Un autre Français a failli subir le même sort que Guy André Kieffer après la disparition du journaliste à Abidjan.
Lorsque des hommes en armes sont venus dans sa chambre de l'hôtel Ivoire, à Abidjan, l'avocat parisien Xavier Ghelber a cru sa dernière heure arrivée, craignant de disparaître comme le journaliste Guy-André Kieffer six mois plus tôt. L'avocat se trouvait alors à Abidjan pour un audit de la filière cacao - principale richesse du pays - pour le compte de l'Union européenne. Une information judiciaire a été ouverte à Paris fin 2004 pour enlèvement, séquestration et tentative d'assassinat. Le témoignage de l'avocat a été versé au dossier. Ce soir-là, le 6 novembre 2004, la ville était plongée dans le chaos, raconte-t-il à l'AFP : dans les rues, des milliers de personnes manifestaient contre les Français après la destruction de l'aviation ivoirienne, consécutive au bombardement d'un cantonnement militaire français à Bouaké qui avait fait neuf morts. Réfugié dans sa chambre, l'avocat entend frapper à sa porte à 05H00 le lendemain matin : « Je me suis dit, Licorne (le dispositif militaire français, Ndlr) vient m'évacuer ». Mais une voix ivoirienne qui n'a « rien d'amical » lui intime l'ordre de sortir, avant un tir de Kalachnikov dans la porte. « J'ai ouvert et j'ai vu six ou sept mecs en uniforme et un vieux Blanc avec eux », un retraité français lui aussi enlevé cette nuit-là, se remémore Xavier Ghelber. L'enquête judiciaire française a montré qu'il s'agissait de « membres de la garde très rapprochée du chef de l'Etat ivoirien», selon des sources proches du dossier. L'avocat a juste le temps d'enfiler un pantalon, d'attraper son passeport, une lentille de contact et deux téléphones portables qu'il cache sur lui. « Dans le hall de l'hôtel, l'un d'eux veut me passer un sac sur la tête, je me suis dit que ce serait la dernière chose que je verrais avant d'être fusillé. J'ai dit pas question ». Enervé, un membre du commando, Toussaint D., lâche une rafale à ses pieds. Les balles ricochent sur le sol et blessent grièvement le tireur à une jambe. Xavier Ghelber est ensuite emmené à bord d'un 4X4 avec le retraité français par trois membres du commando. Direction «la résidence du président, Laurent Gbagbo», entend-il. «Je me suis senti rassuré: on ne fusille pas à la résidence, il y a des cellules, on va peut-être être gardés en otage ». « On passe un barrage et on s'arrête sur le parking à l'intérieur de la résidence », poursuit-il. L'un des ravisseurs sort du véhicule, va prendre ses ordres et finalement emmène les deux Français au quartier général de la gendarmerie. Un gardien menace de les exécuter avant que deux officiers n'arrivent, manifestement «gênés» par la situation des deux Français. «C'est là que j'ai senti qu'on passait d'un statut de détenu à un statut de protégé», confie Xavier Ghelber. En fin d'après-midi le dimanche, tous sont transférés dans un autre hôtel. En chemin il voit «la foule qui faisait des signes d'égorgement». Récupéré deux jours plus tard par des soldats français, Xavier Ghelber est évacué vers la France le vendredi. L'enquête a montré des similitudes avec le dossier Guy-André Kieffer, disparu six mois plus tôt, selon son frère Bernard Kieffer: les articles du journaliste sur la filière cacao pourraient avoir gêné des cadres du régime, et des témoignages font état de son passage au palais présidentiel après sa « disparition ».
(Avec AFP)
Lorsque des hommes en armes sont venus dans sa chambre de l'hôtel Ivoire, à Abidjan, l'avocat parisien Xavier Ghelber a cru sa dernière heure arrivée, craignant de disparaître comme le journaliste Guy-André Kieffer six mois plus tôt. L'avocat se trouvait alors à Abidjan pour un audit de la filière cacao - principale richesse du pays - pour le compte de l'Union européenne. Une information judiciaire a été ouverte à Paris fin 2004 pour enlèvement, séquestration et tentative d'assassinat. Le témoignage de l'avocat a été versé au dossier. Ce soir-là, le 6 novembre 2004, la ville était plongée dans le chaos, raconte-t-il à l'AFP : dans les rues, des milliers de personnes manifestaient contre les Français après la destruction de l'aviation ivoirienne, consécutive au bombardement d'un cantonnement militaire français à Bouaké qui avait fait neuf morts. Réfugié dans sa chambre, l'avocat entend frapper à sa porte à 05H00 le lendemain matin : « Je me suis dit, Licorne (le dispositif militaire français, Ndlr) vient m'évacuer ». Mais une voix ivoirienne qui n'a « rien d'amical » lui intime l'ordre de sortir, avant un tir de Kalachnikov dans la porte. « J'ai ouvert et j'ai vu six ou sept mecs en uniforme et un vieux Blanc avec eux », un retraité français lui aussi enlevé cette nuit-là, se remémore Xavier Ghelber. L'enquête judiciaire française a montré qu'il s'agissait de « membres de la garde très rapprochée du chef de l'Etat ivoirien», selon des sources proches du dossier. L'avocat a juste le temps d'enfiler un pantalon, d'attraper son passeport, une lentille de contact et deux téléphones portables qu'il cache sur lui. « Dans le hall de l'hôtel, l'un d'eux veut me passer un sac sur la tête, je me suis dit que ce serait la dernière chose que je verrais avant d'être fusillé. J'ai dit pas question ». Enervé, un membre du commando, Toussaint D., lâche une rafale à ses pieds. Les balles ricochent sur le sol et blessent grièvement le tireur à une jambe. Xavier Ghelber est ensuite emmené à bord d'un 4X4 avec le retraité français par trois membres du commando. Direction «la résidence du président, Laurent Gbagbo», entend-il. «Je me suis senti rassuré: on ne fusille pas à la résidence, il y a des cellules, on va peut-être être gardés en otage ». « On passe un barrage et on s'arrête sur le parking à l'intérieur de la résidence », poursuit-il. L'un des ravisseurs sort du véhicule, va prendre ses ordres et finalement emmène les deux Français au quartier général de la gendarmerie. Un gardien menace de les exécuter avant que deux officiers n'arrivent, manifestement «gênés» par la situation des deux Français. «C'est là que j'ai senti qu'on passait d'un statut de détenu à un statut de protégé», confie Xavier Ghelber. En fin d'après-midi le dimanche, tous sont transférés dans un autre hôtel. En chemin il voit «la foule qui faisait des signes d'égorgement». Récupéré deux jours plus tard par des soldats français, Xavier Ghelber est évacué vers la France le vendredi. L'enquête a montré des similitudes avec le dossier Guy-André Kieffer, disparu six mois plus tôt, selon son frère Bernard Kieffer: les articles du journaliste sur la filière cacao pourraient avoir gêné des cadres du régime, et des témoignages font état de son passage au palais présidentiel après sa « disparition ».
(Avec AFP)