Le président de la Commission Electorale Indépendante (Cei), Robert Beugré Mambé, était l'invité de la rédaction de Onuci-Fm samedi dernier. Il s'est prononcé sur l'opération d'identification et d'enrôlement des élections qui s'est achevée le 30 juin dernier. Et sur les autres étapes qui vont suivre pour aboutir à la confection de la liste électorale. Pour Mambé, une prorogation de l'identification n'est pas envisageable pour l'heure.
M. le président, l'opération d'identification et d'enrôlement des électeurs a pris fin le 30 juin dernier. Est-ce que son déroulement vous satisfait ?
(…) Le délai qui était imparti était fixé au 30 juin comme vous avez pu le constater lors du communiqué final de la réunion du Cadre permanent de concertation de l'Accord politique de Ouagadougou. Nous nous sommes attelé à travailler avec toute la ferveur nécessaire dans une telle opération. Nous avons structuré nos interventions en relation avec le ministère des Finances pour avoir les moyens nécessaires pour réaliser cette dernière opération. Nous avons déployé nos équipes sur le terrain, consolidé certaines qui y étaient déjà. Et envoyé à l'étranger tous nos frères et sœurs des différentes structures (Cni, Cnsi, Ins, Sagem et tous ceux qui sont partie prenante dans l'opération). Nous les avons tous déployés à l'extérieur. Et à la date du 30 juin, l'opération a pris fin. Cela conformément aux recommandations du Cadre permanent de concertation de l'Accord politique de ouagadougou. C'est ce que je peux dire à nos frères et sœurs ivoiriens. Je voudrais saisir l'opportunité de la fin de l'opération pour remercier au nom de toutes les structures qui ont travaillé, le Chef de l'Etat, le premier ministre, le ministre de l'Economie et des finances, tous les ministres, les bailleurs de fonds, les différents pays amis de la Côte d'Ivoire, les chefs de village, les agents d'enrôlement, les forces de sécurité et tous ceux qui se sont mobilisés pour nous aider à finaliser cette opération. Je voudrais, au nom de tous, leur exprimer notre profonde gratitude.
Alors, il n'y aura pas de prorogation cette fois ?
Non, ça ne fait pas partie de notre feuille de route. La feuille de route que nous avons retenue au terme de la réunion de Ouagadougou, c'est le 30 juin. La prorogation, pour l'instant, il n'en est pas question. Parce qu'il faut bien qu'on s'arrête un jour.
On nous parle de plus de 4 millions d'Ivoiriens qui ont été laissés sur la touche. A leur niveau, qu'est-ce qu'on peut dire ?
Je voudrais sincèrement féliciter les Ivoiriens, leur dire merci. Parce que nous avons senti un engouement extraordinaire pour cette opération. En toute chose, il faut avoir la mémoire de l'histoire. Nous avons commencé le 15 septembre 2008 à Abidjan dans des conditions extrêmement difficiles. Nous n'avons pas toujours parlé, nous ne voulions même pas parler. L'essentiel pour nous, c'était d'enregistrer les Ivoiriens, de leur donner leur carte nationale d'identité et leur permettre d'aller aux élections. Au plus profond de nous-même, nous avons souffert terriblement des grèves, des incompréhensions, des menaces, de toutes sortes, de difficultés. Mais, nous sommes presque resté stoïque parce qu'il fallait sortir ce pays de l'impasse dans laquelle nous nous trouvions tous, en faisant en sorte que les Ivoiriens soient enrôlés. Donc, on a accepté les incompréhensions, certains jugements erronés. L'essentiel, c'est qu'il fallait quelqu'un pour porter la croix. Nous l'avons portée. Pour que la Côte d'Ivoire finisse cette opération, nous avons accepté cela. Je crois qu'aujourd'hui, on peut rendre gloire à Dieu de ce que cette opération ait abouti.
Président, si on vous demandait de dresser un bilan, quels chiffres provisoires pourriez-vous avancer. Il y a eu combien de personnes enrôlées tant à l'interieur qu'à l'extérieur de la Côte d'Ivoire ?
