Dans cette dernière partie de l’interview qu’il a accordée à la Rti et à la Rtb, le Premier ministre explique le processus électoral et les enjeux de l’éligibilité de la Côte d’Ivoire à l’initiative Ppte.
Par expérience, dans l’analyse du processus de sortie de crise, il y a quand même une constante, le retard observé dans sa mise en œuvre. L’accord politique de Ouagadougou avait été assorti d’un chronogramme de 10 mois. Aujourd’hui, nous en sommes à 32 mois pour le premier tour de l’élection présidentielle, sans oublier que la date du 30 juin avait été avancée entre-temps. De façon permanente, on sait qu’il y a des retards. Je prends un autre exemple ; il y a eu le cas des commandants de zone qui, selon les termes du 4e accord complémentaire, devaient faire la passation des charges, le 15 janvier au plus tard. Il a fallu attendre 5 mois. Est-ce que raisonnablement, ne peut-on pas être pessimiste quant à la date du 29 novembre ? Cela n’est-il pas un pessimisme justifié ?
Je veux croire d’abord à votre expérience. J’en ai aussi dans la gestion de la sortie de crise. Mais je suis optimiste. Si je ne l’étais pas, je ne serais pas Premier ministre. Ce poste est fait pour être optimiste et pour trouver des solutions aux problèmes. Je comprends que vous ayez des interrogations et que même vous soyez inquiet quant au respect de la date. Sachez que le gouvernement est le premier concerné par ces préoccupations.
Je voudrais encore une fois vous dire que dans le mécanisme électoral, la plus grosse des difficultés que le gouvernement avait, c’était de faire l’enrôlement. Parce qu’il fallait payer beaucoup d’argent, déployer des équipes, 11.000 centres de collecte sur l’ensemble du territoire. C’était quelque chose d’extrêmement compliqué.
Heureusement que je me rends compte que nous avons réussi. Vous ne savez pas toutes les peines que le gouvernement s’est donné pour déployer tout ce matériel et personnel sur l’ensemble du territoire. Il était donc plus difficile de réaliser l’enrôlement que de faire un traitement informatique qui est simple.
Le contentieux électoral qui aurait pu être encore une des grosses difficultés, parce que nous le savions, nous l’avons anticipé. En faisant en sorte qu’il n’y ait pas suffisamment de matière à réclamation. C’est pourquoi, le traitement informatique, le croisement, etc., doivent servir d’éléments qui élaguent la liste électorale pour qu’il n’y ait pas trop de contestations. Mais si par extraordinaire, il y avait un volume important de contestations, il n’y aurait pas de problème, parce que nous avons pris des dispositions pour que les magistrats soient installés sur l’ensemble du territoire. C’est pourquoi, nous avons pressé le ministre de la Justice de redéployer les magistrats sur l’ensemble du territoire pour qu’ils puissent rendre les verdicts au plus tard en 8 jours. Après cela, il n’y aura pas de raison que la liste définitive ainsi établie ne serve pas à aller à ces élections. Je veux vous rassurer. Maintenant, quand vous me dites que des dates ont été ratées, j’ai été le premier à dire aux Ivoiriens qu’il ne fallait pas se focaliser sur le fétichisme des dates. Parce que celles qui avaient été données étaient des dates indicatives. Je suis encore la personne qui vient dire aujourd’hui que la date du 29 novembre 2009 est réaliste. Parce que j’ai toujours eu pour conviction et position de ne pas mentir aux Ivoiriens. Nous ne pouvions pas faire d’élection le 30 novembre 2008 parce que nous n’avions pas 100.000 personnes inscrites sur les listes électorales. Aujourd’hui, c’est différent ; nous avons plus de 6 millions de personnes. Et l’enrôlement s’achève le 30 juin. Ce sont des éléments concrets qui prouvent que nous pouvons tenir la date du 29 novembre 2009. Je suis convaincu qu’aussi bien sur la question du contentieux électoral que du traitement informatique, nous avons anticipé pour ne pas commettre les mêmes erreurs. C’est en cela que je parle d’expérience. Nous avons mis des marges de sécurité, même si nous débordons un peu.
Vous avez noté qu’au niveau du 4e accord complémentaire, il y a la question du démantèlement des milices qui va être effective au moins deux mois avant la tenue du scrutin. C’est une dimension qui est différente de celle de l’identification. Pensez-vous que là encore les délais seront tenus ?
Je comprends que votre rôle est de trouver les différents problèmes et le mien de trouver des solutions. Nous ne sommes pas forclos par rapport aux deux mois avant les élections. Nous sommes en pleine activité de démantèlement des milices, dans le règlement des questions militaires. Je peux vous rassurer que deux mois avant ces élections, nous pourrons vous présenter un bilan rassurant.
Donc, on ira aux élections sans armes.
Non. Il faut des armes pour la sécurisation. Je veux bien comprendre. Il y a une nuance qu’il faut que les Ivoiriens comprennent sur les questions militaires. C’est parce qu’on n’a pas peut-être bien expliqué. Je voudrais le faire.
Premièrement, pour aller aux élections, nous avons mis en place un plan de sécurisation des élections qui va mobiliser 8000 hommes sur l’ensemble du territoire. C’est ce déploiement qui a commencé à Bouaké et Abidjan.
Deuxièmement, dans les zones centre, nord et ouest, on a décidé de passer de 10 zones à 4 villes, où les combattants des Forces armées des Forces nouvelles, donc 5000 qui est le quota affecté aux Forces armées des forces nouvelles, doivent intégrer la nouvelle armée. Ils ont un statut reconnu par l’Etat de Côte d’Ivoire et ils ont à émarger sur le budget de Côte d’Ivoire. Ils deviendront des militaires.
Quand ?
Ce sera lorsque l’armée sera réunifiée.
Après ou avant la présidentielle ?
Après la présidentielle. Vous avez 4000 éléments des Forces armées des Forces nouvelles qui vont être dans le Cci pour assurer la sécurité des élections. Ce sont eux qui auront légalement le droit de porter des armes. Au sein des Forces armées des forces nouvelles, il y aura 9000 personnes qui auront le droit de porter les armes. Ceux qui n’auront pas été retenus dans les différents quotas, sont ceux qu’on ramène à la vie civile qu’on appelle les démobilisés. C’est-à-dire qu’ils n’ont pas le droit de faire partie des différents quotas. Ils vont être démobilisés et ils ont des droits. Qui ont été réglés par l’accord 4 qui prévoit 500.000 F par démobilisé. Tout ce processus qui part du déploiement des éléments du Cci sur l’ensemble du territoire au regroupement des éléments dans les différentes casernes, dans 4 villes, au centre, nord et ouest, sont des opérations que nous réaliserons avant d’aller aux élections. Après le scrutin, ceux qui doivent aller à la retraite, iront. Et ceux qui doivent intégrer la nouvelle armée, le feront.
Toutes ces étapes nécessitent beaucoup d’argent. Manifestement cela coûte très cher à l’Etat de Côte d’Ivoire. Du coup, la société Sagem réclame de temps en temps de l’argent et parle parfois de retard dans le paiement des factures. Aujourd’hui, il semble que l’Etat reste devoir plus de 100 milliards de francs à la Sagem.
Votre question n’est pas exacte.
Combien doit-on à la Sagem et combien a coûté l’opération d’enrôlement ?
A des moments donnés, Sagem a eu à réclamer à l’Etat, le paiement de ses dus pour pouvoir continuer d’assurer le service pour lequel, elle a été appelée. Nous avons récemment payé 10 milliards 800 millions de F à Sagem. Elle est encore avec nous. Nous avons passé un accord avec eux pour continuer de leur verser un certain montant pendant le reste de l’opération. Je ne crois pas qu’il y ait des difficultés avec Sagem.
Il y a une époque où Sagem avait été absente. Elle réclamait 10 milliards 800 millions de F. L’Etat a payé et Sagem est sur le terrain, participe à l’enrôlement.
Il y a aussi que les agents bloquent souvent les pièces des pétitionnaires.
Mais comme vous m’aviez posé la question sur la Sagem, je vous donne la réponse sur cette société. Sagem ne bloque rien pour le moment parce que nous avons payé. Mardi nous allons commencer des discussions avec Sagem pour aboutir à un accord sur le montant de la facture à payer pour les jours où ils ont travaillé. C’est un devoir pour l’Etat de s’assurer que ce qu’il paye est bien ce qu’il faut. Ces discussions ne sont pas suspensives au travail de Sagem. Il n’y a pas d’inquiétude à avoir quant à la Sagem. Si vous me dites qu’il y a eu des difficultés dans l’enrôlement avec des grèves ici et là, je suis d’accord avec vous. J’ai eu à l’époque à déplorer les multiples grèves. L’Etat a connu une situation de trésorerie difficile à un moment donné. Cela ne devrait pas être le prétexte pour aller aussi facilement en grève. De toute façon, l’Etat s’organise à faire en sorte que ces engagements soient respectés.
M. le Premier ministre, comment fait l’Etat de Côte d’Ivoire qui a payé 100 milliards ? Vous aviez donné votre budget de sortie de crise, 247 milliards.
Les bailleurs de fonds avaient promis d’aider la Côte d’Ivoire qui a payé 100 milliards. Que font-ils ?
Ils ont décidé à un moment donné de nous aider. Une aide reste une aide. La plus grande responsabilité incombe à l’Etat. Ce sont des opérations qui relèvent de la souveraineté de l’Etat. Je suis content que l’Etat ait pu honorer ses engagements. Si la communauté internationale nous aide, nous en serons heureux. Il y en a qui ont heureusement contribué, je voudrais les remercier pour leur contribution. Mais dans la sortie de crise, beaucoup de programmes du processus relèvent de l’Etat. Qui entend jouer sa partition. Il ne faut donc pas jeter la pierre à telle ou telle structure internationale pour n’avoir pas contribué.
On s’interroge. Quand on promet beaucoup d’argent pour n’en donner que 17 milliards, on pose la question pour avoir la réponse.
Je le constate aussi bien que vous. C’est pourquoi je dis que c’est de notre responsabilité…puisque c’est nous qui avons des problèmes et qui devons les régler. Nous n’avons pas à hésiter. Nous allons continuer de faire face à ces difficultés. Maintenant, si les aides viennent à temps, c’est une bonne chose, parce qu’il n’y a pas que le montant de la contribution, mais il faut que l’aide vienne à point nommé. Nous, nous allons continuer d’assumer les charges qui sont les nôtres.
Monsieur le Premier ministre, à combien peut-on estimer l’enveloppe qu’il faut pour cette sortie de crise ?
Autour de 300 milliards. Mais nous avons déjà payé une bonne partie pour réaliser plusieurs processus.
Quand on entend cette somme, on pourrait dire quel gâchis, puisqu’on pouvait faire autre chose avec autant d’argent.
Ecoutez, je l’ai dit, nous sommes arrivés à un tel montant, parce qu’il nous fallait réaliser la confiance. Et c’est la facture de la confiance. Donc, la paix coûte cher, c’est à nous d’assumer ces montants. C’est vrai qu’on aurait bien aimé ou souhaité que ces 300 milliards soient affectés à l’investissement. Par exemple, si la Côte d’Ivoire n’avait pas connu de problème. Nous sommes tenus, à partir du moment où nous voulons maintenant aller à la normalité, de mettre la main à la poche. Et l’Etat est malheureusement tenu de payer cette somme.
Au-delà de la mise en œuvre du processus de sortie de crise, je remarque que la Côte d’Ivoire n’a pas arrêté de vivre. Et de ce point de vue, vous avez d’autres dossiers sur votre table de travail. Notamment l’apurement de la dette, la relance économique. Il y a également le front social à satisfaire. Comment appréhendez-vous tous ces dossiers et quel est le point que vous entendez donner à la Côte d’Ivoire et à la sous-région ?
