Les négociations sur les nouveaux arrangements avec les pays ACP ont débuté en 2002 à Bruxelles. L’Accord de Cotonou a déjà défini les principaux points qui devront être négociés. Toutefois, de nombreux détails doivent encore être examinés et clarifiés. Pour l’Afrique de l’Ouest, une série d'études est en cours sur les implications des négociations et les configurations possibles de ce processus. Les années passent et l’Accord de partenariat n’est toujours pas signé.
L’Afrique de l’Ouest et l’Union européenne (UE) vont-ils un jour s’accorder pour signer l’Accord de partenariat économique (APE) qui va désormais régir leur coopération commerciale ? C’est sur cette interrogation que 12 journalistes ouest-africains spécialistes des APE ont échangé au cours d’un séminaire qui s’est tenu à leur intention, du 24 au 26 juin dernier, à Saly Portudal, au Sénégal. Thème : “Atelier régional sur les négociations de l’APE entre la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) et l’UE”.
En effet, faut-il le rappeler, depuis 2000, les relations commerciales basées sur les Accords de Lomé ont cédé la place à l’Accord de Cotonou qui prévoit une période préparatoire de 7 ans au cours de laquelle ont lieu les négociations. Mais, au 31 décembre 2007, l’accord n’a pu être signé. Pour demeurer dans la roue de la négociation, la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao tenue en janvier 2008 a confié une mission technique aux deux commissions de la Cedeao et de l’Uemoa : élaborer un cadre régional d’un APE porteur de développement, traiter les questions du tarif extérieur commun en suspens, accompagner et encadrer la Côte d’Ivoire et le Ghana qui ont signé un APE intérimaire afin de sécuriser leurs recettes d’exportation. A la fin de leur mission, lors de la réunion du comité ministériel de suivi de Nouakchott de février 2008, lesdites commissions ont proposé à la Cedeao de signer l’APE en juin 2009.
A l’échéance, l’APE n’est toujours pas signé.
Les raisons du blocage
Dans une communication fort enrichissante, le directeur du Commerce extérieur du Sénégal, Dr. Cheikh Saadbouh Seck, a indiqué que les négociations achoppent sur plusieurs points.
Sur l’offre d’accès au marché, la Cedeao propose une libéralisation de 60% de son commerce sur une période de 25 ans là où l’UE souhaite une libéralisation à hauteur de 80% sur une période de 15 ans calquée sur l’accord global signé avec les Caraïbes. D’autre part, l’offre européenne reste muette sur la réforme de ses politiques sectorielles concernant les produits concurrents, de même que sur les obstacles non-tarifaires et autres obstacles à la pénétration du marché européen, tels que les normes sanitaires et phytosanitaires et autres obstacles techniques. Par ailleurs, la Cedeao souhaite voir l’UE prendre des engagements dans l’APE pour réduire les mesures susceptibles de créer des distorsions sur les échanges.
Au sujet des prélèvements communautaires dans l’Uemoa et la Cedeao, l’UE demande leur suppression alors que ces prélèvements (PCS pour l’Uemoa et PC pour la Cedeao), perçus ad valorem sur toutes les importations des deux organisations, sont aujourd’hui les uniques taxes communautaires qui assurent à elles seules, selon Dr Seck, l’essentiel des coûts de fonctionnement des institutions régionales.
Un autre point de divergence porte sur l’introduction en 2007 par l’UE dans les négociations de la clause de la nation la plus favorisée. Cette clause veut que chaque partie s’engage à s’octroyer tout traitement plus favorable résultant d’accords d’intégration économique futurs conclus avec toute partie tierce pour l’UE ou avec tout partenaire commercial majeur pour la Cedeao.
