Pour Mme Kaba Fofana, militante des droits de la femme, la loi sur le mariage doit permettre aux couples qui le souhaitent de choisir un régime polygamique.
Partagez vous l’idée des femmes qui pensent que la polygamie est une porte ouverte au désordre ?
La polygamie n’est pas légalisée en Côte d’Ivoire mais qu’est qu’on fait de ce nombre pléthorique d’enfants de la rue et dans la rue ? La démission des parents des foyers, lorsqu’ ils ne peuvent plus assumer leurs responsabilité empiètent sur les enfants. Les enfants ne mangent pas, ils ne sont pas scolarisés. Les enfants traînent à longueur de journée, les mamans n’en peuvent plus. Il n’y a même pas l’ombre d’un adulte dans la maison alors que nous sommes sous un régime monogamique légal. Ce n’est pas à la polygamie qu’il faut lancer l’opprobre.
Ne pensez vous pas que l’idée de la polygamie est dépassée ?
Non, je ne crois pas que ce soit dépassé. Nous avons des cas de polygames qui assument ce choix matrimonial, quoique cela ne soit pas légalisé. Ce qui existe pourtant dans le code coutumier qui est toujours en vigueur d’ailleurs. Et ce n’est pas moi qui vous apprendrai qu’il y a des hommes mariés légalement donc astreints à la fidélité, à l’obligation de n’avoir qu’une seule épouse mais qui quelque part, entretiennent une femme, une famille et des enfants, qui font aussi un deuxième foyer et on les appelle les deuxièmes bureaux.
Une légalisation n’est-elle pas une atteinte à la dignité de la femme ?
Je ne le crois pas du tout. Au contraire, je pense même que c’est pour valoriser quelque part la femme. La deuxième épouse, elle bénéficie d’un statut dans la légalisation de l’acte. Quelque part, pour tout citoyen qui tient à l’ordre social, le fait de la légalisation de la polygamie est quelque chose de positif.
Vous parlez d’ordre social et que faire des tensions de ménage ?
Même dans un foyer monogame, il y a toujours des tensions, soit avec le mari, soit avec la belle famille, soit même avec les enfants d’un mariage précédent. Ce sont des choses qui arrivent. L’idéal, serait que chaque épouse ait un domicile différent. Cela amoindrirait les tensions éventuelles. Entre les dents et la langue, il y a des histoires, à plus forte raison, entre deux êtres humains qui se disputent un même cœur.
Est-ce que le fait que les femmes vivent séparément règle la question de l’héritage ?
Pourquoi voulez-vous que la question de l’héritage des enfants soit atténuée ? Les enfants ont des droits. Les enfants issus de ces couples n’ont pas demandé à naître. A partir du moment où ils sont nés, il faut qu’ils aient des droits. La convention sur les droits des enfants est claire. En me situant de ce point de vue, je défends une valeur. Celle de la responsabilisation des adultes. Ils doivent assumer tous les actes qu’ils posent. Les enfants ne doivent pas être des victimes. Dans le régime polygamique, les parents, père et mère sont responsabilisés. Quelque part, les enfants sont protégés parce qu’ils ont clairement des droits à la protection, à l’héritage et cela ne doit souffrir d’aucune sanction.
Ces parents savent que la loi interdit la polygamie et ils se sont engagés…
A propos de loi, il y a des personnes qui vous diront qu’elles n’ont pas été consultées. Moi je dis que la démocratie est une loi. La légalisation de la polygamie participe aussi à la démocratie. Ceux que cela n’arrangent pas ne doivent pas être enfermés dans ce carcan, sous prétexte que c’est une loi. La loi doit évoluer.
Comment vous envisagez la légalisation de la polygamie ?
Je l’envisage en tant qu’option. Il faut faire très attention. On ne dit pas que tous les Ivoiriens doivent devenir polygames. Nous disons plutôt de donner la possibilité aux Ivoiriens que cela arrange, de choisir la polygynie (Ndlr polygamie masculine) comme option. Si une bonne partie du peuple opte pour la légalisation de la polygamie comme option, pourquoi on leur refuserait ce choix ? Il faut accorder cette liberté de choix aux individus.
Mais la multiplicité des partenaires n’expose-t-elle pas aux Mst et au Vih/Sida ?
Mais je vous dis qu’en légalisant la polygamie, il faut penser à mettre des conditions. C’est une pratique qui a toujours existé. Vous me parlez de Mst, mais les conditions doivent tout prévoir. Attention, lorsqu’on parle des Mst on peut leur dire de se protéger. Sur ce sujet les réalités sont palpables, il ne faut pas les occulter. Il y a même des femmes qui trompent leur mari. Ce ne sont pas que les hommes qui ramènent les Mst à la maison. Les gens contourneront toujours la monogamie. Dès que la loi est au dessus de la résistance humaine, elle est contournée. Tout le monde sait que moi Madame Kaba, je défends les droits de la femme en Côte d’Ivoire. Mais c’est en toute responsabilité que je défends la polygamie masculine comme option. Non pas parce que moi-même je suis dans un foyer polygame, ou bien que je sois menacée de polygamie, loin s’en faut. Sur plusieurs générations, c’est quelque chose qui n’existe pas dans ma famille. Mais je ne suis pas pour qu’on bloque ceux que ce choix arrange.
