Le gouvernement ivoirien a adopté en conseil des ministres un projet de loi portant création d'un fonds de développement et de soutien du transport. Une véritable bouffée d'oxygène pour le secteur du transport terrestre qui se trouve aujourd'hui, à bout de souffle, avec un parc auto des plus vieillissants.
Les transporteurs de voyageurs et de marchandises de Côte d'Ivoire verront peut-être le bout du tunnel, après une traversée du désert, accentuée par la crise militaro-politique qui a secoué le pays. Une situation qui a eu pour conséquence un vieillissement accentué du parc automobile des professionnels du secteur. Et les statistiques à ce niveau sont loin d'être reluisants. En effet, une récente étude effectuée par l'Agence des transports urbains (Agetu) révèle que l'état technique de notre parc automobile est désastreux. Du fait que l'âge moyen des véhicules de transport est marqué par une nette tendance au vieillissement. Ce que ne cesse de déplorer Touré Adama, président de la Coordination nationale des gares routières de Côte d'Ivoire (Cngr-ci) et les syndicats de transporteurs rencontrés.
Des véhicules clinquants et inéligibles à la visite technique
Il ressort des statistiques de l'Agetu que tous les types de véhicules de transport souffrent de la même tare. Au niveau des minibus, communément appelés " Gbaka ", on note que seulement 9% ont moins de 5 ans. Quand 31% se situent entre 6 et 10. Tandis que 33% ont entre 11 et 15 ans. Les mêmes études indiquent que 18% des gbaka ont un âge, compris entre 16 et 20 ans. Au bas du tableau, on retrouve les "antiquités ". En effet, 4% des minicars ont entre 21 et 25 ans. A côté des 3% dont l'âge varie entre 26 et 30 ans, contre 1% qui présente un âge au-delà de 30 ans. Sur la base d'un comptage systématique des véhicules effectué par les services de Zorro Bi Nangoné, Dg de l'Agetu, il est établi que sur 4000 gbaka dans le District d'Abidjan en 2008, seulement 2288, inscrits à cette agence, étaient éligibles à la visite technique. Soit un peu plus de 50%. Au niveau des taxis communaux et intercommunaux dits "wôrô-wôrô", le tableau est plus sombre. Seulement 0,5 % de ces véhicules ont moins de 5 ans, contre 0,8% situé entre 6 et 10 ans. Le gros du lot, soit 70%, a entre 16 et 20 ans. Ce qui représente un âge moyen de 19 ans. Les études ont montré que le secteur des “wôrô-wôrô” est mal maîtrisé, aussi bien en terme d'entrée sur le marché qu'en terme de contrôle. Dans une fourchette basse, en raison de l'absence d'un fichier précis à cause de l'anarchie, les statistiques provisoires indiquent que sur 15.000 "wôrô-wôrô" recensés dans les dix communes d'Abidjan, seulement 3744 étaient éligibles à la visite technique. En ce qui concerne les “taxis-compteurs”, l'âge moyen est monté à plus de 15 ans. On note juste 0,6 % de taxi-compteurs ayant moins de 5 ans. Quand 92% ont un âge compris entre 11 et 20 ans. Soit 45% entre 11 et 15 ans et 47% entre 16 et 20 ans. Il faut indiquer que depuis 2006, une réforme est en cours pour fixer l'âge maximum des taxis-compteurs à 12 ans. Mais, au regard de la réalité du terrain, une telle réforme éliminerait 80% des taxis-compteurs de la circulation.
300 milliards par an dans les caisses de l'Etat
Toutes choses qui ne sont pas sans conséquences sur les revenus des transporteurs. A en croire la Cngr-ci qui a diligenté une enquête auprès des transporteurs, les opérateurs du milieu perdent plusieurs dizaines de milliards de nos francs par année, dans un secteur qui s'est solidement enraciné dans l'informel. Alors que le secteur, un pilier de l'économie du pays, rapporte à l'Etat de Côte d'Ivoire plus de 300 milliards de FCfa chaque année. Les frais élevés d'entretien des véhicules de plus en plus vieillissants et qui consomment de plus en plus de carburant dont le prix ne cesse de grimper, le faible taux de rotation et de remplissage sont autant de boulets que les professionnels du transport traînent au fur et à mesure que le parc auto tombe en désuétude. Sans compter les effets pervers du racket policier, les désagréments causés par les barrages anarchiques qui ralentissent la fluidité routière, les actes d'extorsion de fonds posés par des pseudo syndicats mafieux et autres prélèvements parallèles qui pénalisent les opérateurs du secteur. Dans une totale anarchie. Les transporteurs, pris au piège, déplorent le fait qu'il leur est aujourd'hui, impossible d'acquérir des véhicules neufs.
