Le jatropha appelé encore l’«or vert du désert» semble intéresser les paysans ivoiriens. Cependant, aucune stratégie globale nationale n’est mise en place pour rentabiliser cette culture. C’est eu égard à cela, que le groupe Bio pétrole renouvelable (jeudi à Nord-Sud) a expliqué les raisons du séminaire international qu’il organise à Abidjan du 3 au 4 octobre.
Votre structure initie du 3 au 4 octobre à Abidjan un séminaire sur le Jatropha en Côte d’Ivoire. Qu’est-ce que vous comptez proposer aux paysans quand on sait que beaucoup d’entre eux ignorent encore cette culture?
Le groupe Bio pétrole renouvelable (Bpr) est une entreprise espagnole qui a pour activité principale la transformation de l’huile végétale en biocarburant ou biodiesel. Cette structure dispose d’une usine à Granada en Espagne et est consciente du fait que le jatropha peut être une source d’énergie pour nos pays. C’est dans ce cadre que les dirigeants de Brp ont décidé de s’installer en Côte d’Ivoire avec leur représentation Afrique que nous dirigeons, afin de développer cette culture. Mais il faut préciser qu’avant de s’installer à Abidjan, ils ont sillonné des pays comme le Burkina, le Mali et le Ghana. Mais leur choix a été porté sur notre pays eu égard aux nombreuses potentialités dont il dispose. Nous avons surtout constaté que de nombreuses personnes commencent à s’intéresser à cette culture sans la connaître véritablement. Mieux, certains producteurs vendent l’hectare à 15.000 Fcfa. Après ces constats, notre structure a vu l’urgence d’initier cette rencontre internationale en vue d’étudier avec l’ensemble des partenaires, l’environnement dans lequel le jatropha peut être cultivé dans notre pays. C’est pourquoi nous avons retenu le thème : «Le jatropha en Côte d’Ivoire : mythes, réalités et potentialités d’investissement.»
En termes de rendement, est-ce que «l’or vert du désert» peut bien réussir en Côte d’Ivoire ?
Ce que de nombreuses personnes ne savent pas, c’est que le jatropha a toujours existé en Côte d’Ivoire. Bien avant, dans les années 1940 et 1950, on exportait les graines de jatropha. Le savon de Marseille est fabriqué à base de jatropha. La colonisation faisait produire cette culture. D’ailleurs, cette plante pousse mieux et peut produire correctement dans la zone des savanes, mais à conditions d’utiliser les techniques qu’il faut. Certaines personnes estiment que le jatropha peut produire 20 tonnes à l’hectare. L’expérience que nous avons sur le terrain, démontre le contraire. On peut avoir au maximum 5 kg à l’hectare. Si les paysans s’y mettent, ils peuvent atteindre 7 tonnes. Donc un arbre peut produire environ 5 kilos or un hectare prend entre 1.100 et 1.500 arbres. C’est pourquoi ce séminaire restera déterminant pour la suite. Le jatropha produit à partir d’un an. Nous avons des parcelles expérimentales à Sakasssou, Daoukro et on a distribué l’année dernière, trois tonnes de semences dans la zone de Gagnoa, Daloa et Bouaflé. A la fin du mois de février 2010, ces plantations vont commencer à produire.
Vous faites allusion à quelles techniques ?
Il s’agit de techniques culturales bien adaptées. Il s’agit du dosage en engrais, de l’écartement des plantes... Ce sont des techniques qu’on peut enseigner aux producteurs. Si effectivement au terme de ce séminaire, les partenaires sont unanimes sur le fait qu’on doit vulgariser cette culture, alors nous allons prendre d’’importantes décisions. Les producteurs qui veulent s’y intéresser, doivent comprendre que le gouvernement ivoirien n’est pas impliqué mais il est un observateur. Si on ne fait pas attention, on va tomber dans les mêmes erreurs qu’a connues la filière anacarde. C’est maintenant qu’on veut mieux organiser cette filière. On aurait pu le faire depuis longtemps, afin que les producteurs ne travaillent pas sans avoir une très bonne marge bénéficiaire comme on le voit aujourd’hui.
Justement pensez-vous que les autorités du pays seront prêtes à vous suivre. D’autant que lors de la commémoration du 49ème anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, le chef de l’Etat a estimé que le jatropha ne pouvait pas apporter grand-chose aux paysans. Laurent Gbagbo incite au contraire les paysans à la culture du vivrier.
