Ils ont entre 8 et 13 ans. Et déjà à cet âge ils sont commerçants. Une activité bien dangereuse quand on sait les risques qu`ils courent : Les accidents, les disparitions, sans oublier les pédophiles à l`affût.
«Tantie il y a lotus. Tantie fais-moi plaisir en achetant mon lotus », crie une fillette d`à peine 9 ans. Vêtue d`une robe sale, dont on devine difficilement la couleur, un foulard noué sur la tête, Diabaté Fatou vend du papier « kleenex » sur le boulevard Latrille, non loin du super marché Sococé. A la voir appeler les clients, il est difficile de résister à sa marchandise. On est tenté d`en acheter même quand on n`en a pas besoin. Chaque fois qu`une voiture s`arrête au feu tricolore, Fatou et d`autres gamines de son âge vont proposer les kleenex aux occupants. Ce 22 juin, un véhicule 4x4 s`est arrêté au feu. Le conducteur a baissé la vitre. Au volant, on aperçoit un homme. Les fillettes s`empressent pour lui tendre leurs articles. «Tonton, c`est moi qui suis arrivée la première », crie l`une d`elles. «Tonton elle ment, je suis arrivée avant elle. Et puis je vends du bon lotus», argumente la petite Fatou. L`automobiliste avec un large sourire veut engager la conversation mais le feu passe au vert. Il démarre en trombe après avoir jeté une pièce d`argent vers les fillettes. Chacune se bat pour être la première à la prendre. Awa réussit à s`emparer de la pièce de 200 Fcfa. Mais, elle est prête à la partager avec ses camarades. Chaque jour, Fatou se lève très tôt à Abobo pour rejoindre à pied son lieu de commerce aux II Plateaux en passant par le zoo. Avant de venir elle n`oublie pas de faire sa prière. Comme Fatou, la plupart des mineurs qui se faufilent à longueur de journée entre les véhicules ont entre 8 et 13 ans. Elles commencent très jeunes à accomplir des tâches réservées aux grandes personnes. « Je vends pour ma mère, chaque jour, elle me remet 1000 Fcfa pour l`achat d`un paquet de lotus. Je revends ensuite le paquet au détail », explique la fillette dans un français approximatif. La petite fille soutient qu`elle peut faire un gain de 500Fcfa par jour. Un commerce certes rentable mais combien pénible pour un enfant de cet âge ? Lorsque vous arrivez au corridor de Yopougon-Gesco vous êtes frappé par la multitude d`enfants qui y vendent. Alimatou vend des fruits, particulièrement des pommes. Ce matin, habillée d`un pantalon et une chemise pagne, elle court dans les deux sens du corridor avec ses pommes ; elle ne veut pas rater une seule occasion de vente. La vive allure à laquelle les cars de transport et les voitures personnelles roulent ne la décourage pas. « Je dois finir de vendre le maximum de pommes avant la tombée de la nuit », nous dit-elle. Assise près d`un kiosque à café, Elise, vendeuse de pain surveille de temps à autre les enfants. « Les cas d`accidents sont fréquents ici », nous informe-t-elle. Selon elle, un enfant a frôlé la mort il y a quelques mois « Une voiture a marché sur son pied, c`était difficile tant elle souffrait », regrette-t-elle. Il semble que ces scènes sont récurrentes sur les boulevards et autoroutes. Le 7 août 2004 à 9h, Mlle Coulibaly Aminata, vendeuse d`eau glacée au corridor de Gesco 2, avait été fauchée et tuée par les balles tirées de la Kalachinov AK 47 du soldat Zohé Valery. Avec elle, cinq autres personnes ont reçu des projectiles de la même arme. Certes, les autres victimes ont eu la vie sauve, mais elles garderont encore longtemps le souvenir douloureux de cette journée. Selon la version qui, conduit à l`arrestation de Zohé Valery, ce dernier tentait de rattraper un voyageur qui s`était soulagé à un endroit où il était interdit d`uriner. Refusant de payer la somme de 5.000 F qui représentait l`amende infligée aux contrevenants, il s`était mis à fuir avec à ses trousses le militaire. C`est dans sa course que Zohé aurait lâché les rafales qui n`ont pas atteint le fuyard mais plutôt Coulibaly Aminata. A la barre, le prévenu a soutenu autre chose. Selon lui, les coups sont partis accidentellement. « Certes je courrais après l`individu, mais je n`ai pas levé mon arme pour tirer ». Finalement, il a été condamné pour coups et blessures involontaires et il a écopé de 3ans d`emprisonnement et 100.000 Fcfa d`amende. Un autre cas d`accident a été constaté à Cocody, il y a quelques mois. Ibrahim Konaté, un garçon de 11 ans, s`est retrouvé avec un pied cassé : il a été renversé par un taxi urbain appelé communément « wôrô-wôrô ». Les garçons de son âge vont à l`école, Lui, il vend de l`eau glacée aux passants. Venu d`Odienné, Ibrahim, selon les souhaits de son père, doit devenir un chauffeur de camion remorque. En attendant l`âge de passer le permis de conduire, le garçon a été initié au commerce. « De l`eau formée, glacée », c`est ce qu`on entend constamment sur ses lèvres chaque jour sur son passage. Ces enfants sans défense sont des proies faciles pour les pédophiles.