Je dois dire simplement que les années 2007 et 2008 n’ont pas été des années faciles pour le gouvernement de Côte d’Ivoire. Comme vous le dites, nous avions des échéances qu’il fallait absolument réaliser avant le 31 mars 2009.Notamment l’épineuse question de notre dette. Vous savez que la Côte d’Ivoire est un pays lourdement endetté. Nous avons plus de 6000 milliards de dette extérieure. Pour bénéficier de l’allègement de cette dette, il nous fallait atteindre avant le 31 mars 2009, ce qu’on appelle le point de décision. Lorsque vous avez atteint ce point, il vous garantit, si vous mettez en œuvre un autre programme qu’on appelle la Frpc, qui est la facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance, l’allègement effectif de votre dette. Certains se demandent pourquoi nous nous donnons tant de peine pour réaliser le Ppte. J’ai même lu quelque part avec beaucoup d’amusement, que le gouvernement ivoirien se réjouissait d’être pauvre. Non, le gouvernement ivoirien ne peut pas se réjouir d’être pauvre. Il y a des standards. Après nos indépendances dans les années 1960, les gouvernements avaient estimé qu’il fallait s’endetter pour offrir des infrastructures à nos pays, et construire nos économies .Ce qui a amené plusieurs pays à s’endetter lourdement. Et quand la crise économique est souvenue en 1980 et que le niveau d’endettement des pays était très élevé, aussi bien avec les multilatéraux que sont la Banque mondiale, le Fmi, la Bad et autres, que les bilatéraux que sont les différents gouvernements amis à la Côte d’Ivoire, il a fallu trouver un mécanisme pour réduire la dette. Il y a eu plusieurs initiatives. La première était le Club de Paris. Je reviendrai là-dessus.
L’endettement de la Côte d’Ivoire, ce n’est pas la crise. C’est lié, je dirai même parallèle, à une vision politique, à un objectif qui était de réaliser de grandes infrastructures. Et je crois que la Côte d’Ivoire était fière à un moment donné de tout le travail qui a été fait dans notre pays en termes d’infrastructures et d’économie. Maintenant, la Côte d’Ivoire, si elle veut continuer d’être compétitive et investir pour le futur, doit obtenir l’annulation de sa dette. Parce que si nous ne l’obtenons pas, nous continuerons chaque année de consacrer le tiers de notre budget au service de la dette. C’est pourquoi nous avons fait beaucoup de sacrifices et je reconnais que ça a été difficile. Je l’ai dit, 2007 et 2008 ont été des années très difficiles pour la Côte d’Ivoire. Parce que nous devions puiser dans nos recettes, dans notre budget pour rembourser la Banque mondiale, la Bad. Ce que nous avons fait. C’est quand même 200 à 300 milliards que nous avons remboursé à ces différentes institutions. Aujourd’hui, il est heureux de constater que la Côte d’Ivoire a été unanimement déclarée éligible au point de décision. Ce qui nous a permis de souffler un peu. Le contrecoup, c’est qu’on a accumulé une dette intérieure de plus de 280 milliards, que nous sommes aussi en train d’apurer. Mais ce qui est réjouissant, c’est que nous sommes déclarés éligibles à l’allègement de la dette. Ce qui explique la visite de M. Dominique Strauss-Khan en Côte d’Ivoire pour continuer d’encourager les Ivoiriens. Il nous reste encore des efforts à faire qui nous engagent, qui nous encouragent sur le chemin à réaliser les différents engagements que nous avons pris pour avoir le point d’achèvement. Et le point d’achèvement, ce sera là où la Côte d’Ivoire va bénéficier d’un allègement substantiel de sa dette. Mais entre-temps, le ministre de l’Economie et des Finances est allé à Paris pour négocier avec le Club de Paris. Nous avons, là aussi avec beaucoup de dynamisme, obtenu l’abandon d’environ 420 milliards de dette. Et le rééchelonnement du principal pour dix ans. La Bei a décidé de s’engager à nouveau avec la Côte d’Ivoire. Donc ce sont des signaux que la gestion des finances publiques en Côte d’ivoire est approuvée par les instances internationales. Ce qui est encourageant pour le gouvernement.
Comment le peuple peut ressentir cela dans sa vie quotidienne ?
Si vous posez la question aux fournisseurs qui avaient des créances sur l’Etat, de zéro à 30 millions, ils vous diront qu’ils ont perçu leur argent.
Si vous interrogez nos représentations diplomatiques, elles vous diront qu’elles ont reçu maintenant de l’argent pour assurer leur fonctionnement.
Naturellement la question que vous me posez, c’est de savoir si chaque citoyen à domicile, a perçu un chèque….
Le fait de réinjecter dans notre économie nationale les différents appuis budgétaires, va justement permettre aux petites entreprises de créer plus d’emplois, de résorber le chômage et de relever le niveau de vie des populations. Mais ça ne se fait pas en un jour. Nous travaillons pour le futur. Nous travaillons à atteindre le point d’achèvement. Dès lors, nous aurons des sommes substantielles à injecter dans notre économie. Pour l’heure, les différents créanciers de l’Etat sont des Ivoiriens ou des citoyens qui vivent dans notre pays. Cet argent qu’ils vont recevoir va continuer de circuler sur le territoire national et aider ainsi des gens qui n’avaient pas de possibilité, il y a un an d’avoir ces possibilités concrètes aujourd’hui.
Quand on vous écoute et quand on voit les actions du gouvernement en priorité, que tout est consacré à 99% à la sortie de crise. Et donc certainement, 1% du souci du gouvernement est porté au quotidien des Ivoiriens (…) le problème de fond, est que le gouvernement ne met rien en œuvre pour suivre l’application effective des décisions sur le marché (…)
Cette perception n’est pas juste. Nous avons eu deux priorités au moins et je viens de les évoquer. C’est vrai, il y a la sortie de crise. Mais la deuxième priorité, qui à mon avis est légitime et en rapport avec les élections, c’était d’être éligible à l’allègement de notre dette. Je vous répète encore que sans l’allègement de la dette de la Côte d’Ivoire, notre budget actuel, c’est-à-dire le niveau des recettes de la Côte d’Ivoire, ne permet pas de consacrer une enveloppe à l’investissement. Or, c’est l’investissement qui crée les richesses, lesquelles permettent à un pays de prétendre au développement. Notre budget, pour l’essentiel aujourd’hui, est consacré au service de la dette, aux salaires et nous avons des difficultés à dégager une enveloppe pour la paix. Donc il faut accroître l’investissement en Côte d’Ivoire, si l’on veut réduire le chômage, relever le niveau de vie de notre population.
Relever le niveau de vie de la population commence déjà par là. Le niveau de vie des populations va s’améliorer, quand celles qui sont au chômage auront du travail et pourront nourrir une famille. Donc ce n’est pas vrai de penser que la sortie de crise est la seule préoccupation du gouvernement. Permettez-moi de dire quelque chose, parce que c’est très important. Savez-vous que l’initiative Ppte a été mise en place en septembre 1996 ? C’est-à-dire pour bénéficier de l’allègement de la dette. Donc c’est depuis 1996 que la Côte d’Ivoire tout entière court après le point de décision. Et on ne l’a obtenu que cette année, le 31 mars 2009.C’est vous dire que tous les gouvernements, avant nous, avaient perçu l’urgence et la nécessité d’avoir l’allègement de la dette de la Côte d’Ivoire, s’ils voulaient réaliser le progrès pour le pays. Malheureusement, des circonstances particulières n’ont pas permis qu’on ait ce niveau de décision. Aujourd’hui que nous l’avons, ça prouve que le gouvernement se préoccupe du quotidien des populations et a pris une option sur le développement, le progrès et l’amélioration du quotidien des populations. Nous avons fait ce sacrifice dans une situation particulière. Au moment où la Côte d’Ivoire ne bénéficiait pas du fonctionnement normal de ces institutions. Je pense qu’on peut considérer que des efforts importants ont été faits.
Vous me dites, des décisions sont prises et des sacrifices sont faits et on ne le ressent pas au niveau des populations. C’est absolument vrai, puisque nous continuons d’avoir des variables. Par exemple sur le gaz, les bouteilles ne sont pas vendues aux prix homologués.
Je voudrais lancer un appel. Il faudrait qu’il y ait une coopération entre la population et le gouvernement. A l’époque, j’avais reçu un certain nombre d’associations de consommateurs et je les avais invitées à avoir une plate forme avec le gouvernement pour s’assurer que les sacrifices que nous faisons et qui se traduisent en termes de moins-value dans notre bulletin ne soient pas vains. Donc c’est un travail que nous devons faire ensemble. Le gouvernement actuel est celui des Ivoiriens. Il ne faudrait pas qu’on ait le sentiment que le gouvernement est quelque part et le peuple ailleurs. Le résultat de cette coopération doit permettre à la population de ressentir dans son vécu quotidien, les sacrifices faits par le gouvernement.
Malheureusement, le contexte international est difficile. Il n’y a pas que la Côte d’Ivoire qui est frappée. Vous allez aux Etats-Unis, aujourd’hui il y a plus de chômage, pourtant ce sont des pays qui ont des moyens incomparables aux nôtres.
Vous ne pouvez pas dire que le gouvernement, dans ces situations difficiles, n’a pas pris des mesures pour améliorer le quotidien des Ivoiriens.
M. le premier ministre, on ne vous reproche pas l’inaction. Quand les prix du pétrole ont vraiment flambé, que les prix du carburant ont pris l’ascenseur et que les denrées alimentaires ont suivi cette montée en hausse des prix, vous avez pris la décision de créer justement une structure interministérielle pour le suivi des mesures. On ne sait pas ce que devient cette structure. Le suivi des décisions qui sont prises dans ces cas spécifiques, c’est de cela qu’il s’agit.
Tout à fait. Vous savez nous, nous avons mis en place le cadre réglementaire. Maintenant, il s’agissait de trouver telle ou telle associations de consommateurs pour figurer là-dedans. Ce n’est pas un exercice facile. Vous savez qu’il y a plusieurs associations de consommateurs en Côte d’Ivoire. Quand vous vous adressez à telle, les autres crient. Quand vous vous occupez de telle autre, c’est la levée de boucliers de l’autre côté. Ce sont des facteurs exogènes qui ne sont pas liés directement au gouvernement. Donc je continue de penser que le gouvernement a choisi la meilleure option qui était de dire que nous allons faire des sacrifices en abandonnant telle ou telle charge et que la population elle-même s’organise de façon beaucoup plus sérieuse et rigoureuse comme le gouvernement, pour que cette interaction, gouvernement et associations de consommateurs–populations, donne des résultats probants.
Malheureusement, le gouvernement a travaillé et nous attendons que les associations s’organisent mieux, afin que nous puissions aller sur le terrain pour réaliser que les Ivoiriens bénéficient des retombées des sacrifices du gouvernement.
Votre regard sur la fronde sociale avec les revendications salariales qui aboutissent toujours à des audiences avec le Chef de l’Etat.
Oui, dans toutes ces revendications, il me faut reconnaître que certaines sont totalement légitimes. Même s’il faut déplorer quelquefois la surenchère de part et d’autre. Il faut reconnaître que pour l’essentiel, les revendications sont légitimes. L’aspiration de tout Ivoirien, c’est un mieux-être. Donc c’est normal qu’il y ait des revendications. Mais c’est tout aussi juste qu’il y ait un gouvernement responsable pour faire face à toutes ces revendications. Ce que nous disons aujourd’hui aux syndicats, c’est que nous sommes si près du but, que les revendications ne doivent pas compromettre tout le travail que nous avons fait. Nous sommes dans une situation particulière et aujourd’hui les priorités du gouvernement sont d’avoir l’allègement de la dette et d’organiser les élections. Que les syndicats nous permettent d’épuiser ces deux points et le gouvernement pourra faire face à toutes ces revendications. Je pense qu’il faut avoir un discours responsable avec les syndicats. Je suis heureux qu’on se soit mis d’accord pour qu’il y ait une trêve.