Je vous félicite d'avoir employé le mot provisoire. Il faut que les auditeurs qui nous écoutent retiennent que c'est provisoire. Les chiffres consolidés définitivement seront communiqués. Et je m'emploierai à faire une conférence de presse technique pour leur communiquer les chiffres définitifs. Mais pour l'instant, retenons qu'à l'extérieur de la Côte d'Ivoire, après l'opération que nous venons de réaliser, nous avons près de 38.000 Ivoiriens enregistrés. On attendait 72.000. Nous sommes allés au-delà des 50% des Ivoiriens de l'étranger. Mais 38.000 se sont présentés pour se faire enrôler. A Abidjan, pendant les 7 derniers jours, nous avons enregistré plus de 25.000 Ivoiriens et personnes étrangères hors Cedeao. En consolidant ces chiffres avec ceux que nous avons réussi à avoir pour l'instant à l'intérieur du pays, nous sommes à près de 6.500.000 personnes enregistrées. Voici les chiffres provisoires d'enregistrés. Ce qu'il faut retenir, c'est que d'abord la population cible calculée a été identifiée sur la base de paramètres statistiques d'une Côte d'Ivoire qui était dans une situation normale. Or, les paramètres ont bougé entre-temps. Mais comme on ne les avait pas, on a fait une projection avec les paramètres d'une Côte d'Ivoire qui roulait normalement. Donc déjà au niveau des paramètres, nous avions des réserves. Deuxièmement, il faut retenir que beaucoup n'ont pas pu avoir leurs papiers. La preuve, c'est que l'opération de reconstitution des registres a permis d'enregistrer près de 270.000 personnes qui se sont présentées pour avoir des extraits d'acte de naissance dans le futur. Pour l'instant, ce sont les attestations du plumitif qui ont été données. Donc beaucoup d'Ivoiriens n'avaient pas de documents pour se faire enrôler.
Troisièment, c'est une opération volontaire. A l'époque, pour faire le recensement général de la population qui permettait de faire d'autres déductions statistiques, on passait de maison en maison. Cette fois, c'est un acte volontaire qui exigeait que chaque Ivoiriens se présente à l'enrôlement. Si quelqu'un ne veut pas aller se faire identifier, c'est son droit. Mais je pense que tous les Ivoiriens qui pouvaient aller le faire sont partis. Voilà un peu le contexte dans lequel nous avons évolué. Il faut avouer que 75% de la population cible enregistrée, ce n'est pas un mauvais score.
Ça vous satisfait les 75% ?
L'idéal aurait été d'aller au-delà de 90%. Mais 75%, ce n'est déjà pas mal quand on sait dans quel contexte nous sommes actuellement et dans quel contexte se trouvent les Ivoiriens au regard des difficultés qu'ils ont eues à un moment donné pour avoir leurs papiers.
Des voix s'élèvent, des voix des partis politiques. Ce sont eux les plus concernés parce que cela va nous conduire à des élections si on sort une liste électorale. Devant toutes ces réactions, quelle sera l'attitude de la Cei ?
D'abord, je voudrais féliciter les partis politiques, la société civile ivoirienne et nos frères et sœurs ivoiriens qui ont manifesté un engouement extraordinaire pour cette opération. Je voudrais aussi féliciter les partis politiques et les cadres parce que dans certaines régions, à un moment donné, ils ont dû s'impliquer dans la mobilité de nos équipes et dans les conditions de travail de nos agents, notamment dans les villages. Je voudrais féliciter les chefs de village pour tout ce qu'ils ont fait. Chacun a donné le maximum qu'il pouvait. On ne pouvait pas demander cela continuellement aux Ivoiriens. Le ministère des Finances a fait de gros efforts. En toute chose, il faut optimiser ses moyens. Je pense que toutes les personnalités, toutes les structures qui sont intervenues nous ont soutenu. Nos ambassadeurs à l'étranger nous ont soutenu. Chacun a donné le maximum. On ne peut pas demander que continuellement ces efforts soient maintenus à un certain niveau. Les journalistes devraient nous aider à rappeler aux Ivoiriens qu'on a eu plusieurs prorogations. C'est pour dire qu'on a donné le maximum de chance aux Ivoiriens. Je comprends certaines voix qui s'élèvent parce qu'il y a encore des Ivoiriens à enrôler. Mais la fin de l'opération actuelle n'est pas la fin de l'identification. Après celle-ci, l'Oni va continuer dans le cycle normal de l'identification pour permettre aux Ivoiriens d'avoir leur carte nationale d'identité. C'est une opération là interrompue qui va continuer sans problème.