La filière de “France au revoir”
Selon Touré Adama, président de la Coordination nationale des gares routières de Côte d'Ivoire (Cngr-ci), les coûts des véhicules neufs, devenus exorbitants du fait de l'inflation, sont quasiment hors de leur portée. Du coup, il ne reste plus qu'une alternative : les véhicules d'occasion dits " France au revoir " qui inondent le marché ivoirien, via des pays de la sous-région comme le Bénin et le Togo. Avec tous les inconvénients que cela présente en termes, rappelons-le, de coût d'entretien et de conséquences néfastes sur l'environnement. En effet, il ne fait aucun doute que les véhicules d'occasion qui s'amoncellent dans notre pays sont une source importante de pollution atmosphérique qui va de plus en plus croissant. Par ailleurs, il est démontré que ces véhicules très souvent mal adaptés à notre climat, soumettent, pendant les longs trajets, les usagers du transport à un fort taux de stress. Causant des problèmes pernicieux et pas toujours visibles de santé aux populations. Hélas, le secteur du transport étant considéré comme une activité à risque, il est peu probable que, dans le contexte actuel, les banques s'engagent à le financer.
Les effets désastreux de la guerre
S'il y a un secteur qui a directement souffert de la guerre, c'est bien le secteur des transports de voyageurs et de marchandises. De nombreuses compagnies de transport se sont trouvées sinistrées, au plus fort de la crise armée. Beaucoup de sociétés ont perdu une partie importante de leur matériel roulant et de leurs installations d'exploitation, après les actes de saccage et de pillages qui ont accompagné les premiers instants de la guerre. Les pertes subies par les transporteurs pendant ces moments douloureux sont énormes. Des dizaines de milliards de nos francs et des investissements lourds perdus. Conséquence, beaucoup de compagnies de transport qui ont tout perdu, n'ont eu d'autre choix que de mettre la clé sous le paillasson. Une série de faillite qui a entraîné la mise au chômage de milliers de personnes qui se sont retrouvées à la rue. Quand l'on sait que ce secteur, bien que dans l'informel, absorbe une bonne frange de la population jeune en termes d'emplois, on peut dire que le Fonds de développement et de soutien au secteur du transport, s'il était adopté maintenant par l'Assemblée nationale, permettrait aux acteurs des transports de retrouver un second souffle, après la tempête, pour créer des emplois.
Des gares routières qui ternissent l'image de la Côte d'Ivoire
De toute évidence, sur un tableau aussi sombre, on ne peut pas trouver des gares routières qui soient à l'image d'une Côte d'Ivoire qui se veut un modèle dans la sous-région, en terme de développement des transports. Comme l'a indiqué Touré Adama, président de la Cngr-ci, la gare routière d'Adjamé est une honte pour le District d'Abidjan et pour la Côte d'Ivoire. Dans la poussière ou la boue selon la saison, dans le désordre de la circulation chaotique et des implantations anarchiques, même les boutiques et les trottoirs sont devenus des gares où les agressions sont monnaie courante. Le décor n'est pas différent dans les autres villes du pays. Et pourtant, ce ne sont pas les projets qui ont manqué dans le sens de doter le pays de gares routières dignes de ce nom. L'ex- locataire du ministère des Transports avait, en son temps, révélé que des contacts avaient été pris avec des partenaires au développement pour la construction d'une gare à Abidjan. Le projet, caressé par Anaky Kobenan, avait été vaguement évalué à un peu plus de 3 milliards de Fcfa. On peut donc féliciter le ministère des transports d'avoir entendu le cri de cœur des transporteurs. Le projet de loi portant création du fonds du transport est un pas important vers l'organisation et le financement du secteur qui constitue un poumon de l'économie ivoirienne. La balle se trouve désormais dans le camp des parlementaires. Et les regards des transporteurs sont tournés vers l'Assemblée nationale.