Le 21 mars de l’année dernière, à la réunion du Comité d’évaluation et d’accompagnement, vous avez estimé que la finalité de votre mission, «c’est la tenue d’élections libres, transparentes et ouvertes à tous». Or aujourd’hui, des interrogations subsistent quant à la candidature du président Henri Konan Bédié du Pdci-Rda qui pourrait être frappée par la limite d’âge. Quant à M. Alassane Dramane Ouattara, il y a eu les problèmes de nationalité qu’on a connus. Que dit exactement l’accord de Pretoria, et qu’est-ce qui va être fait concrètement ?
Je suis surpris par la question que vous posez. Il n’a jamais été question de remettre en cause la candidature de qui que ce soit. Mieux, le Chef de l’Etat lui-même, à plusieurs reprises, aussi bien au Cpc qu’en Conseil des ministres, a rappelé qu’il a pris une décision se fondant sur l’article 48 de la Constitution ivoirienne pour faire en sorte que tous ceux qui ont signé l’accord politique de Linas Marcoussis soient d’office candidats sans discrimination d’âge et autres. Pour respecter cette volonté du Chef de l’Etat, nous avons pris une ordonnance portant modification du code électoral, et en son article 54, il est bel et bien écrit que tous ceux qui ont signé l’accord politique de Marcoussis seront d’office candidats sans quelque discrimination que ce soit. Donc c’est un problème qui est réglé depuis l’accord politique de Pretoria et il n’y a pas de raison qu’on y revienne. Je crois que le Chef de l’Etat l’a dit et je me fais l’écho de ses dires, de ses propos. Maintenant, il faut bien dire que nous irons à des élections démocratiques, transparentes aussi. C’est pourquoi la méthode et l’approche que j’ai eues avec les partis politiques a été de les associer à chaque niveau, à chaque étape du processus électoral. Quand on a un compromis, je le consolide et puis on passe à une autre étape. Quand il a été question des audiences foraines, j’ai fait une large concertation avec les partis politiques. Une fois ce compromis obtenu, nous les avons réalisées. Pour l’enrôlement, j’ai procédé de même et tout se déroule bien. Donc il n’y a pas de problème à ce niveau.
Vu que les signataires de l’accord de Marcoussis sont d’office éligibles, et les non signataires alors ? Sans tomber sous le coup des dispositions constitutionnelles, que deviennent donc les candidatures qui n’en sont pas issues ?
L’article 54 énumère les critères à partir desquels tous les citoyens ivoiriens, y compris les signataires des accords politiques de Ouagadougou et de Marcoussis pourraient être candidats. Conformément à l’ordonnance portant justement code électoral et à l’article 54, tout le monde peut être candidat à l’élection présidentielle.
Il n’y aurait pas de discrimination ?
Justement, en prenant cette décision se fondant sur l’article 48 de la constitution de notre pays, le Président de la République a voulu éviter la discrimination.
Revenons sur les questions militaires, les problèmes de grades Nous avons dit qu’il fallait une commission d’harmonisation des grades que l’on mettrait en place par décret. Le document a été préparé par le ministre de la Défense. Je lui ai demandé de s’assurer auprès des deux généraux Mangou Philippe et Bakayoko qu’ils comprenaient bien les termes du décret. La semaine dernière, il m’a assuré que c’était le cas et que ces derniers étaient d’accord sur ses termes et sa mouture. Il reste maintenant au chef du gouvernement de le proposer à la signature du Chef de l’Etat.
Peut-on avoir les contours de l’arrangement ?
Vous savez que grâce à l’accord IV, deux généraux au sein des Forces armées des Forces nouvelles seront confirmés dans leur grade. Ce décret est sur ma table, j’attends que le décret sur la commission soit prêt, pour qu’ils soient ensemble transmis au Chef de l’Etat. Pour le reste, on a dit qu’il fallait faire une harmonisation pour qu’il n’y ait pas d’injustice. Si un soldat Fafn et un autre des Fds qui ont fait la même classe au 18 septembre 2002, se sont retrouvés séparés, et qu’on doit les réunifier, il ne faudrait pas qu’il y ait de frustration. On alignera les Fafn sur leurs camarades des Fds pour s’assurer qu’ils reprennent le chemin, que personne ne soit pénalisé parce qu’il a été soldat Fafn et qu’on ne fasse pas de tort non plus à un soldat des Fds pour être resté loyal. Donc nous avons voulu un juste milieu. Nous avons voulu que sur la base de la justice, on puisse harmoniser les grades des soldats Fafn et des Fds.
Donc ce n’est pas de la justice, c’est une base d’arrangement.
Oui ! Vous savez, un accord politique, c’est d’abord un arrangement. Nous fonctionnons dans une sorte d’arrangement politique.
Parlez-nous du format de la prochaine armée.
Les travaux sont en cours. Il y a un groupe de travail en place qui doit nous sortir tout un document, une loi sur les Forces armées de Côte d’Ivoire, notamment la question que vous évoquez. Ils n’ont pas encore terminé. Quand cela sera prêt, on pourra dire aux Ivoiriens : «voilà ce que sera l’armée de Côte d’Ivoire».
M. le Premier ministre, le Programme national de réinsertion et de réhabilitation communautaire lancé en juin 2007 a suscité à l’époque beaucoup d’espoir quant à la réinsertion des ex-combattants démobilisés. Apparemment, il n’a pas eu les moyens de ses ambitions. De quelles autres perspectives disposez-vous aujourd’hui pour résoudre ce problème qui est pendant ?
Je pense que c’est une question importante que même les prochains gouvernements devront continuer de traiter. Quand vous voyez un pays comme l’Angola, bien qu’il y ait eu des élections, il continue de traiter la question des ex-combattants. Ceci est inhérent à tous les pays ayant connu une crise d’une telle envergure. C’est un programme qui va continuer à gagner en intensité dans les années à venir. Mais que fait-il? A partir du moment où nous devrons mettre une armée réunifiée en place, il est évident que certaines personnes ne s’y retrouveront pas. Donc il fallait les accompagner et les amener à la vie civile. C’est pourquoi nous avons mis en place ce programme qui avait la charge de réinsérer ceux qu’on a appelé les démobilisés. C’est-à-dire qui n’auront pas été retenus pour la nouvelle armée. Ils devaient choisir un métier et ce programme devait les former et les accompagner avec des kits pour qu’ils s’installent. Comme vous l’avez dit, il y a eu beaucoup de difficultés parce que la trésorerie n’était pas disponible. Or l’Etat de Côte d’Ivoire lui-même avait des difficultés et la Banque mondiale qui devait soutenir le programme en a créé un autre pour aussi faire sa réinsertion. Mais, malgré les difficultés de trésorerie, il y a eu la réinsertion, et nous sommes heureux de voir qu’il y a eu une restructuration du programme pour permettre au moins que le minimum soit fait. Je pense que la question des ex-combattants est importante et qu’il faudra qu’on la règle. Pour le moment, je ne peux pas anticiper sur les différentes propositions que nous faisons au Chef de l’Etat. Mais nous pensons qu’il faudra un cadre plutôt permanent pour s’occuper des questions des ex-combattants et de leur avenir.
M. le Premier ministre, les élections ne sont pas une panacée, pour sortir de crise. Sous d’autres cieux, elles ont été génératrices de violence. Qu’est-ce qui va être fait véritablement pour que les Ivoiriens puissent aller introduire leurs bulletins dans les urnes en toute liberté de conscience et surtout en toute sécurité ?
Je suis d’accord avec vous que sur la scène internationale, quand on parle d’élections en Afrique, cela ne manque pas de susciter quelques inquiétudes. Je pense qu’aujourd’hui, la classe politique, en tout cas pour les leaders politiques que je vois assez souvent, la leçon à tirer de la crise est de faire en sorte que l’élection de 2009 soit apaisée. Nous allons y travailler. C’est pour cela d’ailleurs qu’au dernier Cpc, M. Compaoré a dit - c’était bien sûr une anecdote- que le conseil se réunira le 1er décembre 2009. C’est pour montrer qu’au- delà de l’élection, il faut maintenir le dialogue et la concertation pour bâtir la Côte d’Ivoire post-crise. Et à mon avis, cela est important. Comme vous l’avez dit, l’élection n’est pas la finalité. Mais elle est aussi une étape, qui consolide les acquis que nous avons obtenus, qui consolide la paix dans notre pays, qui consolide la réconciliation que nous avons engagée. Donc je suis d’avis avec vous que l’idée, en ce qui nous concerne- Je sais aussi que c’est la position de la facilitation-, c’est de faire en sorte que le dialogue dans le cadre du Cpc, le dialogue tout court, soit un moyen pour nous permettre et permettre aux acteurs politiques de se rallier à l’idée qu’on aille à des élections apaisées.
Justement, à propos des élections, les Forces nouvelles vont-elles se contenter d’y assister seulement. N’y aura-t-il pas de candidat en son sein ?
Je ne suis pas candidat aux élections de 2009 !
On parle des militaires, et non des civils.
Je pense premièrement, que les Forces nouvelles ne vont pas se transformer en parti politique. Le faire, ce serait devenir partisan comme tous les autres partis. Notre position est la position médiane de neutralité, d’impartialité.
Deuxièmement, le secrétaire général des Forces nouvelles n’est pas candidat. Donc il ne s’agira pas pour les Forces nouvelles de positionner quelqu’un aux élections. Cela fausserait le jeu. Je pense que ce qui sert de ciment, ce qui sert d’épine dorsale du processus vient du fait que le Premier ministre chef du gouvernement n’est pas candidat à l’élection présidentielle et qu’il ne veut pas profiter de sa situation ou de sa fonction pour fausser le jeu électoral. Je pense qu’on a la chance inouïe d’envoyer tous les Ivoiriens aux élections. Il ne faut pas la rater. C’est pourquoi en ce qui concerne les Forces nouvelles, nous n’aurons pas de candidat. Le secrétaire général n’est pas candidat, les Forces nouvelles ne seront pas un parti politique, nous permettrons le jeu démocratique entre les forces politiques existantes.
Avez-vous une idée de la position des civils?
Je pense que chacun des cadres civils qui travaillent au sein des Forces nouvelles a beaucoup de possibilités. Quand on est un civil politique dans un mouvement politique, naturellement, sa trajectoire c’est de faire de la politique. Donc ceux qui veulent faire la politique le feront, ceux qui sont dans l’administration, s’ils le veulent, y demeureront. Il n’y a pas un cadre spécifique de Ouagadougou pour dire que tel civil a droit à telle chose. Vous voyez ce que je veux dire. Déjà, les cadres civils des Forces nouvelles ont des positionnements. Il ne tiendra qu’à eux de poursuivre sur leur lancée ou d’opérer un choix.
Vous ne serez pas candidat, vous venez de le dire. Au- delà de la formule consacrée qu’on se met en réserve de la République, que deviendra M. Soro Guillaume au soir du 29 novembre 2009.
Au soir du 29 novembre 2009, après la proclamation des résultats, M. Soro ira rendre sa démission au nouveau Président de la République. Je pense que être sur la scène de l’actualité politique de son pays pendant sept ans, ce n’est pas rien. On peut croire que cela a été une charge de travail, une capacité d’anticipation. Organiser des élections dans un tel contexte, ce n’est pas une sinécure. Vous pourrez imaginer que M. Soro veuille rendre sa démission au nouveau Président de la République, de toute façon, il ne pouvait en être autrement. Et en ce moment-là, ce que je ne vous dévoilerai pas, parce que c’est quand même de ma responsabilité et vous me le concéderez-, je verrai ce qu’il faut faire.
J’aurai forcément, des activités. Mais je ne vous dirai pas ou j’irai.
Comme vous vous êtes suffisamment enrichi, vous n’aurez pas de soucis à vous faire ?
(Rire…) Vous savez, depuis que j’ai été nommé Premier ministre…
Avant cela d’ailleurs…
Depuis que j’ai été nommé Premier ministre, je me suis rendu compte qu’en Côte d’Ivoire, on a surfait les fortunes des gens. En Côte d’Ivoire, dès que vous accédez à un poste de responsabilité, on vous prête des centaines de milliards. Ce n’est pas exact. Maintenant, je ne vais pas non plus faire la fine bouche, pour dire que les responsabilités qui sont les miennes ou non, m’ont mis dans une certaine stature. Quand on vous nomme ministre, il y a des primes d’installation pour qu’il y ait au moins les apparats. Il faut bien que le gouvernement ait la capacité d’assumer sa charge. Mais pour le reste, en ce qui concerne la richesse et autres, c’est généralement en Côte d’Ivoire qu’on a vu des fortunes.