Même si certaines personnes s`accordent à dire qu`elles n`ont pas encore enregistré des cas, des attitudes suspectes sont signalées chaque jour. Qu`est-ce qui est arrivé au petit Rodrigue au corridor de Gesco, au point où il refuse désormais d`obéir à sa mère ? Seul l`avenir nous le dira. Selon sa mère, Rodrigue est devenu orphelin à l`âge de 13 ans. Par manque de moyens financiers et ne pouvant pas subvenir à ses frais scolaires, elle décide de le retirer de l`école. C`est ainsi que le garçon s`est reconverti en commerçant de « bon maïs ». Chaque jour, il sillonne cette grande voie de l`autoroute du Nord avec sa marchandise. « Depuis l`an dernier, il y avait un monsieur dans une belle voiture qui venait acheter près de la moitié du bon maïs de mon fils », relate la mère, (elle-même vendeuse de pain). Au fil du temps une confiance s`est installée entre le monsieur et la petite famille. « Souvent il venait chercher mon fils et revenait avec lui les bras chargés de cadeaux. Rodrigue le prenait comme un père. En janvier dernier, il est venu le chercher. Au bout d`une heure de temps il est revenu avec lui, il m`a dit que mon fils est très impoli, qu`il avait décidé de nous aider, mais que Rodrigue s`est mal comporté », a-t-il dit. Le monsieur a promis de réfléchir et de revenir donner une réponse à la mère. Et il n`est jamais revenu. Depuis ce temps le garçon refuse d`accomplir sa tâche habituelle, c`est-à-dire vendre son bon maïs. « Il préfère s`asseoir, regarder les passants et ne rien faire. Cette situation me révolte et je menace chaque fois de l`envoyer au village, mais rien ne semble le décider », se plaint la mère. Notre tentative pour comprendre un tel revirement de comportement a été vaine. Rodrigue est muré dans un silence effrayant. Les parents de ces «enfants commerçants» énoncent toujours le manque de moyens financiers. Ce 24 juin, en partance pour Adiopodoumé, lorsque notre véhicule a stationné pour un contrôle de police, nous avons remarqué une petite fille vendant du «pain sucré » auprès de sa mère. Elle s`est empressée de proposer sa marchandise. «Pain sucré, il y a du pain sucré. Ma tantie, mon tonton il y a du bon pain sucré », ne cessait-elle de crier. Habillée d`un tricot vert à l`effigie de Didier Drogba elle semble heureuse d`échanger avec les voyageurs. Elle s`appelle Bintou. Elle est née à Dabou en 1999. En 2006 ses parents l`ont inscrite au Cp1.