K. Kouassi Maurice
Les transporteurs de voyageurs et de marchandises de Côte d'Ivoire verront peut-être le bout du tunnel, après une traversée du désert, accentuée par la crise militaro-politique qui a secoué le pays. Une situation qui a eu pour conséquence un vieillissement accentué du parc automobile des professionnels du secteur. Et les statistiques à ce niveau sont loin d'être reluisants. En effet, une récente étude effectuée par l'Agence des transports urbains (Agetu) révèle que l'état technique de notre parc automobile est désastreux. Du fait que l'âge moyen des véhicules de transport est marqué par une nette tendance au vieillissement. Ce que ne cesse de déplorer Touré Adama, président de la Coordination nationale des gares routières de Côte d'Ivoire (Cngr-ci) et les syndicats de transporteurs rencontrés.
Des véhicules clinquants et inéligibles à la visite technique
Il ressort des statistiques de l'Agetu que tous les types de véhicules de transport souffrent de la même tare. Au niveau des minibus, communément appelés " Gbaka ", on note que seulement 9% ont moins de 5 ans. Quand 31% se situent entre 6 et 10. Tandis que 33% ont entre 11 et 15 ans. Les mêmes études indiquent que 18% des gbaka ont un âge, compris entre 16 et 20 ans. Au bas du tableau, on retrouve les "antiquités ". En effet, 4% des minicars ont entre 21 et 25 ans. A côté des 3% dont l'âge varie entre 26 et 30 ans, contre 1% qui présente un âge au-delà de 30 ans. Sur la base d'un comptage systématique des véhicules effectué par les services de Zorro Bi Nangoné, Dg de l'Agetu, il est établi que sur 4000 gbaka dans le District d'Abidjan en 2008, seulement 2288, inscrits à cette agence, étaient éligibles à la visite technique. Soit un peu plus de 50%. Au niveau des taxis communaux et intercommunaux dits "wôrô-wôrô", le tableau est plus sombre. Seulement 0,5 % de ces véhicules ont moins de 5 ans, contre 0,8% situé entre 6 et 10 ans. Le gros du lot, soit 70%, a entre 16 et 20 ans. Ce qui représente un âge moyen de 19 ans. Les études ont montré que le secteur des “wôrô-wôrô” est mal maîtrisé, aussi bien en terme d'entrée sur le marché qu'en terme de contrôle. Dans une fourchette basse, en raison de l'absence d'un fichier précis à cause de l'anarchie, les statistiques provisoires indiquent que sur 15.000 "wôrô-wôrô" recensés dans les dix communes d'Abidjan, seulement 3744 étaient éligibles à la visite technique. En ce qui concerne les “taxis-compteurs”, l'âge moyen est monté à plus de 15 ans. On note juste 0,6 % de taxi-compteurs ayant moins de 5 ans. Quand 92% ont un âge compris entre 11 et 20 ans. Soit 45% entre 11 et 15 ans et 47% entre 16 et 20 ans. Il faut indiquer que depuis 2006, une réforme est en cours pour fixer l'âge maximum des taxis-compteurs à 12 ans. Mais, au regard de la réalité du terrain, une telle réforme éliminerait 80% des taxis-compteurs de la circulation.
300 milliards par an dans les caisses de l'Etat
Toutes choses qui ne sont pas sans conséquences sur les revenus des transporteurs. A en croire la Cngr-ci qui a diligenté une enquête auprès des transporteurs, les opérateurs du milieu perdent plusieurs dizaines de milliards de nos francs par année, dans un secteur qui s'est solidement enraciné dans l'informel. Alors que le secteur, un pilier de l'économie du pays, rapporte à l'Etat de Côte d'Ivoire plus de 300 milliards de FCfa chaque année. Les frais élevés d'entretien des véhicules de plus en plus vieillissants et qui consomment de plus en plus de carburant dont le prix ne cesse de grimper, le faible taux de rotation et de remplissage sont autant de boulets que les professionnels du transport traînent au fur et à mesure que le parc auto tombe en désuétude. Sans compter les effets pervers du racket policier, les désagréments causés par les barrages anarchiques qui ralentissent la fluidité routière, les actes d'extorsion de fonds posés par des pseudo syndicats mafieux et autres prélèvements parallèles qui pénalisent les opérateurs du secteur. Dans une totale anarchie. Les transporteurs, pris au piège, déplorent le fait qu'il leur est aujourd'hui, impossible d'acquérir des véhicules neufs.
