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Politique Publié le samedi 4 juillet 2009 | Le Nouveau Réveil

Débat sur la prorogation ou non de l`enrôlement/Me Ahoussou Kouadio Jeannot (Membre du BP du Pdci-Rda) répond au Fpi : “Gbagbo a envie de se maintenir au pouvoir vaille que vaille comme un roi nègre”

Me Ahoussou Kouadio Jeannot, membre du Bureau politique du Pdci-Rda, membre de la délégation de son parti à la dernière réunion du Cpc à Ouagadougou, crache, dans cette interview, ses vérités au Fpi qui veut encore retarder le processus de sortie de crise.
Monsieur le ministre, on croyait le débat de la fin de l'enrôlement réglée lors de la dernière réunion du Cpc le 18 mai à Ouagadougou. Réunion à laquelle vous avez pris part. Aujourd'hui, après le 30 juin, ce débat ressurgit de plus belle. Quel est votre avis sur le sujet ?
Je suis vraiment désolé de constater que cette question d'identification pour avoir une carte nationale d'identité et de l'enrôlement pour les élections ressurgisse sur un fond de mauvaise foi. En effet, il y a deux opérations qui sont couplées. L'identification pour avoir la carte nationale d'identité, est un processus continu, perpétuel. N'eût été le coup d'Etat de 1999 les cartes d'identité vertes seraient actuellement en vigueur. Tout le monde était en possession de sa carte d'identité verte. Malheureusement, depuis le coup d'Etat, ce processus d'identification des Ivoiriens a été arrêté. Un autre processus à l'avènement du Président Gbagbo a été lancé avec (paix à son âme) le ministre Boga Doudou. En 2002, ce processus a été arrêté par la guerre. Nous avons adopté d'une manière consensuelle et avec la communauté internationale ce nouveau processus d'identification et d'enrôlement pour les élections. J'interviendrai essentiellement sur la question de l'enrôlement pour les élections. C'est ce débat politique qui rend malsaine cette question de l'enrôlement pour les élections. En effet, quand je lis à gauche et à droite, dans la presse partout que certaines personnes, parmi elles des présidents d'Institutions, demandent que ce processus continue jusqu'à ce que tous les Ivoiriens qui progressivement, au fur à mesure, atteignent l'âge de la majorité puissent être enrôlés, alors je dis que ça sera un processus sans fin. On n'ira jamais aux élections. Dans ce cas, qu'on dise qu'il faut changer la Constitution, qu'il faut suspendre la Constitution, qu'il faut supprimer la Constitution pour proclamer le Président Laurent Gbagbo, roi de Côte d'Ivoire. Ça sera plus simple !

Pour vous, c'est parce que ceux-là ne veulent pas aller aux élections qu'ils posent le problème en ces termes ?
Tous les refondateurs n'ont pas envie de perdre leurs avantages matériels. Regardez comment ils sont devenus tous ronds, gros, repus. Ils n'ont pas envie de perdre ces avantages matériels, c'est pour cela qu'ils utilisent des subterfuges, des arguties pour ne pas aller aux élections. Quand on sait que le vote en Côte d'Ivoire n'est pas obligatoire, on a beau enrôler dix millions de personnes, on peut se retrouver avec 2 millions de votants. Donc, il faut arrêter le processus pour aller aux élections le 29 novembre 2009. Si le vote était obligatoire, alors, on pouvait dire qu'on a privé certains Ivoiriens dans l'absolu de leur droit de voter. Depuis le 15 septembre 2008, le processus de l'enrôlement a été lancé. Ça a commencé à Abidjan le 29 septembre 2008. Si nous comptons les mois, cela fait 9 mois, c'est-à-dire qu'on a eu le temps de concevoir et voir un bébé naître. On l'a conçu, il faut que nous voyions ce bébé naître avec la fin de l'enrôlement pour que nous puissions aller aux élections afin que la Côte d'Ivoire revienne à la normalité. On devient ridicule aux yeux de la communauté internationale. Et puis, on devient même méchant quand vous voyez l'état de délabrement où se trouve le pays, l'état de chute perpétuelle, vertigineuse dans laquelle se trouve la Côte d'Ivoire. Cela n'émeut personne. Je pense qu'il faille arrêter l'enrôlement pour aller aux élections. Celui qui aura gagné, aura gagné et tous les Ivoiriens vont le suivre. On l'a vu au Ghana. Le parti du Président Rawlings a perdu les élections. Son parti est revenu apès au pouvoir. Kuffor a perdu la dernière élection. Mais, en grand démocrate, alors que la différence de voix était très faible, il a appelé à reconnaître la victoire du Président Atta Mills. Le Ghana ne peut que bien se porter. Alors qu'on arrête d'angoisser les Ivoiriens. Qu'on arrête de faire de la Côte d'Ivoire, terre d'espérance, une terre d'angoisse, une terre de désordre.