En 2007 c`est le de Cp2. Après un redoublement de cette classe, son père a jugé qu`elle n`est pas faite pour les études. Il décide qu`elle apprenne la couture. Elle fut donc confiée à un cousin de la famille couturier au « quartier Maroc » (Yopougon). Un jour, par inadvertance, elle a brulé le pagne d`une cliente avec un fer à repasser. Le cousin qui visiblement n`était pas content de sa venue l`a répudiée. C`est ainsi qu`elle s`est retrouvée chez une tante à la « Siporex ». Elle est depuis lors vendeuse de pain sucré au corridor du Km 17. La tante de Bintou soutient que tous les enfants ne sont pas doués pour l`école. « Bintou est faite pour le commerce. Depuis qu`elle a laissé la couture, et qu`elle vend avec moi le pain finit toujours », relate-t-elle. Levée très tôt les matins, la fillette explique qu`elle fait la vaisselle avant de prendre la route du km 17. A midi, elle marque une petite pause juste le temps de manger de l`attiéké. Selon elle, elle dépense en moyenne 200 Fcfa pour le plat de midi. A la question de savoir pourquoi sa nièce travaille Abiba travaille si jeune, la tante se défend en ces termes : « C`est dès le bas âge qu`on éduque les enfants. Si on ne l`habitue pas à vendre à cet âge elle deviendra paresseuse ». Et la voisine d`enfoncer le clou : « Les gens pensent qu`on maltraite les enfants. C`est dans leur propre intérêt. Il y a des voyageurs qui viennent se plaindre ici, mais nous leur disons que chacun est libre de donner l`éducation qu`il veut à son enfant. » Un passager qui n`avait pas de pièce d`identité prolonge notre arrêt à ce corridor. Nous suivons le manège des enfants vendeurs. Un garçon de 13 ans vend des jus de « Tampico ». Il vient vers nous : « Tampico formé, glacé, c`est 100 Fcfa seulement ». On décide d`en acheter et profiter pour engager la causerie. Il s`appelle Adrien, nous dit-il. Il semble ne pas préférer notre compagnie et s`occupe de sa vente. Une glacière accrochée à l`épaule, il tient dans sa main un échantillon de tampico. Une Mercédès stationne à son niveau, l`occupante, une femme paye un sachet. Nous nous approchons d`eux. Elle démarre la voiture tous en projetant une fumée noire sur nous. Adrien s`éloigne aussi en essayant de souffler cette fumée, à l`aide de ses mains. Aussitôt, une autre voiture qui venait dans le sens de Dabou-Abidjan est sifflée par un agent de police en faction. Le conducteur gare la voiture. « Messieurs et dames vos pièces », entend-on. Le vendeur de tampico s`approche. Le couple dans la voiture a soif. Adrien s`empresse de les servir. Le conducteur, fermier à Dabou, ne voit pas d`inconvénient à se faire servir par le petit gars. « S`ils ne vont pas à l`école, c`est mieux qu`ils fassent quelque chose que de devenir des voyous », se défend-il.
Soro Sita (Stagiaire)
«Tantie il y a lotus. Tantie fais-moi plaisir en achetant mon lotus », crie une fillette d`à peine 9 ans. Vêtue d`une robe sale, dont on devine difficilement la couleur, un foulard noué sur la tête, Diabaté Fatou vend du papier « kleenex » sur le boulevard Latrille, non loin du super marché Sococé. A la voir appeler les clients, il est difficile de résister à sa marchandise. On est tenté d`en acheter même quand on n`en a pas besoin. Chaque fois qu`une voiture s`arrête au feu tricolore, Fatou et d`autres gamines de son âge vont proposer les kleenex aux occupants. Ce 22 juin, un véhicule 4x4 s`est arrêté au feu. Le conducteur a baissé la vitre. Au volant, on aperçoit un homme. Les fillettes s`empressent pour lui tendre leurs articles. «Tonton, c`est moi qui suis arrivée la première », crie l`une d`elles. «Tonton elle ment, je suis arrivée avant elle. Et puis je vends du bon lotus», argumente la petite Fatou. L`automobiliste avec un large sourire veut engager la conversation mais le feu passe au vert. Il démarre en trombe après avoir jeté une pièce d`argent vers les fillettes. Chacune se bat pour être la première à la prendre. Awa réussit à s`emparer de la pièce de 200 Fcfa. Mais, elle est prête à la partager avec ses camarades. Chaque jour, Fatou se lève très tôt à Abobo pour rejoindre à pied son lieu de commerce aux II Plateaux en passant par le zoo. Avant de venir elle n`oublie pas de faire sa prière. Comme Fatou, la plupart des mineurs qui se faufilent à longueur de journée entre les véhicules ont entre 8 et 13 ans. Elles commencent très jeunes à accomplir des tâches réservées aux grandes personnes. « Je vends pour ma mère, chaque jour, elle me remet 1000 Fcfa pour l`achat d`un paquet de lotus. Je revends ensuite le paquet au détail », explique la fillette dans un français approximatif. La petite fille soutient qu`elle peut faire un gain de 500Fcfa par jour. Un commerce certes rentable mais combien pénible pour un enfant de cet âge ? Lorsque vous arrivez au corridor de Yopougon-Gesco vous êtes frappé par la multitude d`enfants qui y vendent. Alimatou vend des fruits, particulièrement des pommes. Ce matin, habillée d`un