Pour ce qui est du financement du programme de l’APE pour le développement (PAPED) évalué à 9,5 milliards d’euros sur cinq ans, l’UE soutient qu’elle ne dispose d’aucun mécanisme pouvant générer des ressources pour financer le programme en dehors des procédures et dispositifs de l’accord de Cotonou. A l’opposé, pour la Cedeao, l’accord de Cotonou ne peut nullement prendre en charge ses préoccupations et souhaite un engagement clair de l’UE sur le PAPED. C’est-à-dire que la Cedeao pose comme préalable non négociable un accord sur le financement du PAPED à travers un mécanisme opérationnel et durable.
D’autres projets sont également en discussion. Notamment le commerce des services pour lequel la Cedeao propose une clause de rendez-vous de 3 ans alors que l’UE souhaite une alternative à la clause du rendez-vous. Toutefois, toujours selon Dr Seck, des avancées ont été constatées qui portent, principalement, sur la flexibilité pour la mise en place du tarif extérieur commun de la Cedeao jusqu’en décembre 2011, l’accord de principe pour un traitement approprié de la dimension développement dans le texte de l’accord régional, la négociation d’un système de règles d’origine unique pour l’ensemble de la région et qui s’appliquerait également aux accords intérimaires de la Côte d’Ivoire et du Ghana. On note également que la Cedeao accepte de ne pas introduire de nouveaux droits à l’exportation et de geler ceux existants, tout en gardant dans des circonstances exceptionnelles justifiées, la possibilité d’introduire de manière temporaire des taxes sur un nombre limité de marchandises. Sur le délai de transition du principe de la libre circulation des marchandises et la libre pratique, un compromis semble se dégager pour une transition de 5 ans à compter de la date d’entrée en vigueur de l’accord. La Cedeao demandait une période de transition.
Tout compte fait, la réunion des deux parties qui s’est tenue à Bruxelles le 17 juin dernier, laisse la porte à la poursuite des négociations en deux phases. Une première phase intensive pour s’accorder en octobre 2009 sur un APE régional couvrant le commerce des marchandises, la coopération au développement liée à l’APE et certains domaines liés au commerce. Et une seconde phase qui engage les deux parties au plus tard en janvier 2010, visant à élargir les négociations afin de couvrir les autres domaines qui viendront compléter l’APE régional.
J-S Lia Envoyé spécial à Dakar
L’Afrique de l’Ouest et l’Union européenne (UE) vont-ils un jour s’accorder pour signer l’Accord de partenariat économique (APE) qui va désormais régir leur coopération commerciale ? C’est sur cette interrogation que 12 journalistes ouest-africains spécialistes des APE ont échangé au cours d’un séminaire qui s’est tenu à leur intention, du 24 au 26 juin dernier, à Saly Portudal, au Sénégal. Thème : “Atelier régional sur les négociations de l’APE entre la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) et l’UE”.
En effet, faut-il le rappeler, depuis 2000, les relations commerciales basées sur les Accords de Lomé ont cédé la place à l’Accord de Cotonou qui prévoit une période préparatoire de 7 ans au cours de laquelle ont lieu les négociations. Mais, au 31 décembre 2007, l’accord n’a pu être signé. Pour demeurer dans la roue de la négociation, la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la Cedeao tenue en janvier 2008 a confié une mission technique aux deux commissions de la Cedeao et de l’Uemoa : élaborer un cadre régional d’un APE porteur de développement, traiter les questions du tarif extérieur commun en suspens, accompagner et encadrer la Côte d’Ivoire et le Ghana qui ont signé un APE intérimaire afin de sécuriser leurs recettes d’exportation. A la fin de leur mission, lors de la réunion du comité ministériel de suivi de Nouakchott de février 2008, lesdites commissions ont proposé à la Cedeao de signer l’APE en juin 2009.
A l’échéance, l’APE n’est toujours pas signé.
Les raisons du blocage
Dans une communication fort enrichissante, le directeur du Commerce extérieur du Sénégal, Dr. Cheikh Saadbouh Seck, a indiqué que les négociations achoppent sur plusieurs points.