La filière de “France au revoir”
Selon Touré Adama, président de la Coordination nationale des gares routières de Côte d'Ivoire (Cngr-ci), les coûts des véhicules neufs, devenus exorbitants du fait de l'inflation, sont quasiment hors de leur portée. Du coup, il ne reste plus qu'une alternative : les véhicules d'occasion dits " France au revoir " qui inondent le marché ivoirien, via des pays de la sous-région comme le Bénin et le Togo. Avec tous les inconvénients que cela présente en termes, rappelons-le, de coût d'entretien et de conséquences néfastes sur l'environnement. En effet, il ne fait aucun doute que les véhicules d'occasion qui s'amoncellent dans notre pays sont une source importante de pollution atmosphérique qui va de plus en plus croissant. Par ailleurs, il est démontré que ces véhicules très souvent mal adaptés à notre climat, soumettent, pendant les longs trajets, les usagers du transport à un fort taux de stress. Causant des problèmes pernicieux et pas toujours visibles de santé aux populations. Hélas, le secteur du transport étant considéré comme une activité à risque, il est peu probable que, dans le contexte actuel, les banques s'engagent à le financer.
Les effets désastreux de la guerre
S'il y a un secteur qui a directement souffert de la guerre, c'est bien le secteur des transports de voyageurs et de marchandises. De nombreuses compagnies de transport se sont trouvées sinistrées, au plus fort de la crise armée. Beaucoup de sociétés ont perdu une partie importante de leur matériel roulant et de leurs installations d'exploitation, après les actes de saccage et de pillages qui ont accompagné les premiers instants de la guerre. Les pertes subies par les transporteurs pendant ces moments douloureux sont énormes. Des dizaines de milliards de nos francs et des investissements lourds perdus. Conséquence, beaucoup de compagnies de transport qui ont tout perdu, n'ont eu d'autre choix que de mettre la clé sous le paillasson. Une série de faillite qui a entraîné la mise au chômage de milliers de personnes qui se sont retrouvées à la rue. Quand l'on sait que ce secteur, bien que dans l'informel, absorbe une bonne frange de la population jeune en termes d'emplois, on peut dire que le Fonds de développement et de soutien au secteur du transport, s'il était adopté maintenant par l'Assemblée nationale, permettrait aux acteurs des transports de retrouver un second souffle, après la tempête, pour créer des emplois.
Des gares routières qui ternissent l'image de la Côte d'Ivoire
De toute évidence, sur un tableau aussi sombre, on ne peut pas trouver des gares routières qui soient à l'image d'une Côte d'Ivoire qui se veut un modèle dans la sous-région, en terme de développement des transports. Comme l'a indiqué Touré Adama, président de la Cngr-ci, la gare routière d'Adjamé est une honte pour le District d'Abidjan et pour la Côte d'Ivoire. Dans la poussière ou la boue selon la saison, dans le désordre de la circulation chaotique et des implantations anarchiques, même les boutiques et les trottoirs sont devenus des gares où les agressions sont monnaie courante. Le décor n'est pas différent dans les autres villes du pays. Et pourtant, ce ne sont pas les projets qui ont manqué dans le sens de doter le pays de gares routières dignes de ce nom. L'ex- locataire du ministère des Transports avait, en son temps, révélé que des contacts avaient été pris avec des partenaires au développement pour la construction d'une gare à Abidjan. Le projet, caressé par Anaky Kobenan, avait été vaguement évalué à un peu plus de 3 milliards de Fcfa. On peut donc féliciter le ministère des transports d'avoir entendu le cri de cœur des transporteurs. Le projet de loi portant création du fonds du transport est un pas important vers l'organisation et le financement du secteur qui constitue un poumon de l'économie ivoirienne. La balle se trouve désormais dans le camp des parlementaires. Et les regards des transporteurs sont tournés vers l'Assemblée nationale.
K. Kouassi Maurice