N'est-ce pas les velléités de contestation des élections futures qui sont en train d'être posées ? Parce que tout le monde savait que l'enrôlement prenait fin le 30 juin ?
Si vous regardez Fraternité Matin du jeudi 02 juillet 2009, regardez le visage de la plupart des personnes interviewées sur la question de l'arrêt du processus d'enrôlement. Ceux qui ne veulent pas de la fin de ce processus sont ceux qui ont le visage radieux. Un visage qui témoigne de l'embonpoint. C'est eux qui préparent les esprits d'abord à la contestation de la liste électorale. C'est par là qu'ils vont commencer. Ensuite, quand on aura fini avec cette première contestation, nous allons aller aux élections. Mais croyez-vous qu'en Côte d'Ivoire, on peut déclarer que Laurent Gbagbo a perdu sans qu'il y ait des troubles ? Si Gbagbo perd, il y aura des troubles. C'est ce qui fait peur à certaines personnes, qui ne manquent pas de dire, " oui, il faut soutenir Gbagbo parce qu'il est capable de violence ". Mais, il appartient à Laurent Gbagbo et à son parti de prouver le contraire pour l'amour de la Côte d'Ivoire.

Des gens qui travaillent avec lui?
Des gens qui travaillent avec lui, mais aussi des gens qui sont dans nos partis du Rhdp. Ces gens-là, le jour, arborent des cravates du Pdci, du Rdr ou de l'Udpci et la nuit, ils s'en vont souper à la résidence du Président Gbagbo. Ce sont en fait des politiciens clandestins qui agissent dans les ténèbres. Mais, je peux leur dire une chose : nous avons vu les Mobutu, régner, faire ce qu'ils avaient envie de faire. Ils sont partis. Nous avons vu des Idi Amin Dada. Oui, nous avons vu ici en Afrique, les Sékou Touré, régner en Guinée. Ils sont partis. Alors qu'on arrête ce jeu-là. Tout pouvoir a une fin. Il faut que la fin du règne de Gbagbo soit pacifique, contrairement à son avènement au pouvoir qui s'est fait dans le sang.

Vous voulez dire que Laurent Gbagbo fait partie de la lignée de ces dictateurs africains ?
Mais son mandat est expiré depuis 2005. Il est encore au pouvoir. Comment appelle-t-on cela ? Démocratie ou dictature ?

Vous êtes juriste, il dit que c'est par les dispositions de la Constitution qu'il est encore au pouvoir.
Il ne faut pas être ridicule. Il ne faut pas être rigolo. Lorsque le Conseil constitutionnel présidé par M. Yanon Yapo, rend une décision qui date de septembre 2005 ou bien d'octobre 2005 qui dit que " Le processus électoral commencé en 2005 a été interrompu par la crise. Et que compte tenu de cela, le Président Gbagbo doit se maintenir au pouvoir jusqu'à ce que la crise prenne fin. C'est vraiment ridicule ! Depuis septembre 2005, ça fait bientôt 5 ans. C'est un processus électoral qui est ainsi enclenché depuis 5 ans. Mais mon Dieu, quel est ce processus ? Même dans les grandes démocraties comme les Etats-Unis, l'Inde avec leurs populations, la crise ne dure pas autant. Moi, je dis que le Président Gbagbo a envie de se maintenir au pouvoir vaille que vaille contre les textes. D'ailleurs, nous assistons tous complices, passivement complices à cette imposture. Nous contribuons au maintien du Président Gbagbo au pouvoir.

Qu'est-ce que vous devez faire ?
Si les Ivoiriens sont assommés et totalement abêtis par la refondation, ils n'ont qu'à s'en prendre à eux-mêmes. Je pense que l'idiot un jour au moins se réveille. Et le jour où il est réveillé, il ne connaît plus la raison. Vous savez la colère de l'idiot, elle est sans borne. Un jour arrivera où le peuple abêti va se réveiller, alors on verra la colère sans borne de ce peuple abêti.

Justement, avec ce discours du genre, il faut encore proroger l'enrôlement. Est-ce qu'on ne va pas perturber le calendrier électoral du 29 novembre une fois encore ?
Je pense que le Secrétaire général du Pdci, Alphonse Djédjé Mady, a bien répondu. Il a dit : " Il faut bien que ce processus s'arrête et qu'on aille aux élections ". On a décidé au dernier Cpc que c'était juin. Ça a été le 30 juin 2009. Des personnes ne sont pas venues se faire enrôler pour diverses raisons. Quand on voit l'opération inondation avec de faux extraits d'actes de naissance, de faux jugements qui envahissent la Côte d'Ivoire, les refondateurs veulent qu'on retarde le processus pour qu'ils puissent inonder le processus davantage. Malheureusement, leur inondation va être comme le carrefour de l'Indénié pour le Fpi. Ils vont s'embourber comme on s'embourbe aujourd'hui dans le carrefour de l'Indenié qui est le symbole de l'échec du Fpi dans la gestion de la Côte d'Ivoire

Donc aujourd'hui, la position du Pdci, la position que vous défendez, qui est proche de celle du Secrétaire général, c'est qu'il faut mettre un terme à cette opération et passer à autre chose ?
Dire que je défends une position, c'est peu dire. C'est une évidence. Il faut le bon sens. Le vote n'étant pas obligatoire, vous avez beau enrôler dix millions de personnes, c'est peut être 1,5 million de personnes qui vont aller voter.

