Pendant au moins 24 heures, en Côte d'Ivoire, un homme a ravi la vedette à ATT, Salif Kéita, Stéphane Kanouté, Oumou Sangaré et autres stars maliennes.
La nouvelle étoile montante s'appelle Kalilou Thiéro, un respectable chef de secteur à Ségou, au Mali, qui fut chauffeur de Félix Houphouët-Boigny, pendant 40 ans, dit-il. Le très respectable vieil homme a été révélé aux Ivoiriens par Rfi. C'est cette station de radio, en effet, qui a suscité l'intérêt autour du patriarche, en diffusant une interview du rédacteur en chef d'un périodique malien, « Le Ségovien ». Lequel rédacteur en chef expliquait avec jubilation qu'il a déniché un scoop : l'interview de quelqu'un qui connaissait presqu'intimement le Bélier de Yamoussoukro, pour l'avoir pratiqué pendant près de quatre décennies. Kalilou Thiéro dit « Bakalilou » a donc rendu son témoignage. Avec, on s'en doute, les effets sulfureux qui ont suivi cette phrase, que les journaux responsables, ont caviardé : « Alassane est bien un burkinabé ». Personnellement, j'ai été interpellé sur la fiabilité des propos du vieil homme, âgé de quatre-vingt ans. Kalilou Thiéro affirme ceci : « En ce qui concerne Alassane, ses relations avec Houphouët datent de son séjour en tant que fonctionnaire international à Dakar puis à Abidjan, sinon Alassane est bien un burkinabé mais détesté par Sankara. Houphouët a donc sauté sur l'occasion pour contrer Sankara en le nommant Premier Ministre ». L'ancien chauffeur du président Houphouët-Boigny a commis plusieurs méprises graves. D'abord celle-ci. Comment Félix Houphouët-Boigny pouvait-il nommer Alassane Ouattara, en avril 1989, pour faire mal à Thomas Sankara, qui était mort depuis le 15 octobre 1987, à 16 heures ? Il y a un anachronisme manifeste, dérangeant. Ensuite, les faits démontrent qu'Houphouët-Boigny a connu Alassane Ouattara depuis ses années d'études aux Etats-Unis, au Drexel Institute of Technology et surtout pendant ses études d'économie à l'université de Pennsylvanie, à Philadelphie. Henri Konan Bédié lui-même raconte dans son livre : « Les chemins de ma vie » comment Houphouët-Boigny lui avait confié le jeune Alassane, pendant qu'il était ambassadeur aux Usa. Avant d'entrer à la Bceao, à Dakar, Alassane Ouattara a été recruté au Fmi, en tant qu'économiste junior de nationalité ivoirienne. Puis d'aller gravir les échelons à la Bceao jusqu'à en devenir le gouverneur.
Enfin, le point que j'ai le plus trouvé à polémique, c'est cette affirmation selon laquelle, en 1990, « tout était presque au point pour qu'Houphouët désigne Gbagbo comme chef du Gouvernement ». Selon donc ce témoignage, immédiatement après la réintroduction du multipartisme en Côte d'Ivoire, Houphouët-Boigny était prêt à partager son pouvoir avec son opposant le plus intransigeant et le plus redoutable. Au moment où Laurent Gbagbo mobilisait des centaines de milliers de personnes chaque jour dans les rues pour vilipender le Vieux, attaquer son régime et stigmatiser sa gouvernance trentenaire, est-il raisonnable de penser que ce stratège qu'était « Nanan » aurait pris le risque de confier «son» pouvoir à ce politique intrépide de 45 ans, bouillonnant, socialiste, marxisant ? N'était-ce pas prendre le risque de se faire «bourguibiser » par un chef de gouvernement, qui savait pouvoir compter sur la rue et sur une partie des forces de l'ordre pour imposer son pouvoir ? Notre propre expérience nous amène à douter d'un tel schéma. Le fait que ce témoignage apparaisse en pleine campagne présidentielle et fasse ressortir une ritournelle vieille de seize ans, à savoir qu'Alassane Ouattara n'est pas ivoirien mais burkinabé, ôte beaucoup de saveur à ce témoignage qui aurait pu être sincèrement édifiant sur le vécu quotidien du premier chef d'Etat ivoirien.