C’est un point de vue du président de la République. Nous estimons qu’il est dans son droit de se poser des questions sur le jatropha tant qu’il n’a pas vu ce que cette culture peut apporter aux paysans ivoiriens. Aujourd’hui, une culture comme l’hévéa n’est pas destinée à la consommation mais elle offre tout de même des revenus substantiels aux paysans. Les revenus qu’ils obtiennent à partir de ce produit, leur permettent de vivre correctement. Nous avons suffisamment de terre pour cultiver le jatropha et le vivrier. D’ailleurs, on peut planter les cultures vivrières à l’intérieur des parcelles de jatropha. C’est la culture d’association. A Madagascar le jatropha est beaucoup associé à la culture de la vanille qui est un produit très prisé chez nous dans la fabrication de gâteaux. Donc c’est peut être une inquiétude du président, mais nous voulons démontrer que le jatropha peut contribuer à la lutte contre la pauvreté en Côte d’Ivoire. Nos conclusions vont certainement amener le gouvernement à s’y intéresser véritablement. En effet le jatropha s’est avéré comme un non polluant et reste également une solution palliative pour réduire les dépenses pétrolières. De nombreux pays comme les Etats-Unis et la France sont engagés dans cette démarche.
L’une de grosses préoccupations demeurent la commercialisation. Quelle garantie comptez-vous donner aux producteurs ?
Justement, c’est l’un des aspects qui nous tient à cœur. Notre groupe veut s’installer en Côte d’Ivoire à travers l’installation d’usines. Nous ne pouvons pas encourager une production de masse et ne pas régler le problème de débouchés. L’installation de nos usines d’extraction et de transformation (biodiesel) en Côte d’Ivoire, va offrir plus de visibilité aux paysans qui hésitent encore à se lancer dans le jatropha. Cette transformation pourra occuper 5% du marché ivoirien en termes de fourniture en carburant. La capacité de notre unité sera de 40 tonnes de traitement de graine à l’heure. Nous envisageons investir pour cela, entre 6 et 7 milliards de Fcfa. Nous allons nous engager à acheter les productions. Cela va permettre à l’ensemble des partenaires de fixer des prix très rémunérateurs, de sorte que le producteur qui est le premier maillon de la chaîne, puisse bénéficier véritablement du fruit de son travail. Nous avons proposé actuellement des contrats d’achat aux paysans. Pour l’instant, on ne finance pas la mise en place des paysans, mais c’est un projet qui sera mis en œuvre une fois que notre unité de production sera installée.
Est-ce que les industriels prendront part à cette rencontre, dans la mesure où ils demeurent de gros utilisateurs d’énergie ?
Nous avons voulu par expérience nous concentrer sur les producteurs et les Ong qui vendent les semences. Parce qu’il y a eu dans le temps, un grand séminaire sur les énergies renouvelables à Grand-Bassam, mais rien n’a été fait concrètement. Nous n’avons pas voulu nous disperser. Cependant, nous comptons associer des organismes de recherche tels que le Cnra. Le jatropha ayant plusieurs variétés, notre objectif est d’arriver à développer avec cette structure, un programme de recherche qui va nous orienter vers celles (variétés) qui sont mieux adaptées en Côte d’Ivoire.
Interview réalisée par Cissé Cheick Ely
Votre structure initie du 3 au 4 octobre à Abidjan un séminaire sur le Jatropha en Côte d’Ivoire. Qu’est-ce que vous comptez proposer aux paysans quand on sait que beaucoup d’entre eux ignorent encore cette culture?
Le groupe Bio pétrole renouvelable (Bpr) est une entreprise espagnole qui a pour activité principale la transformation de l’huile végétale en biocarburant ou biodiesel. Cette structure dispose d’une usine à Granada en Espagne et est consciente du fait que le jatropha peut être une source d’énergie pour nos pays. C’est dans ce cadre que les dirigeants de Brp ont décidé de s’installer en Côte d’Ivoire avec leur représentation Afrique que nous dirigeons, afin de développer cette culture. Mais il faut préciser qu’avant de s’installer à Abidjan, ils ont sillonné des pays comme le Burkina, le Mali et le Ghana. Mais leur choix a été porté sur notre pays eu égard aux nombreuses potentialités dont il dispose. Nous avons surtout constaté que de nombreuses personnes commencent à s’intéresser à cette culture sans la connaître véritablement. Mieux, certains producteurs vendent l’hectare à 15.000 Fcfa. Après ces constats, notre structure a vu l’urgence d’initier cette rencontre internationale en vue d’étudier avec l’ensemble des partenaires, l’environnement dans lequel le jatropha peut être cultivé dans notre pays. C’est pourquoi nous avons retenu le thème : «Le jatropha en Côte d’Ivoire : mythes, réalités et potentialités d’investissement.»
En termes de rendement, est-ce que «l’or vert du désert» peut bien réussir en Côte d’Ivoire ?
Ce que de nombreuses personnes ne savent pas, c’est que le jatropha a toujours existé en Côte d’Ivoire. Bien avant, dans les années 1940 et 1950, on exportait les graines de jatropha. Le savon de Marseille est fabriqué à base de jatropha. La colonisation faisait produire cette culture. D’ailleurs, cette plante pousse mieux et peut produire correctement dans la zone des savanes, mais à conditions d’utiliser les techniques qu’il faut. Certaines personnes estiment que le jatropha peut produire 20 tonnes à l’hectare. L’expérience que nous avons sur le terrain, démontre le contraire. On peut avoir au maximum 5 kg à l’hectare. Si les paysans s’y mettent, ils peuvent atteindre 7 tonnes. Donc un arbre peut produire environ 5 kilos or un hectare prend entre 1.100 et 1.500 arbres. C’est pourquoi ce séminaire restera déterminant pour la suite. Le jatropha produit à partir d’un an. Nous avons des parcelles expérimentales à Sakasssou, Daoukro et on a distribué l’année dernière, trois tonnes de semences dans la zone de Gagnoa, Daloa et Bouaflé. A la fin du mois de février 2010, ces plantations vont commencer à produire.