Sur l’offre d’accès au marché, la Cedeao propose une libéralisation de 60% de son commerce sur une période de 25 ans là où l’UE souhaite une libéralisation à hauteur de 80% sur une période de 15 ans calquée sur l’accord global signé avec les Caraïbes. D’autre part, l’offre européenne reste muette sur la réforme de ses politiques sectorielles concernant les produits concurrents, de même que sur les obstacles non-tarifaires et autres obstacles à la pénétration du marché européen, tels que les normes sanitaires et phytosanitaires et autres obstacles techniques. Par ailleurs, la Cedeao souhaite voir l’UE prendre des engagements dans l’APE pour réduire les mesures susceptibles de créer des distorsions sur les échanges.
Au sujet des prélèvements communautaires dans l’Uemoa et la Cedeao, l’UE demande leur suppression alors que ces prélèvements (PCS pour l’Uemoa et PC pour la Cedeao), perçus ad valorem sur toutes les importations des deux organisations, sont aujourd’hui les uniques taxes communautaires qui assurent à elles seules, selon Dr Seck, l’essentiel des coûts de fonctionnement des institutions régionales.
Un autre point de divergence porte sur l’introduction en 2007 par l’UE dans les négociations de la clause de la nation la plus favorisée. Cette clause veut que chaque partie s’engage à s’octroyer tout traitement plus favorable résultant d’accords d’intégration économique futurs conclus avec toute partie tierce pour l’UE ou avec tout partenaire commercial majeur pour la Cedeao.
Pour ce qui est du financement du programme de l’APE pour le développement (PAPED) évalué à 9,5 milliards d’euros sur cinq ans, l’UE soutient qu’elle ne dispose d’aucun mécanisme pouvant générer des ressources pour financer le programme en dehors des procédures et dispositifs de l’accord de Cotonou. A l’opposé, pour la Cedeao, l’accord de Cotonou ne peut nullement prendre en charge ses préoccupations et souhaite un engagement clair de l’UE sur le PAPED. C’est-à-dire que la Cedeao pose comme préalable non négociable un accord sur le financement du PAPED à travers un mécanisme opérationnel et durable.
D’autres projets sont également en discussion. Notamment le commerce des services pour lequel la Cedeao propose une clause de rendez-vous de 3 ans alors que l’UE souhaite une alternative à la clause du rendez-vous. Toutefois, toujours selon Dr Seck, des avancées ont été constatées qui portent, principalement, sur la flexibilité pour la mise en place du tarif extérieur commun de la Cedeao jusqu’en décembre 2011, l’accord de principe pour un traitement approprié de la dimension développement dans le texte de l’accord régional, la négociation d’un système de règles d’origine unique pour l’ensemble de la région et qui s’appliquerait également aux accords intérimaires de la Côte d’Ivoire et du Ghana. On note également que la Cedeao accepte de ne pas introduire de nouveaux droits à l’exportation et de geler ceux existants, tout en gardant dans des circonstances exceptionnelles justifiées, la possibilité d’introduire de manière temporaire des taxes sur un nombre limité de marchandises. Sur le délai de transition du principe de la libre circulation des marchandises et la libre pratique, un compromis semble se dégager pour une transition de 5 ans à compter de la date d’entrée en vigueur de l’accord. La Cedeao demandait une période de transition.
Tout compte fait, la réunion des deux parties qui s’est tenue à Bruxelles le 17 juin dernier, laisse la porte à la poursuite des négociations en deux phases. Une première phase intensive pour s’accorder en octobre 2009 sur un APE régional couvrant le commerce des marchandises, la coopération au développement liée à l’APE et certains domaines liés au commerce. Et une seconde phase qui engage les deux parties au plus tard en janvier 2010, visant à élargir les négociations afin de couvrir les autres domaines qui viendront compléter l’APE régional.
J-S Lia Envoyé spécial à Dakar