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Économie Publié le mercredi 23 septembre 2009 | Le Temps

M. Sea T. Vincent (Président de l`Observatoire National des Producteurs de Café et Cacao de Côte d`Ivoire) : “Aucun prix ne sera fixé sans discussion préalable avec l’observatoire”

Le président de l'Observatoire national des producteurs de café et cacao de Côte d'Ivoire, M. Séa T. Vincent, voudrait une rencontre d'échanges, avec le comité de gestion de la filière avant l'ouverture de la campagne 2009/2010. Il explique ses ambitions dans cette interview.

Les Producteurs sont impatients parce que cette année la campagne se fait désirer.
En ce qui concerne la gestion de la campagne, ce n'est pas le fait de l'Observatoire. Mais ce qui nous intéresse en tant que producteurs, c'est le mécanisme à mettre en place pour que la campagne soit ouverte et que les producteurs développent leurs activités. L'impatience dont vous parliez à l'instant, s'inscrit dans le cadre normal des choses, à savoir que chaque année, la production cacaoyère se fait et sa commercialisation débute à partir de août-septembre et octobre. Déjà en ces mois-ci, quelques grains commencent à sortir. Je vous avoue qu'à notre passage à San Pedro, on peut dire que la campagne est déjà ouverte. Parce que le cacao commence à être commercialisé.


Nous ne comprenons pas assez bien lorsque vous dites que la campagne est ouverte. Alors qu'officiellement cette campagne n'est pas encore annoncée.

C'est vrai. Partout où nous sommes passé, nous avons constaté effectivement que les producteurs sont impatients suite à ce retard qui fait qu'ils ont encore leurs produits sur le bras. Ils sont impatients parce que la filière étant une chaine contrôlée par les producteurs eux-mêmes à un moment donné, et qu'aujourd'hui est gérée par un comité de gestion, les mesures d'accompagnement ainsi que l'appui aux producteurs n'ont pas changé. Les producteurs sont donc en droit d'attendre que les gestionnaires disent quelque chose. Mais, c'est parce que le comité de gestion se fait désirer que, nous sommes en train de faire une tournée de sensibilisation et rencontrer en même temps les producteurs impatients pour les rassurer. Et nous leur demandons de se calmer. Parce que nous envisageons entreprendre une concertation avec les gestionnaires de la filière.


Alors, quel rôle joue exactement l'observatoire ?

Le rôle de l'observatoire, c'est d'abord de concilier la position des uns et des autres, sur une question bien précise. Aujourd'hui, vous avez remarqué comme nous, l'impatience des producteurs. L'observatoire prend donc sur lui, la décision d'aller vers les producteurs pour recueillir leurs sentiments, leurs propositions et aller vers ceux qui gèrent pour échanger et régler cette situation au plus vite possible. Voilà le rôle de l'observatoire. En dehors de cela, l'observatoire observe et écoute sans relâche tous les jours, les faits et gestes de ceux qui ont en charge la gestion de la filière. Nous avons la charge de porter un droit de regard sur tout ce qui concerne la gestion. Et s'il y a lieu de dénoncer, nous le faisons avec véhémence. En plus l'observatoire envisage faire en sorte que les Organisations professionnelles agricoles (Opa), des coopératives, des Unions de coopératives, les Fédérations, les Associations syndicales, comment établir un esprit de cohésion, pour que les producteurs ne commettent pas encore une seconde erreur dans la gestion de leur filière. L'observatoire a donc une panoplie de rôle à jouer aussi bien pour le compte des producteurs eux-mêmes, pour le compte de leurs organisations professionnelles que pour ceux qui ont la responsabilité de gérer la filière.

Vous voulez dire que l'observatoire joue à présent le rôle de gendarme ?
Je l'ai déjà dit. Effectivement, l'Observatoire joue le rôle de gendarme mais, il n'est pas un pistolero. Il joue le rôle de gendarme lorsqu'il s'approprie tous les textes légaux qui régissent le fonctionnement de la filière, les passe au peigne fin et fait la part des choses. A savoir ce qui revient aux producteurs et ce qui revient à l'Etat. Nous n'avons pas à nous mêler de ce qui revient à l'Etat.

