La conception que les Ivoiriens ont de la pauvreté démontre que ce phénomène prend en compte d`énormes aspects. Nord-Sud a promené son micro dans la capitale économique.
1) Alou Koffi (Ingénieur des eaux et forêts) : “Il ne faut pas politiser la notion de pauvreté”
“Nous sommes tous pauvres parce que nos moyens sont très limités. La notion de pauvreté n`est pas facile à définir. Mais il faut craindre une politisation du phénomène. Je dirais même un déplacement du contexte. Ce n`est pas parce que les Européens vivent avec par exemple x dollar par jour, qu`un Ivoirien se doit de vivre avec le même montant en dollar par jour. Je crois que les gens font souvent des erreurs en comparant notre niveau de pauvreté à celui de l`Europe. La pauvreté prend cependant de l`ampleur parce que les gens ne travaillent pas et aiment la facilité. Souvent vous faites de petites entreprises pour des travaux donnés, vous cherchez des travailleurs et vous n`en trouvez pas parce qu`on pense que ce travail est difficile. Actuellement, j`ai créé une plantation d`hévéa, je ne trouve pas de manœuvres. On a beau faire des affiches, on ne trouve pas de manœuvres. Si vous ne travaillez pas, comment pouvez-vous lutter contre la pauvreté? Quelle image donnent des jeunes qui, dans la fleur de l`âge, se retrouvent dès le matin dans les maquis en train de boire de l`alcool au lieu de chercher à travailler ? Donc la pauvreté progresse parce que beaucoup de jeunes n`ont pas la volonté de travailler”.
2) Touré Youssouf (Informaticien) : “Le pauvre est un misérable”
“La pauvreté est une notion qui prend en compte la question du revenu. De nombreuses personnes sont pauvres parce qu`elles n`ont pas assez d`argent, ou leur faible niveau de revenu, ne leur permet pas de couvrir tous leurs besoins. En Côte d`Ivoire, avec les effets de la crise, on constate que la misère s`installe chaque jour à l`intérieur du pays. Le pauvre est un misérable. Cette misère s`est prononcée du fait qu`il n`y a pas eu de flux importants de marchandises et de transactions financières, entre la zone gouvernementale et les zones Centre, Nord et Ouest. Cela veut dire que le circuit économique n`est pas suffisamment alimenté pour créer de la richesse. Forcement cela se ressent au niveau des conditions de vie des populations. Aujourd`hui, avec l`avènement du Ppte, on nous classe comme un pays très pauvre. Notre Pib est largement en dessous du montant de la dette que nous devons rembourser. Cela veut dire que la production intérieure ne nous permet pas de rembourser la dette et de financer tous les besoins internes. Ce sont des indicateurs importants qui démontrent notre pauvreté. On parle de 48,9% de taux de pauvreté. Le taux réel est plus élevé que 48,9%. Il faut dire sans exagérer que ce taux peut avoisiner les 60%. Avec 500 Fcfa, on ne peut plus acheter un plat normal. Donc la pauvreté est une réalité qui, malheureusement, prend chaque jour des proportions inquiétantes”.
3) Sanogo Lamory (Opérateur économique) : “Seuls les dirigeants sont riches”
“La situation est très alarmante parce que les conditions de vie des populations se dégradent davantage. Il est difficile de trouver une personne qui prend trois repas par jour en Côte d`Ivoire. Ceux qui ont ce privilège peuvent être comptés sur le bout des doigts. Mais le pays n`est pas pauvre, c`est au contraire la population qui est dans la misère parce qu`elle n`arrive pas à subvenir à ses besoins vitaux. C`est le résultat de la mauvaise répartition des richesses du pays qui fait que les gens ont beaucoup de problèmes. On ne peut pas nous traiter de pauvres au moment où l`on découvre et qu`on commence à exploiter les richesses de notre sous- sol. Dans la gestion quotidienne, les dirigeants sont toujours riches et les populations plus pauvres. C`est de la comédie, quand on prétend que tout va bien dans le pays. Au moment où les prix du carburant baissent, on augmente le prix de l`électricité. Alors que nous sommes en crise. Dans ces conditions, comment ne peut-on pas être plus pauvre? Quel sacrifice la population n`a-t-elle pas fait pour qu`on continue de l`enfoncer?”