Après cette étape, quelle autre étape à la liste électorale ?
Après cette étape, dès le mois de juillet, nous allons commencer les traitements informatiques pour mettre en évidence les erreurs techniques, faire des rapprochements, voir si on a bien écrit les noms, si les instruments qui ont été utilisés pour l'enregistrement ont bien fonctionné. C'est le travail technique. Ensuite, nous allons faire les croisements pour mettre en évidence la qualité des documents présentés à l'enrôlement. Sur ce point, nous serons exigeants et intransigeants. Ça, c'est le travail technique qui va durer au maximum six semaines.
Deuxième phase, la phase du contentieux. Nous allons, le moment venu, avoir des émissions dans la presse pour expliquer aux Ivoiriens ce que c'est que le contentieux.
Profitez-en
Le contentieux, une fois qu'on a affiché la liste provisoire après le traitement informatique, il est permis aux Ivoiriens d'aller regarder si leur nom est bien écrit. Si vous constatez par exemple que quelqu'un qui a perdu son droit de vote se trouve sur la liste provisoire, vous indiquez que cette personne a perdu son droit de vote avec les arguments à l'appui. Attention, si vous faites de faux témoignages, la loi peut se retourner contre vous. Ensuite, il faut voir les problèmes de nationalité. C'est cela la phase du contentieux. Mais cela doit se passer dans la paix et la fraternité. Nous sommes-là pour la vérité, pour faire éclore la vérité… La phase du contentieux doit durer, maximum, un mois et plus 8 jours. Parce que quand le juge est saisi du dernier dossier, il a 8 jours pour le traiter.
Pouvez-vous rassurer que toute vérité est acceptable ? N'y a-t-il pas de vérité qui gène?
La vérité ne se fabrique pas. La vérité est l'émanation de faits qui sont intangibles. Les faits, dans cette matière, s'appuient sur des accords, des documents, sur la structure de l'administration ivoirienne. On connaît tout cela. Donc, on ne peut pas la fabriquer, la vérité s'impose. Nous demandons simplement aux Ivoiriens de vérifier ces listes qui seront affichées dans les lieux d'enrôlement, dans les lieux de naissance et qui seront mises à la disposition de tous les partis politiques et de tous ceux qui voudront demander. Si l'impression de la liste a un coût, la personne qui demande va supporter ce coût. Si c'est un CD, on pourra le donner sans problème. Jusqu'à un certain nombre. Si ça commence à compter, on va demander que tous ceux qui sollicitent cette liste puissent contribuer d'une manière ou d'une autre. On verra le mécanisme, mais surtout on envisage de publier sur internet.
On fait le compte avec vous. Vous avez parlé de six semaines et, après, d'un mois et demi. Cela veut dire qu'on peut espérer que cette date du 29 novembre sera tenue ?
On est dans le temps. On sera dans le temps du 29 novembre. On a conscience, vous savez, des potentialités économiques énormes de ce pays. On ne peut que souhaiter aller aux élections pour que tous ceux qui seront élus travaillent dans des conditions sereines pour que la Côte d'Ivoire donne la chance à ses enfants d'être des hommes et des femmes de valeur demain pour réaliser avec toutes les autres nations et collaborer avec les nations du monde. Les élections sont un passage obligé.
Pour y arriver, il y a certainement des garde-fous à mettre en place. La Cei est chargée de l'organisation des élections. Sur la question de la sécurisation, quelle est votre idée pour que les élections soient sécurisées ?
