La décision du retour à l’uniforme kaki prise par le ministère de la Sécurité le mois dernier suscite un mécontentement au sein de la police. Surtout que ces ensembles leur sont vendus aux agents.
Il y a à peine deux mois, on les rencontrait encore aux différents carrefours dans leur treillis bleu.
Mais depuis bientôt un mois, les agents de l’Unité de régulation de la circulation (Urc) sont tous métamorphosés. En lieu et place de leurs treillis sombres et délavés pour la majorité, ces agents arborent aujourd’hui fièrement la tenue kaki. «On ne sait vraiment pas d’où est venue la décision, mais c’est le commissaire du corps urbain qui a décidé depuis le mois dernier, que nous portions désormais la tenue kaki qui est d’ailleurs celle qui nous est appropriée», explique une jeune dame sous-officier de police postée au carrefour de Williamsville. Sans pouvoir nous donner les raisons profondes de ce changement, cet agent explique que le treillis n’est pas fait pour les agents de la circulation. «Nulle part dans le monde, vous ne verrez les agents de la circulation en treillis. Nous (les agents de la circulation, Ndlr) nous sommes les premiers interlocuteurs des populations. En plus de la régulation de la circulation, nous devons pouvoir servir d’agent de renseignements ou de guide aux personnes ayant besoin d’aide pour s’orienter. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle dans notre formation, il y a un pan qui concerne la connaissance des grandes artères. Imaginez que nous soyons en treillis en train de réguler la circulation, personne n’aura le courage de nous approcher pour prendre des renseignements», explique une de ses collègues, assise sur sa moto. C’est finalement un sergent chef, à la station Shell des Deux Plateaux, communément appelé carrefour Duncan, qui nous situera sur les raisons de la reprise de l’ancienne tenue kaki. «Hormis l’agent de police qui a à charge la régulation de la circulation, le Kaki est la tenue de travail de tous les policiers, et encore plus de celle de l’agent de la circulation.
Mais, il faut dire qu’en situation exceptionnelle, il faut avoir des attitudes exceptionnelles. La Côte d’Ivoire était en guerre. Et c’est la raison pour laquelle l’Etat avait décidé que nous portions le treillis. Vous avez dû remarquer qu’en plus du treillis, nous tenions des kalachnikovs. Mais depuis quelque temps, le pays a amorcé la phase de la sortie de crise. Il faut par conséquent que cela se ressente lorsqu’on arrive dans le pays. La tutelle a pour cela décidé que le treillis soit remplacé par l’uniforme kaki tenue à laquelle les populations sont habituées », explique-t-il. Mais un problème reste pourtant posé, selon les agents. «Pendant que les décisions de changement de tenue viennent du sommet, l’argent vient d’en bas. Nous ne comprenons rien à ces décisions qui devaient être suivies de mesures d’accompagnement», expliquent en substances des agents, sous le sceau de l’anonymat.
La tenue Kaki vendue à 5.000Fcfa
Pour les agents de la circulation, le passage du treillis au kaki ne pose pas problème parce que tous reconnaissent que le kaki est la tenue de travail du policier, en général, et en particulier de l’agent de police qui a en charge la régulation de la circulation. Mais ce qui les écœure, c’est la vente de ces tenues. «Nous n’avons pas été avisés lorsque la décision du port du treillis bleu a été prise en début d’année 2009. Un an après, la hiérarchie décide que nous revenions à la tenue originelle de l’agent de la circulation. Jusqu’à présent, il n’y a pas de souci. Mais nous sommes remontés lorsqu’on nous demande de payer cette tenue à raison de 5000 Fcfa l’ensemble. Or, on sait que le kaki se salit très vite. C’est dire qu’il faudra au mois deux, sinon trois ensembles par agent. Ce qui revient à 10.000 Fcfa ou 15.000 Fcfa. Au niveau de l’unité de régulation de la police, nous sommes environ 250 agents. Ce qui fait au ministère entre 2,500 et 2,750 millions Fcfa. Et ce que les autres collègues ignorent, c’est que la décision du port du kaki va s’élargir à toute la corporation. Et là, il s’agit d’environ 11.000 agents de police. Ce fera entre 110 millions et 165 millions Fcfa. Comprenez que c’est un bon marché pour celui qui se trouve derrière cette affaire», explique le sergent chef. «S’il s’avérait qu’il n’y avait pas de tenue kaki et que chacun devait s’en procurer, là, nous aurions pu comprendre. Mais les tenues kaki, il y en a suffisamment au fourrier. Alors pourquoi nous les vend-on», s’interroge un autre agent de la route, encore plus remonté. Pour ce dernier, il y a anguille sous roche. «D’où sont venues ces tenues. Il s’avère que c’est l’Etat qui a décidé de nous les donner. Alors pourquoi nous les vend-on ? Où va l’argent de cette vente ?», s’est-il interrogé. Du coté du service communication du ministère, une source révèle : « Le treillis est sa tenue de combat. C’est parce que la Côte d’Ivoire était dans la situation de crise qu’il a été recommandé aux éléments de se mettre en treillis pour travailler. Mais aujourd’hui, nous amorçons la période de sortie de crise, et il faut revenir aux habitudes initiales ». Puis de nous orienter vers le porte-parole de la police pour les autres préoccupations.
Malheureusement, le commissaire Zagouli Gnagnoua qui occupe ce poste semble très occupé. Il n’a jamais eu le temps de nous recevoir. Et portant, c’est la mission qui lui est dévolue. Comment parviendra-t-il alors à faire entendre le message de ces collègues s’il ne se donne pas le temps ?