On parlait plutôt du poste de secrétaire général des Forces nouvelles.
Vous savez, si ce poste était aussi enrichissant, j’aurais décliné d’autres responsabilités. Ce que je veux dire, c’est que les gens en Côte d’Ivoire ont toujours une réputation surfaite.
Malheureusement, la rumeur est là! Vous ne pouvez pas aller dans la concession de chaque citoyen pour lui prouver que ce qui a été dit n’est pas exact. J’ai assuré ma charge de secrétaire général dans bien des difficultés sur lesquelles je peux toujours revenir. Je dis que notre première option n’était pas d’aller nous enrichir, sinon je ne serais pas Secrétaire général.
N’y a –t-il pas d’exil prévu après les élections le 29 novembre ?
Mais pourquoi voulez-vous qu’on s’exile volontairement. Après l’élection, je l’ai dit, je rendrai ma démission au Président de la République et je ne vous dévoilerai pas ce que je ferai.
Où en êtes-vous des résultats de l’enquête suite à l’attentat auquel vous avez échappé ?
Je suis en premier lieu concerné et c’est toujours difficile de parler de soi. Pour l’attentat, le Président de la République, Laurent Gbagbo, a signé un courrier pour demander aux Nations unies de mener l’enquête. L’Organisation nous a opposé une fin de non-recevoir. Nous avons donc chargé le ministre de la Justice de voir le mécanisme interne pour mener l’enquête. Or, pour mener une telle enquête, il faut de gros moyens. L’enquête est toujours en cours, jusqu’à présent, nous n’avons pas encore d’éléments à mettre à la disposition du public. Mais nous pouvons vous assurer que cette enquête suit son cours. Je ne veux pas en dire davantage car je suis concerné. Les mécanismes nationaux ont été déclenchés et donc les résultats seront fournis au grand public quand ce sera nécessaire.
On note bien qu’après l’Accord de Ouagadougou, l’image de la Côte d’Ivoire s’est améliorée à l’extérieur. Quel est votre regard sur ce fait et pourquoi un prochain conseil des ministres conjoints Côte d’Ivoire - Burkina Faso ?
Je suis heureux de vous entendre le dire. C’est vrai, j’ai fait des sorties en Angleterre et dans d’autres pays. J’ai tout de suite noté que l’image de la Côte d’ Ivoire à l’extérieur s’est considérablement améliorée. Cela montre que l’Accord politique de Ouagadougou met tout le monde en harmonie sur la capacité des acteurs politiques ivoiriens, mais aussi sur celle du pays, donc sur son aptitude à surmonter les difficultés, à revenir sur la scène internationale. Et cela est à louer.
Lors d’une rencontre de l’Union africaine où j’y étais, des félicitations ont été adressées à la Côte d’Ivoire. Le modèle de règlement de la crise en Côte d’Ivoire est en passe d’être un cas d’école. Et nous serons heureux que dans les annales des Nations unies, on retienne qu’on peut régler une crise militaire de cette façon.
Concernant le conseil conjoint, l’Accord politique de Ouagadougou a eu pour corollaire le rapprochement entre les deux pays. Ce qui n’était pas le cas quelques années auparavant, où les rapports n’étaient pas au beau fixe. Donc l’effet induit de cet accord a été le rapprochement non seulement au niveau institutionnel mais au niveau de la population.
Le Président Gbagbo a été en visite d’Etat à Ouagadougou et a rencontré le Président burkinabé Blaise Compaoré. Il a fait une intervention devant l’Assemblée nationale du Burkina. Ce sont des signes qui montrent bien la volonté de bonne coopération entre les deux pays. Il y a eu une convention qui a été signée entre les deux pays instituant une conférence au sommet. D’où la tenue d’un conseil conjoint des ministres.
Le symbole à retenir, ici, est de bien montrer qu’au-delà des frontières, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire sont des pays voisins et frères. Et c’est cela la consécration qu’on a à la suite des accords de Ouagadougou. Il y a eu des actes que nous avons posés et dont les journaux n’en parlent pas assez, et qui me paraissent plus importants : la carte de séjour a été supprimée en Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, un citoyen burkinabé peut se promener en Côte d’Ivoire avec la carte de son pays ou la carte consulaire. Je me réjouis également qu’à l’enrôlement, on n’ait pas porté main à quelqu’un parce qu’il est venu habillé en boubou ou du fait de son patronyme ou des traits de son visage. Voilà les effets bénéfiques, positifs de l’accord. Et c’est cela qui gagnerait à être consolidé en mettant ensemble un mécanisme qui rapproche les deux Etats. Et le conseil conjoint veut être justement le lieu où nous allons partager les préoccupations qui, du fait de la proximité géographique, sont les mêmes. Nous allons passer en revue la coopération, les grands projets dans les deux pays et faire en sorte qu’on ait un marché économique commun. C’est cela l’avenir de l’Afrique. Qui réside dans le regroupement. Lequel doit partir et passer par des idéaux. Où des pays se retrouvent, créent des marchés, des projets communs, les développent et créent la richesse, le progrès pour leurs pays.
Le destin entre les peuples burkinabé et ivoirien est un fait de l’histoire. On constate cependant que 50 ans après, l’intégration reste dans les discours politiques qui ne sont pas nécessairement en phase avec la libre circulation des personnes et des biens. Avez-vous le sentiment que cette intégration est une sorte d’arlésienne depuis le temps qu’on en parle ?
A vous entendre, je note la pointe de pessimisme. Vous savez, on a l’exemple en Europe, de la France et de l’Allemagne. Ces deux pays ont été plusieurs fois ennemis ; aujourd’hui, ils sont le moteur de l’Union européenne. Il faut déjà concevoir l’intégration, de sorte que chaque pas que nous allons poser renforce l’idée de cette intégration. Qui n’est pas seulement l’affaire des dirigeants, mais aussi celle de toute la population.
L’un de nos ambassadeurs a fait une étude sur les mariages multiples en Côte d’Ivoire. Et celle-ci montre bien que l’intégration au niveau de la population est réelle. Il y a une interaction entre les peuples voisins et cela devrait constituer un modèle pour les dirigeants.
Je ne suis pas pessimiste. En Europe, l’intégration ne s’est pas construite en 50 ans. Donc, il faut être optimiste. L’intégration en Afrique est possible. Depuis 1963, on en parle au niveau du continent avec la création de l’organisation de l’Unité africaine pour susciter la prise de conscience des dirigeants africains à réaliser l’intégration. Maintenant ça suppose un certain nombre de critères et conditions notamment financières.
Je n’ai pas le même jugement que vous. A mon avis, l’intégration effectivement, se construit. Elle est peut-être lente, mais c’est pour s’entourer de toutes les précautions et garanties pour ne pas qu’elle soit mise en cause. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui nous ont amené à instituer au sein de nos gouvernements des ministères chargés de l’intégration africaine. Quand vous observez le plan de la région ouest-africaine, il y a des instruments dont la Bceao, l’Uemoa. Alors l’intégration est en marche. Et le fait qu’il y ait une conférence au sommet qui réunit les deux gouvernants, montre bien que ce n’est pas seulement de la phraséologie mais que dans le concret, nous sommes en train de prendre et poser des actes qui confortent cette intégration. Elle gagnerait à être renforcée et encouragée plutôt.
L’élection présidentielle du 29 novembre 2009 sera-t-elle possible ?
La date du 29 novembre est une date réaliste. Nous devons la tenir. Seulement, je ne suis pas un devin. Ne me demandez pas de vous dire ce qu’il en est. Ce que je puis dire, c’est qu’elle est effectivement réaliste. Car nous avons 6 mois pour établir une liste électorale définitive. Quand on a déjà enrôlé plus de 6 millions de personnes, je pense que la tâche qui reste est plus allégée que celle que nous avons accomplie. Si les acteurs y mettent de la bonne volonté, il n’y pas de raison, j’en suis convaincu, que les élections n’aient pas lieu à la date du 29 novembre. De toute façon, le gouvernement est conscient, la Commission électorale indépendante est consciente qu’il n’y aura pas de cadeau en ce qui concerne le 29 novembre. Nous ferons donc tout ce qu’il faut pour que l’élection se tienne à cette date précise.
Par contre, pour la date du 30 novembre 2008, je n’avais pas le même optimisme, parce que nous n’avions pas enrôlé 100 000 personnes et nous ne pouvions aller aux élections avec cette liste électorale de moins de 100 000 inscrits.
Aujourd’hui, je suis optimiste car nous avons enrôlé plus de 6 millions d’électeurs, et cela est un élément important pour aller aux élections.
Pour ce qui est du volet financier, la situation de trésorerie de l’Etat de Côte d’Ivoire s’est améliorée. Je n’ai pas dit que c’est l’abondance, mais il y a une nette amélioration par rapport aux années 2007 et 2008. Ce sont donc des garanties. Nous avons des moyens financiers et techniques (pour ce qui est de la liste électorale) pour faire les élections.
Que peut-on retenir, M. le Premier ministre, à l’issue de cet entretien ?
Nous avons fait un effort pour assurer la mise en œuvre de l’Accord politique de Ouagadougou. Car les signataires que nous sommes, sommes convaincus que c’est la seule voie pour sortir notre pays de la crise. Un accord aussi parfait soit-il, s’il n’est pas accompagné de la volonté politique de ceux qui l’ont paraphé, ne marche pas. En effet, on peut faire plusieurs interprétations de ces écrits (parlant des accords). Mais heureusement, dans le cadre de l’Accord politique de Ouagadougou, le Chef de l’Etat et moi-même avons pour atouts, cette volonté politique de nous surpasser et de faire en sorte d’appliquer et d’assurer la bonne mise en œuvre de ces accords.
Il est vrai qu’il y a encore des questions à parfaire. Mais ce que les Ivoiriens doivent retenir et qui est plus important, c’est que, personne ne viendra mettre ces accords en œuvre à notre place. Nous devons en toute responsabilité et dans l’intérêt de l’Etat de Côte d’Ivoire faire de sorte que l’Accord politique de Ouagadougou soit effectif pour aller à des élections démocratiques et transparentes.
Je veux des élections apaisées. Qu’on fasse mentir les pronostics pessimistes de tous ceux qui nous entourent en voyant dans ces élections l’occasion d’échauffourées.
Je dis qu’il n’y aura pas de violence dans ces élections parce que personne ne veut la violence, car nous avons souffert des conséquences de la violence dans notre pays. Nous voulons maintenant des élections apaisées. Nous ferons tout, en concertation avec la facilitation, pour que nous allions aux élections sans heurt. Ma responsabilité est de préparer un environnement apaisé et d’accalmie pour les échéances électorales. C’est aussi de préparer chaque étape dans la transparence et la limpidité et c’est ce que je fais. L’enrôlement est transparent et limpide. La liste électorale provisoire sera produite après un processus transparent et limpide. La liste électorale définitive sera produite après un processus électoral limpide. Les acteurs politiques eux-mêmes devront déclarer leur satisfaction quant au listing électoral définitif. Si nous faisons tout ceci dans la transparence et le consensus, nous sommes en train de déblayer le chemin pour des élections apaisées et tranquilles en Côte d’Ivoire. Après, il restera un autre effort à faire : ce sera la prise de conscience, le sursaut personnel que les uns et les autres devront avoir pour aller aux élections sans contestation. Parce que la liste est transparente, les élections le seront également pour que nous puisions retrouver ce havre de paix. Ce qui doit nous habiter, c’est de vendre la réconciliation aux Ivoiriens, c’est de vivre en paix. Et quand les institutions auront été renouvelées par le processus des urnes, je suis convaincu que la Côte d’Ivoire sera un grand pays en Afrique et dans le monde.