pantalon et une chemise pagne, elle court dans les deux sens du corridor avec ses pommes ; elle ne veut pas rater une seule occasion de vente. La vive allure à laquelle les cars de transport et les voitures personnelles roulent ne la décourage pas. « Je dois finir de vendre le maximum de pommes avant la tombée de la nuit », nous dit-elle. Assise près d`un kiosque à café, Elise, vendeuse de pain surveille de temps à autre les enfants. « Les cas d`accidents sont fréquents ici », nous informe-t-elle. Selon elle, un enfant a frôlé la mort il y a quelques mois « Une voiture a marché sur son pied, c`était difficile tant elle souffrait », regrette-t-elle. Il semble que ces scènes sont récurrentes sur les boulevards et autoroutes. Le 7 août 2004 à 9h, Mlle Coulibaly Aminata, vendeuse d`eau glacée au corridor de Gesco 2, avait été fauchée et tuée par les balles tirées de la Kalachinov AK 47 du soldat Zohé Valery. Avec elle, cinq autres personnes ont reçu des projectiles de la même arme. Certes, les autres victimes ont eu la vie sauve, mais elles garderont encore longtemps le souvenir douloureux de cette journée. Selon la version qui, conduit à l`arrestation de Zohé Valery, ce dernier tentait de rattraper un voyageur qui s`était soulagé à un endroit où il était interdit d`uriner. Refusant de payer la somme de 5.000 F qui représentait l`amende infligée aux contrevenants, il s`était mis à fuir avec à ses trousses le militaire. C`est dans sa course que Zohé aurait lâché les rafales qui n`ont pas atteint le fuyard mais plutôt Coulibaly Aminata. A la barre, le prévenu a soutenu autre chose. Selon lui, les coups sont partis accidentellement. « Certes je courrais après l`individu, mais je n`ai pas levé mon arme pour tirer ». Finalement, il a été condamné pour coups et blessures involontaires et il a écopé de 3ans d`emprisonnement et 100.000 Fcfa d`amende. Un autre cas d`accident a été constaté à Cocody, il y a quelques mois. Ibrahim Konaté, un garçon de 11 ans, s`est retrouvé avec un pied cassé : il a été renversé par un taxi urbain appelé communément « wôrô-wôrô ». Les garçons de son âge vont à l`école, Lui, il vend de l`eau glacée aux passants. Venu d`Odienné, Ibrahim, selon les souhaits de son père, doit devenir un chauffeur de camion remorque. En attendant l`âge de passer le permis de conduire, le garçon a été initié au commerce. « De l`eau formée, glacée », c`est ce qu`on entend constamment sur ses lèvres chaque jour sur son passage. Ces enfants sans défense sont des proies faciles pour les pédophiles.
Même si certaines personnes s`accordent à dire qu`elles n`ont pas encore enregistré des cas, des attitudes suspectes sont signalées chaque jour. Qu`est-ce qui est arrivé au petit Rodrigue au corridor de Gesco, au point où il refuse désormais d`obéir à sa mère ? Seul l`avenir nous le dira. Selon sa mère, Rodrigue est devenu orphelin à l`âge de 13 ans. Par manque de moyens financiers et ne pouvant pas subvenir à ses frais scolaires, elle décide de le retirer de l`école. C`est ainsi que le garçon s`est reconverti en commerçant de « bon maïs ». Chaque jour, il sillonne cette grande voie de l`autoroute du Nord avec sa marchandise. « Depuis l`an dernier, il y avait un monsieur dans une belle voiture qui venait acheter près de la moitié du bon maïs de mon fils », relate la mère, (elle-même vendeuse de pain). Au fil du temps une confiance s`est installée entre le monsieur et la petite famille. « Souvent il venait chercher mon fils et revenait avec lui les bras chargés de cadeaux. Rodrigue le prenait comme un père. En janvier dernier, il est venu le chercher. Au bout d`une heure de temps il est revenu avec lui, il m`a dit que mon fils est très impoli, qu`il avait décidé de nous aider, mais que Rodrigue s`est mal comporté », a-t-il dit. Le monsieur a promis de réfléchir et de revenir donner une réponse à la mère. Et il n`est jamais revenu. Depuis ce temps le garçon refuse d`accomplir sa tâche habituelle, c`est-à-dire vendre son bon maïs. « Il préfère s`asseoir, regarder les passants et ne rien faire. Cette situation me révolte et je menace chaque fois de l`envoyer au village, mais rien ne semble le décider », se plaint la mère. Notre tentative pour comprendre un tel revirement de comportement a été vaine. Rodrigue est muré dans un silence effrayant. Les parents de ces «enfants commerçants» énoncent toujours le manque de moyens financiers. Ce 24 juin, en partance pour Adiopodoumé, lorsque notre véhicule a stationné pour un contrôle de police, nous avons remarqué une petite fille vendant du «pain sucré » auprès de sa mère. Elle s`est empressée de proposer sa marchandise. «Pain sucré, il y a du pain sucré. Ma tantie, mon tonton il y a du bon pain sucré », ne cessait-elle de crier. Habillée d`un tricot vert à l`effigie de Didier Drogba elle semble heureuse d`échanger avec les voyageurs. Elle s`appelle Bintou. Elle est née à Dabou en 1999. En 2006 ses parents l`ont inscrite au Cp1.
