« Cet homme n’est pas digne de confiance ». Ce sont ces propos qui ont mis en transe depuis hier le camp présidentiel. Parlant de la crise ivoirienne au cours d’une réception du secrétaire général de l’organisation des Nations unies, le chef de l’Etat français Nicolas Sarkozy a tenu ces propos à l’égard de son homologue ivoirien. Le président de la République française a accusé le président Laurent Gbagbo de ne pas respecter ses engagements. Nicolas Sarkozy a déclaré que Laurent Gbagbo ne veut pas des élections cette année. Pour soutenir ces accusations , il a dévoilé pour la première fois, l’objet de la visite effectuée à l’Elysée par N’Zi Paul David, son directeur de cabinet, le mois dernier. Selon le président français, N’Zi Paul David a été envoyé par Laurent Gbagbo auprès des autorités françaises pour leur signifier sa volonté de ne pas respecter la date du 29 novembre 2009, prévue pour la tenue du premier tour du scrutin présidentiel. On se souvient que lors des obsèques du président Omar Bongo à Libreville, le patron de l’Elysée avait en évoquant de cette affaire, parlé de « promesses fallacieuses ». Mercredi dernier, il a été un peu plus direct en accusant le président Laurent Gbagbo d’être un homme qui n’est pas « digne de confiance ». Le langage débarrassé de tout euphémisme de « l’homme de la rupture » a réveillé la colère et l’indignation des gardiens du temple de la Refondation. Ces derniers crient au retour au passé et au néocolonialisme. Mais qu’a dit le successeur de Jacques Chirac pour essuyer une telle volée de bois vert de la part des gardes chiourmes de la galaxie patriotique ? Apparemment rien de grave et rien de faux. Peut-être que c’est le caractère cru des propos du premier responsable des Français qui a sans doute choqué du côté du Palais. Sinon dans le fond, Nicolas Sarkozy n’a fait dit à sa manière ce qui est en Côte d’Ivoire. Le reste n’est que faux débat. Est-ce que le président Laurent Gbagbo n’a pas envoyé en mission son directeur de cabinet à l’Elysée pour négocier un éventuel report du scrutin du 29 novembre ? Répondre à cette question, c’est revenir au vrai débat. Comment peut-on qualifier un homme qui dit à la fois une chose et son contraire ? Que peut-on dire d’un homme qui dit haut et fort à qui veut l’entendre qu’il faut aller aux élections cette année et qui manœuvre en sourdine pour ne pas qu’elles aient lieu à la date convenue ? Les propos de Sarkozy peuvent paraître irrévérencieux pour les irréductibles de Laurent Gbagbo. Mais il faut les situer pour les comprendre dans leur contexte. Ils traduisent le ras-le-bol d’un chef d’Etat à qui depuis 2008 on ne fait que « des promesses électorales fallacieuses ». En 2008, Laurent Gbagbo a assuré à son homologue de France au cours de leur rencontre au sommet de Nations unies qu’il organiserait les élections. Le chef de l’Etat ivoirien avait même pris le décret n° 2008-134 du 14 avril 2008 dans ce sens pour convoquer les Ivoiriens aux urnes le 30 novembre 2008. Par la suite, il a justifié de contretemps dans le calendrier électoral pour rejeter le vote à cette année. Cette année encore, alors que toutes les conditions sont plus que jamais réunies, c’est le même coup que prépare l’actuel locataire du Palais présidentiel. La colère de Nicolas Sarkozy est d’autant justifié que cette année les garanties fermes avaient été données aux autorités françaises. Lors de sa visite en Côte d’Ivoire en mai dernier, le secrétaire d’Etat français à la Coopération l’assurance de la part du chef de l’Etat ivoirien que les élections se tiendront en 2009. Reçu à Yamoussoukro par Laurent Gbagbo le 5 mai dernier, le ministre Alain Joyandet était retourné en France avec la ferme assurance que l’an 2009 serait l’année des élections en Côte d’Ivoire. Laurent Gbagbo avait joint l’acte à la parole en prenant le décret n° 2009-181 du 14 mai 2009 pour convoquer les électeurs ivoiriens le 29 novembre prochain. Après le départ de l’émissaire de Nicolas Sarkozy. On ne peut pas avoir posé tous ces actes et dire qu’on va reporter les élections. Sauf si on « n’est pas digne de confiance ». Et c’est ce que le président Nicolas Sarkozy tenait à rappeler au président Laurent Gbagbo dans le langage direct et franc qu’on lui connait. Comme on le dit chez nous : « La vérité rougit les yeux , mais ne les casse pas ». Laurent Gbagbo et ses partisans doivent comprendre cela et faire mentir Sarkozy. En organisant tout simplement les élections à la date que le candidat de la Refondation a lui-même librement choisi sur proposition de la Commission électorale indépendante.
JCC
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