Propos recueillis par Paulin N. Zobo
Christian Dallet
Cissé Mamadou
Marc Yevou
coordination :
Agnès Kraidy
Par expérience, dans l’analyse du processus de sortie de crise, il y a quand même une constante, le retard observé dans sa mise en œuvre. L’accord politique de Ouagadougou avait été assorti d’un chronogramme de 10 mois. Aujourd’hui, nous en sommes à 32 mois pour le premier tour de l’élection présidentielle, sans oublier que la date du 30 juin avait été avancée entre-temps. De façon permanente, on sait qu’il y a des retards. Je prends un autre exemple ; il y a eu le cas des commandants de zone qui, selon les termes du 4e accord complémentaire, devaient faire la passation des charges, le 15 janvier au plus tard. Il a fallu attendre 5 mois. Est-ce que raisonnablement, ne peut-on pas être pessimiste quant à la date du 29 novembre ? Cela n’est-il pas un pessimisme justifié ?
Je veux croire d’abord à votre expérience. J’en ai aussi dans la gestion de la sortie de crise. Mais je suis optimiste. Si je ne l’étais pas, je ne serais pas Premier ministre. Ce poste est fait pour être optimiste et pour trouver des solutions aux problèmes. Je comprends que vous ayez des interrogations et que même vous soyez inquiet quant au respect de la date. Sachez que le gouvernement est le premier concerné par ces préoccupations.
Je voudrais encore une fois vous dire que dans le mécanisme électoral, la plus grosse des difficultés que le gouvernement avait, c’était de faire l’enrôlement. Parce qu’il fallait payer beaucoup d’argent, déployer des équipes, 11.000 centres de collecte sur l’ensemble du territoire. C’était quelque chose d’extrêmement compliqué.
Heureusement que je me rends compte que nous avons réussi. Vous ne savez pas toutes les peines que le gouvernement s’est donné pour déployer tout ce matériel et personnel sur l’ensemble du territoire. Il était donc plus difficile de réaliser l’enrôlement que de faire un traitement informatique qui est simple.
Le contentieux électoral qui aurait pu être encore une des grosses difficultés, parce que nous le savions, nous l’avons anticipé. En faisant en sorte qu’il n’y ait pas suffisamment de matière à réclamation. C’est pourquoi, le traitement informatique, le croisement, etc., doivent servir d’éléments qui élaguent la liste électorale pour qu’il n’y ait pas trop de contestations. Mais si par extraordinaire, il y avait un volume important de contestations, il n’y aurait pas de problème, parce que nous avons pris des dispositions pour que les magistrats soient installés sur l’ensemble du territoire. C’est pourquoi, nous avons pressé le ministre de la Justice de redéployer les magistrats sur l’ensemble du territoire pour qu’ils puissent rendre les verdicts au plus tard en 8 jours. Après cela, il n’y aura pas de raison que la liste définitive ainsi établie ne serve pas à aller à ces élections. Je veux vous rassurer. Maintenant, quand vous me dites que des dates ont été ratées, j’ai été le premier à dire aux Ivoiriens qu’il ne fallait pas se focaliser sur le fétichisme des dates. Parce que celles qui avaient été données étaient des dates indicatives. Je suis encore la personne qui vient dire aujourd’hui que la date du 29 novembre 2009 est réaliste. Parce que j’ai toujours eu pour conviction et position de ne pas mentir aux Ivoiriens. Nous ne pouvions pas faire d’élection le 30 novembre 2008 parce que nous n’avions pas 100.000 personnes inscrites sur les listes électorales. Aujourd’hui, c’est différent ; nous avons plus de 6 millions de personnes. Et l’enrôlement s’achève le 30 juin. Ce sont des éléments concrets qui prouvent que nous pouvons tenir la date du 29 novembre 2009. Je suis convaincu qu’aussi bien sur la question du contentieux électoral que du traitement informatique, nous avons anticipé pour ne pas commettre les mêmes erreurs. C’est en cela que je parle d’expérience. Nous avons mis des marges de sécurité, même si nous débordons un peu.
Vous avez noté qu’au niveau du 4e accord complémentaire, il y a la question du démantèlement des milices qui va être effective au moins deux mois avant la tenue du scrutin. C’est une dimension qui est différente de celle de l’identification. Pensez-vous que là encore les délais seront tenus ?
Je comprends que votre rôle est de trouver les différents problèmes et le mien de trouver des solutions. Nous ne sommes pas forclos par rapport aux deux mois avant les élections. Nous sommes en pleine activité de démantèlement des milices, dans le règlement des questions militaires. Je peux vous rassurer que deux mois avant ces élections, nous pourrons vous présenter un bilan rassurant.
Donc, on ira aux élections sans armes.
Non. Il faut des armes pour la sécurisation. Je veux bien comprendre. Il y a une nuance qu’il faut que les Ivoiriens comprennent sur les questions militaires. C’est parce qu’on n’a pas peut-être bien expliqué. Je voudrais le faire.
Premièrement, pour aller aux élections, nous avons mis en place un plan de sécurisation des élections qui va mobiliser 8000 hommes sur l’ensemble du territoire. C’est ce déploiement qui a commencé à Bouaké et Abidjan.
Deuxièmement, dans les zones centre, nord et ouest, on a décidé de passer de 10 zones à 4 villes, où les combattants des Forces armées des Forces nouvelles, donc 5000 qui est le quota affecté aux Forces armées des forces nouvelles, doivent intégrer la nouvelle armée. Ils ont un statut reconnu par l’Etat de Côte d’Ivoire et ils ont à émarger sur le budget de Côte d’Ivoire. Ils deviendront des militaires.
Quand ?
Ce sera lorsque l’armée sera réunifiée.
Après ou avant la présidentielle ?
Après la présidentielle. Vous avez 4000 éléments des Forces armées des Forces nouvelles qui vont être dans le Cci pour assurer la sécurité des élections. Ce sont eux qui auront légalement le droit de porter des armes. Au sein des Forces armées des forces nouvelles, il y aura 9000 personnes qui auront le droit de porter les armes. Ceux qui n’auront pas été retenus dans les différents quotas, sont ceux qu’on ramène à la vie civile qu’on appelle les démobilisés. C’est-à-dire qu’ils n’ont pas le droit de faire partie des différents quotas. Ils vont être démobilisés et ils ont des droits. Qui ont été réglés par l’accord 4 qui prévoit 500.000 F par démobilisé. Tout ce processus qui part du déploiement des éléments du Cci sur l’ensemble du territoire au regroupement des éléments dans les différentes casernes, dans 4 villes, au centre, nord et ouest, sont des opérations que nous réaliserons avant d’aller aux élections. Après le scrutin, ceux qui doivent aller à la retraite, iront. Et ceux qui doivent intégrer la nouvelle armée, le feront.
Toutes ces étapes nécessitent beaucoup d’argent. Manifestement cela coûte très cher à l’Etat de Côte d’Ivoire. Du coup, la société Sagem réclame de temps en temps de l’argent et parle parfois de retard dans le paiement des factures. Aujourd’hui, il semble que l’Etat reste devoir plus de 100 milliards de francs à la Sagem.
Votre question n’est pas exacte.
Combien doit-on à la Sagem et combien a coûté l’opération d’enrôlement ?
A des moments donnés, Sagem a eu à réclamer à l’Etat, le paiement de ses dus pour pouvoir continuer d’assurer le service pour lequel, elle a été appelée. Nous avons récemment payé 10 milliards 800 millions de F à Sagem. Elle est encore avec nous. Nous avons passé un accord avec eux pour continuer de leur verser un certain montant pendant le reste de l’opération. Je ne crois pas qu’il y ait des difficultés avec Sagem.
Il y a une époque où Sagem avait été absente. Elle réclamait 10 milliards 800 millions de F. L’Etat a payé et Sagem est sur le terrain, participe à l’enrôlement.
Il y a aussi que les agents bloquent souvent les pièces des pétitionnaires.
Mais comme vous m’aviez posé la question sur la Sagem, je vous donne la réponse sur cette société. Sagem ne bloque rien pour le moment parce que nous avons payé. Mardi nous allons commencer des discussions avec Sagem pour aboutir à un accord sur le montant de la facture à payer pour les jours où ils ont travaillé. C’est un devoir pour l’Etat de s’assurer que ce qu’il paye est bien ce qu’il faut. Ces discussions ne sont pas suspensives au travail de Sagem. Il n’y a pas d’inquiétude à avoir quant à la Sagem. Si vous me dites qu’il y a eu des difficultés dans l’enrôlement avec des grèves ici et là, je suis d’accord avec vous. J’ai eu à l’époque à déplorer les multiples grèves. L’Etat a connu une situation de trésorerie difficile à un moment donné. Cela ne devrait pas être le prétexte pour aller aussi facilement en grève. De toute façon, l’Etat s’organise à faire en sorte que ces engagements soient respectés.
M. le Premier ministre, comment fait l’Etat de Côte d’Ivoire qui a payé 100 milliards ? Vous aviez donné votre budget de sortie de crise, 247 milliards.
Les bailleurs de fonds avaient promis d’aider la Côte d’Ivoire qui a payé 100 milliards. Que font-ils ?
Ils ont décidé à un moment donné de nous aider. Une aide reste une aide. La plus grande responsabilité incombe à l’Etat. Ce sont des opérations qui relèvent de la souveraineté de l’Etat. Je suis content que l’Etat ait pu honorer ses engagements. Si la communauté internationale nous aide, nous en serons heureux. Il y en a qui ont heureusement contribué, je voudrais les remercier pour leur contribution. Mais dans la sortie de crise, beaucoup de programmes du processus relèvent de l’Etat. Qui entend jouer sa partition. Il ne faut donc pas jeter la pierre à telle ou telle structure internationale pour n’avoir pas contribué.
On s’interroge. Quand on promet beaucoup d’argent pour n’en donner que 17 milliards, on pose la question pour avoir la réponse.
Je le constate aussi bien que vous. C’est pourquoi je dis que c’est de notre responsabilité…puisque c’est nous qui avons des problèmes et qui devons les régler. Nous n’avons pas à hésiter. Nous allons continuer de faire face à ces difficultés. Maintenant, si les aides viennent à temps, c’est une bonne chose, parce qu’il n’y a pas que le montant de la contribution, mais il faut que l’aide vienne à point nommé. Nous, nous allons continuer d’assumer les charges qui sont les nôtres.
Monsieur le Premier ministre, à combien peut-on estimer l’enveloppe qu’il faut pour cette sortie de crise ?
Autour de 300 milliards. Mais nous avons déjà payé une bonne partie pour réaliser plusieurs processus.
Quand on entend cette somme, on pourrait dire quel gâchis, puisqu’on pouvait faire autre chose avec autant d’argent.
Ecoutez, je l’ai dit, nous sommes arrivés à un tel montant, parce qu’il nous fallait réaliser la confiance. Et c’est la facture de la confiance. Donc, la paix coûte cher, c’est à nous d’assumer ces montants. C’est vrai qu’on aurait bien aimé ou souhaité que ces 300 milliards soient affectés à l’investissement. Par exemple, si la Côte d’Ivoire n’avait pas connu de problème. Nous sommes tenus, à partir du moment où nous voulons maintenant aller à la normalité, de mettre la main à la poche. Et l’Etat est malheureusement tenu de payer cette somme.
Au-delà de la mise en œuvre du processus de sortie de crise, je remarque que la Côte d’Ivoire n’a pas arrêté de vivre. Et de ce point de vue, vous avez d’autres dossiers sur votre table de travail. Notamment l’apurement de la dette, la relance économique. Il y a également le front social à satisfaire. Comment appréhendez-vous tous ces dossiers et quel est le point que vous entendez donner à la Côte d’Ivoire et à la sous-région ?