4) Siaba Gon (Géomètre) : “L`ignorance est un signe de pauvreté”
“Le pauvre, c`est celui qui n`arrive pas à se nourrir correctement chaque jour. Si on parle de mort subite (un seul repas par jour), cela veut dire que les populations vivent dans la précarité totale. On ne peut donc pas leur demander de se soigner parce qu`elles n`arrivent même pas à manger. La définition que je viens de donner est celle de la ville. Cela veut dire que le niveau de pauvreté varie selon le lieu. Au village, le paysan a son champ qui lui permet de se nourrir. Mais il se soigne difficilement à cause des maigres moyens, et surtout du manque des infrastructures de santé. C`est une autre dimension de la pauvreté. De plus, les prix de vente des produits agricoles ne changent pas grand chose à leurs conditions de vie. Le pays n`arrive pas à donner du travail aux jeunes diplômés qui sortent des universités et Grandes écoles. Pourtant, leurs parents, qui espèrent tirer profit, ont investi énormément dans leur formation. C`est comme un investissement qui n`a rien produit. Cela appauvrit le père de famille puisque ses enfants ne lui rapportent rien. Les différentes crises sociopolitiques ont également affecté l`activité économique avec la fermeture d`entreprises et la mise au chômage des travailleurs qui sombrent dans la misère. Le pays doit miser plus que jamais sur la formation et l`industrialisation en vue de donner une chance aux jeunes générations. Il faut donner le minimum aux populations rurales, c`est-à-dire l`apport d`eau potable et l`électricité. Afin qu`elles soient d`abord formées parce que la lutte contre la pauvreté passe également par la formation. Car l`ignorance est un signe de la pauvreté”.
5) Diby Omer (Entrepreneur) : “Les pauvres perdent leur dignité”
“La population souffre énormément parce qu`elle n`arrive pas à satisfaire tous les besoins fondamentaux. Des chefs de famille passent leur temps à quémander de l`argent parce qu`ils n`ont rien. C`est qu`avec la pauvreté, l`homme perd sa dignité. Il y a beaucoup de chômeurs. Le marché du travail est totalement saturé. Je suis entrepreneur mais j`ai été obligé d`arrêter mes activités à cause des difficultés liées à la perte de la clientèle. On vivait mieux dans les années 1990, mais aujourd`hui la situation s`est beaucoup détériorée. Aujourd`hui, près de la moitié de la population est pauvre. Cela doit interpeller les dirigeants du pays parce que c`est suffisamment grave pour qu`on ne fasse rien”.
6) Mme Tipénin Virginie (Encadreur pédagogique d`allemand) : “Le pauvre ne peut pas épargner”
“Le seuil de pauvreté est très élevé. 48, 9%. Cela suppose que c`est environ la moitié de la population qui est touchée par ce phénomène. Mais, ce n`est pas faux parce qu`en tant que fonctionnaire, je sens effectivement le poids de la famille sur mes épaules. Il y a beaucoup de parents qui, malheureusement, ne travaillent pas et qui sont obligés de nous solliciter en tant que travailleurs. Nous leurs venons en aide. Cela se ressent forcement sur notre budget. On n`arrive pas à épargner convenablement. On ne peut pas s`offrir une maison. On vit de façon très budgétisée. Il faut tout calculer, tout prévoir. On est obligé de solliciter des prêts qui n`arrivent pas très souvent. Quand j`ai commencé à travailler en 1998, je m`en sortais très bien, puisque je pouvais économiser aisément 100.000 Fcfa par mois. Mais depuis 2000, la situation est devenue très difficile, puisque j`arrive à peine à épargner 10.000 Fcfa par mois”.
7) Sylla Ladji (Agent d`assurance) : “Un sans-emploi est un pauvre”
“Le pauvre, c`est celui qui n`arrive plus à satisfaire ses besoins. C`est-à-dire manger à sa faim, s`occuper du quotidien. Le manque d`emploi fait qu`il y a également des gens en âge de travailler et qui restent sans revenu. Ils n`ont rien donc ils sont pauvres. Et la cherté de la vie a aggravé cette situation. Par exemple : une personne qui était payée à 60.000 Fcfa par mois il y a 10 ans, pouvait se procurer un sac de riz de 7 à 10.000 Fcfa. Aujourd`hui avec ce même niveau de salaire, vous êtes obligé de payer le même sac de riz à 15 ou 20.000 Fcfa. Il en est de même pour le transport. Donc le pouvoir d`achat des ménages s`est beaucoup effrité. Ce sont des paramètres qui permettent de mieux comprendre l`impact de la pauvreté sur les populations”.
8) Traoré Adama (Homme d`affaires) : “Le pauvre prend des risques pour survivre”
“La population est en majorité considérée comme pauvre, parce que très peu de personnes en Côte d`Ivoire arrivent à vivre correctement. Le pauvre s`alimente et n`arrive pas à se soigner. Dans ce cas, il prend d`énormes risques. A preuve, de jour comme de nuit, il parcourt des kilomètres à pied à la recherche du gain quotidien, ou pour regagner son domicile quand il en a. Au pire des cas, il passe la nuit à la belle étoile. La conséquence c`est qu`on voit toutes sortes de mendiants aux différents carrefours. C`est le signe que la pauvreté gagne du terrain chaque jour”.