Touré Yelly
Il y a à peine deux mois, on les rencontrait encore aux différents carrefours dans leur treillis bleu.
Mais depuis bientôt un mois, les agents de l’Unité de régulation de la circulation (Urc) sont tous métamorphosés. En lieu et place de leurs treillis sombres et délavés pour la majorité, ces agents arborent aujourd’hui fièrement la tenue kaki. «On ne sait vraiment pas d’où est venue la décision, mais c’est le commissaire du corps urbain qui a décidé depuis le mois dernier, que nous portions désormais la tenue kaki qui est d’ailleurs celle qui nous est appropriée», explique une jeune dame sous-officier de police postée au carrefour de Williamsville. Sans pouvoir nous donner les raisons profondes de ce changement, cet agent explique que le treillis n’est pas fait pour les agents de la circulation. «Nulle part dans le monde, vous ne verrez les agents de la circulation en treillis. Nous (les agents de la circulation, Ndlr) nous sommes les premiers interlocuteurs des populations. En plus de la régulation de la circulation, nous devons pouvoir servir d’agent de renseignements ou de guide aux personnes ayant besoin d’aide pour s’orienter. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle dans notre formation, il y a un pan qui concerne la connaissance des grandes artères. Imaginez que nous soyons en treillis en train de réguler la circulation, personne n’aura le courage de nous approcher pour prendre des renseignements», explique une de ses collègues, assise sur sa moto. C’est finalement un sergent chef, à la station Shell des Deux Plateaux, communément appelé carrefour Duncan, qui nous situera sur les raisons de la reprise de l’ancienne tenue kaki. «Hormis l’agent de police qui a à charge la régulation de la circulation, le Kaki est la tenue de travail de tous les policiers, et encore plus de celle de l’agent de la circulation.
Mais, il faut dire qu’en situation exceptionnelle, il faut avoir des attitudes exceptionnelles. La Côte d’Ivoire était en guerre. Et c’est la raison pour laquelle l’Etat avait décidé que nous portions le treillis. Vous avez dû remarquer qu’en plus du treillis, nous tenions des kalachnikovs. Mais depuis quelque temps, le pays a amorcé la phase de la sortie de crise. Il faut par conséquent que cela se ressente lorsqu’on arrive dans le pays. La tutelle a pour cela décidé que le treillis soit remplacé par l’uniforme kaki tenue à laquelle les populations sont habituées », explique-t-il. Mais un problème reste pourtant posé, selon les agents. «Pendant que les décisions de changement de tenue viennent du sommet, l’argent vient d’en bas. Nous ne comprenons rien à ces décisions qui devaient être suivies de mesures d’accompagnement», expliquent en substances des agents, sous le sceau de l’anonymat.
La tenue Kaki vendue à 5.000Fcfa
Pour les agents de la circulation, le passage du treillis au kaki ne pose pas problème parce que tous reconnaissent que le kaki est la tenue de travail du policier, en général, et en particulier de l’agent de police qui a en charge la régulation de la circulation. Mais ce qui les écœure, c’est la vente de ces tenues. «Nous n’avons pas été avisés lorsque la décision du port du treillis bleu a été prise en début d’année 2009. Un an après, la hiérarchie décide que nous revenions à la tenue originelle de l’agent de la circulation. Jusqu’à présent, il n’y a pas de souci. Mais nous sommes remontés lorsqu’on nous demande de payer cette tenue à raison de 5000 Fcfa l’ensemble. Or, on sait que le kaki se salit très vite. C’est dire qu’il faudra au mois deux, sinon trois ensembles par agent. Ce qui revient à 10.000 Fcfa ou 15.000 Fcfa. Au niveau de l’unité de régulation de la police, nous sommes environ 250 agents. Ce qui fait au ministère entre 2,500 et 2,750 millions Fcfa. Et ce que les autres collègues ignorent, c’est que la décision du port du kaki va s’élargir à toute la corporation. Et là, il s’agit d’environ 11.000 agents de police. Ce fera entre 110 millions et 165 millions Fcfa. Comprenez que c’est un bon marché pour celui qui se trouve derrière cette affaire», explique le sergent chef. «S’il s’avérait qu’il n’y avait pas de tenue kaki et que chacun devait s’en procurer, là, nous aurions pu comprendre. Mais les tenues kaki, il y en a suffisamment au fourrier. Alors pourquoi nous les vend-on», s’interroge un autre agent de la route, encore plus remonté. Pour ce dernier, il y a anguille sous roche. «D’où sont venues ces tenues. Il s’avère que c’est l’Etat qui a décidé de nous les donner. Alors pourquoi nous les vend-on ? Où va l’argent de cette vente ?», s’est-il interrogé. Du coté du service communication du ministère, une source révèle : « Le treillis est sa tenue de combat. C’est parce que la Côte d’Ivoire était dans la situation de crise qu’il a été recommandé aux éléments de se mettre en treillis pour travailler. Mais aujourd’hui, nous amorçons la période de sortie de crise, et il faut revenir aux habitudes initiales ». Puis de nous orienter vers le porte-parole de la police pour les autres préoccupations.
Malheureusement, le commissaire Zagouli Gnagnoua qui occupe ce poste semble très occupé. Il n’a jamais eu le temps de nous recevoir. Et portant, c’est la mission qui lui est dévolue. Comment parviendra-t-il alors à faire entendre le message de ces collègues s’il ne se donne pas le temps ?
Touré Yelly