Je dois dire simplement que les années 2007 et 2008 n’ont pas été des années faciles pour le gouvernement de Côte d’Ivoire. Comme vous le dites, nous avions des échéances qu’il fallait absolument réaliser avant le 31 mars 2009.Notamment l’épineuse question de notre dette. Vous savez que la Côte d’Ivoire est un pays lourdement endetté. Nous avons plus de 6000 milliards de dette extérieure. Pour bénéficier de l’allègement de cette dette, il nous fallait atteindre avant le 31 mars 2009, ce qu’on appelle le point de décision. Lorsque vous avez atteint ce point, il vous garantit, si vous mettez en œuvre un autre programme qu’on appelle la Frpc, qui est la facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance, l’allègement effectif de votre dette. Certains se demandent pourquoi nous nous donnons tant de peine pour réaliser le Ppte. J’ai même lu quelque part avec beaucoup d’amusement, que le gouvernement ivoirien se réjouissait d’être pauvre. Non, le gouvernement ivoirien ne peut pas se réjouir d’être pauvre. Il y a des standards. Après nos indépendances dans les années 1960, les gouvernements avaient estimé qu’il fallait s’endetter pour offrir des infrastructures à nos pays, et construire nos économies .Ce qui a amené plusieurs pays à s’endetter lourdement. Et quand la crise économique est souvenue en 1980 et que le niveau d’endettement des pays était très élevé, aussi bien avec les multilatéraux que sont la Banque mondiale, le Fmi, la Bad et autres, que les bilatéraux que sont les différents gouvernements amis à la Côte d’Ivoire, il a fallu trouver un mécanisme pour réduire la dette. Il y a eu plusieurs initiatives. La première était le Club de Paris. Je reviendrai là-dessus.
L’endettement de la Côte d’Ivoire, ce n’est pas la crise. C’est lié, je dirai même parallèle, à une vision politique, à un objectif qui était de réaliser de grandes infrastructures. Et je crois que la Côte d’Ivoire était fière à un moment donné de tout le travail qui a été fait dans notre pays en termes d’infrastructures et d’économie. Maintenant, la Côte d’Ivoire, si elle veut continuer d’être compétitive et investir pour le futur, doit obtenir l’annulation de sa dette. Parce que si nous ne l’obtenons pas, nous continuerons chaque année de consacrer le tiers de notre budget au service de la dette. C’est pourquoi nous avons fait beaucoup de sacrifices et je reconnais que ça a été difficile. Je l’ai dit, 2007 et 2008 ont été des années très difficiles pour la Côte d’Ivoire. Parce que nous devions puiser dans nos recettes, dans notre budget pour rembourser la Banque mondiale, la Bad. Ce que nous avons fait. C’est quand même 200 à 300 milliards que nous avons remboursé à ces différentes institutions. Aujourd’hui, il est heureux de constater que la Côte d’Ivoire a été unanimement déclarée éligible au point de décision. Ce qui nous a permis de souffler un peu. Le contrecoup, c’est qu’on a accumulé une dette intérieure de plus de 280 milliards, que nous sommes aussi en train d’apurer. Mais ce qui est réjouissant, c’est que nous sommes déclarés éligibles à l’allègement de la dette. Ce qui explique la visite de M. Dominique Strauss-Khan en Côte d’Ivoire pour continuer d’encourager les Ivoiriens. Il nous reste encore des efforts à faire qui nous engagent, qui nous encouragent sur le chemin à réaliser les différents engagements que nous avons pris pour avoir le point d’achèvement. Et le point d’achèvement, ce sera là où la Côte d’Ivoire va bénéficier d’un allègement substantiel de sa dette. Mais entre-temps, le ministre de l’Economie et des Finances est allé à Paris pour négocier avec le Club de Paris. Nous avons, là aussi avec beaucoup de dynamisme, obtenu l’abandon d’environ 420 milliards de dette. Et le rééchelonnement du principal pour dix ans. La Bei a décidé de s’engager à nouveau avec la Côte d’Ivoire. Donc ce sont des signaux que la gestion des finances publiques en Côte d’ivoire est approuvée par les instances internationales. Ce qui est encourageant pour le gouvernement.
Comment le peuple peut ressentir cela dans sa vie quotidienne ?
Si vous posez la question aux fournisseurs qui avaient des créances sur l’Etat, de zéro à 30 millions, ils vous diront qu’ils ont perçu leur argent.
Si vous interrogez nos représentations diplomatiques, elles vous diront qu’elles ont reçu maintenant de l’argent pour assurer leur fonctionnement.
Naturellement la question que vous me posez, c’est de savoir si chaque citoyen à domicile, a perçu un chèque….
Le fait de réinjecter dans notre économie nationale les différents appuis budgétaires, va justement permettre aux petites entreprises de créer plus d’emplois, de résorber le chômage et de relever le niveau de vie des populations. Mais ça ne se fait pas en un jour. Nous travaillons pour le futur. Nous travaillons à atteindre le point d’achèvement. Dès lors, nous aurons des sommes substantielles à injecter dans notre économie. Pour l’heure, les différents créanciers de l’Etat sont des Ivoiriens ou des citoyens qui vivent dans notre pays. Cet argent qu’ils vont recevoir va continuer de circuler sur le territoire national et aider ainsi des gens qui n’avaient pas de possibilité, il y a un an d’avoir ces possibilités concrètes aujourd’hui.
Quand on vous écoute et quand on voit les actions du gouvernement en priorité, que tout est consacré à 99% à la sortie de crise. Et donc certainement, 1% du souci du gouvernement est porté au quotidien des Ivoiriens (…) le problème de fond, est que le gouvernement ne met rien en œuvre pour suivre l’application effective des décisions sur le marché (…)
Cette perception n’est pas juste. Nous avons eu deux priorités au moins et je viens de les évoquer. C’est vrai, il y a la sortie de crise. Mais la deuxième priorité, qui à mon avis est légitime et en rapport avec les élections, c’était d’être éligible à l’allègement de notre dette. Je vous répète encore que sans l’allègement de la dette de la Côte d’Ivoire, notre budget actuel, c’est-à-dire le niveau des recettes de la Côte d’Ivoire, ne permet pas de consacrer une enveloppe à l’investissement. Or, c’est l’investissement qui crée les richesses, lesquelles permettent à un pays de prétendre au développement. Notre budget, pour l’essentiel aujourd’hui, est consacré au service de la dette, aux salaires et nous avons des difficultés à dégager une enveloppe pour la paix. Donc il faut accroître l’investissement en Côte d’Ivoire, si l’on veut réduire le chômage, relever le niveau de vie de notre population.
Relever le niveau de vie de la population commence déjà par là. Le niveau de vie des populations va s’améliorer, quand celles qui sont au chômage auront du travail et pourront nourrir une famille. Donc ce n’est pas vrai de penser que la sortie de crise est la seule préoccupation du gouvernement. Permettez-moi de dire quelque chose, parce que c’est très important. Savez-vous que l’initiative Ppte a été mise en place en septembre 1996 ? C’est-à-dire pour bénéficier de l’allègement de la dette. Donc c’est depuis 1996 que la Côte d’Ivoire tout entière court après le point de décision. Et on ne l’a obtenu que cette année, le 31 mars 2009.C’est vous dire que tous les gouvernements, avant nous, avaient perçu l’urgence et la nécessité d’avoir l’allègement de la dette de la Côte d’Ivoire, s’ils voulaient réaliser le progrès pour le pays. Malheureusement, des circonstances particulières n’ont pas permis qu’on ait ce niveau de décision. Aujourd’hui que nous l’avons, ça prouve que le gouvernement se préoccupe du quotidien des populations et a pris une option sur le développement, le progrès et l’amélioration du quotidien des populations. Nous avons fait ce sacrifice dans une situation particulière. Au moment où la Côte d’Ivoire ne bénéficiait pas du fonctionnement normal de ces institutions. Je pense qu’on peut considérer que des efforts importants ont été faits.
Vous me dites, des décisions sont prises et des sacrifices sont faits et on ne le ressent pas au niveau des populations. C’est absolument vrai, puisque nous continuons d’avoir des variables. Par exemple sur le gaz, les bouteilles ne sont pas vendues aux prix homologués.
Je voudrais lancer un appel. Il faudrait qu’il y ait une coopération entre la population et le gouvernement. A l’époque, j’avais reçu un certain nombre d’associations de consommateurs et je les avais invitées à avoir une plate forme avec le gouvernement pour s’assurer que les sacrifices que nous faisons et qui se traduisent en termes de moins-value dans notre bulletin ne soient pas vains. Donc c’est un travail que nous devons faire ensemble. Le gouvernement actuel est celui des Ivoiriens. Il ne faudrait pas qu’on ait le sentiment que le gouvernement est quelque part et le peuple ailleurs. Le résultat de cette coopération doit permettre à la population de ressentir dans son vécu quotidien, les sacrifices faits par le gouvernement.
Malheureusement, le contexte international est difficile. Il n’y a pas que la Côte d’Ivoire qui est frappée. Vous allez aux Etats-Unis, aujourd’hui il y a plus de chômage, pourtant ce sont des pays qui ont des moyens incomparables aux nôtres.
Vous ne pouvez pas dire que le gouvernement, dans ces situations difficiles, n’a pas pris des mesures pour améliorer le quotidien des Ivoiriens.
M. le premier ministre, on ne vous reproche pas l’inaction. Quand les prix du pétrole ont vraiment flambé, que les prix du carburant ont pris l’ascenseur et que les denrées alimentaires ont suivi cette montée en hausse des prix, vous avez pris la décision de créer justement une structure interministérielle pour le suivi des mesures. On ne sait pas ce que devient cette structure. Le suivi des décisions qui sont prises dans ces cas spécifiques, c’est de cela qu’il s’agit.
Tout à fait. Vous savez nous, nous avons mis en place le cadre réglementaire. Maintenant, il s’agissait de trouver telle ou telle associations de consommateurs pour figurer là-dedans. Ce n’est pas un exercice facile. Vous savez qu’il y a plusieurs associations de consommateurs en Côte d’Ivoire. Quand vous vous adressez à telle, les autres crient. Quand vous vous occupez de telle autre, c’est la levée de boucliers de l’autre côté. Ce sont des facteurs exogènes qui ne sont pas liés directement au gouvernement. Donc je continue de penser que le gouvernement a choisi la meilleure option qui était de dire que nous allons faire des sacrifices en abandonnant telle ou telle charge et que la population elle-même s’organise de façon beaucoup plus sérieuse et rigoureuse comme le gouvernement, pour que cette interaction, gouvernement et associations de consommateurs–populations, donne des résultats probants.
Malheureusement, le gouvernement a travaillé et nous attendons que les associations s’organisent mieux, afin que nous puissions aller sur le terrain pour réaliser que les Ivoiriens bénéficient des retombées des sacrifices du gouvernement.
Votre regard sur la fronde sociale avec les revendications salariales qui aboutissent toujours à des audiences avec le Chef de l’Etat.
Oui, dans toutes ces revendications, il me faut reconnaître que certaines sont totalement légitimes. Même s’il faut déplorer quelquefois la surenchère de part et d’autre. Il faut reconnaître que pour l’essentiel, les revendications sont légitimes. L’aspiration de tout Ivoirien, c’est un mieux-être. Donc c’est normal qu’il y ait des revendications. Mais c’est tout aussi juste qu’il y ait un gouvernement responsable pour faire face à toutes ces revendications. Ce que nous disons aujourd’hui aux syndicats, c’est que nous sommes si près du but, que les revendications ne doivent pas compromettre tout le travail que nous avons fait. Nous sommes dans une situation particulière et aujourd’hui les priorités du gouvernement sont d’avoir l’allègement de la dette et d’organiser les élections. Que les syndicats nous permettent d’épuiser ces deux points et le gouvernement pourra faire face à toutes ces revendications. Je pense qu’il faut avoir un discours responsable avec les syndicats. Je suis heureux qu’on se soit mis d’accord pour qu’il y ait une trêve.
Le 21 mars de l’année dernière, à la réunion du Comité d’évaluation et d’accompagnement, vous avez estimé que la finalité de votre mission, «c’est la tenue d’élections libres, transparentes et ouvertes à tous». Or aujourd’hui, des interrogations subsistent quant à la candidature du président Henri Konan Bédié du Pdci-Rda qui pourrait être frappée par la limite d’âge. Quant à M. Alassane Dramane Ouattara, il y a eu les problèmes de nationalité qu’on a connus. Que dit exactement l’accord de Pretoria, et qu’est-ce qui va être fait concrètement ?
