Un vaste réseau de fabrication d`extraits de naissance fictifs a été découvert à Bouaflé. Ces documents étaient destinés exclusivement aux pétitionnaires susceptibles d`apporter leurs suffrages au candidat Laurent Gbagbo.
Tout est parti d`un banal examen auquel les agents d`identification se sont amusés à soumettre les pétitionnaires du centre d`enrôlement d`Aka-N`guessankro, un bourg distant d`une vingtaine de kilomètres de Bouaflé. Pour la seule journée du mardi 3 juin, l`on découvre que quelque 50 pétitionnaires ignorent leur lieu de naissance. A la question de savoir : "Où es-tu né ?", ils ont tous répondu : "A Aka-N`guessankro". Alors que sur les documents qu`ils détiennent, il est inscrit "né à Koudougou". Devant le refus opposé par les agents à leur identification et enrôlement, les esprits s`échauffent. Le déroulement de l`opération est perturbé dans le centre d`Aka-N`guessankro. Acculés par les questions, certains demandeurs finissent par céder. Ils révèlent sans faux-fuyant que ce sont des responsables locaux du Front populaire ivoirien (Fpi) qui leur ont délivré « gratuitement » ces extraits de naissance.
Le contrôle qui a tout révélé
Ayant eu vent de cette affaire, nous approchons la Cei locale. Là, une source nous confirmera l`information. «C`est sur insistance de certains responsables du Fpi que l`ouverture du centre d`Aka N`guessankro a été autorisée pour la phase de ratissage. Ils ont soutenu avoir une liste de plus d`un millier de personnes dont 150 pour le seul village d`Aka-N`guessankro, possédant des extraits d`acte de naissance et n`ayant jusque-là pu se faire enrôler. Nous étions loin de nous imaginer qu`il s`agissait de faux documents », explique notre source à la Cei locale. Là-bas, depuis l`éclatement du scandale, les réunions se multiplient en vue d`adopter une conduite à tenir. Quoique n`ayant pas compétence pour authentifier un extrait d`acte de naissance, à la Commission électorale indépendante locale, des experts de l`Office national d`identification, joints par téléphone, acceptent de révéler les irrégularités constatées. La principale faute que comportent ces «faux extraits» porte sur les déclarations de naissance faites hors délai. Par exemple un pétitionnaire né en 1963 se présente avec un extrait qui montre qu`il a été déclaré pour la première fois en 1995. « L`état civil de Côte d`Ivoire délivre trois types d`extraits de naissance», relate notre interlocuteur, qui présente les deux cas qui concernent cette affaire. On délivre l`extrait d`acte de naissance lorsque la naissance est déclarée dans un délai maximum de trois mois. Cette déclaration se fait à la mairie, à la sous-préfecture ou dans un centre secondaire. Le centre secondaire de rattachement de Aka-N`guessankro par exemple est Pakpouabo et non Koudougou. Dans le deuxième cas, on délivre l`extrait d`acte de naissance lorsque la déclaration se fait après le délai de trois mois, c`est ce qu`on appelle un jugement hors délai ou jugement supplétif. En pareille situation, seule une ordonnance délivrée par un tribunal de première instance autorise l`officier d`état civil à délivrer un jugement supplétif. Et le numéro de l`ordonnance doit obligatoirement figurer sur le document.
Les preuves de la supercherie
Or, sur les documents trouvés sur les pétitionnaires de Aka-N`guessankro, le sous-préfet s`est contenté de signer sachant bien qu`aucun numéro d`ordonnance n`existe. (Ndlr : voir fac similé). «Ce sont autant d`éléments qui nous amène à douter de l`impartialité du sous-préfet dans la supervision des opérations d`identification », poursuit notre expert qui a requis l`anonymat. Les évènements d`Aka-N`guessakro révèleront plus tard que ce sont au total une douzaine de centres d`enrôlement de la sous-préfecture de Bouaflé qui ont enregistré ces extraits de naissance fictifs. Une opération savamment orchestrée donc pour faire passer le faux pour du vrai. Les bénéficiaires n`ont eu à fournir aucun effort pour obtenir leurs documents. Des rabatteurs les auraient recensés, avec la ferme promesse que leur extrait de naissance viendrait les trouver à domicile. « C`est dans la suite logique de l`opération Inondation initiée par le Fpi », nous apprend l`un des détenteurs des faux documents à Guézanoufla. Autre anomalie relevée, c`est le fait que certains extraits d`acte de naissance aient été saisis à l`ordinateur alors que la sous-préfecture de Bouaflé n`en dispose pas encore. A Kouassi-Périta, le chef du village, Nanan Kouakou Koffi Lazare, n`a pu retenir sa colère. Il a bruyamment interpellé le sous-préfet, Bossé Zogbré, en milieu de semaine dernière lui demandant de dire clairement aux villageois la provenance desdits extraits de naissance. Sur une centaine de ces documents délivrés dans le village, il est indiqué que le pétitionnaire est « né à Blè », un amalgame que le chef du village juge «grave». Dans cette sous-préfecture, des agents de l`état civil nous indiqueront que ce sont plus de 1.000 extraits de naissance de ce type que le sous-préfet a sciemment signés. Le comble, poursuivent ces agents, « tous les numéros de registre attribués à ces documents sont faux. Les détenteurs pourront certes se faire enrôler avec, avoir leurs cartes d`électeur et d`identité, mais, ils ne pourront jamais se faire reproduire ces extraits, car leurs traces n`existent dans aucun registre », relève une dame. D`autres sources avancent le chiffre de 628 extraits signés. Mais, sur le terrain, les agents d`identification confirment plutôt le nombre de 1.000. Face à ce scandale, la Cei joue la carte de la prudence. La commission locale de supervision de l`identification, elle, est embarrassée. Interrogé jeudi sur l`authenticité desdits documents, le sous-préfet s`est refusé à tout commentaire. « Je n`ai rien à vous dire sur cette affaire. J`attends que la Sagem me saisisse », s`est-il contenté de nous lancer laconiquement et visiblement agacé. De Guézanoufla à Bouafla, en passant par Aka-N`guessankro, les chefs de villages et même les populations sont très remontés contre le sous-préfet. Pour eux, le représentant de l`autorité s`est rendu complice d`une magouille qui porte préjudice à leurs enfants. Les agents d`identification ayant participé à la première phase de l`enrôlement avancent qu`à part les localités de Toh et du Yaourè-Nord, ces faux documents étaient également rejetés dans tous les centres.