Touré Moussa
La nouvelle étoile montante s'appelle Kalilou Thiéro, un respectable chef de secteur à Ségou, au Mali, qui fut chauffeur de Félix Houphouët-Boigny, pendant 40 ans, dit-il. Le très respectable vieil homme a été révélé aux Ivoiriens par Rfi. C'est cette station de radio, en effet, qui a suscité l'intérêt autour du patriarche, en diffusant une interview du rédacteur en chef d'un périodique malien, « Le Ségovien ». Lequel rédacteur en chef expliquait avec jubilation qu'il a déniché un scoop : l'interview de quelqu'un qui connaissait presqu'intimement le Bélier de Yamoussoukro, pour l'avoir pratiqué pendant près de quatre décennies. Kalilou Thiéro dit « Bakalilou » a donc rendu son témoignage. Avec, on s'en doute, les effets sulfureux qui ont suivi cette phrase, que les journaux responsables, ont caviardé : « Alassane est bien un burkinabé ». Personnellement, j'ai été interpellé sur la fiabilité des propos du vieil homme, âgé de quatre-vingt ans. Kalilou Thiéro affirme ceci : « En ce qui concerne Alassane, ses relations avec Houphouët datent de son séjour en tant que fonctionnaire international à Dakar puis à Abidjan, sinon Alassane est bien un burkinabé mais détesté par Sankara. Houphouët a donc sauté sur l'occasion pour contrer Sankara en le nommant Premier Ministre ». L'ancien chauffeur du président Houphouët-Boigny a commis plusieurs méprises graves. D'abord celle-ci. Comment Félix Houphouët-Boigny pouvait-il nommer Alassane Ouattara, en avril 1989, pour faire mal à Thomas Sankara, qui était mort depuis le 15 octobre 1987, à 16 heures ? Il y a un anachronisme manifeste, dérangeant. Ensuite, les faits démontrent qu'Houphouët-Boigny a connu Alassane Ouattara depuis ses années d'études aux Etats-Unis, au Drexel Institute of Technology et surtout pendant ses études d'économie à l'université de Pennsylvanie, à Philadelphie. Henri Konan Bédié lui-même raconte dans son livre : « Les chemins de ma vie » comment Houphouët-Boigny lui avait confié le jeune Alassane, pendant qu'il était ambassadeur aux Usa. Avant d'entrer à la Bceao, à Dakar, Alassane Ouattara a été recruté au Fmi, en tant qu'économiste junior de nationalité ivoirienne. Puis d'aller gravir les échelons à la Bceao jusqu'à en devenir le gouverneur.
Enfin, le point que j'ai le plus trouvé à polémique, c'est cette affirmation selon laquelle, en 1990, « tout était presque au point pour qu'Houphouët désigne Gbagbo comme chef du Gouvernement ». Selon donc ce témoignage, immédiatement après la réintroduction du multipartisme en Côte d'Ivoire, Houphouët-Boigny était prêt à partager son pouvoir avec son opposant le plus intransigeant et le plus redoutable. Au moment où Laurent Gbagbo mobilisait des centaines de milliers de personnes chaque jour dans les rues pour vilipender le Vieux, attaquer son régime et stigmatiser sa gouvernance trentenaire, est-il raisonnable de penser que ce stratège qu'était « Nanan » aurait pris le risque de confier «son» pouvoir à ce politique intrépide de 45 ans, bouillonnant, socialiste, marxisant ? N'était-ce pas prendre le risque de se faire «bourguibiser » par un chef de gouvernement, qui savait pouvoir compter sur la rue et sur une partie des forces de l'ordre pour imposer son pouvoir ? Notre propre expérience nous amène à douter d'un tel schéma. Le fait que ce témoignage apparaisse en pleine campagne présidentielle et fasse ressortir une ritournelle vieille de seize ans, à savoir qu'Alassane Ouattara n'est pas ivoirien mais burkinabé, ôte beaucoup de saveur à ce témoignage qui aurait pu être sincèrement édifiant sur le vécu quotidien du premier chef d'Etat ivoirien.
Touré Moussa