Micro-trottoir réalisé par Cissé Cheick Ely
1) Alou Koffi (Ingénieur des eaux et forêts) : “Il ne faut pas politiser la notion de pauvreté”
“Nous sommes tous pauvres parce que nos moyens sont très limités. La notion de pauvreté n`est pas facile à définir. Mais il faut craindre une politisation du phénomène. Je dirais même un déplacement du contexte. Ce n`est pas parce que les Européens vivent avec par exemple x dollar par jour, qu`un Ivoirien se doit de vivre avec le même montant en dollar par jour. Je crois que les gens font souvent des erreurs en comparant notre niveau de pauvreté à celui de l`Europe. La pauvreté prend cependant de l`ampleur parce que les gens ne travaillent pas et aiment la facilité. Souvent vous faites de petites entreprises pour des travaux donnés, vous cherchez des travailleurs et vous n`en trouvez pas parce qu`on pense que ce travail est difficile. Actuellement, j`ai créé une plantation d`hévéa, je ne trouve pas de manœuvres. On a beau faire des affiches, on ne trouve pas de manœuvres. Si vous ne travaillez pas, comment pouvez-vous lutter contre la pauvreté? Quelle image donnent des jeunes qui, dans la fleur de l`âge, se retrouvent dès le matin dans les maquis en train de boire de l`alcool au lieu de chercher à travailler ? Donc la pauvreté progresse parce que beaucoup de jeunes n`ont pas la volonté de travailler”.
2) Touré Youssouf (Informaticien) : “Le pauvre est un misérable”
“La pauvreté est une notion qui prend en compte la question du revenu. De nombreuses personnes sont pauvres parce qu`elles n`ont pas assez d`argent, ou leur faible niveau de revenu, ne leur permet pas de couvrir tous leurs besoins. En Côte d`Ivoire, avec les effets de la crise, on constate que la misère s`installe chaque jour à l`intérieur du pays. Le pauvre est un misérable. Cette misère s`est prononcée du fait qu`il n`y a pas eu de flux importants de marchandises et de transactions financières, entre la zone gouvernementale et les zones Centre, Nord et Ouest. Cela veut dire que le circuit économique n`est pas suffisamment alimenté pour créer de la richesse. Forcement cela se ressent au niveau des conditions de vie des populations. Aujourd`hui, avec l`avènement du Ppte, on nous classe comme un pays très pauvre. Notre Pib est largement en dessous du montant de la dette que nous devons rembourser. Cela veut dire que la production intérieure ne nous permet pas de rembourser la dette et de financer tous les besoins internes. Ce sont des indicateurs importants qui démontrent notre pauvreté. On parle de 48,9% de taux de pauvreté. Le taux réel est plus élevé que 48,9%. Il faut dire sans exagérer que ce taux peut avoisiner les 60%. Avec 500 Fcfa, on ne peut plus acheter un plat normal. Donc la pauvreté est une réalité qui, malheureusement, prend chaque jour des proportions inquiétantes”.
3) Sanogo Lamory (Opérateur économique) : “Seuls les dirigeants sont riches”
“La situation est très alarmante parce que les conditions de vie des populations se dégradent davantage. Il est difficile de trouver une personne qui prend trois repas par jour en Côte d`Ivoire. Ceux qui ont ce privilège peuvent être comptés sur le bout des doigts. Mais le pays n`est pas pauvre, c`est au contraire la population qui est dans la misère parce qu`elle n`arrive pas à subvenir à ses besoins vitaux. C`est le résultat de la mauvaise répartition des richesses du pays qui fait que les gens ont beaucoup de problèmes. On ne peut pas nous traiter de pauvres au moment où l`on découvre et qu`on commence à exploiter les richesses de notre sous- sol. Dans la gestion quotidienne, les dirigeants sont toujours riches et les populations plus pauvres. C`est de la comédie, quand on prétend que tout va bien dans le pays. Au moment où les prix du carburant baissent, on augmente le prix de l`électricité. Alors que nous sommes en crise. Dans ces conditions, comment ne peut-on pas être plus pauvre? Quel sacrifice la population n`a-t-elle pas fait pour qu`on continue de l`enfoncer?”