Vous faites allusion à quelles techniques ?
Il s’agit de techniques culturales bien adaptées. Il s’agit du dosage en engrais, de l’écartement des plantes... Ce sont des techniques qu’on peut enseigner aux producteurs. Si effectivement au terme de ce séminaire, les partenaires sont unanimes sur le fait qu’on doit vulgariser cette culture, alors nous allons prendre d’’importantes décisions. Les producteurs qui veulent s’y intéresser, doivent comprendre que le gouvernement ivoirien n’est pas impliqué mais il est un observateur. Si on ne fait pas attention, on va tomber dans les mêmes erreurs qu’a connues la filière anacarde. C’est maintenant qu’on veut mieux organiser cette filière. On aurait pu le faire depuis longtemps, afin que les producteurs ne travaillent pas sans avoir une très bonne marge bénéficiaire comme on le voit aujourd’hui.
Justement pensez-vous que les autorités du pays seront prêtes à vous suivre. D’autant que lors de la commémoration du 49ème anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, le chef de l’Etat a estimé que le jatropha ne pouvait pas apporter grand-chose aux paysans. Laurent Gbagbo incite au contraire les paysans à la culture du vivrier.
C’est un point de vue du président de la République. Nous estimons qu’il est dans son droit de se poser des questions sur le jatropha tant qu’il n’a pas vu ce que cette culture peut apporter aux paysans ivoiriens. Aujourd’hui, une culture comme l’hévéa n’est pas destinée à la consommation mais elle offre tout de même des revenus substantiels aux paysans. Les revenus qu’ils obtiennent à partir de ce produit, leur permettent de vivre correctement. Nous avons suffisamment de terre pour cultiver le jatropha et le vivrier. D’ailleurs, on peut planter les cultures vivrières à l’intérieur des parcelles de jatropha. C’est la culture d’association. A Madagascar le jatropha est beaucoup associé à la culture de la vanille qui est un produit très prisé chez nous dans la fabrication de gâteaux. Donc c’est peut être une inquiétude du président, mais nous voulons démontrer que le jatropha peut contribuer à la lutte contre la pauvreté en Côte d’Ivoire. Nos conclusions vont certainement amener le gouvernement à s’y intéresser véritablement. En effet le jatropha s’est avéré comme un non polluant et reste également une solution palliative pour réduire les dépenses pétrolières. De nombreux pays comme les Etats-Unis et la France sont engagés dans cette démarche.
L’une de grosses préoccupations demeurent la commercialisation. Quelle garantie comptez-vous donner aux producteurs ?
Justement, c’est l’un des aspects qui nous tient à cœur. Notre groupe veut s’installer en Côte d’Ivoire à travers l’installation d’usines. Nous ne pouvons pas encourager une production de masse et ne pas régler le problème de débouchés. L’installation de nos usines d’extraction et de transformation (biodiesel) en Côte d’Ivoire, va offrir plus de visibilité aux paysans qui hésitent encore à se lancer dans le jatropha. Cette transformation pourra occuper 5% du marché ivoirien en termes de fourniture en carburant. La capacité de notre unité sera de 40 tonnes de traitement de graine à l’heure. Nous envisageons investir pour cela, entre 6 et 7 milliards de Fcfa. Nous allons nous engager à acheter les productions. Cela va permettre à l’ensemble des partenaires de fixer des prix très rémunérateurs, de sorte que le producteur qui est le premier maillon de la chaîne, puisse bénéficier véritablement du fruit de son travail. Nous avons proposé actuellement des contrats d’achat aux paysans. Pour l’instant, on ne finance pas la mise en place des paysans, mais c’est un projet qui sera mis en œuvre une fois que notre unité de production sera installée.
Est-ce que les industriels prendront part à cette rencontre, dans la mesure où ils demeurent de gros utilisateurs d’énergie ?
Nous avons voulu par expérience nous concentrer sur les producteurs et les Ong qui vendent les semences. Parce qu’il y a eu dans le temps, un grand séminaire sur les énergies renouvelables à Grand-Bassam, mais rien n’a été fait concrètement. Nous n’avons pas voulu nous disperser. Cependant, nous comptons associer des organismes de recherche tels que le Cnra. Le jatropha ayant plusieurs variétés, notre objectif est d’arriver à développer avec cette structure, un programme de recherche qui va nous orienter vers celles (variétés) qui sont mieux adaptées en Côte d’Ivoire.
Interview réalisée par Cissé Cheick Ely