On constate que le prix bord champ est diversement apprécié par les acheteurs et autre pisteurs. L'Observatoire a-t-il les moyens de garantir aux producteurs un prix fixe d'achat des produits ?
Nous sommes dans un pays à économie libérale. Chacun de nous peut choisir d'être exportateur, acheteur de produits, pisteur selon qu'il dispose des moyens de sa politique. Mais pour les producteurs, il existe une loi qui les organise en coopérative. Et une fois que cela est fait, la filière a un devoir de les appuyer. Et quand cet appui n'arrive pas, il ne faut pas le réclamer par des bruits. Il faut le faire par le moyen de la concertation. C'est ce à quoi, nous nous attelons. C'est ainsi que, les syndicats, les associations, les coopératives sont au sein de l'Observatoire. Nous avons demandé à toutes ces structures de se calmer et d'aller à la concertation avec le comité de gestion. Rien que pour protéger les acquis des producteurs. Sur ce chapitre, il faut dire que les pisteurs ont leurs rôles. Mais le paradoxe dans cette affaire, est le fait qu'au moment où on agrée les acheteurs de produits, les exportateurs, ceux-là s'organisent à leur niveau et au niveau de leurs banques pour la collecte et l'achat des produits, c'est au même moment qu'on se retient de financer les coopératives qui sont l'émanation des producteurs. On sent là, un empêchement des producteurs de mieux s'organiser en coopérative et de mener eux-mêmes leurs affaires pour qu'il y ait une certaine émulation dans leur environnement vital. C'est ce paradoxe que nous observons. Mais, il ne faut pas rapidement jeter la pierre aux gestionnaires, il faut tout simplement discuter avec eux. C'est tout ce que l'Observatoire demande. Nous demandons surtout l'implication de notre chef, le président du Conseil national des Sages, le président Bléoué Aka, pour que ceux qui gèrent la filière engagent rapidement cette discussion.

L'autre volet craint par les producteurs concerne la qualité des produits. Comment allez-vous vous prendre pour garantir là aussi cette qualité tant attendue par les autorités ?
C'est un chapitre très important aussi bien pour le producteur que l'exportateur et également pour les bailleurs de fonds, les industriels. Il faut dire que la qualité est un programme. Mais, il y a lieu de discuter avec ceux qui gèrent la filière. Il n'y a pas longtemps que le comité de gestion a parlé du programme de toutes ces entités : qualité, quantité, commercialisation. Mais nous à l'Observatoire, nous n'avons pas vu les effets de ce programme. Parce que, lorsque nous avons envoyé nos inspecteurs en mission sur le terrain, nous constatons que les producteurs continuent de sécher leurs fèves de cacao sur du bitume en certains endroits de la Côte d'Ivoire. Alors, qu'est-ce qui a été fait quand le programme a été développé ? Quelles sont les mesures qui ont été prises pour que le producteur soit protégé ? A toutes ces questions, nous avons des éléments que nous allons déposer sur la table de discussion pour amener à une conclusion paisible avec les gestionnaires.

L'autre aspect du problème qui rend davantage anxieux les producteurs concerne l'octroi des produits phytosanitaires et autres tels que les sachets et les sacs…
Vous voyez, je suis obligé de parler de tout cela dans un journal parce que les discussions ne sont pas encore ouvertes avec les gestionnaires de la filière.

Avez-vous tenté de nouer les fils de dialogue avec les gestionnaires de la filière ?
Les contacts ont été établis et nous attendons toujours. Nous avons adressé à la filière au total 9 courriers qui sont restés sans suite. Je vous dis que tout cela est dommage. Nous disons que s'il n'y a pas cette rencontre, nous ne comprendrions pas que quelqu'un aille à la télévision demain pour dire que la campagne est ouverte et que le prix est tant. Nous n'accepterons jamais cela. Il faut que cela soit clair.

Nombreux sont les producteurs qui se plaignent d'être grugés par des acheteurs ou des personnes de mauvaise foi dans l'achat de leurs produits. L'Observatoire a-t-il un plan pour faire naître la confiance entre les producteurs sceptiques et la filière ?
La confiance est déjà née. Puisque nous sommes sur le terrain avec eux. Ils disent même que l'Observatoire est leur avocat auprès de la filière. Nous sommes donc à l'aise. Ce ne sont pas des phrases que des personnes leur ont fait prononcer.

Interview réalisée par Jean Baptiste Essis
Jgessis06525881@gmail.com
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