La colère des chefs de villages
«Conséquence, durant les derniers jours de la première phase de l`enrôlement, nous n`enregistrons que 5 à 10 pétitionnaires au plus par jour. Nous avions cru que pour cette phase de rattrapage, les demandeurs étaient surtout issus de la reconstitution des registres de l`état civil. D`où vient donc ce flot d`extraits de naissance ? », s`interrogent-ils. Des membres de la commission locale de supervision de l`identification attendent des explications de leur président sur ce scandale. Une réunion décisive est annoncée dans les heures à venir.
Notons qu`à Bouaflé, la prolongation de la date limite des opérations d`enrôlement au 30 juin a été accueillie avec joie par les populations. La plupart ayant pris part à l`opération de reconstitution des registres de l`état civil n`ont pas encore reçu l`attestation du plumitif devant permettre de se faire enrôler. Il y a aussi ceux qui attendent que l`Office national d`identification leur achemine les copies des extraits de naissance qui leur ont permis de se faire établir en son temps, les cartes d`identité vertes. Des indiscrétions nous indiquent que l`Oni a débuté le tirage des photocopies desdits extraits à Bouaflé depuis seulement le 3 juin.
Inza D. Kader Correspondant régional
Tout est parti d`un banal examen auquel les agents d`identification se sont amusés à soumettre les pétitionnaires du centre d`enrôlement d`Aka-N`guessankro, un bourg distant d`une vingtaine de kilomètres de Bouaflé. Pour la seule journée du mardi 3 juin, l`on découvre que quelque 50 pétitionnaires ignorent leur lieu de naissance. A la question de savoir : "Où es-tu né ?", ils ont tous répondu : "A Aka-N`guessankro". Alors que sur les documents qu`ils détiennent, il est inscrit "né à Koudougou". Devant le refus opposé par les agents à leur identification et enrôlement, les esprits s`échauffent. Le déroulement de l`opération est perturbé dans le centre d`Aka-N`guessankro. Acculés par les questions, certains demandeurs finissent par céder. Ils révèlent sans faux-fuyant que ce sont des responsables locaux du Front populaire ivoirien (Fpi) qui leur ont délivré « gratuitement » ces extraits de naissance.
Le contrôle qui a tout révélé
Ayant eu vent de cette affaire, nous approchons la Cei locale. Là, une source nous confirmera l`information. «C`est sur insistance de certains responsables du Fpi que l`ouverture du centre d`Aka N`guessankro a été autorisée pour la phase de ratissage. Ils ont soutenu avoir une liste de plus d`un millier de personnes dont 150 pour le seul village d`Aka-N`guessankro, possédant des extraits d`acte de naissance et n`ayant jusque-là pu se faire enrôler. Nous étions loin de nous imaginer qu`il s`agissait de faux documents », explique notre source à la Cei locale. Là-bas, depuis l`éclatement du scandale, les réunions se multiplient en vue d`adopter une conduite à tenir. Quoique n`ayant pas compétence pour authentifier un extrait d`acte de naissance, à la Commission électorale indépendante locale, des experts de l`Office national d`identification, joints par téléphone, acceptent de révéler les irrégularités constatées. La principale faute que comportent ces «faux extraits» porte sur les déclarations de naissance faites hors délai. Par exemple un pétitionnaire né en 1963 se présente avec un extrait qui montre qu`il a été déclaré pour la première fois en 1995. « L`état civil de Côte d`Ivoire délivre trois types d`extraits de naissance», relate notre interlocuteur, qui présente les deux cas qui concernent cette affaire. On délivre l`extrait d`acte de naissance lorsque la naissance est déclarée dans un délai maximum de trois mois. Cette déclaration se fait à la mairie, à la sous-préfecture ou dans un centre secondaire. Le centre secondaire de rattachement de Aka-N`guessankro par exemple est Pakpouabo et non Koudougou. Dans le deuxième cas, on délivre l`extrait d`acte de naissance lorsque la déclaration se fait après le délai de trois mois, c`est ce qu`on appelle un jugement hors délai ou jugement supplétif. En pareille situation, seule une ordonnance délivrée par un tribunal de première instance autorise l`officier d`état civil à délivrer un jugement supplétif. Et le numéro de l`ordonnance doit obligatoirement figurer sur le document.