Aujourd'hui on parle de 6.300.000 enrôlés… ?
A l'élection de 2000, il y a eu combien de votants ? Il y a eu à peine 1.300.000 votants. En 2000 Gbagbo a eu 800.000 voix, Guéi a eu 400.000 voix environ, selon le deuxième résultat donné par Honoré Guié. Donc Gbagbo a été élu par 825.000 Ivoiriens sur 5.200.000 personnes inscrites.

Vous voulez dire que c'est une légitimité étriquée ?
Mais lui-même le dit, qu'il a été mal élu. Il n'y a pas de vérité aussi belle que l'aveu de celui qui a été mal élu. Je dis donc que 6.000.000 et plus de personnes, ça suffit. On avait 5.200.000 personnes en 2000, on est à 6.500.000 en 2009, donc 1 million d'électeurs en plus. Allons aux élections. Partout dans le monde, même aux Etats-Unis, tout élection est sujette à critique. Aux Etats-Unis, on l'a vu, c'est suite à des pointages que le Président Bush a été élu. On connaîtra donc des contestations. Mais j'en appelle à la raison des uns et des autres. Que celui qui aura gagné et celui qui aura perdu puissent se tendre la main pour que la cohésion nationale ivoirienne renaisse.

Le Fpi raisonne comme si toutes ces personnes qui ne sont pas enrôlées étaient ses militants.
Ce sont des militants par la fraude du FPI. C'est-à-dire que c'est tous leurs militants qui ont bénéficié des faux extraits de naissance. Ces extraits ont inondé toute la Côte d'Ivoire. Vous en avez trouvé à Akoupé. J'ai fait déposer même une plainte ce jour (Ndlr : jeudi dernier) auprès du Procureur de la République d'Adzopé pour qu'on enquête là-dessus. A Aboisso, à Bonoua, partout il y a de faux extraits de naissance du Fpi qui circulent. Surtout dans les anciennes zones acquises au FPI

Est-ce une plainte au nom du Pdci que vous avez déposée ?
C'est bien une plainte au nom du Pdci. Tout citoyen qui a constaté l'existence de ces faux extraits peut aussi saisir le procureur.

Le nom du ministre de l'Intérieur revient souvent dans cette affaire. Il est présenté comme étant l'instigateur de toute cette fraude.
C'est ce que la presse fait ressortir. Le ministre de l'Intérieur n'est qu'un élément du Fpi. Donc c'est le Fpi et ses dirigeants officiels qui ont parlé d'inondation et qui ont envoyé leurs délégués dans toutes les régions pour aller prendre les copies des extraits de naissance de nos parents dans les campagnes. Sous prétexte de distribution gratuite de timbres. Ils ont pris les noms et la filiation totale des personnes pour aller confectionner d'autres faux extraits. Ceux qui ont commis l'erreur de leur remettre leurs papiers, parce qu'ils espéraient bénéficier de timbre gratuit, risquent de se voir naître à nouveau ailleurs dans d'autres endroits de la Côte d'Ivoire avec leur même filiation. Ça a été leur tactique, c'est ça l'opération inondation. Donc le ministre de l'Intérieur n'est qu'un élément du système. Sinon c'est une procédure conçue, réfléchie dans le laboratoire du Fpi. Ce sont des spécialistes du faux. Ils peuvent vous égorger en vous faisant croire qu'ils sont en train de faire votre bonheur.

Cette manipulation de l'Etat civil est quand même un acte à des fins politiciennes. N'est-ce pas que tout cela est dangereux pour la citoyenneté ?
Ce n'est pas une question de manipulation. Je dis que c'est la destruction de l'Etat civil qu'ils sont en train d'opérer comme ils sont en train de détruire l'Etat de Côte d'Ivoire. Ils ont détruit l'école, ils ont détruit les forces de sécurité : la police. Ils ont aussi détruit la justice par des nominations fantaisistes. Ils ont contribué à la corruption de toutes les institutions, à la pollution des Ivoiriens, à l'empoisonnement mental des Ivoiriens par le mensonge, les calomnies, les montages grossiers et grotesques. Ils en ont fait de même avec l'administration. Ils ont tout détruit et il ne reste plus que l'Etat civil. C'est ce qu'on appelle la refondation. Il faut tout détruire. Le vocable refondation est un concept de destruction en Côte d'Ivoire

Interview réalisée par
Diarrassouba Sory
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