Le ministre de la Défense était dans nos locaux. Il nous a fait l'amitié de nous rendre visite. Nous avons passé en revue les mécanismes de sécurisation, les points de détails où nous attendons la sécurisation par les Forces de défense et de sécurité et par la communauté internationale. Il y a quelques mois, M. Choi lui-même, le représentant spécial du secrétaire général de l'Onu, est venu ici pour nous présenter le plan de sécurisation préparé par les forces Onusiennes avec l'appui des autres forces impartiales qui sont sur le territoire. Depuis quelque temps, vous voyez toute la dynamique qui entoure la mise en route du Centre de commandement intégré. Tout cela montre que chacun a pris conscience qu'il faut aller aux élections dans un espace sécurisé. Nous nous attelons à mettre cela en évidence. Le gouvernement et tous les partenaires s'attellent à réaliser, à cristalliser cette volonté d'aller aux élections dans des conditions apaisées. Il faut demander aux Ivoiriens de prendre conscience que les élections, ce n'est plus la guerre, c'est le choix paisible.
Alors, tous les candidats peuvent aller battre campagne partout ?
C'est cela qui est prévu, sinon on ne peut pas avoir des élections crédibles. Il faut que tout le monde aille battre campagne partout, en toute sécurité, mais dans la fraternité. J'insiste, dans la fraternité. Qu'est-ce qu'il y a de plus beau que la fraternité ? Je n'en vois pas. Le sommet de la fraternité, c'est l'amour et la charité. C'est cela que les Ivoiriens doivent avoir comme richesse.
Il faut des équipements pour aller au vote : les urnes, les isoloirs et tout autre équipement pour le scrutin. Est-ce que vous êtes prêt à la Cei ?
Je voudrais dire que par la grâce de Dieu, par la qualité des rapports que la Côte d'Ivoire a avec les bailleurs de fonds, ces derniers ont tout acheté. Les urnes ont déjà été achetées. Nous avons presque 25.000 urnes transparentes. Les isoloirs ont été achetés, il y en a plus de 50.000. Nous avons des ordinateurs qui ont été achetés. Nous avons les kits qui sont dans les bureaux de vote avec les crayons, les gommes. Tout a été déjà acheté, tout est en place. Nous avons même des groupes électrogènes que nous allons mettre dans 68 départements. Et nous sommes en négociation pour renforcer ce dispositif avec des pays amis. De ce point de vue, je peux rassurer les Ivoiriens, on n'est pas mal lotis. Bien au contraire.
On espère qu'on aura le premier tour de l'élection présidentielle le 29 novembre. Est-ce que vous êtes préparé à régler les contentieux après le scrutin ?
Il y a un mécanisme opératoire de règlement des contentieux qui est décrit dans le code électoral. Il y a un mécanisme opératoire qui est décrit dans les différents décrets d'application. Il y a un mécanisme opératoire qui est décrit dans les textes connexes. Il ne s'agira que de les appliquer et de faire en sorte que les Ivoiriens aillent aux élections la paix dans le cœur et dans l'esprit. La paix est un état d'esprit qui conduit à un comportement et à des actions paisibles. C'est surtout cela. Donc, je voudrais demander aux Ivoiriens d'aller aux élections l'esprit apaisé. C'est cela l'essentiel.
Alors le dernier mot vous revient. Qu'est-ce que vous pourrez dire aux Ivoiriens pour que tout le monde puisse partager l'optimisme que vous avez ?
Je voudrais remercier les Ivoiriens pour l'engouement qu'ils ont manifesté lors de cette opération qui vient de s'achever. Je voudrais les en féliciter. C'est une œuvre humaine, difficile, qui exige beaucoup d'humilité, de vérité. Vous savez que l'intelligence de l'homme est limitée et que toute réussite procède de la conjugaison de ce que nous voyons et de ce que nous ne voyons pas. Ce que nous voyons, c'est à l'échelle humaine, chacun de nous fera le maximum. Ce que nous ne voyons pas, c'est entre les mains de Dieu. Donc, je demande une seule chose aux Ivoiriens, que chacun se mette en prière pour que le 29 novembre soit un succès pour la Côte d'Ivoire. Et que ce pays retrouve ses marques pour le bien de ses enfants. Parce que nous sommes tous frères. La seule richesse des Ivoiriens, c'est la Côte d'Ivoire. Chaque Ivoirien est la richesse de la Côte d'Ivoire.