4) Siaba Gon (Géomètre) : “L`ignorance est un signe de pauvreté”
“Le pauvre, c`est celui qui n`arrive pas à se nourrir correctement chaque jour. Si on parle de mort subite (un seul repas par jour), cela veut dire que les populations vivent dans la précarité totale. On ne peut donc pas leur demander de se soigner parce qu`elles n`arrivent même pas à manger. La définition que je viens de donner est celle de la ville. Cela veut dire que le niveau de pauvreté varie selon le lieu. Au village, le paysan a son champ qui lui permet de se nourrir. Mais il se soigne difficilement à cause des maigres moyens, et surtout du manque des infrastructures de santé. C`est une autre dimension de la pauvreté. De plus, les prix de vente des produits agricoles ne changent pas grand chose à leurs conditions de vie. Le pays n`arrive pas à donner du travail aux jeunes diplômés qui sortent des universités et Grandes écoles. Pourtant, leurs parents, qui espèrent tirer profit, ont investi énormément dans leur formation. C`est comme un investissement qui n`a rien produit. Cela appauvrit le père de famille puisque ses enfants ne lui rapportent rien. Les différentes crises sociopolitiques ont également affecté l`activité économique avec la fermeture d`entreprises et la mise au chômage des travailleurs qui sombrent dans la misère. Le pays doit miser plus que jamais sur la formation et l`industrialisation en vue de donner une chance aux jeunes générations. Il faut donner le minimum aux populations rurales, c`est-à-dire l`apport d`eau potable et l`électricité. Afin qu`elles soient d`abord formées parce que la lutte contre la pauvreté passe également par la formation. Car l`ignorance est un signe de la pauvreté”.
5) Diby Omer (Entrepreneur) : “Les pauvres perdent leur dignité”
“La population souffre énormément parce qu`elle n`arrive pas à satisfaire tous les besoins fondamentaux. Des chefs de famille passent leur temps à quémander de l`argent parce qu`ils n`ont rien. C`est qu`avec la pauvreté, l`homme perd sa dignité. Il y a beaucoup de chômeurs. Le marché du travail est totalement saturé. Je suis entrepreneur mais j`ai été obligé d`arrêter mes activités à cause des difficultés liées à la perte de la clientèle. On vivait mieux dans les années 1990, mais aujourd`hui la situation s`est beaucoup détériorée. Aujourd`hui, près de la moitié de la population est pauvre. Cela doit interpeller les dirigeants du pays parce que c`est suffisamment grave pour qu`on ne fasse rien”.
6) Mme Tipénin Virginie (Encadreur pédagogique d`allemand) : “Le pauvre ne peut pas épargner”
“Le seuil de pauvreté est très élevé. 48, 9%. Cela suppose que c`est environ la moitié de la population qui est touchée par ce phénomène. Mais, ce n`est pas faux parce qu`en tant que fonctionnaire, je sens effectivement le poids de la famille sur mes épaules. Il y a beaucoup de parents qui, malheureusement, ne travaillent pas et qui sont obligés de nous solliciter en tant que travailleurs. Nous leurs venons en aide. Cela se ressent forcement sur notre budget. On n`arrive pas à épargner convenablement. On ne peut pas s`offrir une maison. On vit de façon très budgétisée. Il faut tout calculer, tout prévoir. On est obligé de solliciter des prêts qui n`arrivent pas très souvent. Quand j`ai commencé à travailler en 1998, je m`en sortais très bien, puisque je pouvais économiser aisément 100.000 Fcfa par mois. Mais depuis 2000, la situation est devenue très difficile, puisque j`arrive à peine à épargner 10.000 Fcfa par mois”.
7) Sylla Ladji (Agent d`assurance) : “Un sans-emploi est un pauvre”
“Le pauvre, c`est celui qui n`arrive plus à satisfaire ses besoins. C`est-à-dire manger à sa faim, s`occuper du quotidien. Le manque d`emploi fait qu`il y a également des gens en âge de travailler et qui restent sans revenu. Ils n`ont rien donc ils sont pauvres. Et la cherté de la vie a aggravé cette situation. Par exemple : une personne qui était payée à 60.000 Fcfa par mois il y a 10 ans, pouvait se procurer un sac de riz de 7 à 10.000 Fcfa. Aujourd`hui avec ce même niveau de salaire, vous êtes obligé de payer le même sac de riz à 15 ou 20.000 Fcfa. Il en est de même pour le transport. Donc le pouvoir d`achat des ménages s`est beaucoup effrité. Ce sont des paramètres qui permettent de mieux comprendre l`impact de la pauvreté sur les populations”.
8) Traoré Adama (Homme d`affaires) : “Le pauvre prend des risques pour survivre”
“La population est en majorité considérée comme pauvre, parce que très peu de personnes en Côte d`Ivoire arrivent à vivre correctement. Le pauvre s`alimente et n`arrive pas à se soigner. Dans ce cas, il prend d`énormes risques. A preuve, de jour comme de nuit, il parcourt des kilomètres à pied à la recherche du gain quotidien, ou pour regagner son domicile quand il en a. Au pire des cas, il passe la nuit à la belle étoile. La conséquence c`est qu`on voit toutes sortes de mendiants aux différents carrefours. C`est le signe que la pauvreté gagne du terrain chaque jour”.
Micro-trottoir réalisé par Cissé Cheick Ely
