Ou tout, simplement, se sent-elle agacée, menacée dans son existence par la tenue de l’élection présidentielle qui se profile à l’horizon et que son poulain ne peut remporter ? Et si cette frange voulait se rendre maîtresse du jeu politique tout simplement ? La Côte d’Ivoire aurait alors fait de grands pas dans la régression. La preuve sera faite que Laurent Gbagbo n’aura été qu’un pantin entre les mains de la frange de l’armée qui l’a porté au pouvoir.
Ici s’explique alors, la grande impatience des Ivoiriens de voir se tenir ces élections libératrices. Un jeu qui remettrait les choses en place : le pouvoir politique détenu par le peuple et confié à un civil pour sa gestion équitable dans l’intérêt bien compris du pays et l’armée aux militaires pour la défense de l’intégrité territoriale. Redevenue muette et totalement républicaine, cette armée protégeant la tranquillité des populations et garantissant leur confiance en leur patrie. C’est Laurent Gbagbo lui-même qui disait, dans le temps où il était dans l’opposition, que l’armée est « formatée » pour tuer, elle est conçue pour utiliser les armes contre des ennemis venus d’ailleurs. C’est pourquoi, on ne doit pas la mettre en face du peuple. L’armée ne peut pas avoir changé de nature et de méthode du jour au lendemain. Rompez les rangs, soldats et retournez dans les casernes ! Le peuple vous le rendra.
Raphaël Lakpé.
Journaliste-sociologue,
Consultant