Propos recueillis sur Onuci-Fm par Paul Koffi
M. le président, l'opération d'identification et d'enrôlement des électeurs a pris fin le 30 juin dernier. Est-ce que son déroulement vous satisfait ?
(…) Le délai qui était imparti était fixé au 30 juin comme vous avez pu le constater lors du communiqué final de la réunion du Cadre permanent de concertation de l'Accord politique de Ouagadougou. Nous nous sommes attelé à travailler avec toute la ferveur nécessaire dans une telle opération. Nous avons structuré nos interventions en relation avec le ministère des Finances pour avoir les moyens nécessaires pour réaliser cette dernière opération. Nous avons déployé nos équipes sur le terrain, consolidé certaines qui y étaient déjà. Et envoyé à l'étranger tous nos frères et sœurs des différentes structures (Cni, Cnsi, Ins, Sagem et tous ceux qui sont partie prenante dans l'opération). Nous les avons tous déployés à l'extérieur. Et à la date du 30 juin, l'opération a pris fin. Cela conformément aux recommandations du Cadre permanent de concertation de l'Accord politique de ouagadougou. C'est ce que je peux dire à nos frères et sœurs ivoiriens. Je voudrais saisir l'opportunité de la fin de l'opération pour remercier au nom de toutes les structures qui ont travaillé, le Chef de l'Etat, le premier ministre, le ministre de l'Economie et des finances, tous les ministres, les bailleurs de fonds, les différents pays amis de la Côte d'Ivoire, les chefs de village, les agents d'enrôlement, les forces de sécurité et tous ceux qui se sont mobilisés pour nous aider à finaliser cette opération. Je voudrais, au nom de tous, leur exprimer notre profonde gratitude.
Alors, il n'y aura pas de prorogation cette fois ?
Non, ça ne fait pas partie de notre feuille de route. La feuille de route que nous avons retenue au terme de la réunion de Ouagadougou, c'est le 30 juin. La prorogation, pour l'instant, il n'en est pas question. Parce qu'il faut bien qu'on s'arrête un jour.
On nous parle de plus de 4 millions d'Ivoiriens qui ont été laissés sur la touche. A leur niveau, qu'est-ce qu'on peut dire ?
Je voudrais sincèrement féliciter les Ivoiriens, leur dire merci. Parce que nous avons senti un engouement extraordinaire pour cette opération. En toute chose, il faut avoir la mémoire de l'histoire. Nous avons commencé le 15 septembre 2008 à Abidjan dans des conditions extrêmement difficiles. Nous n'avons pas toujours parlé, nous ne voulions même pas parler. L'essentiel pour nous, c'était d'enregistrer les Ivoiriens, de leur donner leur carte nationale d'identité et leur permettre d'aller aux élections. Au plus profond de nous-même, nous avons souffert terriblement des grèves, des incompréhensions, des menaces, de toutes sortes, de difficultés. Mais, nous sommes presque resté stoïque parce qu'il fallait sortir ce pays de l'impasse dans laquelle nous nous trouvions tous, en faisant en sorte que les Ivoiriens soient enrôlés. Donc, on a accepté les incompréhensions, certains jugements erronés. L'essentiel, c'est qu'il fallait quelqu'un pour porter la croix. Nous l'avons portée. Pour que la Côte d'Ivoire finisse cette opération, nous avons accepté cela. Je crois qu'aujourd'hui, on peut rendre gloire à Dieu de ce que cette opération ait abouti.
Président, si on vous demandait de dresser un bilan, quels chiffres provisoires pourriez-vous avancer. Il y a eu combien de personnes enrôlées tant à l'interieur qu'à l'extérieur de la Côte d'Ivoire ?