Je suis surpris par la question que vous posez. Il n’a jamais été question de remettre en cause la candidature de qui que ce soit. Mieux, le Chef de l’Etat lui-même, à plusieurs reprises, aussi bien au Cpc qu’en Conseil des ministres, a rappelé qu’il a pris une décision se fondant sur l’article 48 de la Constitution ivoirienne pour faire en sorte que tous ceux qui ont signé l’accord politique de Linas Marcoussis soient d’office candidats sans discrimination d’âge et autres. Pour respecter cette volonté du Chef de l’Etat, nous avons pris une ordonnance portant modification du code électoral, et en son article 54, il est bel et bien écrit que tous ceux qui ont signé l’accord politique de Marcoussis seront d’office candidats sans quelque discrimination que ce soit. Donc c’est un problème qui est réglé depuis l’accord politique de Pretoria et il n’y a pas de raison qu’on y revienne. Je crois que le Chef de l’Etat l’a dit et je me fais l’écho de ses dires, de ses propos. Maintenant, il faut bien dire que nous irons à des élections démocratiques, transparentes aussi. C’est pourquoi la méthode et l’approche que j’ai eues avec les partis politiques a été de les associer à chaque niveau, à chaque étape du processus électoral. Quand on a un compromis, je le consolide et puis on passe à une autre étape. Quand il a été question des audiences foraines, j’ai fait une large concertation avec les partis politiques. Une fois ce compromis obtenu, nous les avons réalisées. Pour l’enrôlement, j’ai procédé de même et tout se déroule bien. Donc il n’y a pas de problème à ce niveau.
Vu que les signataires de l’accord de Marcoussis sont d’office éligibles, et les non signataires alors ? Sans tomber sous le coup des dispositions constitutionnelles, que deviennent donc les candidatures qui n’en sont pas issues ?
L’article 54 énumère les critères à partir desquels tous les citoyens ivoiriens, y compris les signataires des accords politiques de Ouagadougou et de Marcoussis pourraient être candidats. Conformément à l’ordonnance portant justement code électoral et à l’article 54, tout le monde peut être candidat à l’élection présidentielle.
Il n’y aurait pas de discrimination ?
Justement, en prenant cette décision se fondant sur l’article 48 de la constitution de notre pays, le Président de la République a voulu éviter la discrimination.
Revenons sur les questions militaires, les problèmes de grades Nous avons dit qu’il fallait une commission d’harmonisation des grades que l’on mettrait en place par décret. Le document a été préparé par le ministre de la Défense. Je lui ai demandé de s’assurer auprès des deux généraux Mangou Philippe et Bakayoko qu’ils comprenaient bien les termes du décret. La semaine dernière, il m’a assuré que c’était le cas et que ces derniers étaient d’accord sur ses termes et sa mouture. Il reste maintenant au chef du gouvernement de le proposer à la signature du Chef de l’Etat.
Peut-on avoir les contours de l’arrangement ?
Vous savez que grâce à l’accord IV, deux généraux au sein des Forces armées des Forces nouvelles seront confirmés dans leur grade. Ce décret est sur ma table, j’attends que le décret sur la commission soit prêt, pour qu’ils soient ensemble transmis au Chef de l’Etat. Pour le reste, on a dit qu’il fallait faire une harmonisation pour qu’il n’y ait pas d’injustice. Si un soldat Fafn et un autre des Fds qui ont fait la même classe au 18 septembre 2002, se sont retrouvés séparés, et qu’on doit les réunifier, il ne faudrait pas qu’il y ait de frustration. On alignera les Fafn sur leurs camarades des Fds pour s’assurer qu’ils reprennent le chemin, que personne ne soit pénalisé parce qu’il a été soldat Fafn et qu’on ne fasse pas de tort non plus à un soldat des Fds pour être resté loyal. Donc nous avons voulu un juste milieu. Nous avons voulu que sur la base de la justice, on puisse harmoniser les grades des soldats Fafn et des Fds.
Donc ce n’est pas de la justice, c’est une base d’arrangement.
Oui ! Vous savez, un accord politique, c’est d’abord un arrangement. Nous fonctionnons dans une sorte d’arrangement politique.
Parlez-nous du format de la prochaine armée.
Les travaux sont en cours. Il y a un groupe de travail en place qui doit nous sortir tout un document, une loi sur les Forces armées de Côte d’Ivoire, notamment la question que vous évoquez. Ils n’ont pas encore terminé. Quand cela sera prêt, on pourra dire aux Ivoiriens : «voilà ce que sera l’armée de Côte d’Ivoire».
M. le Premier ministre, le Programme national de réinsertion et de réhabilitation communautaire lancé en juin 2007 a suscité à l’époque beaucoup d’espoir quant à la réinsertion des ex-combattants démobilisés. Apparemment, il n’a pas eu les moyens de ses ambitions. De quelles autres perspectives disposez-vous aujourd’hui pour résoudre ce problème qui est pendant ?
Je pense que c’est une question importante que même les prochains gouvernements devront continuer de traiter. Quand vous voyez un pays comme l’Angola, bien qu’il y ait eu des élections, il continue de traiter la question des ex-combattants. Ceci est inhérent à tous les pays ayant connu une crise d’une telle envergure. C’est un programme qui va continuer à gagner en intensité dans les années à venir. Mais que fait-il? A partir du moment où nous devrons mettre une armée réunifiée en place, il est évident que certaines personnes ne s’y retrouveront pas. Donc il fallait les accompagner et les amener à la vie civile. C’est pourquoi nous avons mis en place ce programme qui avait la charge de réinsérer ceux qu’on a appelé les démobilisés. C’est-à-dire qui n’auront pas été retenus pour la nouvelle armée. Ils devaient choisir un métier et ce programme devait les former et les accompagner avec des kits pour qu’ils s’installent. Comme vous l’avez dit, il y a eu beaucoup de difficultés parce que la trésorerie n’était pas disponible. Or l’Etat de Côte d’Ivoire lui-même avait des difficultés et la Banque mondiale qui devait soutenir le programme en a créé un autre pour aussi faire sa réinsertion. Mais, malgré les difficultés de trésorerie, il y a eu la réinsertion, et nous sommes heureux de voir qu’il y a eu une restructuration du programme pour permettre au moins que le minimum soit fait. Je pense que la question des ex-combattants est importante et qu’il faudra qu’on la règle. Pour le moment, je ne peux pas anticiper sur les différentes propositions que nous faisons au Chef de l’Etat. Mais nous pensons qu’il faudra un cadre plutôt permanent pour s’occuper des questions des ex-combattants et de leur avenir.
M. le Premier ministre, les élections ne sont pas une panacée, pour sortir de crise. Sous d’autres cieux, elles ont été génératrices de violence. Qu’est-ce qui va être fait véritablement pour que les Ivoiriens puissent aller introduire leurs bulletins dans les urnes en toute liberté de conscience et surtout en toute sécurité ?
Je suis d’accord avec vous que sur la scène internationale, quand on parle d’élections en Afrique, cela ne manque pas de susciter quelques inquiétudes. Je pense qu’aujourd’hui, la classe politique, en tout cas pour les leaders politiques que je vois assez souvent, la leçon à tirer de la crise est de faire en sorte que l’élection de 2009 soit apaisée. Nous allons y travailler. C’est pour cela d’ailleurs qu’au dernier Cpc, M. Compaoré a dit - c’était bien sûr une anecdote- que le conseil se réunira le 1er décembre 2009. C’est pour montrer qu’au- delà de l’élection, il faut maintenir le dialogue et la concertation pour bâtir la Côte d’Ivoire post-crise. Et à mon avis, cela est important. Comme vous l’avez dit, l’élection n’est pas la finalité. Mais elle est aussi une étape, qui consolide les acquis que nous avons obtenus, qui consolide la paix dans notre pays, qui consolide la réconciliation que nous avons engagée. Donc je suis d’avis avec vous que l’idée, en ce qui nous concerne- Je sais aussi que c’est la position de la facilitation-, c’est de faire en sorte que le dialogue dans le cadre du Cpc, le dialogue tout court, soit un moyen pour nous permettre et permettre aux acteurs politiques de se rallier à l’idée qu’on aille à des élections apaisées.
Justement, à propos des élections, les Forces nouvelles vont-elles se contenter d’y assister seulement. N’y aura-t-il pas de candidat en son sein ?
Je ne suis pas candidat aux élections de 2009 !
On parle des militaires, et non des civils.
Je pense premièrement, que les Forces nouvelles ne vont pas se transformer en parti politique. Le faire, ce serait devenir partisan comme tous les autres partis. Notre position est la position médiane de neutralité, d’impartialité.
Deuxièmement, le secrétaire général des Forces nouvelles n’est pas candidat. Donc il ne s’agira pas pour les Forces nouvelles de positionner quelqu’un aux élections. Cela fausserait le jeu. Je pense que ce qui sert de ciment, ce qui sert d’épine dorsale du processus vient du fait que le Premier ministre chef du gouvernement n’est pas candidat à l’élection présidentielle et qu’il ne veut pas profiter de sa situation ou de sa fonction pour fausser le jeu électoral. Je pense qu’on a la chance inouïe d’envoyer tous les Ivoiriens aux élections. Il ne faut pas la rater. C’est pourquoi en ce qui concerne les Forces nouvelles, nous n’aurons pas de candidat. Le secrétaire général n’est pas candidat, les Forces nouvelles ne seront pas un parti politique, nous permettrons le jeu démocratique entre les forces politiques existantes.
Avez-vous une idée de la position des civils?
Je pense que chacun des cadres civils qui travaillent au sein des Forces nouvelles a beaucoup de possibilités. Quand on est un civil politique dans un mouvement politique, naturellement, sa trajectoire c’est de faire de la politique. Donc ceux qui veulent faire la politique le feront, ceux qui sont dans l’administration, s’ils le veulent, y demeureront. Il n’y a pas un cadre spécifique de Ouagadougou pour dire que tel civil a droit à telle chose. Vous voyez ce que je veux dire. Déjà, les cadres civils des Forces nouvelles ont des positionnements. Il ne tiendra qu’à eux de poursuivre sur leur lancée ou d’opérer un choix.
Vous ne serez pas candidat, vous venez de le dire. Au- delà de la formule consacrée qu’on se met en réserve de la République, que deviendra M. Soro Guillaume au soir du 29 novembre 2009.
Au soir du 29 novembre 2009, après la proclamation des résultats, M. Soro ira rendre sa démission au nouveau Président de la République. Je pense que être sur la scène de l’actualité politique de son pays pendant sept ans, ce n’est pas rien. On peut croire que cela a été une charge de travail, une capacité d’anticipation. Organiser des élections dans un tel contexte, ce n’est pas une sinécure. Vous pourrez imaginer que M. Soro veuille rendre sa démission au nouveau Président de la République, de toute façon, il ne pouvait en être autrement. Et en ce moment-là, ce que je ne vous dévoilerai pas, parce que c’est quand même de ma responsabilité et vous me le concéderez-, je verrai ce qu’il faut faire.
J’aurai forcément, des activités. Mais je ne vous dirai pas ou j’irai.
Comme vous vous êtes suffisamment enrichi, vous n’aurez pas de soucis à vous faire ?
(Rire…) Vous savez, depuis que j’ai été nommé Premier ministre…
Avant cela d’ailleurs…
Depuis que j’ai été nommé Premier ministre, je me suis rendu compte qu’en Côte d’Ivoire, on a surfait les fortunes des gens. En Côte d’Ivoire, dès que vous accédez à un poste de responsabilité, on vous prête des centaines de milliards. Ce n’est pas exact. Maintenant, je ne vais pas non plus faire la fine bouche, pour dire que les responsabilités qui sont les miennes ou non, m’ont mis dans une certaine stature. Quand on vous nomme ministre, il y a des primes d’installation pour qu’il y ait au moins les apparats. Il faut bien que le gouvernement ait la capacité d’assumer sa charge. Mais pour le reste, en ce qui concerne la richesse et autres, c’est généralement en Côte d’Ivoire qu’on a vu des fortunes.