En 2007 c`est le de Cp2. Après un redoublement de cette classe, son père a jugé qu`elle n`est pas faite pour les études. Il décide qu`elle apprenne la couture. Elle fut donc confiée à un cousin de la famille couturier au « quartier Maroc » (Yopougon). Un jour, par inadvertance, elle a brulé le pagne d`une cliente avec un fer à repasser. Le cousin qui visiblement n`était pas content de sa venue l`a répudiée. C`est ainsi qu`elle s`est retrouvée chez une tante à la « Siporex ». Elle est depuis lors vendeuse de pain sucré au corridor du Km 17. La tante de Bintou soutient que tous les enfants ne sont pas doués pour l`école. « Bintou est faite pour le commerce. Depuis qu`elle a laissé la couture, et qu`elle vend avec moi le pain finit toujours », relate-t-elle. Levée très tôt les matins, la fillette explique qu`elle fait la vaisselle avant de prendre la route du km 17. A midi, elle marque une petite pause juste le temps de manger de l`attiéké. Selon elle, elle dépense en moyenne 200 Fcfa pour le plat de midi. A la question de savoir pourquoi sa nièce travaille Abiba travaille si jeune, la tante se défend en ces termes : « C`est dès le bas âge qu`on éduque les enfants. Si on ne l`habitue pas à vendre à cet âge elle deviendra paresseuse ». Et la voisine d`enfoncer le clou : « Les gens pensent qu`on maltraite les enfants. C`est dans leur propre intérêt. Il y a des voyageurs qui viennent se plaindre ici, mais nous leur disons que chacun est libre de donner l`éducation qu`il veut à son enfant. » Un passager qui n`avait pas de pièce d`identité prolonge notre arrêt à ce corridor. Nous suivons le manège des enfants vendeurs. Un garçon de 13 ans vend des jus de « Tampico ». Il vient vers nous : « Tampico formé, glacé, c`est 100 Fcfa seulement ». On décide d`en acheter et profiter pour engager la causerie. Il s`appelle Adrien, nous dit-il. Il semble ne pas préférer notre compagnie et s`occupe de sa vente. Une glacière accrochée à l`épaule, il tient dans sa main un échantillon de tampico. Une Mercédès stationne à son niveau, l`occupante, une femme paye un sachet. Nous nous approchons d`eux. Elle démarre la voiture tous en projetant une fumée noire sur nous. Adrien s`éloigne aussi en essayant de souffler cette fumée, à l`aide de ses mains. Aussitôt, une autre voiture qui venait dans le sens de Dabou-Abidjan est sifflée par un agent de police en faction. Le conducteur gare la voiture. « Messieurs et dames vos pièces », entend-on. Le vendeur de tampico s`approche. Le couple dans la voiture a soif. Adrien s`empresse de les servir. Le conducteur, fermier à Dabou, ne voit pas d`inconvénient à se faire servir par le petit gars. « S`ils ne vont pas à l`école, c`est mieux qu`ils fassent quelque chose que de devenir des voyous », se défend-il.
Soro Sita (Stagiaire)