Je vous félicite d'avoir employé le mot provisoire. Il faut que les auditeurs qui nous écoutent retiennent que c'est provisoire. Les chiffres consolidés définitivement seront communiqués. Et je m'emploierai à faire une conférence de presse technique pour leur communiquer les chiffres définitifs. Mais pour l'instant, retenons qu'à l'extérieur de la Côte d'Ivoire, après l'opération que nous venons de réaliser, nous avons près de 38.000 Ivoiriens enregistrés. On attendait 72.000. Nous sommes allés au-delà des 50% des Ivoiriens de l'étranger. Mais 38.000 se sont présentés pour se faire enrôler. A Abidjan, pendant les 7 derniers jours, nous avons enregistré plus de 25.000 Ivoiriens et personnes étrangères hors Cedeao. En consolidant ces chiffres avec ceux que nous avons réussi à avoir pour l'instant à l'intérieur du pays, nous sommes à près de 6.500.000 personnes enregistrées. Voici les chiffres provisoires d'enregistrés. Ce qu'il faut retenir, c'est que d'abord la population cible calculée a été identifiée sur la base de paramètres statistiques d'une Côte d'Ivoire qui était dans une situation normale. Or, les paramètres ont bougé entre-temps. Mais comme on ne les avait pas, on a fait une projection avec les paramètres d'une Côte d'Ivoire qui roulait normalement. Donc déjà au niveau des paramètres, nous avions des réserves. Deuxièmement, il faut retenir que beaucoup n'ont pas pu avoir leurs papiers. La preuve, c'est que l'opération de reconstitution des registres a permis d'enregistrer près de 270.000 personnes qui se sont présentées pour avoir des extraits d'acte de naissance dans le futur. Pour l'instant, ce sont les attestations du plumitif qui ont été données. Donc beaucoup d'Ivoiriens n'avaient pas de documents pour se faire enrôler.
Troisièment, c'est une opération volontaire. A l'époque, pour faire le recensement général de la population qui permettait de faire d'autres déductions statistiques, on passait de maison en maison. Cette fois, c'est un acte volontaire qui exigeait que chaque Ivoiriens se présente à l'enrôlement. Si quelqu'un ne veut pas aller se faire identifier, c'est son droit. Mais je pense que tous les Ivoiriens qui pouvaient aller le faire sont partis. Voilà un peu le contexte dans lequel nous avons évolué. Il faut avouer que 75% de la population cible enregistrée, ce n'est pas un mauvais score.
Ça vous satisfait les 75% ?
L'idéal aurait été d'aller au-delà de 90%. Mais 75%, ce n'est déjà pas mal quand on sait dans quel contexte nous sommes actuellement et dans quel contexte se trouvent les Ivoiriens au regard des difficultés qu'ils ont eues à un moment donné pour avoir leurs papiers.
Des voix s'élèvent, des voix des partis politiques. Ce sont eux les plus concernés parce que cela va nous conduire à des élections si on sort une liste électorale. Devant toutes ces réactions, quelle sera l'attitude de la Cei ?
D'abord, je voudrais féliciter les partis politiques, la société civile ivoirienne et nos frères et sœurs ivoiriens qui ont manifesté un engouement extraordinaire pour cette opération. Je voudrais aussi féliciter les partis politiques et les cadres parce que dans certaines régions, à un moment donné, ils ont dû s'impliquer dans la mobilité de nos équipes et dans les conditions de travail de nos agents, notamment dans les villages. Je voudrais féliciter les chefs de village pour tout ce qu'ils ont fait. Chacun a donné le maximum qu'il pouvait. On ne pouvait pas demander cela continuellement aux Ivoiriens. Le ministère des Finances a fait de gros efforts. En toute chose, il faut optimiser ses moyens. Je pense que toutes les personnalités, toutes les structures qui sont intervenues nous ont soutenu. Nos ambassadeurs à l'étranger nous ont soutenu. Chacun a donné le maximum. On ne peut pas demander que continuellement ces efforts soient maintenus à un certain niveau. Les journalistes devraient nous aider à rappeler aux Ivoiriens qu'on a eu plusieurs prorogations. C'est pour dire qu'on a donné le maximum de chance aux Ivoiriens. Je comprends certaines voix qui s'élèvent parce qu'il y a encore des Ivoiriens à enrôler. Mais la fin de l'opération actuelle n'est pas la fin de l'identification. Après celle-ci, l'Oni va continuer dans le cycle normal de l'identification pour permettre aux Ivoiriens d'avoir leur carte nationale d'identité. C'est une opération là interrompue qui va continuer sans problème.
