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Société Publié le jeudi 10 septembre 2009 | Nord-Sud

Rentrée scolaire 2009-2010 :La “machine à analphabètes” se remet en marche

Une autre année scolaire commence lundi. A partir de ce 14 septembre, élèves et enseignants reprendront le chemin des classes. Au lieu de procurer de la joie, cette autre rentrée scolaire provoque inquiétude et amertume.

Souvenons-nous de la mise en garde de cet enseignant du lycée moderne de Port-Bouët. Au lendemain de la proclamation des résultats catastrophiques du Bac 2009, le formateur confiait avec franchise et conviction que ceux de 2010 seront encore plus mauvais. « Les élèves de première qui arrivent en terminale sont plus nuls que ceux de terminale qui viennent d'échouer », a-t-il expliqué. Il est à craindre, en écoutant l'homme de terrain, que la guérison tant voulue de l'école ivoirienne ne soit pas pour si tôt. Le profane pensait pourtant que le mal avait atteint, l'année écoulée, un seuil de gravité infranchissable. De mémoire d'Ivoirien, le taux d'échec au principal examen de fin d'année n'avait jamais été aussi élevé. 80% des candidats a échoué. Le taux réalisé au Bepc n'a pas été fameux. Il a tourné autour de 70% d'échecs. Dans le fond, le mal est plus sévère. Il est rare de rencontrer aujourd'hui un élève du secondaire capable d'aligner, à l'écrit ou à l'oral, cinq phrases correctes dans la langue française enseignée depuis la maternelle. Avec une base ratée, ces lycéens arrivent et partent de l'université avec des lacunes qu'on ne pouvait pas rencontrer chez un bon élève de CM2, il y a peut-être 20 ans. Au plan moral, l'apprenant n'est plus un modèle. En témoigne la violence avec laquelle les syndicats scolaires résolvent les problèmes les plus simples. A quoi sert finalement l'école dans ce pays ? Les experts de la Banque mondiale ont semblé y répondre dans leur dernier rapport sur l'école ivoirienne. Celle-ci ne sert plus, selon eux, qu'à « fabriquer des analphabètes». S'agissant des causes, différentes études (dont le « Rapport d'Etat du système éducatif national, Resen », ou « l'Evaluation diagnostic du système éducatif ») sont unanimes sur un diagnostic qui se résume en trois points : le rétrécissement du temps scolaire en raison des incessants arrêts de cours, le dysfonctionnement des dispositifs voués à l'engagement pédagogique et la mauvaise qualité du pilotage du système opéré à l'échelle des régions et des établissements scolaires. L'analyse de Adama Wattara, psychopédagogue et formateur à l'Institut pédagogique national de l'enseignement technique et professionnel (Ipnept), que nous avons publié le 10 août est plus pragmatique. Il cite comme première cause la démotivation des enseignants.

A chacun sa faute

« L'enseignant qui a un salaire qui ne bouge pas n'est pas motivé. Des notes complaisantes sont distribuées aux élèves, surtout aux filles. Malgré les mauvaises notes, on passe en classe supérieure. Mais comme à l'examen, le prof n'est plus là pour aider, ça devient compliqué. Devant la réalité, tu as la note que tu mérites », constate-t-il. Au plan pédagogique, le technicien remet en cause la qualité des cours dispensés. Les enseignants n'étant pas recyclés comme cela se passe en Europe tous les six mois, les cours sont mal préparés. Dans ce cas, un élève peut être bon et échouer. Tout en condamnant les enseignants, le spécialiste reconnaît que les élèves eux-mêmes, s'adonnent à des pratiques malsaines. La responsabilité des parents a été également relevée. « Quand il rentre le soir, il est fatigué. La seule question qu'il pose s'il pense à son enfant, c'est, est-ce qu'il a mangé ? Les parents devraient dans leur programme, prévoir la place de la réussite de leur enfant », conseille le psychopédagogue. Il arrive aussi, et cela est courant, que bien que bénéficiant de tout le soutien parental nécessaire, l'enfant échoue. Face à des questions à la fois embarrassantes et inquiétantes, Nord-Sud Quotidien à décidé d'ouvrir un grand débat sur le sujet. Pendant quelques jours, les acteurs principaux du système éducatif, depuis les élèves jusqu'aux parents, en passant par les enseignants et le gouvernement, auront la parole pour donner leur point de vue et faire des propositions qui, nous l'espérons, contribueront à guérir le mal.

Cissé Sindou
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