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Sport Publié le samedi 5 décembre 2009 | Nord-Sud

Interview -Philippe Troussier (Suite et Fin) : “Vahid Halilhodzic doit s’entendre avec Guillou…”

Dans cette seconde partie de l’interview de Philippe Omar Troussier, l’ex-défenseur du Red Star, du Fc Rouen ou encore du stade de Reims, évoque la dernière sortie de route de Jean-Marc Guillou qui a allumé Vahid Halilhodzic. Il aborde également le cas du sélectionneur des Bleus, Raymond Domenech, fortement critiqué en France.


Récemment, Jean-Marc Guillou, le « Père des Académiciens », a tenu des propos très durs à l’encontre de Vahid Halilhodzic. Ses propos ont même créé un petit feu de brousse au pays. Qu’en pensez-vous ?

Il est vrai que la philosophie de Jean-Marc Guillou est basée sur la production du jeu, la conservation du ballon, l’art de maîtriser le ballon, l’art de faire vivre collectivement son groupe, l’art de jouer au football, l’art de manœuvrer etc. Evidemment autant cette philosophie fut critiquée par les décideurs du football, autant elle a offert de la qualité à la Côte d’Ivoire. Par sa méthode, en effet, Jean-Marc Guillou a réussi à faire naître des talents de très haut niveau.


Cela suffit-il pour qu’il « insulte » Vahid Halilhodzic comme il l’a fait ?

Je connais l’homme. Il a eu des expériences d’entraîneur et on ne peut pas dire qu’elles ont été des réussites…


Etes-vous un partisan de la philosophie de Guillou ?

Je trouve que sa vision du football est trop poétique et ne donne pas de résultats.


Pourquoi selon vous ?
Simplement parce qu’elle manque de rigueur.


Vahid Halilhodzic n’apporte-t-il pas cette rigueur aux Eléphants ?

Justement, tout le monde reconnaît que cet entraîneur est rigoureux. Il a certainement automatisé certains comportements. Il a peut-être obligé certains joueurs ivoiriens à être au service des autres et de se montrer plus disciplinés.


Sentez-vous les effets ?

Un peu car les Eléphants jouent désormais avec moins de folie mais avec plus de rigueur. Je crois que l’idéal serait de trouver un compromis entre l’école Jean-Marc Guillou qui colle bien à la mentalité africaine. Mais il ne faut jamais oublier que c’est avec une belle organisation et une belle discipline que l’on obtient des résultats.


Qu’auriez-vous fait si vous étiez à la place de Vahid Halilhodzic ?

Les deux entraîneurs doivent se réconcilier afin de servir l’intérêt du football ivoirien.


Cela est-il possible ?

C’est la condition pour trouver un bon équilibre dans le groupe.


Quels commentaires faites-vous de la main de Thierry Henry face à l’Irlande qui continue de faire jaser en France ?

C’était carrément du basket-ball ! C’est une main volontaire qui a permis de ramener le ballon sur l’aire de jeu. C’est carrément une technique de basket-ball. C’est une technique qui doit être sanctionnée par la Fifa.


Entre Thierry Henry et l’arbitre de la rencontre, qui est à condamner ?

Dans cette histoire, le premier à condamner est l’arbitre. Thierry Henry manipule le cuir par réflexe ou par volonté certes mais, le problème est que l’arbitre avec son placement n’a rien vu.


La qualification de la France pour le Mondial 2010 s’est faite par césarienne…
On peut le dire… Ce que je regrette, c’est que la France se soit qualifiée suite à cette situation. Cela n’est pas à notre honneur surtout après avoir revu les images et après le témoignage de Thierry Henry. J’ai un peu honte en tant que Français d’aller au Mondial avec cette image de tricheur.


Que faut-il faire ?

Je fais partie des gens qui auraient choisi, par fair-play, de proposer que la rencontre soit rejouée. Cela aurait été une bonne chose en tout cas de rejouer ce match contre l’Irlande. Cela aurait été une bonne chose que la Fédération française de football (Fff) reste ouverte à une possibilité de pouvoir rejouer ce match car tout le monde a vu la faute. Je suis certain que plusieurs Français souffrent en silence et pleurent même avec les Irlandais qui ont fait un grand match ce jour-là.


Etes-vous pour ou contre la vidéo dans le football ?

En dehors du gardien de but et des deux défenseurs irlandais, personne n’a vu la main de Thierry Henry. Même le public n’a rien vu. La polémique n’était pas au niveau du stade. Cela pour dire que ça a été une erreur et elle reste humaine. Malheureusement, le fait qu’on soit assis dans un fauteuil à la maison et qu’on puisse revoir l’action deux cent fois à la télévision est ce qui fait que l’arbitrage est vilipendé. J’ai donc envie de dire non pour la vidéo car on ne peut pas arrêter chaque fois les rencontres pour contestations.


Raymond Domenech, le sélectionneur français, mérite-t-il de poursuivre l’aventure avec les Bleus ?

Sur l’objectif atteint, je dirais oui. Ce qu’on demande à un entraîneur, en effet, c’est d’atteindre un objectif. Quand on voit aussi qu’avec Domenech les Bleus ont terminé vice-champions du monde, on peut se dire qu’il n’y a pas de problème. Maintenant, en interne, ce que représente Raymond Domenech dans le cœur des Français ou chez certains joueurs, il serait bien qu’il y ait une discussion. Dans certains pays, pour ne pas les citer, il aurait été remercié.


Les Bleus vous intéressent toujours ?

J’ai eu la chance d’être sollicité par la Fédération française de football il y a quelques années. Notamment après le Mondial 2002. Mais aujourd’hui je suis dans une autre dynamique, j’ai conscience qu’il y a des entraîneurs plus expérimentés que moi ou plus aimés que moi dans les cœurs des Français. Je pense à Laurent Blanc qui fait un super travail avec Bordeaux. Je pense aussi à Didier Deschamps. Ces deux-là semblent plus à l’aise que moi pour pouvoir défendre les intérêts de l’équipe de France dans les années à venir.


Où en êtes-vous avec la religion musulmane que vous avez choisie il y a quelques années ?

C’est un cheminement spirituel que j’ai souhaité faire. Je vis dans un pays (Maroc) musulman. J’ai adopté des enfants musulmans. Pour moi, devenir musulman était un acte d’amour par rapport au Maroc et surtout pour mettre mes enfants dans les meilleures conditions d’équilibre. Et tout cela ne regarde que ma conscience personnelle.


Préférez-vous être appelé Philippe ou Omar ?

Mon histoire commence avec Philippe et se termine avec Omar. Selon les endroits où je me retrouve, j’utilise l’un ou l’autre. Je n’ai pas de préférence. Je suis comme vous l’avez dit, un globe-trotter. Je suis un homme de ce monde. Et j’ai la chance de constater la différence entre les peuples, entre les différentes cultures.


Entretien réalisé par Choilio Diomandé et Guy-Florentin Yaméogo
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