Après cette étape, quelle autre étape à la liste électorale ?
Après cette étape, dès le mois de juillet, nous allons commencer les traitements informatiques pour mettre en évidence les erreurs techniques, faire des rapprochements, voir si on a bien écrit les noms, si les instruments qui ont été utilisés pour l'enregistrement ont bien fonctionné. C'est le travail technique. Ensuite, nous allons faire les croisements pour mettre en évidence la qualité des documents présentés à l'enrôlement. Sur ce point, nous serons exigeants et intransigeants. Ça, c'est le travail technique qui va durer au maximum six semaines.
Deuxième phase, la phase du contentieux. Nous allons, le moment venu, avoir des émissions dans la presse pour expliquer aux Ivoiriens ce que c'est que le contentieux.
Profitez-en
Le contentieux, une fois qu'on a affiché la liste provisoire après le traitement informatique, il est permis aux Ivoiriens d'aller regarder si leur nom est bien écrit. Si vous constatez par exemple que quelqu'un qui a perdu son droit de vote se trouve sur la liste provisoire, vous indiquez que cette personne a perdu son droit de vote avec les arguments à l'appui. Attention, si vous faites de faux témoignages, la loi peut se retourner contre vous. Ensuite, il faut voir les problèmes de nationalité. C'est cela la phase du contentieux. Mais cela doit se passer dans la paix et la fraternité. Nous sommes-là pour la vérité, pour faire éclore la vérité… La phase du contentieux doit durer, maximum, un mois et plus 8 jours. Parce que quand le juge est saisi du dernier dossier, il a 8 jours pour le traiter.
Pouvez-vous rassurer que toute vérité est acceptable ? N'y a-t-il pas de vérité qui gène?
La vérité ne se fabrique pas. La vérité est l'émanation de faits qui sont intangibles. Les faits, dans cette matière, s'appuient sur des accords, des documents, sur la structure de l'administration ivoirienne. On connaît tout cela. Donc, on ne peut pas la fabriquer, la vérité s'impose. Nous demandons simplement aux Ivoiriens de vérifier ces listes qui seront affichées dans les lieux d'enrôlement, dans les lieux de naissance et qui seront mises à la disposition de tous les partis politiques et de tous ceux qui voudront demander. Si l'impression de la liste a un coût, la personne qui demande va supporter ce coût. Si c'est un CD, on pourra le donner sans problème. Jusqu'à un certain nombre. Si ça commence à compter, on va demander que tous ceux qui sollicitent cette liste puissent contribuer d'une manière ou d'une autre. On verra le mécanisme, mais surtout on envisage de publier sur internet.
On fait le compte avec vous. Vous avez parlé de six semaines et, après, d'un mois et demi. Cela veut dire qu'on peut espérer que cette date du 29 novembre sera tenue ?
On est dans le temps. On sera dans le temps du 29 novembre. On a conscience, vous savez, des potentialités économiques énormes de ce pays. On ne peut que souhaiter aller aux élections pour que tous ceux qui seront élus travaillent dans des conditions sereines pour que la Côte d'Ivoire donne la chance à ses enfants d'être des hommes et des femmes de valeur demain pour réaliser avec toutes les autres nations et collaborer avec les nations du monde. Les élections sont un passage obligé.
Pour y arriver, il y a certainement des garde-fous à mettre en place. La Cei est chargée de l'organisation des élections. Sur la question de la sécurisation, quelle est votre idée pour que les élections soient sécurisées ?