On parlait plutôt du poste de secrétaire général des Forces nouvelles.
Vous savez, si ce poste était aussi enrichissant, j’aurais décliné d’autres responsabilités. Ce que je veux dire, c’est que les gens en Côte d’Ivoire ont toujours une réputation surfaite.
Malheureusement, la rumeur est là! Vous ne pouvez pas aller dans la concession de chaque citoyen pour lui prouver que ce qui a été dit n’est pas exact. J’ai assuré ma charge de secrétaire général dans bien des difficultés sur lesquelles je peux toujours revenir. Je dis que notre première option n’était pas d’aller nous enrichir, sinon je ne serais pas Secrétaire général.
N’y a –t-il pas d’exil prévu après les élections le 29 novembre ?
Mais pourquoi voulez-vous qu’on s’exile volontairement. Après l’élection, je l’ai dit, je rendrai ma démission au Président de la République et je ne vous dévoilerai pas ce que je ferai.
Où en êtes-vous des résultats de l’enquête suite à l’attentat auquel vous avez échappé ?
Je suis en premier lieu concerné et c’est toujours difficile de parler de soi. Pour l’attentat, le Président de la République, Laurent Gbagbo, a signé un courrier pour demander aux Nations unies de mener l’enquête. L’Organisation nous a opposé une fin de non-recevoir. Nous avons donc chargé le ministre de la Justice de voir le mécanisme interne pour mener l’enquête. Or, pour mener une telle enquête, il faut de gros moyens. L’enquête est toujours en cours, jusqu’à présent, nous n’avons pas encore d’éléments à mettre à la disposition du public. Mais nous pouvons vous assurer que cette enquête suit son cours. Je ne veux pas en dire davantage car je suis concerné. Les mécanismes nationaux ont été déclenchés et donc les résultats seront fournis au grand public quand ce sera nécessaire.
On note bien qu’après l’Accord de Ouagadougou, l’image de la Côte d’Ivoire s’est améliorée à l’extérieur. Quel est votre regard sur ce fait et pourquoi un prochain conseil des ministres conjoints Côte d’Ivoire - Burkina Faso ?
Je suis heureux de vous entendre le dire. C’est vrai, j’ai fait des sorties en Angleterre et dans d’autres pays. J’ai tout de suite noté que l’image de la Côte d’ Ivoire à l’extérieur s’est considérablement améliorée. Cela montre que l’Accord politique de Ouagadougou met tout le monde en harmonie sur la capacité des acteurs politiques ivoiriens, mais aussi sur celle du pays, donc sur son aptitude à surmonter les difficultés, à revenir sur la scène internationale. Et cela est à louer.
Lors d’une rencontre de l’Union africaine où j’y étais, des félicitations ont été adressées à la Côte d’Ivoire. Le modèle de règlement de la crise en Côte d’Ivoire est en passe d’être un cas d’école. Et nous serons heureux que dans les annales des Nations unies, on retienne qu’on peut régler une crise militaire de cette façon.
Concernant le conseil conjoint, l’Accord politique de Ouagadougou a eu pour corollaire le rapprochement entre les deux pays. Ce qui n’était pas le cas quelques années auparavant, où les rapports n’étaient pas au beau fixe. Donc l’effet induit de cet accord a été le rapprochement non seulement au niveau institutionnel mais au niveau de la population.
Le Président Gbagbo a été en visite d’Etat à Ouagadougou et a rencontré le Président burkinabé Blaise Compaoré. Il a fait une intervention devant l’Assemblée nationale du Burkina. Ce sont des signes qui montrent bien la volonté de bonne coopération entre les deux pays. Il y a eu une convention qui a été signée entre les deux pays instituant une conférence au sommet. D’où la tenue d’un conseil conjoint des ministres.
Le symbole à retenir, ici, est de bien montrer qu’au-delà des frontières, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire sont des pays voisins et frères. Et c’est cela la consécration qu’on a à la suite des accords de Ouagadougou. Il y a eu des actes que nous avons posés et dont les journaux n’en parlent pas assez, et qui me paraissent plus importants : la carte de séjour a été supprimée en Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, un citoyen burkinabé peut se promener en Côte d’Ivoire avec la carte de son pays ou la carte consulaire. Je me réjouis également qu’à l’enrôlement, on n’ait pas porté main à quelqu’un parce qu’il est venu habillé en boubou ou du fait de son patronyme ou des traits de son visage. Voilà les effets bénéfiques, positifs de l’accord. Et c’est cela qui gagnerait à être consolidé en mettant ensemble un mécanisme qui rapproche les deux Etats. Et le conseil conjoint veut être justement le lieu où nous allons partager les préoccupations qui, du fait de la proximité géographique, sont les mêmes. Nous allons passer en revue la coopération, les grands projets dans les deux pays et faire en sorte qu’on ait un marché économique commun. C’est cela l’avenir de l’Afrique. Qui réside dans le regroupement. Lequel doit partir et passer par des idéaux. Où des pays se retrouvent, créent des marchés, des projets communs, les développent et créent la richesse, le progrès pour leurs pays.
Le destin entre les peuples burkinabé et ivoirien est un fait de l’histoire. On constate cependant que 50 ans après, l’intégration reste dans les discours politiques qui ne sont pas nécessairement en phase avec la libre circulation des personnes et des biens. Avez-vous le sentiment que cette intégration est une sorte d’arlésienne depuis le temps qu’on en parle ?
A vous entendre, je note la pointe de pessimisme. Vous savez, on a l’exemple en Europe, de la France et de l’Allemagne. Ces deux pays ont été plusieurs fois ennemis ; aujourd’hui, ils sont le moteur de l’Union européenne. Il faut déjà concevoir l’intégration, de sorte que chaque pas que nous allons poser renforce l’idée de cette intégration. Qui n’est pas seulement l’affaire des dirigeants, mais aussi celle de toute la population.
L’un de nos ambassadeurs a fait une étude sur les mariages multiples en Côte d’Ivoire. Et celle-ci montre bien que l’intégration au niveau de la population est réelle. Il y a une interaction entre les peuples voisins et cela devrait constituer un modèle pour les dirigeants.
Je ne suis pas pessimiste. En Europe, l’intégration ne s’est pas construite en 50 ans. Donc, il faut être optimiste. L’intégration en Afrique est possible. Depuis 1963, on en parle au niveau du continent avec la création de l’organisation de l’Unité africaine pour susciter la prise de conscience des dirigeants africains à réaliser l’intégration. Maintenant ça suppose un certain nombre de critères et conditions notamment financières.
Je n’ai pas le même jugement que vous. A mon avis, l’intégration effectivement, se construit. Elle est peut-être lente, mais c’est pour s’entourer de toutes les précautions et garanties pour ne pas qu’elle soit mise en cause. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui nous ont amené à instituer au sein de nos gouvernements des ministères chargés de l’intégration africaine. Quand vous observez le plan de la région ouest-africaine, il y a des instruments dont la Bceao, l’Uemoa. Alors l’intégration est en marche. Et le fait qu’il y ait une conférence au sommet qui réunit les deux gouvernants, montre bien que ce n’est pas seulement de la phraséologie mais que dans le concret, nous sommes en train de prendre et poser des actes qui confortent cette intégration. Elle gagnerait à être renforcée et encouragée plutôt.
L’élection présidentielle du 29 novembre 2009 sera-t-elle possible ?
La date du 29 novembre est une date réaliste. Nous devons la tenir. Seulement, je ne suis pas un devin. Ne me demandez pas de vous dire ce qu’il en est. Ce que je puis dire, c’est qu’elle est effectivement réaliste. Car nous avons 6 mois pour établir une liste électorale définitive. Quand on a déjà enrôlé plus de 6 millions de personnes, je pense que la tâche qui reste est plus allégée que celle que nous avons accomplie. Si les acteurs y mettent de la bonne volonté, il n’y pas de raison, j’en suis convaincu, que les élections n’aient pas lieu à la date du 29 novembre. De toute façon, le gouvernement est conscient, la Commission électorale indépendante est consciente qu’il n’y aura pas de cadeau en ce qui concerne le 29 novembre. Nous ferons donc tout ce qu’il faut pour que l’élection se tienne à cette date précise.
Par contre, pour la date du 30 novembre 2008, je n’avais pas le même optimisme, parce que nous n’avions pas enrôlé 100 000 personnes et nous ne pouvions aller aux élections avec cette liste électorale de moins de 100 000 inscrits.
Aujourd’hui, je suis optimiste car nous avons enrôlé plus de 6 millions d’électeurs, et cela est un élément important pour aller aux élections.
Pour ce qui est du volet financier, la situation de trésorerie de l’Etat de Côte d’Ivoire s’est améliorée. Je n’ai pas dit que c’est l’abondance, mais il y a une nette amélioration par rapport aux années 2007 et 2008. Ce sont donc des garanties. Nous avons des moyens financiers et techniques (pour ce qui est de la liste électorale) pour faire les élections.
Que peut-on retenir, M. le Premier ministre, à l’issue de cet entretien ?
Nous avons fait un effort pour assurer la mise en œuvre de l’Accord politique de Ouagadougou. Car les signataires que nous sommes, sommes convaincus que c’est la seule voie pour sortir notre pays de la crise. Un accord aussi parfait soit-il, s’il n’est pas accompagné de la volonté politique de ceux qui l’ont paraphé, ne marche pas. En effet, on peut faire plusieurs interprétations de ces écrits (parlant des accords). Mais heureusement, dans le cadre de l’Accord politique de Ouagadougou, le Chef de l’Etat et moi-même avons pour atouts, cette volonté politique de nous surpasser et de faire en sorte d’appliquer et d’assurer la bonne mise en œuvre de ces accords.
Il est vrai qu’il y a encore des questions à parfaire. Mais ce que les Ivoiriens doivent retenir et qui est plus important, c’est que, personne ne viendra mettre ces accords en œuvre à notre place. Nous devons en toute responsabilité et dans l’intérêt de l’Etat de Côte d’Ivoire faire de sorte que l’Accord politique de Ouagadougou soit effectif pour aller à des élections démocratiques et transparentes.
Je veux des élections apaisées. Qu’on fasse mentir les pronostics pessimistes de tous ceux qui nous entourent en voyant dans ces élections l’occasion d’échauffourées.
Je dis qu’il n’y aura pas de violence dans ces élections parce que personne ne veut la violence, car nous avons souffert des conséquences de la violence dans notre pays. Nous voulons maintenant des élections apaisées. Nous ferons tout, en concertation avec la facilitation, pour que nous allions aux élections sans heurt. Ma responsabilité est de préparer un environnement apaisé et d’accalmie pour les échéances électorales. C’est aussi de préparer chaque étape dans la transparence et la limpidité et c’est ce que je fais. L’enrôlement est transparent et limpide. La liste électorale provisoire sera produite après un processus transparent et limpide. La liste électorale définitive sera produite après un processus électoral limpide. Les acteurs politiques eux-mêmes devront déclarer leur satisfaction quant au listing électoral définitif. Si nous faisons tout ceci dans la transparence et le consensus, nous sommes en train de déblayer le chemin pour des élections apaisées et tranquilles en Côte d’Ivoire. Après, il restera un autre effort à faire : ce sera la prise de conscience, le sursaut personnel que les uns et les autres devront avoir pour aller aux élections sans contestation. Parce que la liste est transparente, les élections le seront également pour que nous puisions retrouver ce havre de paix. Ce qui doit nous habiter, c’est de vendre la réconciliation aux Ivoiriens, c’est de vivre en paix. Et quand les institutions auront été renouvelées par le processus des urnes, je suis convaincu que la Côte d’Ivoire sera un grand pays en Afrique et dans le monde.
Propos recueillis par Paulin N. Zobo
Christian Dallet
Cissé Mamadou
Marc Yevou
coordination :
Agnès Kraidy