Les preuves de la supercherie
Or, sur les documents trouvés sur les pétitionnaires de Aka-N`guessankro, le sous-préfet s`est contenté de signer sachant bien qu`aucun numéro d`ordonnance n`existe. (Ndlr : voir fac similé). «Ce sont autant d`éléments qui nous amène à douter de l`impartialité du sous-préfet dans la supervision des opérations d`identification », poursuit notre expert qui a requis l`anonymat. Les évènements d`Aka-N`guessakro révèleront plus tard que ce sont au total une douzaine de centres d`enrôlement de la sous-préfecture de Bouaflé qui ont enregistré ces extraits de naissance fictifs. Une opération savamment orchestrée donc pour faire passer le faux pour du vrai. Les bénéficiaires n`ont eu à fournir aucun effort pour obtenir leurs documents. Des rabatteurs les auraient recensés, avec la ferme promesse que leur extrait de naissance viendrait les trouver à domicile. « C`est dans la suite logique de l`opération Inondation initiée par le Fpi », nous apprend l`un des détenteurs des faux documents à Guézanoufla. Autre anomalie relevée, c`est le fait que certains extraits d`acte de naissance aient été saisis à l`ordinateur alors que la sous-préfecture de Bouaflé n`en dispose pas encore. A Kouassi-Périta, le chef du village, Nanan Kouakou Koffi Lazare, n`a pu retenir sa colère. Il a bruyamment interpellé le sous-préfet, Bossé Zogbré, en milieu de semaine dernière lui demandant de dire clairement aux villageois la provenance desdits extraits de naissance. Sur une centaine de ces documents délivrés dans le village, il est indiqué que le pétitionnaire est « né à Blè », un amalgame que le chef du village juge «grave». Dans cette sous-préfecture, des agents de l`état civil nous indiqueront que ce sont plus de 1.000 extraits de naissance de ce type que le sous-préfet a sciemment signés. Le comble, poursuivent ces agents, « tous les numéros de registre attribués à ces documents sont faux. Les détenteurs pourront certes se faire enrôler avec, avoir leurs cartes d`électeur et d`identité, mais, ils ne pourront jamais se faire reproduire ces extraits, car leurs traces n`existent dans aucun registre », relève une dame. D`autres sources avancent le chiffre de 628 extraits signés. Mais, sur le terrain, les agents d`identification confirment plutôt le nombre de 1.000. Face à ce scandale, la Cei joue la carte de la prudence. La commission locale de supervision de l`identification, elle, est embarrassée. Interrogé jeudi sur l`authenticité desdits documents, le sous-préfet s`est refusé à tout commentaire. « Je n`ai rien à vous dire sur cette affaire. J`attends que la Sagem me saisisse », s`est-il contenté de nous lancer laconiquement et visiblement agacé. De Guézanoufla à Bouafla, en passant par Aka-N`guessankro, les chefs de villages et même les populations sont très remontés contre le sous-préfet. Pour eux, le représentant de l`autorité s`est rendu complice d`une magouille qui porte préjudice à leurs enfants. Les agents d`identification ayant participé à la première phase de l`enrôlement avancent qu`à part les localités de Toh et du Yaourè-Nord, ces faux documents étaient également rejetés dans tous les centres.
La colère des chefs de villages
«Conséquence, durant les derniers jours de la première phase de l`enrôlement, nous n`enregistrons que 5 à 10 pétitionnaires au plus par jour. Nous avions cru que pour cette phase de rattrapage, les demandeurs étaient surtout issus de la reconstitution des registres de l`état civil. D`où vient donc ce flot d`extraits de naissance ? », s`interrogent-ils. Des membres de la commission locale de supervision de l`identification attendent des explications de leur président sur ce scandale. Une réunion décisive est annoncée dans les heures à venir.
Notons qu`à Bouaflé, la prolongation de la date limite des opérations d`enrôlement au 30 juin a été accueillie avec joie par les populations. La plupart ayant pris part à l`opération de reconstitution des registres de l`état civil n`ont pas encore reçu l`attestation du plumitif devant permettre de se faire enrôler. Il y a aussi ceux qui attendent que l`Office national d`identification leur achemine les copies des extraits de naissance qui leur ont permis de se faire établir en son temps, les cartes d`identité vertes. Des indiscrétions nous indiquent que l`Oni a débuté le tirage des photocopies desdits extraits à Bouaflé depuis seulement le 3 juin.
Inza D. Kader Correspondant régional