Le ministre de la Défense était dans nos locaux. Il nous a fait l'amitié de nous rendre visite. Nous avons passé en revue les mécanismes de sécurisation, les points de détails où nous attendons la sécurisation par les Forces de défense et de sécurité et par la communauté internationale. Il y a quelques mois, M. Choi lui-même, le représentant spécial du secrétaire général de l'Onu, est venu ici pour nous présenter le plan de sécurisation préparé par les forces Onusiennes avec l'appui des autres forces impartiales qui sont sur le territoire. Depuis quelque temps, vous voyez toute la dynamique qui entoure la mise en route du Centre de commandement intégré. Tout cela montre que chacun a pris conscience qu'il faut aller aux élections dans un espace sécurisé. Nous nous attelons à mettre cela en évidence. Le gouvernement et tous les partenaires s'attellent à réaliser, à cristalliser cette volonté d'aller aux élections dans des conditions apaisées. Il faut demander aux Ivoiriens de prendre conscience que les élections, ce n'est plus la guerre, c'est le choix paisible.
Alors, tous les candidats peuvent aller battre campagne partout ?
C'est cela qui est prévu, sinon on ne peut pas avoir des élections crédibles. Il faut que tout le monde aille battre campagne partout, en toute sécurité, mais dans la fraternité. J'insiste, dans la fraternité. Qu'est-ce qu'il y a de plus beau que la fraternité ? Je n'en vois pas. Le sommet de la fraternité, c'est l'amour et la charité. C'est cela que les Ivoiriens doivent avoir comme richesse.
Il faut des équipements pour aller au vote : les urnes, les isoloirs et tout autre équipement pour le scrutin. Est-ce que vous êtes prêt à la Cei ?
Je voudrais dire que par la grâce de Dieu, par la qualité des rapports que la Côte d'Ivoire a avec les bailleurs de fonds, ces derniers ont tout acheté. Les urnes ont déjà été achetées. Nous avons presque 25.000 urnes transparentes. Les isoloirs ont été achetés, il y en a plus de 50.000. Nous avons des ordinateurs qui ont été achetés. Nous avons les kits qui sont dans les bureaux de vote avec les crayons, les gommes. Tout a été déjà acheté, tout est en place. Nous avons même des groupes électrogènes que nous allons mettre dans 68 départements. Et nous sommes en négociation pour renforcer ce dispositif avec des pays amis. De ce point de vue, je peux rassurer les Ivoiriens, on n'est pas mal lotis. Bien au contraire.
On espère qu'on aura le premier tour de l'élection présidentielle le 29 novembre. Est-ce que vous êtes préparé à régler les contentieux après le scrutin ?
Il y a un mécanisme opératoire de règlement des contentieux qui est décrit dans le code électoral. Il y a un mécanisme opératoire qui est décrit dans les différents décrets d'application. Il y a un mécanisme opératoire qui est décrit dans les textes connexes. Il ne s'agira que de les appliquer et de faire en sorte que les Ivoiriens aillent aux élections la paix dans le cœur et dans l'esprit. La paix est un état d'esprit qui conduit à un comportement et à des actions paisibles. C'est surtout cela. Donc, je voudrais demander aux Ivoiriens d'aller aux élections l'esprit apaisé. C'est cela l'essentiel.
Alors le dernier mot vous revient. Qu'est-ce que vous pourrez dire aux Ivoiriens pour que tout le monde puisse partager l'optimisme que vous avez ?
Je voudrais remercier les Ivoiriens pour l'engouement qu'ils ont manifesté lors de cette opération qui vient de s'achever. Je voudrais les en féliciter. C'est une œuvre humaine, difficile, qui exige beaucoup d'humilité, de vérité. Vous savez que l'intelligence de l'homme est limitée et que toute réussite procède de la conjugaison de ce que nous voyons et de ce que nous ne voyons pas. Ce que nous voyons, c'est à l'échelle humaine, chacun de nous fera le maximum. Ce que nous ne voyons pas, c'est entre les mains de Dieu. Donc, je demande une seule chose aux Ivoiriens, que chacun se mette en prière pour que le 29 novembre soit un succès pour la Côte d'Ivoire. Et que ce pays retrouve ses marques pour le bien de ses enfants. Parce que nous sommes tous frères. La seule richesse des Ivoiriens, c'est la Côte d'Ivoire. Chaque Ivoirien est la richesse de la Côte d'Ivoire.
Propos recueillis sur Onuci-Fm par Paul Koffi