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Santé Publié le mercredi 11 novembre 2009 | Nuit & Jour

Médicament de la rue - Le silence coupable du ministère de la santé

Les médicaments de la rue ont fait une percée fulgurante à tel enseigne qu’ils tiennent une place non moins importante pour l’Ivoirien. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette ruée vers les médicaments de la rue. La pauvreté galopante de la population, le manque d’informations sur les dangers auxquels expose la prise de ces médicaments, la proximité des vendeurs de médicaments de la rue. Cependant depuis près de deux ans, l’ordre des pharmaciens de Côte d’Ivoire s’est saisi du dossier et est monté au créneau pour dénoncer. « Une mafia structurée et disposant d’appuis en haut lieu » Décryptage.

Le combat s’annonce rude entre deux clans antagonistes. D’une part la présidence du conseil national de l’ordre des pharmaciens de Côte d’Ivoire, qui utilise tous les moyens légaux et conventionnels pour enrayer le phénomène des médicaments de la rue parce que « c’est une haute et une grosse perte pour l’industrie pharmaceutique en Côte d’Ivoire » et d’autre part cette ‘’mafia’’ qui profite de ce commerce illicite, structurée et comprenant en son sein des pharmaciens. Les employés d’un pharmacien ont été pris avec une fourgonnette chargée de médicaments destinés au marché de la rue. Au commissariat les employés ont avoué agir sur la demande de leur employeur, un pharmacien. Le contenu de la fourgonnette était estimé à 17 millions de F CFA. Une fois l’affaire au commissariat, la vérité a certes éclatée, mais les employés ont été libérés et cette décision venait « d’en haut », selon les dires du commissaire. Cette information a eu pour qualité de mettre à jour les positions des deux clans. La décision de radier l’employeur (pharmacien) n’a pas été appliquée par le ministère de la santé et de l’hygiène publique au grand dam de l’ordre national des pharmaciens de Côte d’Ivoire. Qui tire les ficelles ou alors qui protègent ces hors la loi ? Pourquoi l’affaire est traitée avec autant de légèreté par le ministère alors que le forfait est avéré ? En toile de fond, la fermeture du site névralgique du commerce des médicaments de la rue. Adjamé Roxy. L’affaire est d’autant plus préoccupante que cette mafia réputée structurée et bénéficiant des appuis administratifs, est moyennement appréciée par l’ivoirien moyen en proie au difficulté de tous genres : manque de couverture d’assurance maladie, pauvreté et manque d’informations sur les risques réels des médicaments de la rue.

Pourquoi Adjamé-Roxy doit être fermé

Il a fait la promotion des médicaments de la rue. C’est ‘’le marché de gros de ces médicaments’’ et il bénéficie d’une indulgence quasi-totale de la part de la police (le commissariat du 3e arrondissement se trouve à quelque 300 mètres) et pourtant année après année, ce marché devient incontournable. « Les policiers ont souvent fait des visites musclées ici, mais après quelques tractations les commerçantes arrêtées sont relâchées moyennant quelques sommes d’argent. En gros, elles ont l’air presque indétrônables car ici l’argent est le nerf de la guerre ». Pour beaucoup d’Ivoiriens, cette descente est la poudre aux yeux car le commerce illicite des médicaments de la rue prospère. Malgré l’internationalisation de la lutte contre ce fléau, les résultats sur le terrain sont minces. Malgré cet état de fait, le conseil national de l’ordre des avocats ne perd pas espoir, pour ces syndicalistes, « la réglementation de ce secteur y va de la prospérité de toute l’industrie pharmaceutique. Ce secteur est resté l’un des rares secteur d’activité compétitifs pendant les années de crise », a renchérit le docteur Kouassi Parfait. ‘’Le CNOP-CI va continuer sa lutte contre les médications de la rue. A cet effet, l’institution a procédé à l’instauration de la journée internationale de la lutte contre le médicaments de la rue et au lancement de sa compagne contre ce fléau ». Pourtant l’optimisme de ce leader syndical contraste avec la progression des ventes de ces médicaments de la rue qui par ailleurs ont été dopés par l’arrivée massive des médicaments Chinois qui font une part belle aux aphrodisiaques dont raffole une bonne partie de la jeunesse. « Fermer le marché d’Adjamé Roxy pourrait être un symbole fort de la lutte contre les médicaments prohibés », a reconnu, un étudiant en 6e année de pharmacie mais « hélas, poursuit-il, cette démarche somme toute normale a aujourd’hui valeur de rêve tant les tenants de cette mafia maîtrisent l’appareil de distribution des médicaments ; de l’administration jusqu’aux détaillants ». Ce phénomène dure depuis plus de deux décennies et les différents ministres de la santé qui se sont succédés n’ont pas pu enrayer ce phénomène au grand dam des professionnels de la filière médicament en Côte d’Ivoire. Lors de cette curieuse indulgence, les Ivoiriens commencent à monter au créneau et la prise de conscience est désormais réelle. « Les médicaments de la rue tuent », « danger, il faut stopper la propagation des médicaments de la rue », pouvons-nous lire sur les plaques lors des compagnes de lutte contre le danger qu’est l’avancée des médicaments de la rue. Après cette étape, il faudra s’attaquer à la racine : venir à bout de cette mafia qui fonctionne si bien.

Williams Arthur Prescot

Photo : Une étagère portant des médicaments prohibés

Légende : Ces médicaments mettent en danger la santé des Ivoiriens.


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