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Politique Publié le jeudi 14 mai 2009 | Nord-Sud

Affrontements interethniques : Akoupé à feu et à sang hier

La ville d'Akoupé a été le théâtre de violents affrontements, hier, entre les populations autochtones qui accusent les allochtones d'avoir assassiné un jeune du terroir.

Akoupé, cité du Sud-Est de la Côte d'Ivoire, située à 142 km d'Abidjan ressemblait hier, à une ville fantôme. Populations (surtout les femmes et les enfants) terrées chez elles, des rues désertes avec des projectiles de tout genre jetés ça et là, des étals en pièces détachées au marché, des pneus brulés en milieu de voie d'où s'échappaient des fumées noires… Tel était le décor qu'offrait cette partie du pays akyé en fin d'après-midi ou un impressionnant détachement de la police nationale (celle du commissariat locale et le renfort en provenance d'Adzopé) avait pris position. Selon des témoignages recueillis sur place, durant toute la journée, cette bourgade de 32.662 habitants a été le théâtre de violents affrontements entre les populations autochtones (les Attié) et les allochtones (composées essentiellement de Dioula et de ressortissants des pays voisins du Nord).

Des versions contradictoires

La cause de cette guerre est la mort d'un Attié dans le “quartier” dioulakro. Evidemment, les versions livrées de part et d'autre par les « combattants » sur les raisons de la dégénérescence de ce drame en conflit interethnique sont diamétralement opposées. La première provient des « étrangers ». Elle indique que les faits remontent à la veille, dans la nuit du mardi 12 au mercredi 13 mai. Aux alentours de 2h30 du matin, le jeune homme (la future victime), originaire d'un village de la commune d'Akoupé et sa bande auraient investi le domicile d'un habitant du quartier dioula avec des intentions manifestement peu amicales. Le propriétaire des lieux, un allochtone qui croit identifier formellement des braqueurs ouvre le feu à l'aide d'un fusil de fabrication artisanale. Les acolytes du jeune homme prennent la fuite. Mais, lui-même est mortellement atteint. La police est alertée pour faire le constat d'usage. Faux ! Rétorque un autre habitant de la ville, qui, lui, se veut porte-voix des autochtones. Selon sa version des faits, la victime se nomme Jean Prince. Elève au lycée moderne d'Akoupé, fils de la région, habitant de la ville, il revenait d'une promenade nocturne avec ses amis. En passant devant la cour d'un habitant du quartier dioula, il a entendu le bruit d'une mangue qui est tombée d'un arbre. Jean Prince aurait tenté de grimper sur le toit de la maison pour aller récupérer la mangue. «Sachant bien, qu'ils avaient affaire à un jeune du quartier, les habitants de ce quartier ont tiré sur lui. Ils l'ont fait exprès», jure notre interlocuteur. Joint par téléphone, le maire-résident de la ville, Ohoueu Edmond Amari corrobore cette seconde version, laissant croire en la piste d'une bavure ou d'une méprise sur la qualité et les intentions de la victime au moment de sa mort. Il nous recommande fermement de rechercher la version de la police qui a été alertée après les faits et a fait le constat d'usage. Mais, toutes nos tentatives pour joindre le chef des forces de l'ordre de la ville sont restées vaines. «Seul le commissaire peut vous parler. Mais, il est très pris sur le terrain à cause des manifestations», a lâché un policier joint par téléphone. En l'absence de l'arbitrage du responsable de forces de l'ordre, les deux films des faits ont fait leur chemin au sein des différentes communautés. Les Attiés ont battu le rappel des troupes annonçant en ville comme dans les villages environnants que les «Dioulas ont tué de sang froid un digne fils de la région». Ils crient donc vengeance. De leur côté, les allochtones qui crient à la manipulation jurent que c'est «juste un voleur qui a été tué». Ils refusent de se laisser avoir. Ainsi mercredi matin, les Attié sonnent la charge. Ils s'attaquent aux étals des commerçants pour la plupart des Dioulas, saccageant et incendiant tout sur leur passage.

Vengeance, vengeance

Les allochtones qui tentent de s'interposer sont pris à parti. Ainsi, explique un commerçant victime des saccages, les jeunes dioulas ont été pris en chasse à coups de machette et de pierres jusque dans le « quartier korhogolais » où ils auraient même essuyé des tirs à l'arme de fabrication artisanale. «L'un des nôtres a reçu 4 balles dans le dos, mais il n'est pas mort. Sept personnes ont été blessées à la machette. Elles sont toutes à l'hôpital de la ville. A l'heure où je vous parle, nous préparons la riposte», explique cet autre habitant qui n'a toutefois pas été en mesure de décliner les identités des blessés. Quelques minutes plus tard, nous apprendrons que les populations allochtones ont été freinées dans leur élan d'une nouvelle vengeance par l'arrivée des renforts de la police en provenance d'Adzopé. Mais, la tension était toujours perceptible dans la ville. Dr Koné, président des jeunes du quartier dioulakro que nous avons contacté a expliqué tous les efforts qu'il lui a fallu déployer pour instaurer le calme dans son camp. «J'essaye de calmer mes frères. Mais c'est difficile. Quand je réussis à les faire entrer, un autre groupe se soulève dans un autre secteur en disant que les Attié arrivent. La ville est à feu et à sang. Mes frères veulent descendre sur les quartiers attié pour rendre leur coup. Les parents des blessés me demandent de venir à l'hôpital pour faire le constat de leurs malheurs. Mais, je suis obligé moi-même de rester vigilant pour protéger ma vie. Je suis fatigué», a-t-il confié. Avant d'affirmer qu'il a appelé les autorités locales (maire, préfet et député) au secours des populations. Environ une heure après cet échange, soit aux alentours de 16h15, le maire résident d'Akoupé nous rassurait que le calme était revenu dans la cité. «Nos actions en faveur de la paix ont payé. Nous avons sollicité les autorités coutumières et religieuses des différentes communautés qui ont appelé les jeunes et leurs parents au calme. C'est vrai qu'il y a eu des jets de pierres et des blessés, mais la tension a baissé. Jusqu'à demain, nous allons nous retrouver pour parler et taire définitivement les palabres», a assuré Ohoueu Edmond Amari.


Djama Stanislas
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