L’on pourrait vous dire que vous soutenez cette thèse parce que vous avez la chance d’être dans un foyer monogame que vous ignorez la douleur des femmes victimes de polygamie… !
Non mais je pratique au quotidien des femmes d’un certain âge qui pleurent tout simplement parce que leur mari veut les laisser tomber pour une autre femme. Les maris s’accrochent à la monogamie et refusent de les garder.
C’est donc par dépit qu’elles acceptent la polygamie ?
Ce n’est pas par dépit. Mais c’est parce que cela s’impose à elles. Elles ne peuvent pas faire autrement. Elles auraient bien voulu partager cet homme avec une autre, ne serait-ce même que pour préserver quelque chose qu’elles ont construit. Mais, là, le choix ne leur est même pas offert. Si on légalisait l’option de la polygamie, deux jeunes qui voudraient se marier auront le choix et sauraient à quoi s’en tenir. Mais quand on leur impose la polygamie dès le départ, ils n’ont même pas le choix. C’est cela que je dénonce.
Les femmes sont-elles prêtes à choisir la polygamie avant le mariage, si l’option est légalisée ?
Donner la possibilité à l’individu de choisir, c’est reconnaître à l’individu toute sa maturité.
A combien limiter le nombre des épouses dans une option polygamique ?
L’islam par exemple autorise quatre épouses. Mais ils sont rares les époux qui en arrivent là. En général, ce sont deux épouses. Ceux qui réussissent de prendre trois épouses, finissent rarement leur vie avec toutes ces trois. Il y en a une qui s’en va.
Est-ce que personnellement vous êtes à même d’accepter une rivale ?
Je me suis mariée au Gabon, un pays où la polygamie est autorisée. J’ai eu le choix. Mon mari aussi a eu la liberté de choix, nous avons opté pour la monogamie. Par la grâce de Dieu, mon mari et moi sommes toujours en vie. On ne sait jamais de quoi demain sera fait. S’il y a une personne pour qui il éprouve des sentiments et qu’il veut légaliser cette union, en ce moment, fort de sa parole conciliée dans des textes devant le maire, j’aurai les moyens pour réagir. Après plusieurs années de mariage, les mentalités peuvent évoluer. On peut devenir indulgente, cela ne veut pas dire qu’on n’a pas de sentiments. Avec l’option de la polygamie, la loi doit être appliquée dans toute sa rigueur de sorte même que celui qui choisit la monogamie reste fidèle.
Interview réalisée par N.D
Partagez vous l’idée des femmes qui pensent que la polygamie est une porte ouverte au désordre ?
La polygamie n’est pas légalisée en Côte d’Ivoire mais qu’est qu’on fait de ce nombre pléthorique d’enfants de la rue et dans la rue ? La démission des parents des foyers, lorsqu’ ils ne peuvent plus assumer leurs responsabilité empiètent sur les enfants. Les enfants ne mangent pas, ils ne sont pas scolarisés. Les enfants traînent à longueur de journée, les mamans n’en peuvent plus. Il n’y a même pas l’ombre d’un adulte dans la maison alors que nous sommes sous un régime monogamique légal. Ce n’est pas à la polygamie qu’il faut lancer l’opprobre.
Ne pensez vous pas que l’idée de la polygamie est dépassée ?
Non, je ne crois pas que ce soit dépassé. Nous avons des cas de polygames qui assument ce choix matrimonial, quoique cela ne soit pas légalisé. Ce qui existe pourtant dans le code coutumier qui est toujours en vigueur d’ailleurs. Et ce n’est pas moi qui vous apprendrai qu’il y a des hommes mariés légalement donc astreints à la fidélité, à l’obligation de n’avoir qu’une seule épouse mais qui quelque part, entretiennent une femme, une famille et des enfants, qui font aussi un deuxième foyer et on les appelle les deuxièmes bureaux.
Une légalisation n’est-elle pas une atteinte à la dignité de la femme ?
Je ne le crois pas du tout. Au contraire, je pense même que c’est pour valoriser quelque part la femme. La deuxième épouse, elle bénéficie d’un statut dans la légalisation de l’acte. Quelque part, pour tout citoyen qui tient à l’ordre social, le fait de la légalisation de la polygamie est quelque chose de positif.
Vous parlez d’ordre social et que faire des tensions de ménage ?
Même dans un foyer monogame, il y a toujours des tensions, soit avec le mari, soit avec la belle famille, soit même avec les enfants d’un mariage précédent. Ce sont des choses qui arrivent. L’idéal, serait que chaque épouse ait un domicile différent. Cela amoindrirait les tensions éventuelles. Entre les dents et la langue, il y a des histoires, à plus forte raison, entre deux êtres humains qui se disputent un même cœur.
Est-ce que le fait que les femmes vivent séparément règle la question de l’héritage ?
Pourquoi voulez-vous que la question de l’héritage des enfants soit atténuée ? Les enfants ont des droits. Les enfants issus de ces couples n’ont pas demandé à naître. A partir du moment où ils sont nés, il faut qu’ils aient des droits. La convention sur les droits des enfants est claire. En me situant de ce point de vue, je défends une valeur. Celle de la responsabilisation des adultes. Ils doivent assumer tous les actes qu’ils posent. Les enfants ne doivent pas être des victimes. Dans le régime polygamique, les parents, père et mère sont responsabilisés. Quelque part, les enfants sont protégés parce qu’ils ont clairement des droits à la protection, à l’héritage et cela ne doit souffrir d’aucune sanction.
Ces parents savent que la loi interdit la polygamie et ils se sont engagés…
A propos de loi, il y a des personnes qui vous diront qu’elles n’ont pas été consultées. Moi je dis que la démocratie est une loi. La légalisation de la polygamie participe aussi à la démocratie. Ceux que cela n’arrangent pas ne doivent pas être enfermés dans ce carcan, sous prétexte que c’est une loi. La loi doit évoluer.
Comment vous envisagez la légalisation de la polygamie ?
Je l’envisage en tant qu’option. Il faut faire très attention. On ne dit pas que tous les Ivoiriens doivent devenir polygames. Nous disons plutôt de donner la possibilité aux Ivoiriens que cela arrange, de choisir la polygynie (Ndlr polygamie masculine) comme option. Si une bonne partie du peuple opte pour la légalisation de la polygamie comme option, pourquoi on leur refuserait ce choix ? Il faut accorder cette liberté de choix aux individus.
Mais la multiplicité des partenaires n’expose-t-elle pas aux Mst et au Vih/Sida ?
Mais je vous dis qu’en légalisant la polygamie, il faut penser à mettre des conditions. C’est une pratique qui a toujours existé. Vous me parlez de Mst, mais les conditions doivent tout prévoir. Attention, lorsqu’on parle des Mst on peut leur dire de se protéger. Sur ce sujet les réalités sont palpables, il ne faut pas les occulter. Il y a même des femmes qui trompent leur mari. Ce ne sont pas que les hommes qui ramènent les Mst à la maison. Les gens contourneront toujours la monogamie. Dès que la loi est au dessus de la résistance humaine, elle est contournée. Tout le monde sait que moi Madame Kaba, je défends les droits de la femme en Côte d’Ivoire. Mais c’est en toute responsabilité que je défends la polygamie masculine comme option. Non pas parce que moi-même je suis dans un foyer polygame, ou bien que je sois menacée de polygamie, loin s’en faut. Sur plusieurs générations, c’est quelque chose qui n’existe pas dans ma famille. Mais je ne suis pas pour qu’on bloque ceux que ce choix arrange.
L’on pourrait vous dire que vous soutenez cette thèse parce que vous avez la chance d’être dans un foyer monogame que vous ignorez la douleur des femmes victimes de polygamie… !
Non mais je pratique au quotidien des femmes d’un certain âge qui pleurent tout simplement parce que leur mari veut les laisser tomber pour une autre femme. Les maris s’accrochent à la monogamie et refusent de les garder.
C’est donc par dépit qu’elles acceptent la polygamie ?
Ce n’est pas par dépit. Mais c’est parce que cela s’impose à elles. Elles ne peuvent pas faire autrement. Elles auraient bien voulu partager cet homme avec une autre, ne serait-ce même que pour préserver quelque chose qu’elles ont construit. Mais, là, le choix ne leur est même pas offert. Si on légalisait l’option de la polygamie, deux jeunes qui voudraient se marier auront le choix et sauraient à quoi s’en tenir. Mais quand on leur impose la polygamie dès le départ, ils n’ont même pas le choix. C’est cela que je dénonce.
Les femmes sont-elles prêtes à choisir la polygamie avant le mariage, si l’option est légalisée ?
Donner la possibilité à l’individu de choisir, c’est reconnaître à l’individu toute sa maturité.
A combien limiter le nombre des épouses dans une option polygamique ?
L’islam par exemple autorise quatre épouses. Mais ils sont rares les époux qui en arrivent là. En général, ce sont deux épouses. Ceux qui réussissent de prendre trois épouses, finissent rarement leur vie avec toutes ces trois. Il y en a une qui s’en va.
Est-ce que personnellement vous êtes à même d’accepter une rivale ?
Je me suis mariée au Gabon, un pays où la polygamie est autorisée. J’ai eu le choix. Mon mari aussi a eu la liberté de choix, nous avons opté pour la monogamie. Par la grâce de Dieu, mon mari et moi sommes toujours en vie. On ne sait jamais de quoi demain sera fait. S’il y a une personne pour qui il éprouve des sentiments et qu’il veut légaliser cette union, en ce moment, fort de sa parole conciliée dans des textes devant le maire, j’aurai les moyens pour réagir. Après plusieurs années de mariage, les mentalités peuvent évoluer. On peut devenir indulgente, cela ne veut pas dire qu’on n’a pas de sentiments. Avec l’option de la polygamie, la loi doit être appliquée dans toute sa rigueur de sorte même que celui qui choisit la monogamie reste fidèle.
Interview réalisée par N.D